conformité

Le nouvel ordre moral mondial

Dossier : ConformitéMagazine N°757 Septembre 2020
Par Richard FINCK (92)

Pour­quoi s’intéresser à la confor­mi­té ? Cer­tai­ne­ment parce que cette pro­blé­ma­tique est deve­nue réel­le­ment pré­gnante au cours des dix der­nières années, au point d’atteindre le cœur de nos entreprises. 

Les États-Unis en sont les pre­miers res­pon­sables. Avec des régle­men­ta­tions extra­ter­ri­to­riales com­plexes, ceux-ci ont rap­pe­lé leur puis­sance, éri­gée en modèle de mora­li­té. Mais ils n’ont pas échap­pé aux accu­sa­tions de concur­rence déloyale. Les autres blocs éco­no­miques (Chine, UE) ne sont pour le moment pas par­ve­nus à rec­ti­fier cette asy­mé­trie. Les signa­taires de la conven­tion de 1997 sur la lutte contre la cor­rup­tion d’agents publics étran­gers ont été conduits à rehaus­ser leurs propres dis­po­si­tifs. En France, la loi Sapin 2 de 2016 a per­mis la créa­tion de l’Agence fran­çaise anti­cor­rup­tion (AFA), outil effi­cace et doré­na­vant bien iden­ti­fié par les entre­prises. Elle a aus­si intro­duit en droit fran­çais la jus­tice tran­sac­tion­nelle, emprun­tée au sys­tème amé­ri­cain. Pour autant, ces avan­cées n’écartent pas le « risque américain ».

“La conformité est complexe, protéiforme,
et requiert une expertise croissante. ”

Nous avons choi­si d’illustrer ici la confor­mi­té (com­pliance en anglais) sous le prisme de la lutte contre la cor­rup­tion. Mais ce terme peut prendre dif­fé­rentes accep­tions. Ain­si, le contrôle des expor­ta­tions impose des régle­men­ta­tions natio­nales sub­stan­tiel­le­ment dif­fé­rentes dans des chaînes d’approvisionnement par ailleurs glo­ba­li­sées. De la même manière, les mesures res­tric­tives déci­dées à l’encontre de cer­tains pays (embar­gos) s’accompagnent de listes extrê­me­ment four­nies de per­sonnes morales ou phy­siques avec les­quelles il est inter­dit de com­mer­cer. Pour les entre­prises, le risque d’erreur n’est pas négli­geable. Dans ce cadre aus­si, les sanc­tions amé­ri­caines ont une por­tée extraterritoriale. 

Au total, la confor­mi­té au sens large est com­plexe, pro­téi­forme, et requiert une exper­tise crois­sante. Pour la cor­rup­tion, le déve­lop­pe­ment en France d’une exper­tise tierce (cabi­nets d’avocats, moyens tech­niques de recherche de preuve), qui ne repose pas uni­que­ment sur des res­sources étran­gères, est abso­lu­ment néces­saire. Fina­le­ment, tout cela ren­voie à des objec­tifs et prin­cipes poli­tiques et moraux, et témoigne de l’irruption de la cité dans l’entreprise, aux côtés de la res­pon­sa­bi­li­té sociale et envi­ron­ne­men­tale, de la diver­si­té… Les entre­prises ancrent ces notions dans les pra­tiques mana­gé­riales. Mais, en tant que citoyens, ne devrions-nous pas déjà être convain­cus de leur intérêt ?

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