Le recrutement devient un enjeu stratégique

Dossier : La ChineMagazine N°684 Avril 2013
Par Gwënola COUPÉ
Par Pierre-Yves GÉRARD

La déme­sure du déve­lop­pe­ment éco­no­mique en Chine néces­site des res­sources colos­sales, et cela est par­ti­cu­liè­re­ment vrai des res­sources humaines. Tous les grands acteurs mon­diaux sont pré­sents. Le mar­ché du recru­te­ment est très dif­fi­cile et concurrentiel.

REPÈRES
Le niveau de rému­né­ra­tion des « talents » en Chine est par­fois supé­rieur à celui qui se pra­tique en Europe. Il n’est pas rare que les aug­men­ta­tions annuelles de salaire soient de l’ordre de 10 % à 20 %. Un can­di­dat chan­ge­ra de socié­té pour 30 % à 40 % d’augmentation sala­riale. De nom­breuses socié­tés font le choix d’attirer les meilleurs pour prendre posi­tion. Il faut pou­voir pro­po­ser des salaires éle­vés pour atti­rer et gar­der les talents, essen­tiels sur le long terme, conju­guant sta­bi­li­té des équipes et réserve de compétences.

L’émergence des sociétés locales

Les ten­sions sur le mar­ché de l’emploi chi­nois se trouvent accrues en rai­son de l’émergence de socié­tés locales, à capi­taux chi­nois ou étran­gers, qui se déve­loppent non seule­ment en Chine mais aus­si en Asie et au niveau mondial.

Les cham­pions locaux offrent des pers­pec­tives de car­rière par­ti­cu­liè­re­ment inté­res­santes à des Chi­nois forts d’une expé­rience pro­fes­sion­nelle réus­sie dans des multinationales.

Le sys­tème de rému­né­ra­tion peut être par­ti­cu­liè­re­ment attrac­tif, avec notam­ment des stock-options et des aug­men­ta­tions de salaire impor­tantes. Les prises de déci­sion y sont éga­le­ment rapides.

Un choix éclairé

L’importance des réseaux
Les réseaux sont extrê­me­ment impor­tants dans les milieux d’affaires. Ce sont avant tout des réseaux pro­fes­sion­nels alliant sou­vent les dif­fé­rents acteurs de la chaîne de valeur. Ils ne sont pas néces­sai­re­ment liés à des réseaux d’anciens élèves ou à des cor­po­ra­tions. Avoir iden­ti­fié et recru­té les per­sonnes adé­quates à tous les niveaux d’une socié­té per­met d’avoir les cartes en main pour connec­ter l’entreprise aux acteurs qui comptent dans son environnement.

La plé­thore d’options qui s’offre aux « talents » chi­nois per­met aux très bons can­di­dats de rece­voir plu­sieurs offres. Ils conduisent une due dili­gence (véri­fi­ca­tion rai­son­nable des risques) sur leur futur employeur, ce qui leur per­met de faire un choix éclai­ré : réa­li­té de la pré­sence en Chine, pers­pec­tives de déve­lop­pe­ment des mar­chés, des sec­teurs ou des pro­duits face à la concur­rence locale et inter­na­tio­nale, pers­pec­tives de car­rière en Chine et à l’international, capa­ci­té de l’équipe « Chine » à réus­sir, rému­né­ra­tion et ses composantes.

En Chine, les bons can­di­dats « recrutent » leurs futurs employeurs.

Une logique d’anticipation

Les entre­prises doivent pos­sé­der une logique d’anticipation des besoins et des mar­chés. Éva­luer les volumes de crois­sance expo­nen­tielle sur des périodes de cinq à dix ans est indis­pen­sable. Trop de socié­tés ne prennent en compte que les inves­tis­se­ments maté­riels et peu consi­dèrent l’investissement humain.

Les bons can­di­dats « recrutent » leurs futurs employeurs

Désor­mais, l’objectif de tout diri­geant est de s’entourer d’une équipe à la fois plu­ri­dis­ci­pli­naire et mul­ti­cul­tu­relle, avec une connais­sance pré­cise des enjeux et des mar­chés au niveau mon­dial, capable de l’accompagner dans le déve­lop­pe­ment de la société.

Sans ossa­ture de res­sources humaines solide, tout déve­lop­pe­ment pérenne est impos­sible. Il existe bien une guerre des talents : celle qui per­met de gagner la guerre économique.

Une mobilité géographique et sectorielle

La mobi­li­té internationale
De nom­breuses socié­tés pro­posent une mobi­li­té inter­na­tio­nale, offrant de courts séjours de for­ma­tion ou d’échange au siège. Les « hauts poten­tiels » per­mettent aux socié­tés qui ont su les conser­ver d’avoir un réel impact dans leur déve­lop­pe­ment, deve­nant de véri­tables traits d’union entre la filiale locale et le siège.

Le déve­lop­pe­ment éco­no­mique de régions entières accen­tue les ten­sions sur le mar­ché de l’emploi. Les besoins sont énormes, et bien sou­vent les socié­tés éprouvent des dif­fi­cul­tés à recru­ter, car les talents des villes de pre­mier rang ne sou­haitent pas for­cé­ment accep­ter un trans­fert dans une ville moins développée.

Cer­taines mul­ti­na­tio­nales ont mis en place des pra­tiques inno­vantes, de rému­né­ra­tion ou autres, pour favo­ri­ser et accé­lé­rer la mobi­li­té géo­gra­phique et sec­to­rielle. À côté des talents chi­nois, il faut éga­le­ment déve­lop­per un réser­voir de talents étran­gers qui maî­trisent la pra­tique des affaires en Chine.

Une rémunération élevée

Le niveau de rému­né­ra­tion des talents en Chine est par­fois supé­rieur à celui qui se pra­tique en Europe. Il arrive de plus en plus sou­vent qu’un mana­ger ayant une res­pon­sa­bi­li­té « Asie- Paci­fique » ou « Chine » ait un salaire équi­valent, voire plus éle­vé que son supé­rieur hié­rar­chique situé au siège.

Un rap­pro­che­ment des sièges sociaux
Quelques socié­tés étran­gères com­mencent à rap­pro­cher de manière stra­té­gique leur centre de gra­vi­té de leur plus gros mar­ché ou de leur mar­ché en deve­nir, le siège d’origine se trans­for­mant alors en filiale.

Par exemple, un direc­teur des ventes en Chine qui doit être per­for­mant dans un envi­ron­ne­ment com­plexe, opaque, hyper­con­cur­ren­tiel et en langue chi­noise, sau­ra cer­tai­ne­ment faire le tra­vail d’un direc­teur des ventes monde, alors que l’inverse n’est pas for­cé­ment vrai.

Qui plus est, le pre­mier pour­ra appor­ter sa connais­sance de la Chine à des sièges qui en sont sou­vent dépour­vus. Son pro­fil plus attrac­tif jus­ti­fie un niveau de salaire équi­valent, sinon supérieur.

Des profils multiculturels

La notion de « talent » est évo­lu­tive dans le temps. Les pro­fils mul­ti­cul­tu­rels inté­grant une bonne for­ma­tion ini­tiale et dotés d’une aisance à com­mu­ni­quer avec des cultures dif­fé­rentes sont et seront les pro­fils gagnants. Il est aujourd’hui essen­tiel de pou­voir com­mu­ni­quer en chi­nois man­da­rin, car cette langue est en Asie une langue d’affaires.

Des managers internationaux

Être « numé­ro un mon­dial » impli­que­ra d’être « numé­ro un en Chine »

Les entre­prises étran­gères doivent accé­lé­rer leur pro­ces­sus d’internationalisation des mana­gers à tous les niveaux de res­pon­sa­bi­li­tés. Cela implique de pla­cer dans les conseils d’administration des col­la­bo­ra­teurs chi­nois seniors dis­po­sant d’une pro­fonde connais­sance de la région Asie-Paci­fique. Des col­la­bo­ra­teurs ayant un par­cours pro­fes­sion­nel excep­tion­nel en Chine peuvent accé­der à des postes à res­pon­sa­bi­li­té glo­bale, soit au siège, soit en Chine. Il est éga­le­ment essen­tiel de com­prendre l’activité des concur­rents sur le mar­ché chinois.

Les socié­tés fran­çaises devront pour­suivre et accé­lé­rer le recru­te­ment et la for­ma­tion de jeunes pro­fils mul­ti­cul­tu­rels et les envoyer en rota­tion à l’international, comme le font déjà cer­taines socié­tés étran­gères pour les hauts poten­tiels chinois.

Le ren­for­ce­ment de l’apprentissage des langues et de la culture des mar­chés émer­gents est de fac­to nécessaire.

Pour réus­sir, la « pra­tique » de la Chine n’est plus un nice to have (agréable à pos­sé­der), mais bien un must have (néces­si­té).

Cabi­net de recru­te­ment en approche directe, Bo Le Asso­ciates est pré­sent en Chine et Asie depuis seize ans. Il compte 25 bureaux et 550 col­la­bo­ra­teurs, dont 430 en Chine. En 2012, le cabi­net a per­mis le recru­te­ment pour ses clients en Chine de plus de 1 300 mana­gers repré­sen­tant près de 100 000 can­di­dats contactés.

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