Le courrier des lecteurs

Dossier : ExpressionsMagazine N°572 Février 2002

À propos du n° 559, novembre 2000 Les X étrangers par Maurice BERNARD (48)

L’article paru en novembre 2000 sous la signa­ture de Mau­rice Ber­nard (48) dans le numé­ro consa­cré aux X étran­gers a sus­ci­té la réac­tion d’un cer­tain nombre de cama­rades, ce qui a don­né lieu à une mise au point du pré­sident Fran­çois Ailleret.
Nos lec­teurs trou­ve­ront ici l’essentiel d’une lettre adres­sée par Mau­rice Ber­nard à ces camarades.

… Je me suis éton­né, en effet, que, quelques cama­rades, sans prendre contact avec moi, aient cru inter­pré­ter ma pen­sée, lire entre les lignes de la légende d’une pho­to (certes impru­dente et mal­adroite, j’y revien­drai) des asser­tions ima­gi­naires et essayer de les faire par­ta­ger ici ou là. Auprès des quelques per­sonnes qui ont eu la cour­toi­sie de me faire part de leur trouble ou de leur éton­ne­ment, je me suis expli­qué serei­ne­ment et ai obte­nu, je crois, leur abso­lu­tion ! Je men­tionne, en pas­sant, que de nom­breux lec­teurs n’ont rien trou­vé à redire ni au texte ni à son illustration.

Vous men­tion­nez dans votre lettre du 13 octobre que l’article que j’ai fait paraître dans La Jaune et la Rouge sou­lève trois questions.

La pre­mière, le choix de l’illustration.

Pour illus­trer mon texte j’avais cher­ché un cli­ché repré­sen­tant, par exemple, la Taupe de Casa­blan­ca… en vain. L’excellente pho­to­gra­phie de la Taupe arabe du lycée Bugeaud d’Alger (datée de 1947) que je pos­sé­dais, quoiqu’elle eût un rap­port ambi­gu avec le corps de l’article, m’avait séduit. Elle per­met­tait tout à la fois :

  • d’honorer la mémoire de l’excellent pro­fes­seur que fut Saint-Jean,
  • d’évoquer le défi­cit des musul­mans d’Algérie dans les pro­mo­tions de l’X,
  • de sou­li­gner l’émergence remar­quable des élites issues de la com­mu­nau­té juive d’Algérie,
  • de per­mettre à quelques lec­teurs de revoir l’image de leurs vingt ans.

Ce choix, naïf et de fait mal­adroit, s’est révé­lé ambi­gu aux yeux de cer­tains lec­teurs : j’en conviens et je le regrette. Cepen­dant ne fei­gnons pas de pen­ser que cer­tains cama­rades auraient pu un ins­tant croire qu’Alger n’était pas jusqu’en 1962 une ville française !

La seconde ques­tion est rela­tive à la cita­tion du décret Crémieux.

Vous men­tion­nez dans votre lettre qu’Henri Bou­men­dil (44) a pro­po­sé, à la place de la mienne, une autre rédac­tion : “ La com­mu­nau­té juive d’Algérie, deve­nue fran­çaise grâce au décret Cré­mieux de 1870, a four­ni à l’École polytechnique… ”

J’approuve cette rédac­tion, elle est meilleure que la mienne. Ceci étant, l’expression que j’ai uti­li­sée quoique impru­dente n’implique aucun favo­ri­tisme ou pri­vi­lège (voir par exemple Le Petit Robert).

D’autre part, si j’avais cité la par­tie du décret Cré­mieux rela­tive aux musul­mans, il m’aurait fal­lu expli­quer pour­quoi ceux-ci furent si peu nom­breux à en béné­fi­cier, donc déve­lop­per des consi­dé­ra­tions poli­tiques, socio­lo­giques et reli­gieuses tota­le­ment hors sujet.

Mon texte, comme vous l’avez cer­tai­ne­ment remar­qué, vise des faits ; il cherche à éta­blir des décomptes et non à les interpréter.

J’en viens à la troi­sième ques­tion que l’on pour­rait for­mu­ler ain­si : quelle inter­pré­ta­tion les lec­teurs peuvent-ils faire des chiffres des dif­fé­rents recru­te­ments obser­vés sur un demi-siècle ?

Les lec­teurs sont, grâce à Dieu, tout à fait libres de les inter­pré­ter comme ils l’entendent, en fonc­tion de leur connais­sance du sujet et de mille autres fac­teurs objec­tifs ou sub­jec­tifs qui leur sont propres.

Rien dans ce que j’ai écrit ne consti­tue une réfé­rence à une quel­conque dis­cri­mi­na­tion. Certes telle forme de dis­cri­mi­na­tion ou telle autre peut appa­raître à l’esprit du lec­teur comme une expli­ca­tion plau­sible… par­mi bien d’autres possibles.

Vous citez un extrait de la thèse d’Anoushé Kar­var qui m’est très fami­lière (je suis à l’origine de son tra­vail que j’ai sui­vi avec inté­rêt depuis le début). Les consi­dé­ra­tions que vous citez ne sont nul­le­ment contra­dic­toires avec ce que j’ai écrit.

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À propos du n° 569, novembre 2001 Le dossier du nucléaire par Henri ARNOUX (46)

La pre­mière réflexion concerne la struc­ture de la demande en éner­gie. À ma connais­sance, le pre­mier sec­teur d’activité au point de vue de la consom­ma­tion d’énergie est l’immobilier rési­den­tiel et ter­tiaire, qui à lui seul repré­sente 40 % de la consom­ma­tion totale. (Voir par exemple l’article de Ben­ja­min Des­sus dans le n° 555 de La Jaune et la Rouge, mai 2000, sur l’effet de serre.) Le gra­phique de la page 9 de ce numé­ro où l’on voit que les habi­tants de la CEI occupent la seconde place pour la demande d’énergie par habi­tant tend à confir­mer l’importance de ce poste, car il est très pro­bable que c’est la demande de chauf­fage qui est à l’origine de cette seconde place.

Or les défen­seurs paten­tés de l’environnement semblent consi­dé­rer que tous nos maux viennent de la voi­ture. Ne serait-il pas sou­hai­table de remettre les choses dans l’ordre et de se deman­der com­ment on pour­rait éco­no­mi­ser l’énergie dans l’immobilier, en remet­tant par exemple à l’ordre du jour les limites de tem­pé­ra­ture dans les loge­ments ? (Pour l’histoire, je rap­pel­le­rai qu’en 1947 et 1948 la Ville de Paris a connu quelques périodes de smog dignes de Londres et qui n’étaient cer­tai­ne­ment pas impu­tables aux voi­tures, objets rares à cette époque, mais à la remise en route de chau­dières fati­guées par la guerre et une longue inactivité.)

Le même article de Ben­ja­min Des­sus remarque, à juste titre, que la réduc­tion des émis­sions dans l’immobilier deman­de­ra un effort consi­dé­rable, s’il faut mettre la tota­li­té du parc immo­bi­lier aux meilleures normes actuelles en matière d’isolation, mais il ajoute que la réduc­tion des émis­sions de l’industrie “ a de bonnes chances de se pro­duire assez natu­rel­le­ment avec la déma­té­ria­li­sa­tion de l’activité indus­trielle ”.

Cette phrase me laisse per­plexe, car nos contem­po­rains n’habiteront pas dans des mai­sons vir­tuelles équi­pées de réfri­gé­ra­teurs, de fours à micro-ondes ou de télé­vi­seurs vir­tuels. Il fau­dra bien conti­nuer à fabri­quer des biens maté­riels, la reprise actuelle du mar­ché de l’automobile montre d’ailleurs qu’il existe une demande de biens réels et non virtuels.

Dans cette même caté­go­rie de fausses bonnes idées, on parle beau­coup des voi­tures non pol­luantes fonc­tion­nant à l’hydrogène ou à l’électricité grâce à une bat­te­rie d’accumulateurs ; mais per­sonne ne semble pen­ser que l’hydrogène à l’état libre n’existe pas dans la nature et qu’il faut de l’énergie, le plus sou­vent élec­trique, pour le pro­duire, et que les bat­te­ries doivent être régu­liè­re­ment rechargées.

Dans les deux cas, on ne sup­prime pas la pol­lu­tion, on la déplace, et on peut même se deman­der, dans le cas des véhi­cules à bat­te­rie, si l’empilage des pertes, de la cen­trale élec­trique au moteur de la voi­ture en pas­sant par les pertes sur le réseau, ne risque pas de conduire à une consom­ma­tion supé­rieure de carburants.

Si on consi­dère main­te­nant non pas la consom­ma­tion d’énergie, mais la consom­ma­tion de com­bus­tibles fos­siles, on s’aperçoit que le pre­mier sec­teur consom­ma­teur est, de très loin, la pro­duc­tion d’électricité qui absorbe entre 40 et 50 % de la consom­ma­tion totale (plus de 60% en Alle­magne d’après l’article de Pierre Bacher). Or un très grand nombre de cen­trales ther­miques implan­tées dans les pays du Sud ne se dis­tinguent pas par leur rendement.

Un pro­gramme de réha­bi­li­ta­tion de ces cen­trales per­met­tant d’améliorer leur ren­de­ment aurait des effets signi­fi­ca­tifs en termes de réduc­tion des rejets de CO2. Pour fixer les idées, une cen­trale de 100 MW, qui est dans nos pays une petite cen­trale, mais qui doit être cou­rante dans des pays du Sud, rejette à l’atmosphère de l’ordre de 500 000 tonnes de CO2 par an, variant selon le com­bus­tible uti­li­sé. Une majo­ra­tion d’un point du ren­de­ment d’une telle cen­trale, pour des ren­de­ments de l’ordre de 35 à 40 %, réduit le rejet annuel de 10 000 à 15 000 tonnes de CO2. Or il y a cer­tai­ne­ment nombre de cen­trales dont le ren­de­ment peut être amé­lio­ré de plus de 1 %. Une telle opé­ra­tion aurait donc des effets signi­fi­ca­tifs sur le niveau des rejets, et per­met­trait aux pays concer­nés des éco­no­mies appré­ciables sur des dépenses en com­bus­tibles sou­vent impor­tés au prix de pré­cieuses devises.

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