Le logement au péril du territoire
La politique publique du logement pourrait-elle mieux répondre à l’objectif de renforcer l’unité et l’identité de nos territoires locaux et régionaux ? La réponse proposée passe par une longue enquête sur le fonctionnement des marchés fonciers et immobiliers.
Le caractère atypique de ces deux types de biens ne permet pas de se contenter des théories économiques usuelles sur la formation des prix, et il faut recourir à des notions complémentaires empruntées à la géographie sociale. À court terme, les images sociales des quartiers et des immeubles sont très stables. Leur évolution, toujours lente et progressive, résulte soit de mouvements diffus d’embourgeoisement ou de paupérisation, soit de l’action délibérée des municipalités pour accompagner ou freiner de telles tendances spontanées.
L’étude du rôle des acteurs professionnels et privés met en évidence d’autres spécificités comme le comportement patrimonial des ménages et des entreprises. De nombreuses régulations limitent les marges de manœuvre de ces acteurs, et la disparition des pénuries aiguës installe désormais les marchés des logements d’occasion comme les régulateurs centraux des dispositifs de formation des prix fonciers et immobiliers.
Ce constat explique pourquoi l’accent excessif mis sur la construction neuve en raison de son impact sur l’emploi immédiat a fortement contribué à la déstructuration des territoires urbains et conduit à de regrettables effets pervers.
La forte inertie du système des logements transforme en effet les mauvaises solutions aux problèmes du jour en nouveaux problèmes pour demain.
Une décentralisation progressive des régimes d’aides publiques pourrait contribuer à tempérer les inconvénients de la situation actuelle si elle permet de mieux répondre à l’objectif de renforcer l’appropriation des territoires locaux par leurs habitants.