L’Atlantique à la rame : c’est parti
Les quatre coéquipières se sont lancées le 6 décembre dernier sur les traces de Christophe Colomb pour rallier les Canaries aux Antilles, relevant ainsi le défi de traverser l’Atlantique à la rame sans assistance. Réglage du bateau, choix des équipements, préparation du quotidien, rien n’est négligé. L’autonomie impose rusticité, sobriété, simplicité… et ingéniosité.
Catherine Remy, Laurence Grand-Clément, Quitterie Marque et Laurence de Rancourt ont raconté dans le numéro d’octobre la genèse d’une aventure. Elles évoquent ici les points cruciaux qui ont fait l’objet des ultimes préparatifs.
Les quarts, une affaire d’optimisation
Trouver le juste rythme de tours est affaire d’optimisation. Le bateau dispose de 2 postes de rames. De la problématique chèvre-chou – loup-barque, il n’y a qu’un pas. Les jeunes femmes rament deux par deux, à tour de rôle. Les quarts sont d’une heure au moment des heures chaudes et peuvent aller jusqu’à quatre heures pendant la nuit. Les sportives n’excluent pas la possibilité de dormir quelques petites heures la nuit en intégrant des quarts en solo. Cela permet à leur corps de récupérer en limitant les blessures et de gagner en efficacité le lendemain.
L’eau, une ressource primordiale
Les jeunes femmes étanchent leur soif avec l’eau qu’elles produisent elles-mêmes. Autonomie oblige. Et plutôt trois fois qu’une : par sécurité, elles ont trois sources à bord. L’autonomie, encore et toujours. Le dessalinisateur électrique, fixé sous le pont, alimenté grâce à l’énergie fournie par les panneaux solaires, fonctionne une heure par jour. Il produit ainsi une vingtaine de litres d’eau douce par jour pour les quatre rameuses, ce sera leur source première. En cas de panne, elles disposent d’un dessalinisateur manuel, fonctionnant également par osmose inverse. En cas d’impossibilité d’utiliser ces deux appareils, l’équipage dispose d’un joker de dernier recours : l’eau stockée sur l’arête longitudinale. Cette eau embarquée est avant tout garante de l’équilibre du bateau : elle le stabilise en le lestant et contribue au contraire à son instabilité en position retournée en cas de dessalage. Une eau douce qui sert en cas de dessalage.
La nourriture, le moral au quotidien
Quant à la nourriture, l’équilibre est fragile et primordial : comment trouver la juste combinaison entre besoins du corps, qui s’élèvent à plus de 4 000 calories au vu de l’effort, et nécessités des papilles ? Les sachets déshydratés apportent à l’organisme protéines, glucides, lipides, tandis que la bouchée de fromage ou de saucisson ravit tout simplement. Pour des raisons de poids (du bateau, s’entend) évidentes, les jeunes femmes privilégient la nourriture déshydratée, mais ne négligent pas ce facteur, ô combien garant du moral des troupes ! Le tout est stocké sous le pont, dans des compartiments étanches. Elles disposent de bonbonnes de gaz pour faire chauffer l’eau.
L’énergie, les communications
Nombre d’appareils électroniques ont besoin d’être alimentés : le dessalinisateur, la radio VHF (Very High Frequency), le GPS (Global Positioning System), le pilote automatique, le téléphone satellite, l’appareil photo.
De l’eau douce en cas de dessalage
Et pour cela, quoi de plus naturel et de plus efficace que les panneaux solaires. Ils alimentent des batteries stockées sous le pont et elles-mêmes reliées aux divers équipements électroniques. L’énergie est donc une affaire de priorités. En cas de manque, le dessalinisateur est est prioritaire – pour ce qui est de l’eau à boire. Viennent ensuite radio et GPS, puis le dessalinisateur à nouveau pour cette fois-ci l’eau de rinçage, le pilote automatique et enfin l’accessoire comme la musique ou les appareils photos. La communication revêt plusieurs formes. La radio VHF permet de communiquer avec les navires qui croisent la route du bateau français. La communication quotidienne avec la base à terre est, quant à elle, assurée par téléphone satellite. Tous les jours, les quatre rameuses relatent les événements forts de la journée et peuvent envoyer des photos de moments choisis. Elles peuvent faire un point météo et optimiser leur route en fonction. Elles sont suivies en temps réel, leur position est rapportée tous les jours sur leur site Web.
Panneaux solaires
Soins du corps, aucune erreur tolérée
Le corps. Un autre facteur clef du succès. Il n’est pas tant question ici de la force musculaire que du corps au sens large : les rameuses portent une attention toute particulière à ce chapitre, car en haute mer, la moindre blessure peut dégénérer et signifier la fin de l’aventure.
Mens sana in corpore sano
Plusieurs raisons à cela : il y a l’autonomie, encore et toujours, mais également l’hostilité du milieu (vent, soleil, sel). Les sportives misent sur la prévention et honorent un vieil adage. Les gants, la crème et les manchons des rames leur évitent les ampoules autant que faire se peut. Les coussins sur les sièges et les réglages des coulisses retardent les blessures. La crème et les vêtements longs les protégent du soleil. Tant de gestes et de réflexes quotidiens que les jeunes femmes font leurs. Mens sana in corpore sano.