Tableau de bord avec GPS (Peugeot)

La route et les transports terrestres

Dossier : Navigation par satelliteMagazine N°594 Avril 2004
Par Roger PAGNY
Par Guillaume PENSIER

Si les trans­ports aériens et mari­times se sont très vite appro­prié l’u­sage de la radio­na­vi­ga­tion par satel­lite, par­fois avec une trop grande confiance d’ailleurs, le monde du trans­port ter­restre, en dehors de la ges­tion de flotte et du gui­dage, reste un uti­li­sa­teur qu’il faut convaincre.
Cet article exa­mine un ensemble d’ap­pli­ca­tions de GNSS dans le domaine des trans­ports et de l’a­mé­na­ge­ment du ter­ri­toire. Nous en avons exclu d’emblée cer­taines, déjà trai­tées dans d’autres articles de ce numé­ro (navi­ga­tion aérienne par exemple).

Le GNSS apporte un référentiel universel aisément accessible en tout point de la terre, indispensable à l’élaboration de systèmes d’information géographique avancés et à une gestion de patrimoine performante

La véri­fi­ca­tion des bases de car­to­gra­phies exis­tantes consti­tue la pre­mière étape d’un pro­ces­sus d’ap­pro­pria­tion. Le GPS est déjà uti­li­sé comme un simple outil de véri­fi­ca­tion des sys­tèmes d’in­for­ma­tion géo­gra­phique pré­sents sur le mar­ché. Un simple récep­teur d’une valeur de 150 euros per­met de mettre en évi­dence les écarts, de cor­ri­ger les erreurs et sur­tout de com­plé­ter le des­sin des réseaux. Les inco­hé­rences sont par­fois surprenantes.

La seconde étape consiste à recréer une base tota­le­ment com­pa­tible avec les résul­tats des mesures GPS mais en appor­tant une pré­ci­sion plus grande. Plu­sieurs grandes villes en France tra­vaillent déjà à la mise en place de ce type de banques de don­nées. L’ac­cès ins­tan­ta­né à une pré­ci­sion d’un cen­ti­mètre grâce à la dif­fu­sion des cor­rec­tions dif­fé­ren­tielles réa­li­sées à par­tir d’une sta­tion RGP (Réseau GPS per­ma­nent) de l’I­GN per­met aux ges­tion­naires de la voi­rie urbaine de construire des bases de don­nées pré­cises, numé­ri­sées, qui récon­ci­lient le par­cel­laire du domaine public et les don­nées cadas­trales. Ces bases, une fois enri­chies des réseaux aériens ou enter­rés, d’un modèle numé­rique de ter­rain et d’é­lé­va­tion, consti­tuent des outils irrem­pla­çables pour une meilleure ges­tion du patri­moine urbain et la mise en œuvre de poli­tiques publiques de trans­port et d’ur­ba­nisme ambitieuses.

Le GNSS apporte également une aide précieuse dans les études de déplacements même si certains progrès dans la méthodologie restent encore nécessaires

L’en­re­gis­tre­ment sys­té­ma­tique de la posi­tion et du temps asso­cié au trai­te­ment auto­ma­tique des don­nées apporte une qua­li­té d’in­for­ma­tion qu’il n’est pas pos­sible d’ob­te­nir avec des enquêtes papier tra­di­tion­nelles. La com­pa­rai­son des résul­tats entre les deux modes d’en­quêtes est sur­pre­nante. La sub­jec­ti­vi­té des réponses aux ques­tion­naires, même quand ils sont bien faits, conduit à des résul­tats très aléa­toires. Les per­sonnes inter­ro­gées oublient de men­tion­ner des dépla­ce­ments ou donnent des valeurs de temps pas­sé tout à fait personnelles.

L’en­re­gis­tre­ment auto­ma­tique du temps et du lieu éli­mine toutes ces erreurs. Dif­fé­rents dis­po­si­tifs d’en­quêtes existent déjà sur le mar­ché. Le pre­mier modèle est un simple récep­teur GPS fonc­tion­nant sur l’al­lume-cigare, asso­cié à un enre­gis­treur. Il peut être ins­tal­lé dans n’im­porte quel véhi­cule en très peu de temps. Le second est des­ti­né au pié­ton. Il est por­té en ban­dou­lière et dis­pose d’une auto­no­mie de trois jours. À l’é­tran­ger, les villes, orga­nismes d’en­quêtes ou ges­tion­naires de tra­fic, qui ont déjà tes­té l’un ou l’autre de ces appa­reils, se déclarent très satis­faits de la qua­li­té des résul­tats obtenus.

Uti­li­sés dans des véhi­cules tra­ceurs, les résul­tats trai­tés à pos­té­rio­ri­té donnent une image pré­cise, heure par heure, de la situa­tion du tra­fic rou­tier dans un centre-ville par exemple. Cette méthode convient très bien au réseau dont le niveau de conges­tion ne néces­site pas le déve­lop­pe­ment d’une infra­struc­ture lourde de col­lecte auto­ma­tique des don­nées type boucles magné­tiques ou camé­ras. Des pro­grès dans la métho­do­lo­gie sont néan­moins encore néces­saires, en par­ti­cu­lier pour les enquêtes des­ti­nées à la pla­ni­fi­ca­tion. La pre­mière requête de posi­tion que l’on appelle tech­ni­que­ment » démar­rage à froid du récep­teur » est par­fois longue, elle peut dépas­ser 10 mn, sur­tout en zone urbaine en rai­son du mas­quage des satel­lites. Il faut, de plus, dis­po­ser d’une base car­to­gra­phique fiable et pré­cise pour pou­voir recons­ti­tuer aisé­ment le motif du dépla­ce­ment. Enfin, l’al­go­rithme qui per­met de pas­ser de la vitesse mesu­rée grâce à la mesure de l’ef­fet Dop­pler au mode de dépla­ce­ment uti­li­sé, marche, bicy­clette, auto­mo­bile ou train, doit encore être amé­lio­ré. Cer­tains cher­cheurs affirment que l’ac­cé­lé­ra­tion serait un indi­ca­teur plus pertinent.

Le secteur routier

Alors que dans le sec­teur rou­tier les trans­por­teurs et les entre­prises de tra­vaux publics sont inté­res­sés et uti­lisent ou déve­loppent des tech­no­lo­gies satel­li­taires, les ges­tion­naires d’in­fra­struc­tures, notam­ment publics, ne se sentent pas encore très concernés.

Aujourd’­hui encore, le sec­teur rou­tier en France ne se sent pas très concer­né par le déve­lop­pe­ment du posi­tion­ne­ment et de la data­tion alors que les modes de l’aé­rien et du trans­port mari­time se sont très vite appro­prié cette nou­velle technologie.

Quelques appli­ca­tions phares comme la navi­ga­tion ou le gui­dage d’en­gins sont en pleine émer­gence, mais la grande varié­té des appli­ca­tions pos­sibles reste encore à explo­rer. Ces appli­ca­tions consti­tuent une véri­table source de pro­duc­ti­vi­té pour les exploi­tants, de confort et de sécu­ri­té pour les usa­gers et ne devraient donc pas lais­ser encore très long­temps les déci­deurs indifférents.

Toutes les acti­vi­tés liées à la route comme la construc­tion, l’en­tre­tien, l’ex­ploi­ta­tion, l’in­for­ma­tion des usa­gers et la sécu­ri­té peuvent tirer pro­fit du déve­lop­pe­ment du posi­tion­ne­ment satellitaire.

Construction et travaux publics

Le posi­tion­ne­ment par satel­lite est déjà très uti­li­sé par les entre­prises de tra­vaux publics. Il sim­pli­fie l’im­plan­ta­tion pré­cise des ouvrages et per­met un contrôle et une mesure en temps réel des quan­ti­tés jour­na­lières réa­li­sées. Il faci­lite la véri­fi­ca­tion du nombre de passes du com­pac­teur. L’u­ti­li­sa­tion de récep­teurs bifré­quences, tra­vaillant non plus sur la lec­ture de code télé­mé­trique mais sur la mesure de phase (mode RTK : Real Time Kine­ma­tic), asso­ciés à une sta­tion de réfé­rence dont la posi­tion est par­fai­te­ment connue, per­met d’im­plan­ter sur un rayon de 10 à 20 km des ouvrages avec une pré­ci­sion cen­ti­mé­trique. Le tra­vail du géo­mètre de chan­tier est sim­pli­fié. Les engins de chan­tiers peuvent éga­le­ment être gui­dés avec la même pré­ci­sion. Il faut men­tion­ner aus­si la pos­si­bi­li­té d’ef­fec­tuer des mesures au mil­li­mètre. Ces mesures néces­sitent des temps d’ac­qui­si­tion plus longs ou du post-trai­te­ment mais sont fort utiles pour sur­veiller des défor­ma­tions d’ou­vrages ou des zones de sub­si­dence par exemple.

Entretien et gestion de patrimoine

Avec des récep­teurs GPS déjà pré­sents sur le mar­ché et qui, demain, seront de plus en plus asso­ciés à un télé­phone por­table, il est pos­sible de posi­tion­ner à un mètre près sur l’Eu­rope tout entière tous les objets qui com­posent une infra­struc­ture rou­tière et cela dans un réfé­ren­tiel uni­ver­sel comme l’I­TRF (Inter­na­tio­nal Ter­res­trial Refe­rence Frame) ou le WGS84 (repère géo­dé­sique du GPS). À l’heure où le nombre de ges­tion­naires du domaine public rou­tier croît, il serait hau­te­ment sou­hai­table d’in­vi­ter les maîtres d’ou­vrages à uti­li­ser de façon sys­té­ma­tique ce mode de posi­tion­ne­ment. La cohé­rence des points kilo­mètres (ou repères) n’est pas tou­jours assu­rée le long d’un iti­né­raire et ces points sont d’un accès dif­fi­cile pour le non-spé­cia­liste. Le posi­tion­ne­ment par satel­lite est un outil puis­sant qui favo­ri­se­ra l’ho­mo­gé­néi­sa­tion des dif­fé­rents sys­tèmes d’in­for­ma­tion rou­tiers. De plus, avec la remon­tée auto­ma­tique d’in­for­ma­tion géo­lo­ca­li­sée, des gains de pro­duc­ti­vi­té consi­dé­rables sont pos­sibles pour les agents appe­lés à inter­ve­nir quo­ti­dien­ne­ment sur ce patri­moine (atta­che­ments de tra­vaux, plans de réco­le­ment, infor­ma­tion rou­tière, sta­tis­tiques natio­nales sur les accidents…).

Exploitation, information des usagers

Dans les véhi­cules la géné­ra­li­sa­tion des sys­tèmes de navi­ga­tion embar­qués capables de rece­voir en temps réel de l’in­for­ma­tion rou­tière type RDS-TMC (Radio Data Sys­tem-Traf­fic Mes­sage Chan­nel) per­met d’ap­por­ter un ser­vice de très haute qua­li­té aux usa­gers. En Europe, les grands four­nis­seurs de car­to­gra­phie numé­rique ont déjà trai­té 6 mil­lions de kilo­mètres de routes pour un gui­dage car­re­four par car­re­four et cela dans la langue mater­nelle du conduc­teur, quel que soit le pays. Grâce à cette car­to­gra­phie, déjà 290 mil­lions d’Eu­ro­péens peuvent être joints par une adresse pos­tale située le long de ce réseau.

Lorsque le parc auto­mo­bile euro­péen aura atteint un niveau d’é­qui­pe­ment aus­si fort que celui du Japon où actuel­le­ment 60 % des véhi­cules ven­dus sont équi­pés d’un sys­tème de navi­ga­tion, on pour­ra éga­le­ment envi­sa­ger de sim­pli­fier la signa­li­sa­tion directionnelle.

Le posi­tion­ne­ment satel­li­taire des véhi­cules, asso­cié à un sys­tème de ges­tion de flotte, apporte des gains de pro­duc­ti­vi­té notables aux pro­fes­sion­nels qui ont fait le choix de s’équiper.

Tableau de bord. © PEUGEOT

La ges­tion de flotte géné­ra­li­sée aux engins d’en­tre­tien rou­tier appor­te­ra aus­si un ser­vice sup­plé­men­taire à l’u­sa­ger. Quoi de plus simple, lorsque les engins de dénei­ge­ment sont équi­pés de récep­teur GNSS (Glo­bal Navi­ga­tion Satel­lite Sys­tem), de mettre cette infor­ma­tion à la dis­po­si­tion des usa­gers sur l’In­ter­net. Dans beau­coup de régions mon­ta­gneuses le simple fait de savoir que le chasse-neige est pas­sé consti­tue déjà une infor­ma­tion précieuse.

Aux États-Unis le sui­vi des chasse-neige grâce au GPS est déjà une réa­li­té dans plu­sieurs États. Les posi­tions des engins sont remon­tées en per­ma­nence à un centre de contrôle et les quan­ti­tés de fon­dants répan­dus sont notées dans une base de don­nées his­to­riques pou­vant ser­vir de preuve le cas échéant.

Une uti­li­sa­tion par­ti­cu­lière et spec­ta­cu­laire est le gui­dage pré­cis des engins de dénei­ge­ment. L’u­ni­ver­si­té de Wis­con­sin (Madi­son) a démon­tré qu’il était pos­sible de faire évo­luer en pleine tem­pête de neige un engin de dénei­ge­ment en s’ap­puyant sur un posi­tion­ne­ment GPS dif­fé­ren­tiel asso­cié à une base de don­nées géo­gra­phiques pré­cises. Cette base per­met de pro­je­ter sur un écran embar­qué les bords de la chaus­sée. Un radar com­plète le dis­po­si­tif en indi­quant sur l’é­cran la posi­tion des autres véhi­cules le cas échéant. Cet équi­pe­ment auto­rise des inter­ven­tions de dénei­ge­ment dans des condi­tions extrêmes.

Sécurité, secours et vitesse

Tout évé­ne­ment asso­cié à un repé­rage en coor­don­nées géo­gra­phiques pré­cises pour­ra aisé­ment être visua­li­sé sur une car­to­gra­phie embar­quée et per­met­tra à l’au­to­mo­bi­liste d’a­dap­ter sa vitesse à l’en­droit vou­lu. Ce repé­rage en coor­don­nées géo­gra­phiques peut être ren­du com­plè­te­ment trans­pa­rent pour l’u­ti­li­sa­teur. Les moyens de posi­tion­ne­ment exis­tants, points kilo­mé­triques ou repères, n’ap­portent pas ce niveau de pré­ci­sion et de confort. Par exemple, même le bali­sage très soi­gné des auto­routes est inopé­rant pour l’u­sa­ger en cas de brouillard dense et ne per­met pas d’é­vi­ter les caram­bo­lages en série.

Des pro­jets de recherche et d’ex­pé­ri­men­ta­tion comme le LAVIA ou » Next Map » envi­sagent déjà de com­plé­ter cette car­to­gra­phie de gui­dage par des infor­ma­tions pré­cises sur les limi­ta­tions de vitesse ou les zones par­ti­cu­liè­re­ment dan­ge­reuses. Le déve­lop­pe­ment des sys­tèmes anti­col­li­sion, le gui­dage avec une aug­men­ta­tion de pré­ci­sion et une inté­gri­té appor­tée par un com­plé­ment des signaux satel­li­taires au sol le long des iti­né­raires équi­pés sont aus­si des solu­tions d’avenir.

Dans un ave­nir plus proche il nous fau­dra envi­sa­ger de géné­ra­li­ser la loca­li­sa­tion pré­cise des appels d’ur­gence effec­tués à par­tir d’un télé­phone por­table. Ce ser­vice n’est dis­po­nible en France aujourd’­hui que sur les 23 000 km équi­pés d’un réseau d’ap­pels d’ur­gence alors que le réseau rou­tier total dépasse le mil­lion de kilo­mètres. Bien sûr, des pro­blèmes de nor­ma­li­sa­tion, de muta­tion devront être sur­mon­tés pour que tous les ser­vices d’ur­gence soient capables de trai­ter des appels posi­tion­nés en coor­don­nées géo­gra­phiques, mais les gains de sécu­ri­té rou­tière seront sans com­mune mesure car la majo­ri­té des acci­dents mor­tels se pro­duit en dehors des grands axes.

Enfin, la géné­ra­li­sa­tion des moyens de posi­tion­ne­ment et de com­mu­ni­ca­tion sur l’en­semble des véhi­cules per­met­tra de construire des matrices ori­gine-des­ti­na­tion fidèles, de cal­cu­ler des temps de par­cours pré­cis et faci­li­te­ra la ges­tion du tra­fic et l’in­for­ma­tion du voyageur.

Tarification des infrastructures

L’in­té­rêt du télé­péage asso­ciant la posi­tion satel­li­taire à la télé­pho­nie mobile, même s’il ren­contre encore quelques dif­fi­cul­tés tech­niques, ne peut être sous-esti­mé. Sont en jeu : la sou­plesse de la tari­fi­ca­tion, l’in­te­ro­pé­ra­bi­li­té au niveau euro­péen et la rapi­di­té de déploiement.

Le télé­péage asso­cié à la loca­li­sa­tion par satel­lite et à la télé­pho­nie mobile auto­rise une grande sou­plesse pour la défi­ni­tion pré­cise des axes et des zones concer­nés. La tari­fi­ca­tion peut éga­le­ment prendre en compte plus faci­le­ment des varia­tions de tarifs horaires, gérer les excep­tions et les atteintes ponc­tuelles à l’en­vi­ron­ne­ment (conges­tion, pol­lu­tion…) et res­pec­ter les rela­tions com­mer­ciales qu’un conces­sion­naire vou­dra entre­te­nir avec une clien­tèle privilégiée.

La solu­tion GNSS/téléphonie mobile per­met­tra d’é­vi­ter la mul­ti­pli­ca­tion des solu­tions tech­niques qui condui­rait à une nou­velle bal­ka­ni­sa­tion de l’Eu­rope des télé­péages alors que les dépla­ce­ments intra­com­mu­nau­taires deviennent de plus en plus nom­breux. La pro­li­fé­ra­tion de sys­tèmes dif­fé­rents à l’in­té­rieur d’un même véhi­cule est aus­si à évi­ter, alors que les signaux GNSS et GSM sont déjà dis­po­nibles sur toute l’Eu­rope et uti­lisent des stan­dards inter­na­tio­naux très répan­dus et soli­de­ment docu­men­tés. Egnos apporte déjà une amé­lio­ra­tion de la cou­ver­ture GPS notam­ment en zone urbaine et une pré­ci­sion suf­fi­sante. Gali­leo vien­dra encore amé­lio­rer ces per­for­mances dans un ave­nir très proche.

La géné­ra­li­sa­tion du posi­tion­ne­ment satel­li­taire obli­ge­ra les opé­ra­teurs de trans­port à uti­li­ser un réfé­ren­tiel com­mun. Cette obli­ga­tion inci­te­ra éga­le­ment les construc­teurs auto­mo­biles à une cer­taine nor­ma­li­sa­tion de la plate-forme embar­quée. Il faut sou­li­gner que la géné­ra­li­sa­tion de dis­po­si­tifs nor­ma­li­sés de posi­tion­ne­ment et de com­mu­ni­ca­tion sur l’en­semble des véhi­cules en Europe per­met­tra le déve­lop­pe­ment d’un nombre consi­dé­rable d’autres ser­vices, déjà men­tion­nés ci-des­sus, comme l’a­lerte sur obs­tacles, la navi­ga­tion embar­quée, l’in­for­ma­tion rou­tière, le limi­teur auto­ma­tique de vitesse et sur­tout le posi­tion­ne­ment des appels d’urgence.

Même si les obli­ga­tions de contrôle viennent tem­pé­rer cette affir­ma­tion, la solu­tion GNSS/téléphonie mobile réduit consi­dé­ra­ble­ment le coût d’é­qui­pe­ment des infrastructures.

Notons que dans cer­tains cas, faute d’es­pace suf­fi­sant pour ins­tal­ler des dis­po­si­tifs de péage, le pas­sage à une tari­fi­ca­tion serait maté­riel­le­ment impos­sible. La rapi­di­té de déploie­ment est éga­le­ment une consé­quence directe de ce faible impact sur les infrastructures.

Les points déli­cats de cette tech­no­lo­gie seront l’ac­cep­ta­bi­li­té sociale si la perte d’une cer­taine par­tie de la vie pri­vée n’est pas com­pen­sée par l’ac­cès à des ser­vices com­plé­men­taires et l’in­gé­nio­si­té des frau­deurs. Les dif­fé­rents ser­vices pré­vus dans Gali­leo devraient per­mettre une meilleure lutte contre la fraude.

La période de tran­si­tion entre un parc qui s’é­qui­pe­ra pro­gres­si­ve­ment et un parc non équi­pé néces­si­te­ra inévi­ta­ble­ment de mettre au point des équi­pe­ments de » seconde monte « . Il sera éga­le­ment néces­saire d’é­tu­dier les inter­fé­rences, les pertes de signal notam­ment en tun­nels ou en zone urbaine.

Transports maritimes

His­to­ri­que­ment c’est le trans­port mari­time qui, le pre­mier, a fait appel aux tech­niques satel­li­taires, pour ses échanges de com­mu­ni­ca­tions et ses signaux de détresse. Ce mode de trans­port uti­lise désor­mais le sys­tème GPS pour ses besoins en posi­tion­ne­ment et fera sans doute appel à EGNOS puis Gali­leo dès que ces sys­tèmes seront opérationnels.

Dans le milieu mari­time, les besoins en moyens de géo­lo­ca­li­sa­tion dif­fèrent fon­da­men­ta­le­ment selon le type de navi­ga­tion : hau­tu­rière, à l’ap­proche des côtes, portuaire.

S’a­gis­sant de la navi­ga­tion hau­tu­rière, la dis­tance au plus proche obs­tacle fixe est de l’ordre de 50 NM et les moyens de navi­ga­tion visent avant tout à pré­pa­rer des routes sûres et éco­no­miques. Les mou­ve­ments des navires étant rela­ti­ve­ment lents, l’ab­sence momen­ta­née du signal de posi­tion­ne­ment est tolé­rable. Dans ce contexte, les per­for­mances exi­gées des sys­tèmes de posi­tion­ne­ment sont plu­tôt modestes :

  • pré­ci­sion : 10 à 100 m,
  • dis­po­ni­bi­li­té : 99 % sur 30 jours,
  • inté­gri­té, délai d’a­lerte : 10 s.

Seules les appli­ca­tions de type » recherche et secours » pour­raient néces­si­ter un posi­tion­ne­ment plus pré­cis de façon à rac­cour­cir les délais de secours.

S’a­gis­sant de la navi­ga­tion côtière, à moins de 50 NM des côtes, le tra­fic mari­time y est beau­coup plus dense et les eaux sont moins pro­fondes (limites du pla­teau conti­nen­tal) ; dès lors, le risque d’é­choue­ment ou d’a­bor­dage est plus impor­tant qu’en haute mer. Ce risque s’ac­croît lorsque les bâti­ments pénètrent dans les che­naux d’ap­proche por­tuaire, dont la lar­geur se réduit à mesure que l’on s’ap­proche du port. Il s’a­git donc d’une zone où le risque acci­den­to­lo­gique est avé­ré, avec des consé­quences impor­tantes sur la sécu­ri­té des per­sonnes et des biens. C’est pour­quoi les per­for­mances atten­dues des sys­tèmes de posi­tion­ne­ment sont ici plus élevées :

  • pré­ci­sion : 10 m,
  • dis­po­ni­bi­li­té : 99,8 % sur 30 jours,
  • inté­gri­té, délai d’a­lerte : 10 s.

S’a­gis­sant enfin de la navi­ga­tion à l’in­té­rieur des ins­tal­la­tions por­tuaires, les sys­tèmes de navi­ga­tion visent essen­tiel­le­ment à pré­ve­nir les col­li­sions avec les autres uti­li­sa­teurs ou les ins­tal­la­tions à quai, ain­si qu’à faci­li­ter l’ac­cos­tage. Au-delà de la navi­ga­tion, les auto­ri­tés por­tuaires uti­lisent les sys­tèmes de géo­lo­ca­li­sa­tion pour assu­rer la tra­ça­bi­li­té de cer­taines mar­chan­dises (matières dan­ge­reuses), opti­mi­ser l’u­ti­li­sa­tion des outillages por­tuaires ou pro­cé­der à des rele­vés bathy­mé­triques. Il est donc atten­du un haut niveau de per­for­mance des moyens de positionnement :

  • pré­ci­sion : 3 m,
  • dis­po­ni­bi­li­té : 99,8 % sur 30 jours,
  • inté­gri­té, délai d’a­lerte : 10 s.

Les besoins du trans­port mari­time en moyens de géo­lo­ca­li­sa­tion sont aujourd’­hui satis­faits par le GPS, dont la pré­ci­sion à l’ap­proche des côtes est amé­lio­rée par les sta­tions dif­fé­ren­tielles situées sur les côtes fran­çaises. Au nombre de 7, ces sta­tions déter­minent les erreurs de mesure sur la constel­la­tion GPS et envoient ces cor­rec­tions en temps réel aux récep­teurs mobiles, de façon à assu­rer une pré­ci­sion infé­rieure à 5 m pen­dant 95 % du temps. Selon toute vrai­sem­blance le trans­port mari­time sera un uti­li­sa­teur du sys­tème Gali­leo, le futur GNSS euro­péen, qui offri­ra des per­for­mances sen­si­ble­ment accrues tant en pré­ci­sion qu’en intégrité.

Outre les sys­tèmes GNSS, le trans­port mari­time uti­lise éga­le­ment un sys­tème de posi­tion­ne­ment par ondes ter­restres : le LORAN C. Uti­li­sé au départ pour les besoins de l’US Navy, ce sys­tème a été éten­du à l’Eu­rope et au trans­port mar­chand ; il repose sur un réseau de sta­tions côtières d’une por­tée d’en­vi­ron 1 000 km, le récep­teur mobile LORAN C déter­mi­nant sa posi­tion en mesu­rant les dif­fé­rences de temps d’ar­ri­vée du signal entre une sta­tion maî­tresse et deux sta­tions secon­daires. Même s’il offre des per­for­mances en pré­ci­sion infé­rieures au GPS (et a for­tio­ri Gali­leo) il offre une grande résis­tance au brouillage et peut être uti­li­sé dans des envi­ron­ne­ments dif­fi­ciles ; de fait, même si l’a­ve­nir de ce sys­tème n’est pas encore com­plè­te­ment assu­ré, son uti­li­sa­tion comme sys­tème de » secours » de Gali­leo fait par­tie des hypo­thèses à envisager.

Les sys­tèmes de géo­lo­ca­li­sa­tion vont bien sûr trou­ver leur place dans la mise en œuvre pro­chaine de l’AIS (Sys­tème d’i­den­ti­fi­ca­tion auto­ma­ti­sé) qui vien­dra pro­chai­ne­ment ren­for­cer les moyens de contrôle/surveillance du tra­fic mari­time. Les don­nées de posi­tion­ne­ment sont en effet incluses dans les mes­sages d’i­den­ti­fi­ca­tion que les bâti­ments vont échan­ger entre eux et avec les auto­ri­tés de sur­veillance du trafic.

La géné­ra­li­sa­tion de l’AIS appor­te­ra des avan­tages appré­ciables aux pilotes, qui auront une connais­sance exhaus­tive de l’é­tat du tra­fic envi­ron­nant, mais aus­si aux ser­vices éta­tiques, qui auront une connais­sance en temps réel de la situa­tion des navires et de leur cargaison.

L’ex­pé­ri­men­ta­tion menée en 2001 par le CETMEF (Centre d’é­tudes tech­niques mari­times et flu­viales) a appor­té de pré­cieux ensei­gne­ments sur les apports de l’AIS et la por­tée des sta­tions côtières. La Direc­tion des affaires mari­times et des gens de mer (DAMGM) pré­voit d’é­qui­per pro­gres­si­ve­ment la tota­li­té de la façade Manche en sta­tions AIS, les autres façades mari­times devant aus­si être équi­pées par la marine.

Les mes­sages AIS sont actuel­le­ment trans­mis (liai­sons navire/navire et navire/station côtière) par liai­sons radio VHF ; à terme, il est vrai­sem­blable que le seg­ment satel­li­taire sera aus­si uti­li­sé, ce qui per­met­tra d’a­mé­lio­rer sen­si­ble­ment la por­tée de l’AIS. Une expé­ri­men­ta­tion est menée en ce sens (pro­jet Nau­plios, auquel par­ti­cipent notam­ment la DAMGM, le CNES et Thales), dont les pre­miers résul­tats devraient être connus en 2004.

Transports fluviaux

Jus­qu’i­ci peu uti­li­sés en milieu flu­vial, les sys­tèmes de géo­po­si­tion­ne­ment sont appe­lés dans un proche ave­nir à être une com­po­sante essen­tielle de la » voie d’eau intel­li­gente « .

Du point de vue des exploi­tants de la voie flu­viale, les avan­tages qui pour­raient être reti­rés de la pré­sence de moyens de géo­po­si­tion­ne­ment à bord des embar­ca­tions sont multiples :

  • sur­veillance de la navi­ga­tion, » tracking « ,
  • contrôle du tra­fic dans des zones spé­ci­fiques à fort risque accidentologique,
  • ges­tion du trafic,
  • recette de péage,
  • sta­tis­tiques sur les voyages.

S’a­gis­sant des usa­gers, l’u­ti­li­sa­tion du GPS pré­sen­te­rait le plus grand inté­rêt dès lors que l’in­for­ma­tion rela­tive au posi­tion­ne­ment serait cou­plée avec un sys­tème de car­to­gra­phie per­for­mant, per­met­tant au pilote de visua­li­ser l’é­tat du fleuve et de la cir­cu­la­tion envi­ron­nante. La norme appli­cable pour les cartes élec­tro­niques de navi­ga­tion est celle de la Com­mis­sion cen­trale de navi­ga­tion sur le Rhin : l’inland ECDIS, qui reprend l’EC­DIS mari­time et intègre éga­le­ment les condi­tions spé­ci­fiques à la navi­ga­tion inté­rieure. En recou­pant les infor­ma­tions de posi­tion­ne­ment des embar­ca­tions, la carte élec­tro­nique ECDIS pré­sente l’i­mage tac­tique du tra­fic et peut donc four­nir une aide pré­cieuse au pilote pour réduire le risque d’ac­ci­dent et opti­mi­ser son parcours.

En milieu flu­vial, la pré­ci­sion atten­due du géo­pos­ti­tion­ne­ment est très variable selon le type d’ap­pli­ca­tions : de l’ordre du mètre pour le pilo­tage des embar­ca­tions, jus­qu’à 1 km pour la dif­fu­sion d’in­for­ma­tions tou­ris­tiques aux usagers.

À ce jour l’u­ti­li­sa­tion de moyens de géo­po­si­tion­ne­ment est encore peu répan­due par­mi les usa­gers de la voie flu­viale, mais devrait sans doute s’ac­croître sous l’im­pul­sion des orga­nismes exploi­tants et suite à l’a­dop­tion par l’U­nion euro­péenne de la direc­tive » River Intel­li­gent Ser­vices » actuel­le­ment à l’é­tat de projet.

Tout comme en milieu mari­time et por­tuaire, le sys­tème d’i­den­ti­fi­ca­tion auto­ma­ti­sé AIS peut être uti­li­sé sur la voie flu­viale, mais son usage sera sans doute limi­té aux zones à fort tra­fic ou à forte acci­den­to­lo­gie compte tenu des coûts qu’il sous-tend.

D’ores et déjà, le CETMEF a conduit avec suc­cès une expé­ri­men­ta­tion de l’AIS sur le bief pari­sien, même si les pas­sages sous les ponts occa­sionnent fré­quem­ment une perte tem­po­raire de l’in­for­ma­tion de posi­tion­ne­ment. Dans les zones non AIS, il est vrai­sem­blable que les réseaux de radio­com­mu­ni­ca­tions publics seront uti­li­sés pour rapa­trier vers l’ex­ploi­tant les don­nées rela­tives au posi­tion­ne­ment des embar­ca­tions ; une pre­mière expé­ri­men­ta­tion en ce sens devrait être menée sur quelques voies navi­gables fran­çaises, en équi­pant les usa­gers de télé­phones mobiles GPRS dotés de la fonc­tion GPS.

Conclusion

Gali­leo, fac­teur d’in­té­gra­tion euro­péenne et pièce maî­tresse de l’é­vo­lu­tion tech­no­lo­gique des pro­chaines décennies.

Gali­leo et Egnos consti­tuent un inves­tis­se­ment impor­tant pour les États membres de la Com­mu­nau­té européenne.

Les signaux EGNOS seront dis­po­nibles sur toute l’Eu­rope en 2004 et en 2008 pour Galileo.

Il serait dom­mage sous pré­texte qu’il existe déjà des solu­tions moins per­for­mantes mais éprou­vées de ne pas » capi­ta­li­ser » sur les infra­struc­tures de radio­na­vi­ga­tion en cours de déploiement.

La radio­na­vi­ga­tion par satel­lite asso­ciée aux nou­velles pos­si­bi­li­tés de télé­com­mu­ni­ca­tions sans fil de seconde et troi­sième géné­ra­tion contri­bue­ra à atteindre les objec­tifs fixés par la Com­mis­sion euro­péenne sur le réseau auto­rou­tier euro­péen en termes d’in­te­ro­pé­ra­bi­li­té, de conti­nui­té de ser­vices tout en mini­mi­sant les coûts sur les infra­struc­tures rou­tières et en per­met­tant une grande flexi­bi­li­té du système.

Si l’u­ti­li­sa­tion des signaux satel­li­taires et des réseaux de télé­com­mu­ni­ca­tions consti­tue la solu­tion d’a­ve­nir pour le déve­lop­pe­ment de nom­breux ser­vices en Europe dont le télé­péage, il est néan­moins néces­saire de réa­li­ser au plus tôt des expé­ri­men­ta­tions ciblées por­tant sur le contrôle, la dis­po­ni­bi­li­té d’é­qui­pe­ment de seconde monte, la conti­nui­té dans les zones urbaines denses, l’ar­chi­tec­ture du sys­tème et le modèle éco­no­mique… pour pré­pa­rer un déploie­ment à grande échelle.

La voca­tion de la tech­nique de loca­li­sa­tion et de syn­chro­ni­sa­tion par satel­lite est des­ti­née à un usage uni­ver­sel. D’in­nom­brables acti­vi­tés feront de plus en plus appel à de l’in­for­ma­tion géo­ré­fé­ren­cée et à une connais­sance pré­cise de la posi­tion et du temps. Il s’a­git d’une muta­tion tech­nique aus­si impor­tante que le déve­lop­pe­ment récent des radio­com­mu­ni­ca­tions et de l’Internet

Le déve­lop­pe­ment de Gali­leo accom­pagne cette muta­tion dont les effets dans le temps por­te­ront sur plu­sieurs décen­nies. Le monde rou­tier doit prendre toute la mesure de cette muta­tion et sor­tir de sa réserve.

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