Le Soleil bleu couvert de neige
Un poète sort de l’ombre et c’est un camarade. Paul Blondel a fait imprimer, pour notre bonheur, un volume important, près de 250 poèmes écrits depuis l’X jusqu’à nos jours, tous excellents.
Mais, comment définir cet ensemble, comment décrire les sous-ensembles dont il est composé ? Blondel lui-même nous dit qu’il n’a pu y réussir de façon rigoureuse.
En parcourant (quitte à y revenir) le Soleil bleu couvert de neige, on trouve d’abord ses premiers poèmes, sous le titre “ balbutiements ” et plus loin des inclassables intitulés “ fatrasies ” et ces deux titres montrent la modestie de leur auteur, jamais satisfait sans doute de ce qu’il a écrit comme le scientifique qui, cherchant des certitudes, croit longtemps n’avoir trouvé qu’une hypothèse expliquant un plus grand nombre de phénomènes que celle communément admise.
Ne négligeons pas les poèmes de circonstances écrits pour ses camarades (il en avait beaucoup) de l’X et du CPA et pour sa parentèle (nombreuse) lors des anniversaires. C’est un genre difficile, comme sont toujours difficiles des sujets imposés. Mais dans ce genre, il excelle, nous montrant son humour et sa sensibilité (qui a dit que la Poésie était malade du coeur ?). La Poésie est là, sa Poésie, comme elle est aussi dans certains poèmes en prose, qui chantent l’amour à la manière du Cantique des Cantiques.
Elle est là puisque sa muse n’est pas imaginée comme il nous le fait accroire, elle l’habite, elle est en lui.
Elle l’habite encore et surtout dans deux petites gestes, dont les titres disent l’importance et qu’il nous a gardées pour la fin de notre lecture.
Elles s’appellent “ le Jardin des Muses ” et “ Quête du Seigneur ”, toutes deux au sommet de l’inspiration poétique de l’auteur, la seconde accompagnant les psaumes comme deux voix chantant à l’unisson, on pense alors à Patrice de la Tour du Pin.
Mais il reste la forme. Le maître du langage qu’il fut dans sa scolarité est devenu un maître du langage poétique, ce langage que nul ne peut utiliser s’il n’a pas maîtrisé au préalable le langage du prosateur.
Blondel est tellement à l’aise dans la forme poétique classique qu’il la pratique sans effort et poète d’abord, ami des muses, ses poèmes, il les vêt en passant d’un “ habit de lumière ”. Cet habit de lumière est adapté à chaque poème. Ses vers sont des alexandrins, mais aussi des octosyllabes, parfois des rythmes plus rares. Peu de sonnets comme si quatorze vers ne suffisaient pas à exprimer le trop plein de ses sentiments par un art qui est l’arme d’une âme généreuse.