La révolution des transports en Île-de-France
Au-delà du projet très médiatisé du Grand Paris Express, la région Île-de-France mène une stratégie résolument tournée vers l’avenir, en investissant massivement afin de créer les conditions d’un développement économique et social réussi du bassin de vie et d’emploi le plus important d’Europe.
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Le dynamisme de l’Île-de-France masque une grande diversité de situations : très attractive pour un premier emploi, elle demeure marquée par ses difficultés de transport et de logement ; elle est très souvent quittée par des jeunes ménages qui vont chercher, ailleurs, un cadre de vie qui leur semble plus adapté.
REPÈRES
L’Île-de-France est une région atypique qui concentre à la fois de grandes richesses et des fractures territoriales et sociales importantes. Elle représente 20 % de la population française, mais plus de 30 % de la création de richesse et 40 % des enjeux de renouvellement urbain. La région connaît un fort dynamisme démographique avec 60 000 nouveaux habitants qui s’y installent chaque année.
Le Grand Paris Express n’est pas tout
La relation entre le développement urbain francilien et les transports est très marquée par le développement du Grand Paris Express. Le doublement en longueur du réseau de métro vise à assurer, enfin, des liaisons de banlieue à banlieue efficaces en transports en commun pour éviter la concentration des flux dans la zone la plus dense. C’est aussi une occasion unique de requalification de nombreux quartiers et villes de l’Île-de-France. Mais le Grand Paris Express ne doit pas masquer des difficultés persistantes : le métro du Grand Paris est loin d’apporter une solution à tous les besoins de développement et de mobilité. Ainsi, les projets de construction de logements en Île-de-France territorialisés par l’État à l’occasion de l’élaboration du schéma régional de l’habitat et de l’hébergement conduisent à ne prévoir que seulement 60 % des 70 000 constructions de logement dans le périmètre desservi par le futur métro.
Vers une stratégie plus globale
Une stratégie plus globale doit être mise en œuvre, tant sur le champ du développement des territoires que sur celui des transports.
Le principe général qui guide la planification territoriale est celui de la limitation de la consommation des espaces, notamment naturels et agricoles, et la construction de la « ville sur la ville ». Ce type de construction est une gageure, car elle nécessite un travail très approfondi de conception et de pédagogie pour faire muter des territoires urbains. La limitation des distances entre les emplois et les logements doit être recherchée. Ce principe atteint cependant ses limites pour certains sites d’envergure mondiale (comme le quartier de la Défense ou le plateau de Saclay) qui ne peuvent pas être développés uniquement en prévoyant que les chercheurs, les enseignants, les étudiants et les salariés habitent tous à proximité immédiate de ces sites en développement.
Un système de transport en limite de capacité
Le système de transport francilien, l’un des plus développés au monde, est souvent vanté par son étendue et sa qualité. Mais il a souffert d’un défaut d’investissement pendant de longues années, tant pour ce qui concerne la régénération que le développement. Aux heures de pointe, ce système de transport connaît une très forte tension, qui se traduit par plus de 400 kilomètres de bouchons sur les routes.
On cite souvent le RER A comme la ligne ferroviaire la plus utilisée d’Europe avec 1,2 million de déplacements quotidiens. Mais c’est une ligne en limite ultime de capacité : en dépit d’une signalisation performante, du développement de l’automatisation et du changement de trains pour des rames ultra-capacitaires à double niveau, le plan de transport historique n’a pas pu être tenu. Les marges pour accueillir de nouveaux usagers sont quasi inexistantes alors que le développement de l’Est francilien va générer des attentes fortes.
De même, le réseau Transilien concentre l’essentiel des circulations ferroviaires de France en nombre d’usagers. Mais le retard de régénération conduit le système à sa limite de fonctionnement. La réalisation des travaux de remise à niveau du réseau sera particulièrement difficile à effectuer car les créneaux de travaux pouvant être acceptés par les usagers sont très limités, condamnant à des années de chantiers.
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Révolutionner les transports du quotidien
Il faudra une dizaine d’années pour que le Grand Paris Express et la régénération du réseau ferroviaire soient menés à leur terme et produisent réellement leurs effets. Dix années, ce sont donc 600 000 nouveaux Franciliens qui se seront installés et plusieurs millions de déplacements quotidiens qu’il faudra pouvoir satisfaire. La région Île-de-France mène donc la révolution dans les transports pour accompagner le développement de la région.
Outre le Grand Paris Express qui demeure du ressort de l’État et dont les vicissitudes récentes sont pour le moins préoccupantes, un programme sans précédent d’investissement de 24 milliards d’euros dans les transports en commun est mené pour apporter rapidement des solutions aux usagers.
Il s’agit tout d’abord de changer ou de rénover la totalité du parc des trains d’Île-de-France. D’ici 2021, ce sont ainsi 708 rames qui seront changées ou rénovées pour disposer de trains plus fiables, plus confortables avec la climatisation, l’augmentation de leur capacité, l’information des voyageurs et sécurisés avec le développement de la vidéosurveillance.
Le changement du matériel sur la ligne K a ainsi permis d’en faire la plus régulière de la région. Il faut dire que le passage des « petits gris » surannés aux franciliens flambant neufs marque une rupture dans tous les domaines et surtout une régularité qui a fait un bond en avant, plaçant la ligne en tête du réseau Transilien.
Il s’agit aussi d’investir 3 milliards d’euros dans les gares franciliennes pour leur accessibilité aux personnes à mobilité réduite et pour l’intermodalité ou, autrement dit, pour rendre les gares faciles à vivre. Les gares sont en effet des points nodaux particulièrement importants où il faut arriver à mener de manière harmonieuse l’intégration urbaine et la facilité des correspondances. Près de 270 gares ferroviaires seront ainsi rendues accessibles aux personnes à mobilité réduite d’ici 2025.
Inventer la mobilité nouvelle
À l’aube de l’avènement des véhicules autonomes, les réponses en termes de transport doivent évoluer et passer d’une logique statique et cloisonnée entre les modes de transport à une approche dynamique et des usages.
Les nouveaux modes de travail incitent d’ailleurs à cette réflexion. Le télétravail, le décalage des horaires s’appuyant sur de nouveaux espaces de coworking ou de tiers-lieux apportent une première réponse au soulagement du système de transport (qui n’atteint sa limite de fonctionnement que pendant quelques heures).
La route – qui demeure l’infrastructure de transport de l’écrasante majorité des déplacements en France – doit être modernisée et son usage développé en facilitant sa fluidité par une exploitation plus dynamique et le développement des nouveaux usages, comme les voies auxiliaires ou l’utilisation des bandes d’arrêt d’urgence pour certaines catégories de véhicules. Le soutien aux véhicules propres, connectés et autonomes ouvre la voie à l’effacement progressif de la frontière entre les transports en commun lourds et le véhicule individuel possédé au profit d’une nouvelle forme de mobilité qui ouvre, à son tour, de nouvelles perspectives pour la ville du futur. En particulier, la réduction des besoins de stationnement permet de libérer un espace urbain utile à une ville plus accueillante.
C’est pour anticiper ces évolutions et les accompagner au bénéfice d’une politique publique cohérente d’aménagement et de mobilité, que la région a engagé ses plans : plan anti-bouchons et, pour changer la route, plan régional pour le vélo et stratégie pour le fret et la logistique.
Partant du principe qu’une révolution de la route et des véhicules est lancée avec des moteurs économiques considérables, il s’agit pour la région de faire de l’Île-de-France un territoire par excellence de l’expérimentation et du développement du véhicule de demain. En accompagnant les évolutions qui se dessinent, la région entend soutenir l’industrie automobile qui emploie aujourd’hui 25 % des salariés de l’industrie francilienne. Il s’agit aussi de répondre aux besoins de mobilité qui ne peuvent pas tous être satisfaits par les solutions classiques. Il s’agit enfin de faire en sorte que les développements tiennent compte des contraintes publiques plutôt que de se placer dans une posture sans doute vaine d’opposition à des modèles disruptifs.
Mieux desservir La Défense
Le prolongement du RER E (Eole) vers l’ouest permettra d’ici à 2024 de disposer d’une nouvelle ligne est-ouest en Île-de-France qui soulagera le RER A tout en offrant une liaison rapide et fréquente entre des quartiers difficiles et le pôle d’emplois de Nanterre – La Défense. La quasi-totalité des crédits du CPER sont ainsi consacrés à ces développements, avec un budget total de plus de 8,5 milliards d’euros dont 3,5 à la charge de la seule région Île-de-France.