Le secret du succès réside dans l’équipe
Vous êtes Président de Leonardo & Co France.
Dites-nous en davantage sur votre parcours professionnel.
J’ai eu un parcours assez atypique pour un banquier d’affaires. A 18 ans, mon Bac en poche, j’ai commencé ma carrière à la BNP. J’y ai passé une vingtaine d’années, exerçant différents métiers en banque de réseau puis à la Banexi, qui était la banque d’affaires du groupe.
En parallèle, j’ai obtenu le diplôme du CESB et de Sciences-Po. J’ai ensuite rejoint le cabinet Arthur Andersen en tant qu’Associé M&A, avant d’intégrer la banque d’affaires Aforge Finance comme responsable des fusions-acquisitions.
Vous êtes spécialiste des fusions-acquisitions.
En quoi consiste cette activité ?
La mission d’une banque d’affaires est de conseiller des actionnaires lors d’un changement dans la géographie du capital d’une entreprise. Concrètement, nous intervenons auprès des actionnaires, c’est-à-dire les propriétaires actuels ou futurs de tout ou partie du capital d’une entreprise, pour les aider dans les opérations liées à ce capital.
Il peut s’agir d’une cession, d’une acquisition ou d’une fusion. Ces opérations ont un impact sur la structure des entreprises et créent des situations nouvelles, que nous les aidons à définir et à mettre en place.
Ces actionnaires-propriétaires peuvent être des sociétés, des fonds d’investissement, ou encore des personnes privées. Nous, spécialistes des fusions-acquisitions (mergers and acquisitions ou M&A), les aidons dans leurs projets et jouons aussi le rôle de passeurs d’idées dans la redistribution des cartes.
Quelles sont les démarches à adopter pour réaliser des transactions ?
Dans le métier du M&A, nous procédons selon deux approches. Soit nous sommes directement consultés par un actionnaire pour l’aider à identifier des entreprises cibles, ou à l’inverse des acquéreurs potentiels. Soit, nous identifions nous-mêmes des situations avec une problématique actionnariale.
Dans tous les cas, cette identification se fait grâce à notre connaissance fine de la situation (soit du secteur, soit d’un contexte actionnarial particulier). Nous analysons régulièrement un certain nombre d’entreprises et à chaque opération nous augmentons notre « intelligence ».
Ensuite, il nous faut conjuguer notre réseau relationnel, en France comme à l’étranger, et notre art de la négociation.
Ce métier exige donc bien davantage que la compétence financière ?
Si notre rôle de banquier conseil consiste à préparer une analyse de l’entreprise-cible, à suivre le bon déroulement de la transaction, et notamment le montage financier grâce à notre technique et notre savoir-faire, il ne faut pas oublier que la finance est un secteur où il faut être créatif.
En effet, nous disposons de multiples instruments que nous pouvons combiner pour répondre aux intérêts des actionnaires, aussi divergents soient-ils.
Notre savoir-faire consiste à mettre en oeuvre les techniques susceptibles de satisfaire les parties en présence pour parvenir au meilleur accord possible sans jamais oublier, pour répondre précisément à votre question, que la finance doit être au service de nos clients, c’est-à-dire des actionnaires et donc de l’entreprise ; la finance pour la finance n’ayant pas de sens dans notre métier.
Pouvez-vous nous en dire plus sur les opérations dans lesquelles vous avez joué un rôle ?
En moyenne, chez Leonardo & Co, nous conseillons près de 25 opérations par an et essentiellement pour les vendeurs. Nos compétences touchent plusieurs typologies de clientèles, notamment les fonds d’investissement, les grandes et moyennes entreprises ou les familles.
Nous avons par exemple participé aux opérations suivantes : Interflora, Maisons du Monde et Foncia. Récemment, nous avons conseillé Safran ou TDF et mené la vente du portefeuille immobilier parisien de Risanamento pour plus d’un milliard d’euros.
Nous avons également accompagné SMCP (Sandro Maje Claudie Pierlot) dans le cadre de la cession à KKR et conseillé le groupe suédois Modern Times Group pour le rachat du groupe de médias Trace TV, ainsi que la société Alain Mikli International lors du rachat par le groupe italien Luxottica Group.
Quels sont les motifs qui poussent les entreprises à avoir recours à ce type de transactions ?
Les fusions-acquisitions sont des opérations qui suscitent souvent des inquiétudes au sein du grand public. Or, même si les risques existent, elles sont motivées par des enjeux stratégiques importants, qui visent le plus souvent à créer de la valeur pour les actionnaires et donc des sociétés plus fortes face à leur environnement.
En effet, la vie d’une entreprise est rythmée par de multiples rebondissements. Parfois, le recours aux fusions-acquisitions est dicté par la nécessité de se refinancer ou de se restructurer. Les entreprises ont aussi besoin d’accélérer leur croissance, de s’étendre à l’international, d’élargir leur portefeuille d’activités ou leur gamme de produits.
Elles peuvent également choisir de recentrer leurs activités en cédant leurs actifs non stratégiques par exemple. L’objectif est de devenir plus rentable et plus compétitif sur un marché concurrentiel.
Quels sont les risques encourus dans ces transactions ?
Les opérations de M&A réussies doivent permettre aux actionnaires de mener à bien leurs ambitions dans les meilleures conditions. Or, ces transactions, si elles sont mal anticipées, peuvent aussi mettre en péril l’entreprise elle-même et ne pas aboutir à la rentabilité escomptée.
L’opération peut achopper en raison de plusieurs facteurs : humain, technique, technologique, juridique, fiscal… Les différentes sociétés impliquées dans l’opération peuvent ne pas se mettre d’accord sur les orientations stratégiques à donner à la nouvelle entreprise. Ce désaccord peut, en outre, survenir entre les actionnaires eux-mêmes.
Le facteur humain est, également, à prendre en considération. Pour les employés, une opération de M&A est souvent synonyme de « clean your desk » et les synergies attendues peuvent ne pas être au rendez-vous. Ce qui peut avoir un impact sur les décisions du management.
En 2014, on a souvent parlé d’un retour en force des fusions-acquisitions.
Qu’en pensez-vous ?
La presse a beaucoup parlé de ce rebond des fusions-acquisitions mais la réalité du marché est toute autre. Il faut savoir que les médias traitent surtout les grandes opérations. Des opérations phares derrière lesquelles on se réfugie pour évoquer un certain regain d’activité mais qui ne correspondent pas à la réalité du marché, car elles ne représentent que 10 % des opérations.
“ Le marché des Fusions-Acquisitions reste dynamique et le restera dans le futur.”
Le marché des fusions-acquisitions reste dynamique et le restera dans le futur. D’une part car il y a des liquidités à investir et surtout, d’autre part, à cause des enjeux de la mondialisation, ainsi que de notre monde en mouvement perpétuel et de plus en plus rapide, ce qui engendre par construction des opérations de M&A.
Je suis convaincu qu’il va continuer à bénéficier des mutations technologiques ou des arbitrages géographiques. Notre métier a de beaux jours devant lui.
Quelle est la recette pour réussir dans ce métier ?
Pour se distinguer sur le marché des fusions-acquisitions, il faut avoir deux atouts. Le premier est, sans nul doute, l’équipe. Constituer une dream team dont chaque membre a ses spécificités et une réelle ouverture d’esprit, une rigueur implacable et une dimension créative.
C’est la condition sine qua non pour faire émerger des idées constructives et pour écrire de belles histoires d’entreprises.
Une fois qu’on a l’équipe, il faut avoir la motivation et beaucoup de persévérance. Notre métier exige des efforts considérables et une implication sans faille.
Nous sommes amenés à beaucoup travailler mais ce n’est pas sans déplaisir ; il n’y a que dans le dictionnaire que le succès précède le travail !