L’Afrique centrale, une des plus grandes réseves forestières du globe.
La forêt congolaise
La forêt congolaise couvre près de 20 millions d’hectares soit 60 % du territoire national, et représente 12,3 % des forêts denses d’Afrique centrale et 10 % de celles du continent africain. Les principales essences sont l’okoumé, le sipo, le sapelli et le limba.
L’ensemble forestier congolais se divise en deux grandes zones :
- Nord, comptant 15 millions d’hectares dont 8 inondés ou inondables,
- Sud, se subdivisant en deux parties :
– le massif du Mayombé dans la zone côtière, avec 1,5 million d’hectares,
– le massif du Chaillu dans les régions du Niari et de la Lékoumou, avec 3,5 millions d’hectares.
Ces forêts peuvent produire en exploitation raisonnée préservant leur régénération environ 2 millions de m3 par an : 1,5 dans le Nord et 0,5 dans le Sud.
Afin d’assurer une gestion rationnelle et contrôlée, ces forêts ont été subdivisées en Unités forestières d’aménagement (UFA) qui constituent des unités de base pour l’aménagement, la gestion, la conservation et la reconstitution des forêts. Ces UFA englobent des zones agricoles. Couvrant en tout 20 millions d’hectares, ces UFA se répartissent ainsi :
- 11 UFA dans le Sud pour 10,9 millions d’hectares,
- 2 UFA pour 600 000 hectares dans le Centre,
- 21 UFA dans le Nord pour 9 millions d’hectares.
Les produits des forêts naturelles et leur destination
Plus de quarante essences sont exploitées totalisant 520 000 m3 de grumes en 1999 (en baisse de 26 % sur 1998 en raison des événements qui ont particulièrement marqué le sud du pays) soit un quart du potentiel du pays.
Cette production, dont l’État s’est entièrement dégagé, se répartit à raison de 92 % pour les entreprises étrangères, pratiquement seules exploitantes dans le massif nord, et 8 % pour les entreprises privées du pays situées uniquement dans le Sud comme le montre le tableau I.
Les principales essences exploitées, qui ne représentent pas une répartition égale à leur présence physique, sont récapitulées dans le tableau II. Pour le moment seules les essences permettant une exploitation massive, principalement orientée vers les bois de sciage et de déroulage (pour le contreplaqué) ou de placage (obtenu principalement par tranchage) sont exploitées de façon vraiment industrielle comme on le verra plus loin.
Les forêts artificielles et le reboisement
Le Congo dispose d’une superficie de 74 000 hectares de forêts artificielles entretenues et exploitées par :
- la Société » Eucalyptus du Congo. SA » (ECO SA) spécialisée dans le reboisement de la savane en eucalyptus destinés à la fabrication de pâte à papier, exploités et exportés actuellement sous forme de rondins, faute d’une unité de production de pâte à papier sur place ;
- le Service national de reboisement (SNR) qui a pour vocation le reboisement en savane et en forêt dense pour assurer la reconstitution de la couverture végétale détruite par les actions humaines (agriculture, exploitation forestière, minières, etc.) ;
- le Centre pilote d’afforestation en limba (CPAL) et les plantations de la Journée nationale de l’arbre (JNA) produisent quelques centaines d’hectares.
Tableau II– Répartition des essences selon l’exploitation forestière de 1999 (en milliers de m3) | |||
Désignation | Cubage | % du total | Emploi de base |
Sapelli | 296,3 | 57 % | Déroulage (contreplaqué d’ébénisterie) |
Sipo | 47,5 | 9,1 % | Sciage |
Okoumé | 41,1 | 7,9 % | Déroulage (contreplaqué standard) |
Niové | 27,3 | 5,2 % | Sciage (ébénisterie et traverses de chemin de fer) |
Bahia | 19,7 | 3,8 % | |
Iroko | 12,9 | 2,5% | Déroulage (contreplaqué) et sciage |
Bossé | 10,3 | 2 % | |
Autres (29 essences) | 64,9 | 12,5 % |
Le limba est une essence semi-précieuse présentant la particularité d’avoir un aubier, dit » limba blanc « , dense, se rapprochant de la texture du chêne, et un cœur, dit » limba noir « , d’aspect voisin de celui du noyer.
Les superficies ainsi représentées se répartissent comme dans le tableau III.
L’expérience du Congo dans le domaine de la sylviculture de l’eucalyptus est déjà assez ancienne et a donné au pays et à ses équipes spécialisées une avance et une compétence reconnue sur le plan international.
L’industrie forestière
Comme l’exploitation des grumes, l’exploitation industrielle est assurée par des sociétés privées nationales ou » expatriées « , c’est-à-dire à capitaux étrangers.
Chaque société produisant des grumes possède au moins une scierie.
On compte 29 scieries dont 10 de type moderne ; quatre unités de déroulage, une unité de tranchage et deux unités de fabrication de contreplaqué, auxquelles il faut ajouter une unité d’imprégnation des poteaux téléphoniques et électriques et trois menuiseries-raboteries.
Tableau III – Superficie en hectares | |||||
Milieu écologique | Effort JNA | Eco SA | SNR | CPAL | Total |
Savane | 230 | 52 000 | 11 400 | - | 63 630 |
Forêt dense | - | - | 9 700 | 220 | 9 920 |
Total | 230 | 52 000 | 20 100 | 220 | 73 550 |
La production industrielle au Congo se limite à la transformation des produits des forêts naturelles en produits de base pour l’industrie du bois : bois de sciages, placages et contreplaqués. L’industrie des produits finis (charpentes élaborées, fermetures de bâtiments, meubles) est très peu développée.
En 1999 :
- la principale production de transformation, le sciage, a été de 73 870 m3, sans progrès sur l’année précédente. Les principales essences exploitées en sciage sont, par ordre d’importance de cubage :
– le sapelli (41 300 m3),
– le niové (10 400 m3),
– le sipo (6 100 m³),
– l’iroko (4 200 m3), - les placages ont baissé considérablement pour atteindre seulement 18 650 m3 (contre 51 900 l’année précédente) ;
- les contreplaqués représentent encore une part faible de la transformation : 2 800 m3, malgré une forte augmentation par rapport à l’année précédente.
Plantation d’eucalyptus.
Comme on l’a vu plus haut, les produits des forêts artificielles, importants par leur cubage sont exportés directement sous formes de grumes (rondins) d’eucalyptus pour l’industrie papetière. À l’exception de l’unité d’imprégnation citée plus haut, ils n’alimentent pas d’industrie de transformation.
Les graphiques ci-contre résument les grands chiffres de l’exploitation forestière et industrielle du pays, tant en ce qui concerne les produits des forêts naturelles que ceux des forêts artificielles.
Conclusion – L’avenir de la forêt au Congo et en Afrique centrale
Pour conclure sur l’exemple du Congo, on a vu dans cet article que, déjà au niveau primaire de l’exploitation des grumes, la forêt congolaise n’est exploitée que pour une part non majoritaire de son potentiel.
Ceci est dû à plusieurs raisons :
- les difficultés politiques des dix dernières années qui ont stoppé tout développement,
- l’insuffisance des moyens de transport,
- le peu de développement de l’industrie dans le nord du pays très peu accessible autrement que par le fleuve.
De plus la majeure partie des grumes exploitée est exportée en l’état, sans transformation.
Conscients de ces problèmes, les gouvernants actuels ont dressé un plan prévoyant :
- un contrôle sérieux de la gestion forestière pour préserver l’avenir, tant en ce qui concerne les capacités de production que la préservation de la faune et des espèces végétales (qui dépend du même ministère),
- un encouragement au développement industriel pour que les exportations se limitent à celle des produits transformés, et pour fixer les populations dans les zones d’exploitation,
- la conception d’un plan de transport adapté avec une bonne coordination fluvial-fer-route, prévoyant notamment un développement de l’équipement des ports fluviaux en matériels de manutention adaptés.
Transport de grumes (sapelli) dans le Kouilou.
Déjà la privatisation totale de l’exploitation forestière et le retour de la sécurité dans le pays rassurent les investisseurs. Certaines organisations internationales ont commencé à faire connaître leur intérêt pour les efforts déjà engagés notamment dans le cadre de la conservation et du développement des » puits de carbone « .
Pour revenir maintenant au niveau du continent africain, afin de mieux protéger et exploiter la richesse que représente le bois pour ces pays, ces derniers se sont groupés au sein de l’Organisation africaine du bois (OAB) dont le président est justement depuis peu l’auteur de cet article. Cette organisation née il y a vingt-quatre ans, mais jusqu’ici peu présente sur la scène internationale, a décidé de se transformer afin que l’Afrique qui représente près du tiers des forêts tropicales du monde remonte au moins à ce niveau au lieu de ne représenter que 10 % du volume commercialisé, pour une participation aux flux financiers de 14 %.
Des actions destinées à la fois à protéger cette richesse, à soutenir les cours des produits forestiers et à en développer l’exploitation sont donc en cours de préparation sur le plan continental.
La Jaune et la Rouge remercie très vivement S. E. Jean-Baptiste TATI-LOUTARD, ministre des Hydrocarbures du Congo, pour la documentation qu’il a bien voulu lui communiquer.
M. TATI-LOUTARD, écrivain réputé, a reçu en 1992 le grand prix du “Rayonnement de la langue française ” décerné par l’Académie française.