Le rôle des femmes africaines dans le développement du continent
Voici l’entretien croisé de deux femmes africaines : Aminata Ndiaye Niang (X98), directrice générale adjointe du groupe Sonatel, directrice de zone chez Orange Middle East & Africa, présidente du groupe X Afrique au féminin ; et Tahirou Barry Traoré, directrice financière d’Africa Global Logistics (AGL). Leurs parcours remarquables illustrent le rôle des femmes africaines dans le développement du leadership économique du continent. Pour une société toujours plus inclusive, en Afrique comme ailleurs, tout commence avec l’éducation et se concrétise avec des politiques publiques.
Merci Mesdames de bien vouloir vous présenter et expliquer brièvement votre rôle dans l’économie africaine, y compris au Sénégal et en Guinée.
Aminata Ndiaye Niang : Je suis actuellement directrice générale adjointe du groupe Sonatel et également directrice de zone au sein d’Orange Middle East & Africa. L’une des premières entreprises sénégalaises et des plus grosses capitalisations boursières de la BRVM (Bourse régionale des valeurs mobilières d’Abidjan), Sonatel opère au Sénégal, au Mali, en Guinée Conakry, en Guinée-Bissau, en Sierra Leone et au Bénin en gestion déléguée. Quand on parle du secteur télécom en Afrique, on parle d’un secteur dynamique qui est vecteur de développement, et même d’accélération de la croissance. Les analyses montrent que croissance de la pénétration Internet et augmentation du PIB sont corrélées. Travailler dans ce secteur est un engagement pour l’inclusion numérique du plus grand nombre, qui permet de communiquer, d’entreprendre, de gérer son argent autrement, tout cela de façon simplifiée et accélérée.
Tahirou Barry Traoré : Je suis guinéenne, mère de trois enfants et directrice financière des ports et terminaux (gestion portuaire et solutions maritimes) chez AGL (Africa Global Logistics). AGL est le premier opérateur de logistique intégré du continent, présent dans 49 pays et riche de 23 000 collaborateurs. Nous sommes présents dans quatre cœurs de métier : la gestion portuaire, les solutions maritimes, la logistique et le transport ferroviaire. En Guinée, nous sommes l’opérateur du terminal à conteneurs de Conakry. Dans un continent en profonde mutation, la logistique est un pilier de la transformation du continent. Chez AGL notre ambition est d’être moteur de cette transformation à travers quatre axes stratégiques : la croissance démographique, l’amélioration du niveau de vie des populations, le développement du commerce intra-africain, la transition énergétique et la numérisation.
Comment les réseaux sociaux ont-ils influencé l’émancipation économique des femmes en Afrique ?
ANN : L’économie informelle est une donnée usuelle en Afrique. Beaucoup d’entrepreneurs s’activent au quotidien dans des domaines aussi diversifiés que l’artisanat, le petit commerce, le transport, la restauration, etc., sans avoir nécessairement toute la structuration connue dans d’autres géographies. Clin d’œil : en Afrique, 26 % des femmes sont des entrepreneures. Pour comprendre l’origine de cet élan, il faut en revenir à la sociologie de la société africaine.
“Les femmes ont toujours eu un rôle prépondérant au sein des familles, des villages, des quartiers, des communautés.”
Les femmes ont toujours eu un rôle prépondérant au sein des familles, des villages, des quartiers, des communautés. Elles ont toujours été très actives, le pas vers l’entrepreneuriat permettant de générer des ressources au profit de leur famille est ainsi vite franchi. Les réseaux sociaux ont amené un vent de fraîcheur, un souffle à ces entrepreneures au féminin et leur servent de plus en plus souvent de vitrine pour leurs activités : c’est du e‑commerce autrement. Dans la capitale dakaroise, les livraisons s’organisent avec des réseaux de livreurs à deux-roues qui prospèrent à la faveur de cette nouvelle tendance. Là encore, il s’agit d’une transposition au numérique de regroupements communautaires bien ancrés, les fameux mbotaay qui s’animent beaucoup désormais via Facebook ou WhatsApp.
Mbotaay
Le concept de mbotaay trouve ses racines dans les cultures africaines, où il est souvent associé aux valeurs de communauté, de solidarité et de soutien mutuel. Bien que le terme puisse avoir des significations spécifiques dans différents contextes culturels africains, il évoque généralement l’idée d’un lien fort qui unit les membres d’une communauté, reflétant des notions de fraternité et, par extension, de sororité.
TBT : Les réseaux sociaux représentent aujourd’hui un vecteur de communication et une plateforme d’échange majeure en Afrique. Pour les femmes, il s’agit d’un formidable outil de vulgarisation et développement de leur entreprise au travers : de l’amélioration de la visibilité (accès à une clientèle plus large que celle à laquelle elles peuvent accéder par le biais d’une présence physique ou d’un canal de publicité classique, à un moindre coût voire gratuitement) ; du renforcement de capacité, partage de connaissance et plateforme d’échange avec des pairs ; de la monétisation de leur activité ; de la conciliation vie privée-vie professionnelle avec la possibilité d’exercer leur activité de n’importe quel endroit et à n’importe quel moment. Il existe de très belles success stories africaines dans le domaine de la création, ayant pris naissance sur les réseaux sociaux et connaissant une notoriété internationale (Tongoro Studio, Nanawax, pour n’en citer que quelques-unes).
Pourriez-vous partager vos perspectives sur les défis et opportunités pour les femmes dans les postes de haute direction en Afrique ?
ANN : À titre personnel, j’ai la chance de travailler dans une organisation où la parité est ancrée de longue date. La parité de notre comité de direction est bien installée et les femmes y occupent toute fonction, y compris des fonctions de directrice des réseaux ou de directrice du système d’information. Plus largement, au Sénégal, femmes et postes de haute direction vont de pair. Chef d’entreprise, directrice générale d’entreprise à taille importante, ministre et même Premier ministre à deux reprises, députée, secrétaire générale de syndicat, et récemment femme générale dans l’armée pour la première fois en 2023, elles illustrent les chances concrétisées pour de nombreuses femmes… avec les nombreux défis qui accompagnent ces prises de responsabilité.
La loi sur la parité fait d’ailleurs que l’Assemblée nationale est paritaire au Sénégal depuis 2010. La société sénégalaise n’attend pas moins de ces femmes dans les autres pans de leur vie : épouses, femmes d’intérieur, maîtresses de maison, éducatrices, animatrices des liens au sein des familles (au sens large en Afrique). Un vrai (multi) défi en somme !
“L’Assemblée nationale est paritaire au Sénégal depuis 2010.”
Le leadership féminin en pointe ne doit pas cacher des disparités et des défis d’inclusion encore réels. Sur la mobilité internationale notamment, j’ai souvent été confrontée au dilemme de femmes cadres dirigeantes face à des développements de carrière impliquant une relocalisation. Souvent le tiraillement est grand : il n’est donc pas rare que les femmes soient obligées de faire des arbitrages au détriment de leurs carrières et ainsi de refuser une mobilité internationale intéressante pour sécuriser la stabilité de leur foyer. La scolarisation des filles dans les milieux défavorisés reste également une vraie question, créant un écart des chances féminines suivant l’origine. En effet, si aujourd’hui le pourcentage de filles ayant accès à l’enseignement primaire dépasse les 90 % au Sénégal, il ne faut pas oublier qu’elles sont à peine 28 % à achever leur cycle secondaire.
TBT : Il n’existe pas de spécificité africaine. Les femmes africaines occupant des postes de responsabilité sont confrontées aux mêmes défis que celles du reste du monde. Ces défis sont multiples. Il s’agit entre autres de la reconnaissance et de l’acceptation, de la gestion de la charge mentale et, dans certains environnements, du poids des traditions et croyances. Le premier et principal défi est l’acceptation et la reconnaissance par les différentes parties prenantes de l’entreprise. Il faut arriver à se faire entendre dans un monde et des cercles généralement composés exclusivement d’hommes.
“Les femmes africaines occupant des postes de responsabilité sont confrontées aux mêmes défis que celles du reste du monde.”
En termes de chances, le champ des possibles reste très vaste en Afrique. Les femmes sont très peu présentes dans les instances de décision clés du monde des affaires (direction générale, conseil d’administration, organisations professionnelles). De nombreuses places sont à prendre dès lors qu’il existe une volonté politique et des mesures concrètes pour accompagner les femmes dans ce mouvement. Le contexte africain, marqué par un fort lien social et un système de soutien familial et d’entraide, permet aux femmes de mener de front carrière professionnelle et vie familiale (qui constitue un des premiers freins à la carrière des femmes).
D’après votre expérience, comment l’inclusion des femmes de divers horizons a‑t-elle façonné le paysage corporatif en Afrique ?
ANN : L’inclusion des femmes façonne un paysage panaché. La diversité des perspectives issues de femmes aide les entreprises à mieux être à l’écoute des besoins de leurs marchés et à s’adapter pour un business plus orienté client et plus durable, à avoir une meilleure compréhension des besoins des employés comme des clients. Sur le plan du management, sans tomber dans le cliché et avec les nuances à prendre en compte, les femmes apportent souvent un leadership plus inclusif, fédérateur, qui sait allier performance et dimension humaine, ce qui est créateur de valeur pour les organisations.
TBT : Les femmes apportent une singularité et une approche managériale différente dans les entreprises, avec un impact direct sur leur performance. Les entreprises qui comptent davantage de femmes dans leurs comités de direction ont de meilleures performances financières et organisationnelles. Les réseaux et corporations de femmes jouent un rôle moteur dans la diversification des instances dirigeantes des entreprises. Elles portent un plaidoyer, poussent les politiques et les dirigeants sur les sujets de parité. Ce mouvement de réseau féminin ne pouvait que trouver un écho favorable dans un continent empreint d’une longue tradition de sororité. J’aime à dire que nous sommes passées du Séré (association de femmes dans la culture mandingue) aux groupes de lobbying. Partout nous poussons pour avoir notre place « à la table de décision ».
Quelles stratégies recommanderiez-vous aux entreprises pour inclure efficacement davantage de femmes dans les rôles décisionnels ?
ANN : Du pragmatisme et encore du pragmatisme. Valoriser les parcours réussis de femmes dans l’entreprise : cela crée souvent une petite graine, une envie, un élan chez les femmes plus jeunes. Créer des passerelles entre elles et leurs aînées permet de croiser les vues, d’inspirer, de conseiller et de nourrir ainsi le parcours de futures leaders. Identifier les jeunes talents au féminin et les accompagner dans leur développement personnel. Les affecter à des projets à enjeux est également un levier utile pour révéler leur potentiel et les aider à grandir en les mettant en situation. Enfin, avoir des mesures concrètes qui accompagnent les femmes face à leurs responsabilités plurielles. Cela s’est traduit chez Sonatel par la mise en place d’une plateforme dite « du 8 mars » qui a fait avancer les choses notamment sur des horaires plus flexibles.
TBT : Il n’existe pas de recette miracle, mais seulement quelques principes fondateurs qui ont fait leur preuve en matière d’inclusion des femmes dans le monde de l’entreprise.
L’engagement des instances dirigeantes : le premier jalon d’une stratégie d’inclusion réussie est la mise en place d’une politique générale de diversité. Cette politique doit se traduire par des objectifs clairement définis (SMART) et diffusés. Les instances dirigeantes (conseil d’administration, dirigeants, comité de direction) doivent incarner cette politique en promouvant en leur sein la diversité (via par exemple des quotas). Il n’y a rien de pire qu’une instance de gouvernance composée exclusivement d’hommes vantant le mérite de la diversité.
La mise en avant de rôle modèle et de parcours de réussite de femmes. Le développement des talents féminins dans toutes les strates de l’entreprise (politique de formation, filières d’excellence, création d’un vivier, définition de plans de succession). Le développement de réseaux de femmes au sein de l’entreprise.
Pourriez-vous raconter un moment déterminant de votre parcours qui illustre le potentiel des femmes africaines en leadership ?
ANN : En 2015, on m’a confié la responsabilité de relancer une activité qui était en berne cinq années après son lancement sur le marché. Au-delà de la vision business à avoir afin d’identifier les leviers pour opérer un second lancement, ça a été un véritable défi pour la leader que j’étais. Rallumer la lumière au sein d’une équipe en proie au doute, écouter puis me forger une vision de l’avenir rêvé pour cette activité, choisir ensemble les bons leviers pour monter pas à pas les marches, adopter une culture de challenger au sein d’une organisation habituée au rang de leader, bref instiller un état d’esprit de remontada, tout un programme. Après neuf mois d’activité, en décembre 2015, la joie de voir atteint l’objectif majeur qu’on s’était fixé pour cette première année de relance. Six jours après, accueillir ma petite fille au terme d’une grossesse menée dans une année particulièrement intense.
TBT : La manutention portuaire reste un domaine très masculin. En janvier 2018, je suis devenue la première femme directrice générale d’un terminal à conteneurs au sein du groupe AGL. J’avais toutes les compétences requises, mais il a fallu la volonté du directeur général des ports et terminaux de l’époque et actuel président d’AGL pour faire sauter le plafond de verre. Depuis lors l’expérience s’est vulgarisée sur des postes aussi bien de direction générale que de direction opérationnelle ou technique. Comme évoqué précédemment, un des défis pour toute femme dirigeante en Afrique est la reconnaissance et l’acceptation par les parties prenantes. Nous nous souvenons toutes de cet instant où le basculement se fait et où vous ressentez et assumez pleinement votre légitimé. Pour moi cela est passé par la gestion d’une grève de dockers.
“Vous n’êtes plus perçue comme une femme mais comme un patron lambda.”
À l’époque, en ma qualité de vice-présidente de l’association guinéenne des entreprises de manutention portuaire, j’avais la charge de la gestion du bureau de main‑d’œuvre dockers. Je vous épargne la scène et le tableau des négociations : un syndicat docker remonté et persuadé qu’avec une femme en face toutes leurs demandes seraient acceptées ; des pairs directeurs généraux de société curieux de voir comment « la petite nouvelle » s’en sortirait. Les journées furent longues, les nuits courtes, les moments de doute fréquents, mais nous sommes parvenus à un accord dans l’intérêt de toutes les parties. Ce jour, j’ai gagné le respect de mes pairs et, plus important, la reconnaissance des hommes de quai comme on les appelle chez nous. Une fois cette étape franchie, vous êtes en quelque sorte adoubée et acceptée. Vous n’êtes plus perçue comme une femme mais comme un patron lambda.
Qui sont les femmes leaders africaines qui vous ont inspirée et que pouvons-nous apprendre de leurs histoires ?
ANN : Comme indiqué plus haut, en Afrique le leadership féminin n’est pas hors du commun, bien au contraire ! Plutôt que d’une figure en particulier, je parlerai d’une mosaïque de personnages inspirants. Des figures du quotidien, des figures du cœur, en particulier ma maman si solaire, si stimulante, rendant « tout possible » ; ma grand-mère si investie dans son Mbacké natal ; des figures de la littérature africaine telles que Mariama Bâ qui a donné son nom à une école d’excellence réservée aux filles, résilientes, traversant les époques, les mutations sociales, des figures de la littérature anglaise et du monde, émouvantes face aux épreuves de la vie.
TBT : Compliqué de répondre à cette question, tant il existe des femmes exceptionnelles et des parcours inspirants sur le continent. J’en citerai deux.
Hadja Aïcha Bah Diallo, Guinéenne, ancienne ministre de l’Éducation nationale de Guinée, ancienne directrice adjointe de l’Unesco, militante des droits des femmes. Elle a été responsable de la mise en œuvre de réformes majeures pour l’amélioration de l’éducation des jeunes filles en Guinée et en Afrique. Elle a réussi en cinq ans à doubler le nombre de jeunes filles inscrites à l’école en Guinée. Militante des droits de l’homme, elle reste à ce jour à 82 ans très active.
Chimamanda Ngozi Adichie est une écrivaine nigériane, mondialement reconnue, récipiendaire d’une dizaine de prix de littérature et militante féministe. Elle a su s’imposer sur la scène littéraire internationale et utiliser sa notoriété aux services de la lutte contre le sexisme et le racisme.
Quel a été le rôle crucial de l’éducation dans votre parcours professionnel et quel rôle joue-t-elle dans la culture des dirigeantes en Afrique ?
ANN : Impact de l’éducation : l’éducation est une porte, un ticket d’entrée. Avoir un parcours d’excellence à l’école, gagner confiance, développer son goût d’apprendre, être au contact de disciplines diverses, repérer ses envies, ses centres d’intérêt. Cela forge. Le rude parcours de sélection qui m’a permis, jeune bachelière du Sénégal, d’intégrer des classes préparatoires puis l’X m’a préparée aux nombreux défis professionnels que j’ai par la suite eu à relever.
“L’éducation est le passeport pour la liberté.”
TBT : L’éducation est le passeport pour la liberté. J’ai été élevée par un père ingénieur pour qui la réussite scolaire était non négociable et selon deux principes cardinaux (qu’il me répétait sans cesse) : « Ton travail est ton premier mari » et « En tant que femme et Noire tu dois en faire deux fois plus ». Un parcours universitaire vous façonne, vous ouvre des perspectives et vous permet de créer votre premier réseau. Pour une dirigeante et dans un continent en mutation, au-delà du parcours académique initial, il est indispensable de continuer à se former aussi bien sur des compétences techniques que sur des compétences managériales.
Quelles sont les compétences que les femmes doivent développer pour réussir dans le paysage économique actuel en Afrique ?
ANN : Une première compétence vient tout naturellement du caractère particulièrement multicasquette d’une responsabilité de femme. Être organisée, savoir gérer son temps de façon efficace avec un esprit créateur de solutions est un vrai atout pour avancer sur le sol africain. Vu la place du numérique et les possibilités qu’il ouvre, être à l’aise avec les nouvelles technologies et plus largement des compétences particulièrement recherchées facilite l’insertion réussie ou la création d’entreprise réussie (programmation, data science, cybersécurité, etc.).
TBT : Des trois grandes catégories de compétences, celles relevant du savoir-être (soft skills) sont essentielles pour réussir. Dans un continent en profonde mutation, la compréhension de l’environnement est fondamentale.
Quelles mesures de politique sociale considérez-vous essentielles pour favoriser le leadership féminin en Afrique ?
ANN : Il faudra faire appel à tous les points discutés précédemment : tout d’abord une éducation inclusive et accessible, le soutien aux femmes entrepreneures, l’engagement pour l’équité au travail ainsi que la flexibilité pour un équilibre pro-perso, des programmes de mentorat et coaching, mais aussi et surtout une politique publique volontariste pour faire avancer les choses de façon pragmatique.
TBT : La première mesure concerne l’éducation de la jeune fille. Les États doivent mettre en place des politiques volontaristes et ambitieuses pour la scolarisation des jeunes filles. Sur les dix pays présentant les taux de scolarisation les plus faibles, neuf sont situés en Afrique subsaharienne. Si nous souhaitons atteindre une masse critique de femmes à des postes de haute responsabilité, il est indispensable de scolariser les filles. La seconde mesure est celle relative à la législation et au cadre réglementaire sur la diversité et l’inclusion. Sans obligations et contraintes légales, les progrès en matière d’égalité des sexes et d’accès des femmes à des postes de responsabilité resteront timides et au bon vouloir des décideurs économiques. Les États africains en sont conscients. De nombreux pays ont fait adopter des lois sur l’égalité des sexes. Il reste à les appliquer…
Quels changements aimeriez-vous voir au cours de la prochaine décennie pour soutenir le leadership économique des femmes en Afrique ?
ANN : S’il fallait choisir une bataille, je choisirais celle de l’éducation pour son pouvoir de transformation ! Je regarde avec beaucoup d’émotion les belles expériences humaines au sein de nos Orange Digital Center, en particulier le programme « les hackeuses » destiné à réinsérer des jeunes filles en échec scolaire au Sénégal. Leur réussite fait chaud au cœur. Plus largement, le parcours de vie des milliers de bénéficiaires de nos programmes numériques dédiés à l’employabilité des jeunes (dont 40 % de filles) est souvent impacté de façon décisive par l’accès gratuit à ces formations. Cela donne envie de les passer à une plus grande échelle, joignant efforts privés et efforts publics, pour y donner accès à des millions de jeunes Africains !
TBT : La mise en œuvre concrète des politiques. Le cadre réglementaire certes contraint mais, sans mesures d’application concrètes et sanctions, le changement ne se fera pas.
Enfin, quel message majeur aimeriez-vous transmettre à la communauté internationale et à celle des polytechnicien(ne)s, en ce qui concerne le rôle des femmes dans le leadership économique de l’Afrique ?
ANN : Un pas pour la femme, c’est un pas pour l’Homme tout simplement. En Afrique, sans doute encore plus qu’ailleurs !
TBT : Poussez-les, accompagnez-les, faites-leur une place à votre « table » ! Elles seront un facteur clé de succès et un atout majeur pour l’amélioration des performances de vos entreprises et organisations.