Le numérique, problème environnemental ou solution ?
Dans ce dossier, nous tentons d’éclairer cette question en interrogeant quelques experts du sujet.
En effet, l’économie continue de réchauffer la planète, sans véritable régulation environnementale. Le numérique (désigné naguère sous le terme « Technologies de l’information et de la communication » ou TIC), comme tous les secteurs économiques, y participe, à son échelle. Selon une source sérieuse, les TIC auraient émis en 2015, dernière année mesurée à l’heure de cette publication, quelque 2,4 % des émissions globales de GES ou 3,2 % de celles de CO2, pour un périmètre comprenant aussi l’électronique grand public. Mais, au fait, comment peut-on mesurer l’empreinte du numérique ? Pas si simple, et les rares experts ne convergent pas vraiment. Une équipe suédoise s’est donné depuis quinze ans la tâche laborieuse de collecter un maximum de données mondiales à ce sujet. Alors qu’on s’attendait à de mauvais indicateurs pour la décennie écoulée, avec une croissance moyenne du débit de données de 25 % par an, paradoxalement l’équipe scandinave estime que l’empreinte s’est stabilisée. Par quel miracle ? Les progrès de la microélectronique se sont chargés de compenser la tendance à la croissance grâce à l’efficacité énergétique. Le secteur du numérique connaît ainsi un répit. Mais que va-t-il se passer ensuite ? Qui va gagner cette course de vitesse entre le flux de données et l’efficacité énergétique par octet transporté ?
“Les progrès de la micro-électronique
se sont chargés de compenser la tendance
à la croissance grâce
à l’efficacité énergétique.”
Le numérique est un secteur systémique, comme l’énergie, l’alimentation, l’éducation, la santé, la construction, la finance. Son effet positif pour l’économie des pays en développement est avéré, mais l’effet négatif de sa surconsommation dans les pays développés l’est aussi. On mise beaucoup sur lui pour lutter contre le changement climatique, pour généraliser des cas exemplaires constatés à petite échelle, par exemple pour le chauffage et la climatisation des bâtiments ou pour la rationalisation des transports, mais cela reste un potentiel à concrétiser. D’autant plus que divers « effets rebond » s’en mêlent et continueront à s’en mêler pour grignoter les réductions des émissions difficilement obtenues.
Dès lors, comment engager une forme de sobriété numérique, l’application au champ des TIC de la sobriété tout court ? On se serre la ceinture ? Un terme plus approprié, ou appropriable par le consommateur moyen, serait peut-être « modération » ? En tout cas, il s’agit de maintenir l’empreinte matérielle des TIC dans des limites raisonnables, par exemple en prolongeant la durée de vie des smartphones, en modérant les usages de la vidéo en ligne, en optimisant le mode veille des antennes mobiles 5G, ou encore en développant largement le recyclage de certains métaux des cartes électroniques, toutes choses qui contribuent à la réduction des émissions. Les opérateurs par la voix de leur association la GSMA souhaitent contribuer à tracer la voie. Ils veulent atteindre la neutralité carbone en 2050, certains plus tôt. Mais il va falloir y travailler dur car cela n’a rien d’automatique. Et il ne suffira pas que les TIC fassent leur part du travail si les autres secteurs ne font pas la leur.
Découvrir l’ensemble du dossier Numérique et environnement