L’automobile, convergence de nouvelles technologies

Dossier : L'automobileMagazine N°557 Septembre 2000
Par Pierre FAURRE (60)

L’automobile au centre du respect de l’environnement

Depuis le milieu des années 80, les efforts de recherche et déve­lop­pe­ment des construc­teurs auto­mo­biles ont conduit à une réduc­tion signi­fi­ca­tive des émis­sions de pol­luants des véhicules.

Evolution des normes antipollution automobilesAin­si, les véhi­cules répon­dant aux normes Euro IV auront des niveaux d’é­mis­sion 10 fois infé­rieurs aux niveaux d’é­mis­sion des véhi­cules des années 90.

De plus les construc­teurs se sont atta­chés à réduire les émis­sions de gaz car­bo­nique, celles-ci sont direc­te­ment liées à la consom­ma­tion de car­bu­rant. Ils se sont enga­gés à ce que, à l’ho­ri­zon 2012, les voi­tures neuves rejettent moins de 120 g de CO2 par kilomètre.

Le gra­phique ci-des­sous donne l’é­vo­lu­tion de la légis­la­tion euro­péenne de 1993 à 2005 en ce qui concerne les niveaux d’oxydes d’a­zote et d’hy­dro­car­bures imbrûlés.

Cette for­mi­dable évo­lu­tion des per­for­mances du groupe moto­pro­pul­seur a été pos­sible grâce à l’a­mé­lio­ra­tion des sys­tèmes de contrôle qui mettent en œuvre, à des coûts de très grandes séries, des solu­tions qui ont per­mis de pilo­ter des avions ou de com­man­der des sys­tèmes d’armes des plus complexes.

De nouvelles technologies de moteurs

La réduc­tion des émis­sions de dioxyde de car­bone, tout en maî­tri­sant les émis­sions des autres pol­luants, se fera par une recon­cep­tion pro­fonde des moteurs. On peut don­ner, comme exemple de muta­tion tech­no­lo­gique, le rem­pla­ce­ment de l’arbre à cames méca­nique par la com­mande indi­vi­duelle des sou­papes à l’aide d’ac­tion­neurs élec­tro­ma­gné­tiques pour les moteurs des années 2005. Le résul­tat atten­du est une consom­ma­tion de car­bu­rant réduite de 15 % à 20 %, et un couple à bas régime amé­lio­ré d’au moins 20 %.

Le prin­cipe de ces action­neurs est d’emmagasiner l’éner­gie dans deux res­sorts en oppo­si­tion, celui de la sou­pape et celui de l’ac­tion­neur, et de com­pen­ser les pertes essen­tiel­le­ment dues aux frot­te­ments lors du mou­ve­ment, en com­man­dant l’élec­troai­mant pour atti­rer la palette et donc la sou­pape vers l’une des deux posi­tions stables, ouverte ou fermée.

Une des prin­ci­pales dif­fi­cul­tés de ce sys­tème réside dans le pilo­tage des élec­troai­mants pour assu­rer une vitesse d’ac­cos­tage des sou­papes sur leur siège com­pa­rable, voire infé­rieure, à celle qui est obte­nue par un sys­tème clas­sique à arbres à cames, et ce afin de garan­tir la durée de vie du sys­tème et de limi­ter le niveau de bruit acous­tique. Ce pilo­tage en dépla­ce­ment et en vitesse met en œuvre des algo­rithmes d’as­ser­vis­se­ments à gains variables et à coef­fi­cients auto-adap­ta­tifs direc­te­ment déri­vés de solu­tions appli­quées dans cer­tains sys­tèmes de défense comme le pilo­tage du balayage des miroirs de camé­ras thermiques.

Il est exé­cu­té en numé­rique par un contrô­leur par cylindre dont la puis­sance de cal­cul est supé­rieure à toute la puis­sance de cal­cul d’une voi­ture de milieu de gamme d’aujourd’hui.

La surveillance permanente des performances du moteur

À par­tir du 1er jan­vier 2001, tous les véhi­cules neufs devront être équi­pés de diag­nos­tic embar­qué, OBD pour On Board Diag­nos­tic, qui sur­veille en per­ma­nence les fonc­tions du véhi­cule qui garan­tissent le res­pect des normes, notam­ment celles qui concernent l’environnement.

Le pro­grès de l’élec­tro­nique digi­tale, l’u­ti­li­sa­tion mas­sive de pro­ces­seurs de trai­te­ment du signal asso­ciés aux cap­teurs jouent un rôle déter­mi­nant dans cette évolution.

Citons comme exemple l’ex­ploi­ta­tion de la mesure du cou­rant d’ionisation.

Lors de la com­bus­tion du mélange, il se crée des radi­caux libres qui sou­mis à une dif­fé­rence de poten­tiel donnent nais­sance à un cou­rant image de la pres­sion cylindre. Mesu­ré aux bornes des élec­trodes de la bou­gie d’al­lu­mage, le signal résul­tant est trai­té numé­ri­que­ment par le cal­cu­la­teur de contrôle moteur. On en déduit la valeur et la posi­tion du maxi­mum de pres­sion dans le cycle de com­bus­tion, ce qui per­met de véri­fier l’oc­cur­rence de celle-ci et d’a­dap­ter l’a­vance à l’al­lu­mage pour obte­nir le ren­de­ment maxi­mum. De plus l’a­na­lyse spec­trale en temps réel du signal per­met de pré­ve­nir les risques de com­bus­tion anor­male comme l’ap­pa­ri­tion du cliquetis.

La généralisation des systèmes asservis électriques

Le prin­cipe géné­ral, qui motive toutes ces évo­lu­tions, est qu’un sys­tème contrô­lé et asser­vi offre, outre des per­for­mances net­te­ment supé­rieures à celles des sys­tèmes méca­niques clas­siques, un meilleur niveau de sécu­ri­té et un bien meilleur ren­de­ment que ceux des sys­tèmes méca­niques. En effet, même si la double conver­sion d’éner­gie, méca­nique-élec­trique puis élec­trique-méca­nique, pré­sente un ren­de­ment a prio­ri plus faible, l’u­ti­li­sa­tion de l’éner­gie, au moment où il le faut, et juste en quan­ti­té néces­saire, amé­liore le bilan éner­gé­tique du véhicule.

Ces nou­veaux sys­tèmes voient le jour grâce au trans­fert vers l’au­to­mo­bile de tech­no­lo­gies de sûre­té et d’élec­tro­nique fiable à haute tem­pé­ra­ture, tech­no­lo­gies qui sont entre autres à l’o­ri­gine des com­mandes de vol des avions d’arme modernes.

Ils recouvrent une grande diver­si­té de fonc­tions allant d’ac­ces­soires entraî­nés élec­tri­que­ment comme le com­pres­seur de cli­ma­ti­sa­tion ou le groupe moto­ven­ti­la­teur, à des sous-sys­tèmes com­plexes comme le  » drive by wire « , géné­ra­tion du couple moteur, et le  » clutch by wire « , pilo­tage de l’embrayage et du chan­ge­ment de rap­port, qui sont déjà com­mer­cia­li­sés. Ils concer­ne­ront pro­chai­ne­ment le  » brake by wire « , frei­nage élec­trique, et le  » steer by wire « , direc­tion élec­trique, elle aus­si sans liai­son mécanique.

L’automobile au centre d’un monde de communications et de loisirs

Les nou­veaux véhi­cules sont conçus pour offrir des niveaux constam­ment amé­lio­rés de confort et de sécu­ri­té au conduc­teur et aux passagers.

Le réseau intérieur du véhicule

Pour satis­faire ce besoin, la struc­ture élec­tro­nique de l’ha­bi­tacle s’o­riente vers un ensemble de sys­tèmes intel­li­gents assu­rant les dif­fé­rentes fonc­tions du véhi­cule comme le confort cli­ma­tique, l’é­clai­rage, la sécurité…

Démarrage d'un véhicule avec reconnaissance d'empreintes digitalesCes sys­tèmes sont orga­ni­sés autour de bus mul­ti­plexés et sécu­ri­sés dans une archi­tec­ture héri­tée des sys­tèmes de télé­com­mu­ni­ca­tions. On y retrouve des pas­se­relles ou  » gate­way « , de la redon­dance, du temps réel, de la sécu­ri­té, du contrôle d’accès…

La répar­ti­tion de l’in­tel­li­gence dans le véhi­cule per­met d’at­teindre un niveau de per­for­mance et de convi­via­li­té aujourd’­hui réser­vé aux véhi­cules haut de gamme. De plus, l’ar­chi­tec­ture logi­cielle du cal­cu­la­teur cen­tral de l’ha­bi­tacle auto­rise le construc­teur à gérer l’im­plan­ta­tion au moindre coût des dif­fé­rentes fonc­tions du véhicule.

Ain­si, la ges­tion des ouvrants, la régu­la­tion de la tem­pé­ra­ture de l’ha­bi­tacle deviennent des fonc­tions standards.

On peut faci­le­ment ima­gi­ner que ces sys­tèmes s’en­ri­chi­ront de dis­po­si­tifs de contrôle d’ac­cès sophis­ti­qués comme la recon­nais­sance d’empreinte digi­tale, de moyens de trans­mis­sion de l’in­for­ma­tion à haut débit par fibres optiques, d’in­ter­faces mieux adap­tées à la conduite auto­mo­bile telle que la com­mande vocale… Autant d’oc­ca­sions de conver­gence des tech­no­lo­gies issues d’autres domaines.

Le véhicule dans des réseaux de communication

La connexion du véhi­cule à l’ex­té­rieur via le réseau Inter­net consti­tue un autre domaine de pré­di­lec­tion des nou­velles tech­no­lo­gies : le véhi­cule devient ain­si un espace de com­mu­ni­ca­tions et de loisirs.

Le réseau Inter­net est aujourd’­hui acces­sible à l’au­to­mo­bi­liste grâce à l’en­semble des tech­no­lo­gies asso­ciées au télé­phone mobile, dont les plus impor­tantes, pour le déve­lop­pe­ment de la com­mu­ni­ca­tion dans les véhi­cules, sont le WAP, Wire­less Appli­ca­tion Pro­to­col, et le GPRS, Glo­bal Packet Radio Sys­tem.

L’au­to­mo­bile se com­porte comme un ter­mi­nal dans un réseau de ser­vices dis­tri­bués. Le plus immé­diat pour l’au­to­mo­bi­liste est bien sûr de lui per­mettre d’ac­cé­der direc­te­ment à ses infor­ma­tions per­son­nelles, à son agen­da et à sa messagerie.

Principe de la navigation distribuéeCer­tains ser­vices liés à la mobi­li­té, tels que l’in­for­ma­tion en temps réel sur le tra­fic, le gui­dage rou­tier, la consul­ta­tion des dis­po­ni­bi­li­tés des hôtels, des res­tau­rants, des par­kings…, sont déjà ouverts.

Dans le contexte Inter­net, le foi­son­ne­ment d’i­dées va entraî­ner très rapi­de­ment la créa­tion d’autres ser­vices tels que le diag­nos­tic du véhi­cule, la ges­tion de flotte, la four­ni­ture de sons et d’images…

Pour les pas­sa­gers du véhi­cule, l’a­gré­ment et l’a­ni­ma­tion du voyage consti­tuent des pres­ta­tions atten­dues. On ima­gine que cha­cun dis­po­se­ra rapi­de­ment d’un ter­mi­nal mul­ti­mé­dia qui lui per­met­tra d’ac­cé­der à des ser­vices dis­tri­bués de jeux, de musiques, d’images…

De plus, l’é­mer­gence de la télé­vi­sion numé­rique ter­restre et de ses pos­si­bi­li­tés de récep­tion sur un véhi­cule per­met­tront dans un ave­nir proche de se connec­ter direc­te­ment sur leur pro­gramme de télé­vi­sion favori.

Pour le conduc­teur et pour les pas­sa­gers la connexion aux réseaux se fera au moyen de leur ter­mi­nal per­son­nel. La voi­ture appor­te­ra l’in­ter­face homme-machine appro­priée au tra­vers de péri­phé­riques comme la recon­nais­sance vocale, les écrans haute réso­lu­tion, les mémoires de masse, la géné­ra­tion de son de qualité.

En conclu­sion, il res­sort clai­re­ment que l’in­dus­trie auto­mo­bile est deve­nue une indus­trie de pointe, qu’elle uti­lise dans cer­tains sec­teurs les tech­no­lo­gies les plus avan­cées, tirées par d’autres mar­chés, les télé­com­mu­ni­ca­tions en par­ti­cu­lier et qu’elle est l’ac­teur prin­ci­pal du déve­lop­pe­ment tech­no­lo­gique dans d’autres sec­teurs, l’en­vi­ron­ne­ment par exemple.

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Nico­las Don­jon et Hen­ri Trin­ti­gnac de la Divi­sion Auto­mo­bile de Sagem ont contri­bué à cet article.

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