Le temps des hélices
Après cinq années passées dans l’armée de l’Air comme pilote de chasse et trente années comme pilote de ligne et pilote inspecteur, à Air France et à l’Organisme de contrôle en vol de la Direction générale de l’aviation civile, l’auteur, ingénieur ENSEM, a été, depuis 1992, responsable de la sécurité des vols auprès du GIE A.T.R (devenu depuis 1996 la société A.I.R). Cette société est chargée de la commercialisation et du support des populaires avions de transport régional : les ATR42 et ATR72.
Les réflexions qu’il nous livre sur la place des avions à turbopropulseurs dans le transport aérien, bien qu’alimentées par des considérations propres à l’ATR, sont de portée plus générale et applicables à tous les produits similaires.
PHOTO AEROSPATIALE
Les habitués des voyages aériens que sont les responsables de notre industrie (et, par voie de conséquence, la plupart des ingénieurs) n’ont pas manqué de constater, avec sans doute un peu d’étonnement, qu’au cours de leurs déplacements, ils étaient souvent transportés à bord d’appareils à hélices, cette technologie pourtant promise autrefois à une disparition rapide par la révolution du » jet « .
La raison de cette évolution tient au fait que ces appareils équipés de turbopropulseurs de nouvelle génération n’ont rien à envier aux appareils à réaction aussi bien en ce qui concerne leur structure, leurs systèmes et leur équipement électronique, qu’ils sont certifiés selon les mêmes normes et répondent aux mêmes exigences de sécurité et qu’ils présentent en même temps des avantages considérables en termes de coût d’exploitation, de simplicité de mise en œuvre et de respect de l’environnement.
Il n’est pas inutile de rappeler brièvement l’historique de la structure des réseaux du transport aérien et de l’évolution des appareils. L’ère industrielle du transport aérien a débuté avec le » boom » économique de l’après-guerre, essentiellement basé sur les réseaux moyens et longs-courriers, les lignes régionales étant quasi inexistantes. Les avions étaient équipés de moteurs à pistons et d’hélices souvent dérivés d’appareils militaires développés pendant ou avant la guerre.
Vers le milieu des années 50 apparurent les premiers jets commerciaux. Ceux-ci apportaient au passager une diminution de près de la moitié du temps de vol sur les étapes longues ainsi qu’un confort certain lié à la réduction du bruit et des vibrations.
Aux compagnies, ces avions permettaient, par leur vitesse, une productivité bien meilleure. La sécurité était améliorée essentiellement par le gain énorme de fiabilité des réacteurs par rapport aux moteurs à pistons (ce qui diminuait en conséquence les coûts de maintenance) et le caractère moins dangereux du kérosène utilisé comparé à l’essence.
Au total, et malgré une consommation importante d’un carburant (bon marché à l’époque), le jet s’est vite révélé imbattable économiquement pour les capacités supérieures à 80 places et les étapes moyennes et longues caractérisant l’essentiel du réseau d’alors.
Les turbopropulseurs sont apparus à la même époque et bénéficiaient de certains avantages des jets, notamment la fiabilité du moteur et la sécurité du carburant utilisé (on oublie souvent qu’il y a beaucoup plus de similitude entre un réacteur et un turbopropulseur qu’entre ce dernier et un moteur à pistons). Au bénéfice du turbopropulseur, une consommation bien plus faible et des performances de décollage améliorées.
Son principal défaut, une vitesse inférieure, se révéla décisif et tous les turbopropulseurs concurrents directs des jets eurent une existence commerciale marginale (Electra, Vanguard…). Les seuls turbopropulseurs qui survécurent avaient une capacité inférieure à 50 sièges, et étaient bien adaptés au marché des liaisons courtes à faible trafic, souvent dans des pays manquant d’infrastructure ou à la géographie difficile, liaisons typiquement assurées jusque-là par des Douglas DC3.
L’exemple type de ces turbopropulseurs est le Fokker 27, conçu à la fin des années 50 et qui, en plus de vingt ans de commercialisation, profitant de l’émergence du transport régional, s’est vendu dans ses différentes versions à plus de 750 exemplaires. Son concurrent direct, l’AVRO 748 britannique, a suivi une carrière parallèle et un succès commercial très honorable avec plus de 350 appareils vendus durant la même période. Dans la catégorie des petits avions de moins de 20 places, certains, comme le Twin Otter canadien, furent des succès mondiaux.
On constate donc que le marché des turbopropulseurs commerciaux n’a jamais disparu mais que la faiblesse relative de ce marché (moins de 1 200 machines de 40 à 50 sièges en presque vingt-cinq ans, c’est peu comparé aux milliers de jets de tous types vendus pendant la même période) a dissuadé les constructeurs de lancer de nouveaux programmes dans cette gamme d’appareils jusqu’à la fin des années 70. Les quelques tentatives (Nord 262 français, Shorts 330 et 360 britanniques, Dash 7 canadien) sont restées des semi-échecs commerciaux.
Durant la même période, on assistait du côté des jets à une prolifération de nouveaux modèles, les vénérables Comet, 707 et Caravelle étant rapidement surpassés par des appareils plus gros, plus économes et plus modernes, la technologie avançant à pas de géant dans tous les domaines : aérodynamique, moteurs, structures et systèmes. Cette évolution était dictée par un marché en croissance soutenue, dont l’ossature restait un réseau de grandes lignes moyen ou long-courrier, le transport régional proprement dit (distances de moins de 500 km et faible trafic) restant marginal.
C’est ainsi que, s’il existe un monde d’évolutions technologiques entre un Airbus A340 et un Boeing 707 de la première génération, les différences entre un Fokker 27 livré au début des années 60 et vingt ans après sont beaucoup plus restreintes.
Les modernisations existent mais sont essentiellement « cosmétiques » améliorant le bruit et l’aspect de l’aménagement intérieur par exemple. Mais le moteur, l’hélice, la structure et les systèmes restent fondamentalement identiques.
Les années 70 vont connaître deux véritables séismes ébranlant l’ensemble du transport aérien mondial.
Le premier fut le choc pétrolier, conduisant en quelques années au quadruplement du prix du pétrole et aggravant en conséquence le poids du carburant dans le coût d’exploitation total des avions.
Le second fut aux États-Unis la politique de déréglementation commencée en 1978 et dont les derniers soubresauts, quinze ans après, se font encore sentir, sans parler de l’effet d’entraînement de cette politique dans les autres pays, notamment au sein de la CEE.
Ces deux chocs vont, aux États-Unis qui sont comme chacun sait le plus gros marché du transport aérien, bouleverser la structure de cette industrie et conduire au développement accéléré du transport régional.
Avant la déréglementation, l’attribution d’une ligne à une grande compagnie était décidée par un organisme fédéral, le CAB (Civil Aeronautic Board) et assortie d’un certain nombre de contraintes sur les tarifs limitant ainsi la concurrence, et bien souvent de l’obligation pour la compagnie d’assurer une ligne secondaire non rentable.
La plupart du temps, les compagnies remplissaient cette obligation avec les avions disponibles dans leur flotte, essentiellement des petits jets tels que les 737 ou les DC9, mal adaptés parce que trop gros et trop gourmands en carburant pour de telles lignes. Avec un prix du kérosène propulsé à plus d’un dollar par gallon, cette situation devenait intenable. La déréglementation abolissait toutes ces contraintes au profit de la loi du marché et de la concurrence libre entre les compagnies.
La première réaction des grandes compagnies fut d’abandonner les lignes secondaires non rentables pour se battre sur les liaisons principales, libérant ainsi un marché important aux compagnies « commuters », typiquement équipées de turbopropulseurs bien adaptés à ce type de lignes.
La seconde réaction de l’ensemble des transporteurs aériens fut ensuite d’entamer une véritable guerre des tarifs qui eut deux conséquences majeures :
- la disparition par faillite ou par rachat d’un grand nombre de compagnies parmi les plus faibles,
- une croissance soutenue du trafic par la baisse des prix, croissance bénéficiant aux grandes compagnies (6 % par an de croissance du trafic domestique ces dernières années) mais plus encore aux compagnies régionales avec plus de 12 % de croissance moyenne depuis la déréglementation, et une part de marché qui atteint maintenant 10 % du trafic total.
C’est ainsi que l’on vit fleurir pas moins de 7 projets d’avions » commuters » au début des années 80, dans la gamme des 30 à 70 sièges, tous ces projets voyant effectivement le jour avec une production en série.
Bien des experts prédisaient à l’époque la disparition de certains de ces projets, du fait de l’excès de concurrence généré par cette avalanche de modèles. Or aujourd’hui ces avions sont tous commercialisés avec des réussites variables mais quelquefois spectaculaires, deux d’entre eux (l’ATR 42 franco-italien et le DH8 canadien) ayant même donné naissance à des versions agrandies pour répondre à la demande du marché, versions qui ont été mises en service dès 1989.
Dans le même temps, deux motoristes majeurs (General Electric aux États-Unis et Pratt & Whitney au Canada) développaient des turbopropulseurs de nouvelle technologie capables de propulser ces nouveaux avions.
C’est ainsi que, depuis 1978, les compagnies régionales américaines ont vu leur trafic multiplié par plus de 3 en ce qui concerne le nombre de passagers transportés et par 4 en nombre de passagers par kilomètre.
Bien entendu une telle évolution, assez facilement prévisible par les planificateurs économiques, avait été anticipée par les constructeurs aéronautiques auxquels elle ouvrait un marché prometteur dans le domaine des appareils régionaux, sans parler du marché de remplacement des turbopropulseurs d’ancienne technologie vieillissants.
Les raisons de la supériorité de la formule turbopropulseur pour le transport régional n’ont pas changé depuis les années 50, et sont d’ordre économique et technique.
Ayant comblé son retard technologique sur le jet et offrant aujourd’hui une large gamme d’appareils modernes, le turbopropulseur est assuré aujourd’hui de constituer, surtout dans les pays les moins bien équipés, la base de développement du transport aérien régional jusqu’à la fin du siècle et au-delà.
La technique des turbopropulseurs
Ces moteurs sont apparus à la même époque que les réacteurs, ce qui n’est pas étonnant lorsque sont mises en évidence les similitudes de ces deux types de machine.
Contrairement aux moteurs à pistons, ce sont des machines purement rotatives (sans mouvement alternatif) ce qui présente de très nombreux avantages dans les domaines de la fiabilité, de l’usure et des vibrations. De plus, l’absence de mouvement alternatif permet des vitesses de rotations beaucoup plus élevées et corrélativement une puissance spécifique (ou rapport puissance sur poids) bien meilleure, ce qui est la clé de l’efficacité en aéronautique.
Enfin, de taille très inférieure au moteur à pistons pour une puissance donnée et nécessitant beaucoup moins d’air de refroidissement, le turbopropulseur peut être logé dans une nacelle de dimensions réduites améliorant la traînée aérodynamique et le rendement de l’hélice.
Dans le cas d’un turbopropulseur, la quasi-totalité de l’énergie produite par un » générateur de gaz » est récupérée par des étages supplémentaires de turbine qui entraînent, par l’intermédiaire d’un réducteur, une hélice.
La grande efficacité énergétique du turbopropulseur découle de ce principe.
La poussée utile du réacteur provient de l’accélération à grande vitesse d’une petite quantité d’air. Celle du turbopropulseur provient de la petite accélération imprimée par l’hélice à une grande quantité d’air. Les principes de la physique enseignent que ce dernier mode de propulsion est très nettement plus économique en énergie que le précédent.
En revanche, l’hélice elle-même est limitée vers les hautes vitesses par des problèmes spécifiques que ne connaissent pas les réacteurs.
Les progrès très importants obtenus depuis plus de vingt ans de développement des réacteurs (matériaux, aérodynamique interne, mécanique, électronique…) furent intégrés par les motoristes dans la nouvelle génération des turbopropulseurs. La comparaison d’un des ces moteurs, le PW 120 de Pratt & Whitney Canada (qui équipe notamment l’ATR 42 franco-italien et le DH8 canadien) avec le vénérable Dart monté sur les Fokker 27 et AVRO 748 et dont les premiers modèles remontent à 1945, est éloquente. Pour une même gamme de puissance, le nouveau moteur est plus léger de plus de 30 % et consomme 12 % de moins à puissance donnée. Sa régulation est plus évoluée et lui permet notamment de conduire l’avion au sol à des régimes réduits beaucoup plus silencieux.
Depuis les premiers réacteurs, les motoristes ont bien entendu essayé d’en améliorer la consommation en s’inspirant du principe du turbopropulseur. C’est ainsi qu’ils inventèrent le » turbofan » ou réacteur à double flux, dans lequel des turbines supplémentaires récupèrent une partie de l’énergie des gaz pour entraîner un » fan « , qui est en fait une hélice carénée.
L’amélioration obtenue fut considérable mais malgré ces progrès, à même niveau de technologie, le turbopropulseur reste la méthode de propulsion la plus économique en carburant pour un avion.
L’hélice a également profité des avancées technologiques.
L’aluminium massif des pales a été remplacé en grande partie ou totalement par des matériaux composites. Ceci, combiné à des profils aérodynamiquement plus performants, permettant des pales moins larges, a réduit considérablement le poids de ces dernières. En conséquence, les charges centrifuges sur le moyeu ont été diminuées et celui-ci a pu être allégé.
Au total, la nouvelle hélice, toutes choses égales par ailleurs, est plus légère que l’ancienne d’environ 40 %, induit donc moins de vibrations et est plus facile à équilibrer. Optimisée pour des vitesses de rotation plus lentes, elle génère également moins de bruit aussi bien à l’extérieur que dans la cabine.
L’aérodynamique est bien évidemment un autre domaine fondamental de la technique aéronautique.
Les avancées dans ce domaine, pourtant bien réelles, sont moins perceptibles pour le passager. Il faut dire que les progrès majeurs des deux dernières décennies touchent surtout au domaine transsonique fréquenté par les jets.
Malgré une allure plus moderne, les nouveaux turbopropulseurs utilisent essentiellement des profils similaires à leurs prédécesseurs. Les techniques de calcul numérique ont permis de mieux cerner les efforts aérodynamiques et, en dimensionnant l’avion plus précisément, d’alléger la structure.
Les choix techniques pour la structure des avions turbopropulseurs modernes reflètent la volonté d’offrir une grande longévité opérationnelle et des coûts d’entretien faibles, avec une utilisation très étendue des matériaux composites, leur application entraînant un gain de charge marchande et une économie de carburant, la disparition des phénomènes de corrosion et une très bonne résistance en fatigue.
On peut enfin ajouter qu’en termes de « dessin enveloppe », il n’y a pas de règle absolue. Les solutions choisies par les différents constructeurs font appel à des techniques souvent dissemblables comme par exemple :
- la voilure haute ou basse,
- les trains d’atterrissage principaux sous fuselage ou sous nacelles moteurs,
- la section du fuselage bilobe, cylindrique ou autre,
- la distance entre moteurs et fuselage, etc. Chacune de ces techniques a bien évidemment ses avantages et ses inconvénients et a ses propres effets sur des paramètres tels que confort, performance ou maintenance.
Une large part des aspects techniques des turbopropulseurs de nouvelle génération doit être consacrée aux principaux systèmes dont ils sont dotés. Les constructeurs ont pour tâche d’intégrer, dans une cellule définie sur la base des concepts généraux structuraux ci-dessus évoqués, un ensemble de systèmes nécessaires à une utilisation efficace et sûre de l’avion tant au point de vue pilotage et maintenance que confort des passagers. Les avions de nouvelle technologie doivent atteindre des objectifs, souvent ambitieux, de robustesse, de fiabilité et de confort. Bien sûr, ces objectifs doivent tenir compte aussi de considérations économiques liées à une exploitation rationnelle de l’avion.
Sur les turbopropulseurs de nouvelle technologie tout a été fait pour assurer non seulement un grand confort aux passagers mais aussi pour réduire les charges de travail des pilotes qui sont appelés d’ailleurs sur ce genre d’appareils à réaliser une série souvent importante de vols de courte durée. Ainsi sur certains turbopropulseurs, le cockpit a été défini suivant les mêmes règles de clarté, d’accessibilité et de simplicité que sur des gros porteurs. Un exemple, la technique du bouton poussoir et le principe du tout éteint : l’utilisation de l’interrupteur d’antan et de son voyant associé est remplacée par un simple bouton poussoir qui a trois fonctions (alarme, commande de l’équipement associé et indication d’état de celui-ci). On peut réduire la description de son fonctionnement à » tout est éteint donc tout va bien « . D’où simplicité d’emploi et compréhension claire.
Si la rusticité est souvent de mise sur les commuters modernes, au moins un groupe de systèmes ne répond pas à cette règle, c’est l’avionique. Les expériences acquises dans ce domaine font qu’il est aujourd’hui absolument nécessaire, afin de bénéficier d’un niveau supérieur de fiabilité mais aussi de qualité d’information, d’utiliser les dernières technologies. On peut citer entre autres les tubes cathodiques ou « EFIS » qui remplacent systématiquement les anciens instruments électromagnétiques du passé et qui sont de véritables écrans de « télévision » sur lesquels apparaissent toutes les informations de base, plus d’autres qui jusqu’à maintenant ne figuraient pas.
Les turbopropulseurs comme les jets doivent voler en toutes conditions. Pour couvrir les cas extrêmes comme les vols en conditions givrantes, ces appareils sont équipés d’un système de dégivrage pneumatique protégeant les parties les plus exposées de l’avion à savoir les bords d’attaque de la voilure et de l’empennage. Ainsi la glace qui se forme sur ces bords d’attaque est périodiquement brisée par le gonflage de matelas dégivreurs en caoutchouc. Un autre système de protection est l’anti-givrage électrique, utilisé entre autres pour les hélices et les pare-brise.
Enfin, les systèmes de vol automatiques permettent aujourd’hui d’assurer un confort total aux passagers même en condition de vol en turbulences. De plus, sur les turbopropulseurs de nouvelle génération des atterrissages à minima réduit peuvent être réalisés. Ceci permet entre autres d’assurer des vols avec une grande régularité.
Certains constructeurs vont jusqu’à ajouter un système automatique de détection qui informe les pilotes de formation de glace. Il s’agit là d’un système de reconnaissance des conditions givrantes qui assiste le pilote dans son travail. Un tel système représente un facteur supplémentaire de sécurité, en permettant à l’équipage d’appliquer sans délais les procédures adaptées.
Enfin, le dernier point de cette présentation de quelques systèmes est celui des sources auxiliaires d’énergie. Sur certains types d’appareil, il est installé (souvent en option) un « APU »(Auxiliary power unit). Il s’agit en fait d’un véritable petit moteur, la plupart du temps utilisable uniquement au sol. L’inconvénient majeur d’un tel système est l’augmentation de masse que cela entraîne. Par contre, sur certains appareils, en option et parfois même en série, on trouve aujourd’hui un frein d’hélice monté sur un moteur et qui permet d’avoir tous les avantages de « l’APU » à un coût minimal et pour quelques kilogrammes seulement.
Robustesse, simplicité, fiabilité, accessibilité, voici les principaux critères de définition des systèmes d’un turbopropulseur de nouvelle technologie.
Le confort des turbopropulseurs
Que ce soit celui d’une voiture ou celui d’un avion, le passager de nos jours est très sensible à la notion de confort et est devenu de plus en plus exigeant en la matière.
L’ancien concept selon lequel le niveau de confort doit être, en règle générale, proportionnel à la durée du parcours est désormais révolu. Les moyennes et petites étapes sont de nos jours considérées comme une suite logique des longs parcours et les usagers des moyens de transport apprécieraient mal d’être acheminés d’un point à un autre dans des conditions de confort successives trop différentes les unes des autres.
Le confort n’est évidemment pas le seul paramètre d’appréciation de la qualité d’un service ou d’un produit, mais cette question a pris une importance telle qu’il est indispensable d’essayer d’en comprendre les raisons et donc d’analyser ses propres composantes.
Il est intéressant de mentionner que la notion de confort est suffisamment vaste pour y distinguer des aspects directs et indirects. La satisfaction d’un passager, en effet, n’est pas seulement faite de perceptions ou sensations directes recueillies pendant la durée de son trajet mais aussi faite d’impressions plus générales qu’il aura pu ressentir depuis son embarquement à l’aéroport de départ jusqu’à son arrivée à l’aéroport de destination.
Avant de développer plus longuement les différents aspects du confort direct pendant le temps de vol, examinons comment les passagers peuvent éprouver une sensation de confort avant, pendant et en fin de vol.
D’abord la notion de temps minimum passé en escale. L’exploitation des turbopropulseurs a réduit sensiblement la durée des escales. Leur taille permet en effet de faire le transbordement complet des passagers et des bagages, le nettoyage cabine et toilettes, le chargement galley et le remplissage éventuel de carburant dans des temps plus courts par comparaison à ceux des jets ; pour le passager, globalement, cela se traduit par une sensation d’efficacité assimilable à une notion de confort.
Ensuite la notion de vitesse. Les turbopropulseurs de nouvelle génération sont dotés de groupe propulseurs permettant d’atteindre des vitesses de croisière suffisamment élevées, approchant les 600 km/h. Sur des étapes de moyenne ou courte distance le passager aura donc une impression favorable à cet égard sans éprouver de transition marquée vis-à-vis des jets.
Enfin les risques de ne pas pouvoir atteindre un aéroport de destination, et les déroutements en découlant, du fait de conditions météorologiques défavorables sont maintenant du même ordre que pour les jets.
À l’image de ceux-ci, les turbopropulseurs modernes sont dotés d’équipements de navigation et d’aide au pilotage performants au delà des besoins réglementaires stricts tels que les systèmes d’approche permettant l’atterrissage par très faible visibilité. Le passager appréciera sans nul doute la flexibilité et la fiabilité opérationnelle ainsi assurées par les turbopropulseurs de nouvelle génération.
Parmi les éléments les plus significatifs, ayant trait à la perception directe du confort pendant le temps de vol proprement dit, ceux qui apparaissent comme importants à souligner sont ceux qui précisément ont creusé l’écart entre les avions d’ancienne et de nouvelle technologie, les commuters de nouvelle génération se situant à la pointe de ces évolutions.
Confort et espace
Le développement rapide des réseaux aussi bien que le niveau de compétition de plus en plus élevé ont conduit les compagnies les plus importantes, à développer les activités et la qualité du transport régional, de manière à assurer la pénétration de l’ensemble du marché tout en répondant à la demande de la clientèle. La réponse à cette nécessité est fournie par la mise à disposition de turbopropulseurs de nouvelle génération.
Aujourd’hui les nouveaux avions à turbopropulseurs constituent le meilleur lien avec les jets pour le transport régional, leur niveau de confort est comparable en tous points et parfois même supérieur à celui des jets.
L’espace intérieur disponible en cabine est généreux et agréable au regard. Dans cet espace, les turbopropulseurs modernes offrent :
- des sièges permettant un repos complet des passagers pour les étapes les plus longues. Des sièges de nouvelle technologie et fort bien dessinés équipent maintenant les commuters modernes. Ils assurent au passager le meilleur confort possible pendant toute la durée du vol ;
- une section cabine à larges dimensions. Ceci permet d’installer des volumes de stockage de bagages à main importants tout au long de la cabine, avec un couloir central de largeur comparable à celui des jets pour des déplacements aisés des passagers et du personnel de bord. Les commuters de nouvelle technologie offrent dans leur majorité des surfaces régulières planes, tant au niveau du sol qu’à celui du plafond améliorant ainsi l’aspect et évitant certaines discontinuités de volumes des boîtes à bagages ;
- une implantation galley personnalisée permettant la préparation et le service de boissons et repas chauds ou froids.
On a vu plus haut que le temps minimum passé en escale était un élément de confort perçu par le passager. Le concept » une porte une fonction » suivant lequel sont définis la plupart des commuters modernes permet de réaliser cet objectif par chargement simultané des soutes à bagages et des galleys.
Confort et bien-être
En termes de température et de pressurisation, les turbopropulseurs modernes offrent aux passagers les meilleures conditions de bien-être pendant le vol et au sol.
Ceux-ci disposent à cet effet d’une ambiance cabine régulée en température et pression relative tout à fait comparable à celle des jets. Ils peuvent utiliser également des aérateurs individuels pour adaptation à leur convenance.
Enfin, afin de permettre une totale autonomie en escale, certains turbopropulseurs de nouvelle génération sont pourvus d’un système frein d’hélice permettant en toute sécurité d’utiliser l’un des moteurs tournant au sol pour produire de l’air conditionné en cabine. C’est le cas par exemple des ATR 42 et 72 et du CN 235. Ce dispositif tout en offrant aux passagers un confort comparable à celui d’un « APU » constitue un avantage économique certain pour la compagnie utilisatrice.
Confort et silence
Le bruit extérieur et intérieur des commuters modernes est aujourd’hui devenu une donnée fondamentale d’un point de vue technique et commercial.
La notion de bruit extérieur est essentiellement liée à des exigences réglementaires dont le niveau de sévérité s’est accru au cours des deux dernières décennies. Globalement, on peut dire que l’ensemble des turbopropulseurs modernes répondent, dans le cadre de leur certification, à l’ensemble des critères de limitation de bruit au décollage, à l’atterrissage et latéralement, ceci avec plus ou moins de marge suivant le type d’appareil.
Bien que le bruit extérieur n’ait apparemment peu ou pas de relation avec le confort du passager situé en cabine, il n’est pas sans importance car, tel avion peu bruyant pourra être autorisé à opérer sur certains aéroports tandis que tel autre, moins silencieux, ne pourra pas bénéficier d’une telle autorisation. Ceci tient au fait que certaines autorités locales ou groupes d’influence dans les environnements aéroportuaires ont mis en application des limites allant au- delà des normes généralement applicables. Ceci est particulièrement le cas en Amérique du Nord. On peut aussi ajouter que ces limites du bruit sont souvent plus contraignantes pour les opérations de nuit.
Dans ce domaine aussi la définition des commuters modernes a été grandement influencée par la mauvaise image laissée par les avions d’ancienne technologie, aussi tout un éventail de techniques spécifiques a été mis en œuvre dans le but de réduire dans les plus larges proportions possibles le bruit interne et les vibrations perçus par les passagers.
On devine par là même l’intérêt opérationnel et commercial associé au meilleur compromis possible bruit/performance. La compagnie utilisatrice améliorera ses résultats et le passager trouvera un attrait supplémentaire dû à la flexibilité opérationnelle que tel type de commuter représentera à ses yeux.
Les niveaux de bruit et de vibrations à l’intérieur de la cabine intéressent directement le confort des passagers. Ceci est d’autant plus vrai que les turbopropulseurs sont fréquemment utilisés dans le prolongement de lignes desservies par des jets, et que les passagers admettraient difficilement de voyager dans une cabine plus bruyante que celle qu’ils viennent de quitter.
Parmi ces techniques :
- l’utilisation de l’informatique pour l’analyse des modes vibratoires,
- la synchronisation de la rotation des hélices,
- l’emploi de supports souples pour la fixation d’équipements et aménagements divers en cabine,
- la vérification précise de l’équilibrage des hélices installées,
- le filtrage des vibrations induites par les moteurs,
- l’utilisation d’absorbeurs dynamiques de vibrations sur la structure,
- l’isolation phonique de certains systèmes.
Tous ces efforts ont porté leurs fruits puisqu’il est établi que le niveau moyen de bruit intérieur des turbopropulseurs modernes est inférieur à celui des jets.
Ce qui précède indique clairement la tendance du marché qui de nos jours pousse à rendre identiques les niveaux de confort des avions commuters de petite capacité et des jets de plus grande capacité.
Le turbopropulseur de nouvelle technologie est là pour démontrer que ceci est possible et déjà réalisé.