L’automatisation des entrepôts : le nouveau défi des retailers
Exotec connaît depuis sa création récente une croissance fulgurante, servie par l’explosion du e‑commerce. À une époque où la digitalisation et la conversion au multicanal des acteurs du retail deviennent des enjeux cruciaux de compétitivité, Stanislas Normand (X06), managing director pour l’Amérique du Nord, nous raconte la success story d’Exotec.
Quelle est l’histoire de la société et comment s’est-elle développée ?
Exotec a été fondée en 2015 par deux ingénieurs français, Romain Moulin et Renaud Heitz. L’entreprise a vu le jour au sein de l’incubateur de Télécom Paris puis elle a déménagé dans le Nord. Son siège est situé à Croix, dans les Hauts-de-France.
Cdiscount a été le premier client d’Exotec et l’entreprise s’est développée sur le marché français pendant deux ans. En 2019, elle a commencé son déploiement à l’international, d’abord en Italie, en Espagne, puis au Japon et depuis 2020 aux États-Unis. Aujourd’hui, Exotec soutient plus de 30 marques leaders dans le monde entier dans les secteurs du e‑commerce, de l’alimentaire, du retail, de la fabrication et de la logistique externalisée (3PL).
En quoi consistent les solutions que propose Exotec ?
L’ambition des fondateurs était de mettre à disposition des entrepôts leur savoir-faire en robotique. L’industrie fonctionnait alors beaucoup sur des technologies d’automatisation plus anciennes, reposant sur de lourdes structures en acier, des convoyeurs, des automates, en bref des dispositifs assez peu flexibles. Romain Moulin et Renaud Heitz ont alors révolutionné le secteur en mettant au point un innovant système automatisé de stockage et de récupération (ASRS), basé sur la modularité et la flexibilité. Le système développé par Exotec, baptisé Skypod, fait appel aux robots du même nom qui peuvent se déplacer dans les trois dimensions, et jusqu’à une hauteur de 12 mètres.
Quelle est votre ambition aujourd’hui ?
Un entrepôt logistique est un site où des produits arrivent, sont stockés, puis sont prélevés pour assembler des commandes, avant d’être envoyés au consommateur final. Nous voulons appliquer notre savoir-faire à l’ensemble des processus des entrepôts de nos clients, avec l’objectif de fournir toutes les briques technologies qui leur permettront d’augmenter la productivité de leurs sites. Notre ambition est de couvrir toute la chaîne logistique. C’est un travail de longue haleine. Nous ne sommes qu’au début de l’aventure.
Comment l’apport de vos robots se traduit-il concrètement ?
D’abord, nous ne vendons pas seulement des robots, nous commercialisons des systèmes complets. Et derrière cette technologie, nous améliorons au fond la performance de nos clients, qui s’exprime en nombre d’articles prélevés par heure. Les skypods voyagent jusqu’à 4 m/s pour accéder à n’importe quel élément du système en deux minutes. Nous nous engageons d’ailleurs contractuellement sur la performance : nous payons des pénalités à nos clients si nos systèmes n’atteignent pas les objectifs fixés. En installant nos produits, le client multiplie en moyenne par cinq la performance de son site.
Nos systèmes répondent ensuite à une problématique de pénibilité et de recrutement. Pour des tâches aussi répétitives que parcourir des kilomètres dans les rayons ou porter des charges lourdes, il est difficile de trouver et surtout de fiabiliser les employés. Par ailleurs, le fort taux de turn over engendre un coût de formation élevé. Cette difficulté à recruter limite la croissance de nos clients. Nos robots remplacent le travail physique des opérateurs qui se déplacent pour pousser des chariots et aller chercher des produits un par un dans les étagères. Avec nos dispositifs, les robots apportent les articles aux opérateurs en station pour qu’ils préparent les commandes.
Enfin, nous permettons de baisser le coût du stockage en augmentant sa densité. Nos robots peuvent monter très haut dans les racks, et de ce fait permettent de réduire la surface de l’entrepôt pour ces opérations. De plus, l’installation n’est pas figée : nous pouvons accompagner la croissance de nos clients de manière simple et flexible, en ajoutant des robots selon le développement des opérations du client.
La mise en œuvre de vos systèmes est-elle une opération complexe ?
C’est au contraire très simple, et c’est justement le grand avantage de nos solutions. Nos racks sont modulables. Nous faisons peser un minimum de contraintes sur site : toute l’électrification se concentre dans les robots. Ascenseurs, convoyeurs, câblages font place à des robots autonomes qui fonctionnent sur batterie. Chaque système est conçu avec le nombre approprié de robots de manière à garantir une performance et une efficacité optimales. L’installation se fait dans un temps très court, ce qui permet à l’entreprise de voir rapidement le bénéfice de sa mise en œuvre. Pour les petits systèmes que nous installons en arrière de magasin (chez Carrefour par exemple), nous avons besoin de six semaines pour la mise en œuvre opérationnelle dans l’entrepôt.
Quels sont les enjeux majeurs pour Exotec actuellement ?
Exotec grandit à une très grande vitesse : tous les ans, nous doublons notre CA et notre effectif. Cette année, nous souhaitons atteindre les 1 000 collaborateurs. Un des principaux enjeux est donc pour nous le recrutement. Nous avons besoin d’un grand nombre d’ingénieurs, en R&D, en software, en hardware, en ingénierie de systèmes, dans les équipes de production (méthode, qualité, performance), dans les équipes de vente (sales executives, ingénieurs avant-vente), mais aussi en tant que chefs de projets dans la partie déploiement des systèmes. Sur la partie maintenance, nous cherchons des ingénieurs autant pour travailler sur l’analyse de la performance des systèmes que pour assurer la maintenance sur site chez nos clients.
La culture d’entreprise a‑t-elle une forte identité chez Exotec ?
C’est un point essentiel. Notre travail dans l’entreprise est guidé par trois grands principes, qui sont rappelés régulièrement à tout le monde. Il s’agit d’abord de comprendre le client : nous inventons, construisons, installons et maintenons nos systèmes d’abord pour répondre à ses besoins. La deuxième valeur, c’est construire ensemble. Il est très important que les collaborateurs se connaissent, ce qui est un vrai défi quand une entreprise grandit et se développe à l’international.
Nous voulons grandir, mais garder notre cohésion. La troisième valeur est d’être fier. Nous sommes fiers de nos produits, et de ce que l’on fait. Cette fierté se manifeste par le goût de l’excellence, le sens du détail, ou le réflexe de partager un problème avec les collaborateurs, la transparence…
Qu’est-ce qui est le plus important pour vous ?
La R&D et l’innovation sont au cœur d’Exotec : nous voulons des produits parfaits. Et cet état d’esprit se traduit notamment par des plans de carrières techniques qui sont autant valorisés que des parcours dans le management. Dès le départ, il était fondamental pour les deux fondateurs que la technique soit reconnue comme la valeur cardinale d’Exotec. Par conséquent, quelqu’un qui n’est pas intéressé par le management pourra parfaitement s’épanouir dans la technique chez nous. C’est vrai non seulement dans la R&D, mais dans d’autres secteurs comme la production, le déploiement de systèmes, la maintenance, etc.
Quels sont vos objectifs pour les années à venir ?
En 2023, nous voulons consolider notre croissance de manière saine, et continuer de nous fortifier sur nos trois marchés, l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Asie du Sud-Est. Dans les prochaines années, nous souhaitons atteindre 1 milliard de CA et nous voulons étendre nos solutions sur l’ensemble de la chaîne de valeur de l’entrepôt, en amont et en aval de la préparation des commandes.