Le partenaire technologique des assureurs
Pierre Beauhaire (X04) et Benoît Pastorelli, cofondateurs de Continuity, nous présentent leur start-up technologique ainsi que la solution qu’ils mettent à disposition des assureurs afin de mieux gérer les risques de leurs clients entreprises. Rencontre.
Comment est née Continuity ?
Benoît Pastorelli : Continuity est avant tout une aventure entrepreneuriale humaine. Nous nous nous sommes rencontrés en prépa et nos chemins se sont croisés de nouveau plusieurs années plus tard. Nous avions alors tous les deux très envie de lancer une start-up dans les services financiers et de travailler ensemble. En explorant différentes pistes, en 2018, nous sommes rendus compte que le marché de l’assurance à destination des entreprises n’avait pas encore fait sa transformation technologique et présentait donc de belles opportunités.
En parallèle, nous assistions aussi à une véritable révolution autour de l’Open Data avec de plus en plus de données accessibles et partagées par les entreprises. Les nouvelles technologies, essentiellement l’intelligence artificielle, et les infrastructures de données, qui ont atteint une certaine maturité, ouvraient, dans ce cadre, de nouvelles perspectives en matière d’exploitation et de valorisation de la data.
À partir de là, notre projet s’est affiné et nous avons créé Continuity, une start-up qui combine l’Open Data et l’intelligence artificielle et dont l’ambition est de se positionner comme le partenaire technologique des assureurs dans le cadre de leur propre transformation technologique.
Entre mi-2018 et 2019, nous avons été incubés au sein de l’incubateur Kamet Ventures. Durant cette première année, nous avons essentiellement travaillé sur notre modèle et notre proposition de valeur avec des assureurs.
Depuis 2020, nous avons levé 7 millions d’euros auprès d’investisseurs de référence : Kamet Ventures ; Elaia, un fonds d’investissement spécialisé dans la deep tech ; et BPI France. Aujourd’hui, Continuity emploie plus de 25 personnes aux profils et aux compétences variés. Nous travaillons avec 8 acteurs du monde de l’assurance, dont les 2 plus importants assureurs nationaux.
Quels sont les métiers de Continuity et que proposez-vous aux assureurs ?
Pierre Beauhaire : Continuity propose aux assureurs un logiciel en mode SaaS afin de leur permettre de qualifier le profil de risque des entreprises autour de quatre grands critères : est-ce que leur activité est risquée ? l’entreprise est-elle située dans une zone à risque ? quel est l’état de leurs bâtiments ? est-ce que la situation financière et administrative est saine ?… À partir de là, la promesse de notre logiciel est de fiabiliser les processus de sélection et de suivi du risque dans le temps.
La partie visible de Continuity est donc un logiciel qui prend la forme d’une interface que nous mettons à la disposition des sociétés d’assurance et de leurs collaborateurs. La partie invisible est l’infrastructure technique et technologique à laquelle cette interface est adossée : la collecte des données, les algorithmes de machine learning pour l’analyse de données et leur valorisation.
Aujourd’hui, dans le cadre de notre développement, nous sommes en train de construire la base de données des entreprises de France la plus exhaustive possible sur les critères de risques qui intéressent les assureurs.
En quoi votre positionnement est-il différenciant ?
B.P : Nous nous positionnons comme le partenaire technologique des assureurs. Ce positionnement nous permet de nous concentrer et d’allouer la majeure partie de nos fonds au développement de notre technologie et à sa montée en puissance. Nous travaillons d’ores et déjà avec de nombreux assureurs leaders sur le marché. Grâce à nos partenaires, notre solution va permettre à plus de 30 % des entreprises françaises de bénéficier d’un meilleur service d’assurance.
Quels sont les besoins des assureurs auxquels vous répondez ?
B.P : Les assureurs sont face à la nécessité de développer une meilleure connaissance de leurs clients. En effet, lors de la genèse de Continuity en 2019, nous nous sommes rendus compte que 10 à 15 % des contrats dans les portefeuilles des assureurs ne correspondent pas ou plus à la situation réelle de leurs clients entreprises. Cela s’explique par le fait que les artisans et dirigeants de TPE se rendent généralement chez des courtiers ou des agents locaux pour établir un contrat d’assurance qu’ils garderont en moyenne pendant 7 ans, car ces contrats sont reconduits de manière tacite en France.
D’année en année, le contrat est donc renouvelé sans mise à jour systématique ce qui peut générer des écarts importants entre la situation de l’entreprise lors de la souscription du contrat et la réalité de l’entreprise à un instant T. C’est une situation « perdant-perdant » aussi bien pour l’entreprise qui est sous-assurée que pour l’assurance dont la rentabilité est fragilisée.
L’enjeu pour les assureurs est donc de sécuriser leur portefeuille en qualifiant plus finement le risque des entreprises qu’elles assurent. Au-delà, c’est aussi la possibilité d’inscrire leurs clients dans une démarche plus proactive de prévention dans un environnement de plus en plus incertain, dans un contexte d’inflation et d’augmentation des catastrophes naturelles.
Au-delà se pose aussi la question de la réactivité du secteur : aujourd’hui, quand un chef d’entreprise souscrit à une assurance, les délais de traitement sont de plusieurs semaines, voire mois. La technologie a vocation à réduire ces délais afin de répondre plus rapidement aux demandes des clients.
Qu’en est-il de la place de l’innovation dans votre modèle ?
P.B : L’innovation est au cœur de notre modèle et de Continuity ! Dès le départ, nous avons misé sur l’innovation technologique pour apporter au marché de l’assurance un produit différenciant à forte valeur ajoutée.
Au-delà de l’histoire personnelle autour de la création de Continuity, la technologie est aussi un fil directeur du développement de la start-up. Diplômé de Polytechnique, j’avais créé une première société en 2012 basée sur la data et l’innovation. L’entreprise a depuis été rachetée par Criteo, un leader mondial du ciblage publicitaire. Notre troisième cofondateur, Antoine Sinton a réalisé son PhD au sein de l’ENS. Il a une expérience de plus de 15 ans dans le domaine du machine learning et de l’intelligence artificielle.
Pour développer notre technologie, nous nous appuyons aussi sur une équipe très technique composée de profils pluridisciplinaires qui ont une très forte appétence pour l’innovation.
Parmi nos compétences techniques, on retrouve des ingénieurs spécialisés en machine learning qui travaillent sur les algorithmes sémantiques, d’analyse de données, de prédiction, de reconnaissance d’analyse visuelle… Nous avons aussi des data ingénieurs qui sont mobilisés sur la construction d’un data lake afin de stocker toutes les informations et la data collectées sur toutes les entreprises de France et qui travaillent à rendre cette data accessible et actionnable. Et à cela s’ajoute une importante équipe d’ingénieurs qui sont mobilisés sur le développement de notre plateforme SaaS afin d’en garantir la réactivité et la performance. Quant à nos collaborateurs en charge des comptes clients, ce sont des compétences qui ont des expériences solides dans la conduite du changement et de l’innovation chez des assureurs.
Aujourd’hui, où en êtes-vous et comment vous projetez-vous sur le marché ?
B.P : Continuity est dans une phase de très forte accélération de sa croissance. C’est une étape passionnante dans le développement de notre entreprise. Depuis notre levée de fonds en septembre 2021, l’équipe est passée de 5 à plus de 25 personnes. Et nous enregistrons le même ratio de croissance au niveau de notre portefeuille client, du nombre d’utilisateurs de notre solution et de notre chiffre d’affaires. En 2023, nous avons de très fortes ambitions en termes de recrutement.
Sur la demande de nos clients, nous réfléchissons aussi à la diversification de notre offre afin de couvrir des cas d’usages plus complexes (cartographie des risques, gestion des cumuls…).
Enfin, nous envisageons aussi de nous développer à l’international sur le court terme.