L’eau et l’énergie, clés du développement durable
Sur notre petite planète Terre, du fait de l’augmentation de la population, de l’urbanisation croissante et des économies en expansion, les besoins augmentent énormément en énergie mais aussi en eau douce, tandis que plusieurs régions du monde connaissent déjà des pénuries significatives.
REPÈRES
L’eau est nécessaire pour produire l’énergie, en particulier l’électricité, directement dans les barrages hydroélectriques, mais aussi dans toutes les centrales thermiques ou nucléaires qui ont besoin d’une bonne source froide pour les condenseurs des turboalternateurs.
Inversement, pour rendre l’eau accessible, c’est-à-dire la pomper, la dessaler éventuellement, la transporter, la distribuer, il faut de plus en plus d’énergie. On estime que 4 % à 5 % de l’électricité en France ou aux États- Unis sont utilisés pour l’eau, et jusqu’à 20 % en Jordanie. Et, pour fournir de l’énergie, il faut de l’eau, beaucoup d’eau même : 600 milliards de mètres cubes par an.
Des enjeux liés
L’eau et l’énergie sont deux secteurs de plus en plus liés et interdépendants dans le développement humain et économique. Il faut beaucoup d’eau pour produire l’électricité dans les barrages ou assurer la source froide des centrales thermiques, et aussi de plus en plus d’énergie pour l’eau, en pompage, traitement, transfert et dessalement.
“ Deux ressources liées pour le meilleur et pour le pire ”
La pénurie d’eau menace la viabilité à long terme des projets énergétiques, avec de graves conséquences pour le développement (thirsty energy).
Le secteur de l’eau, lui, a besoin de plus en plus d’énergie. Ces deux ressources sont intrinsèquement liées « pour le meilleur et pour le pire », prévient l’ONU dans son cinquième rapport mondial sur « La Mise en valeur des ressources en eau », rendu public à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau du 22 mars 2014.
Des besoins croissants en eau
Aujourd’hui, 768 millions d’êtres humains n’ont pas accès à une source d’eau améliorée, c’est-à-dire à un point d’approvisionnement propre qui ne soit pas partagé avec des animaux. 3,5 milliards de personnes sont privées du droit à l’eau et ne bénéficient pas d’une eau sûre, propre, accessible et abordable.
1,3 milliard de personnes ne sont pas raccordées à l’électricité, souvent dans les mêmes régions. La carte des personnes privées d’un accès satisfaisant à l’eau recoupe largement celle des exclus de l’électricité, soulignant ainsi à quel point ces deux ressources sont aujourd’hui plus interdépendantes que jamais.
Or, les ressources énergétiques et les ressources en eau sont soumises à des pressions sans précédent et font l’objet d’une concurrence croissante de la part des populations, des industries, des écosystèmes et des économies en pleine expansion.
“ 1,3 milliard de personnes n’ont pas l’électricité ”
Quand la population mondiale atteindra les 9 milliards d’habitants, la production agricole devra avoir augmenté de 50 %, tandis que les prélèvements d’eau, déjà mis à rude épreuve, devront s’accroître de 15 %. D’ici à 2035, la consommation énergétique mondiale augmentera de 35 %, ce qui déterminera une hausse de 15 % de l’utilisation d’eau, tandis que la consommation d’eau du secteur énergétique augmentera de 85 % selon les projections de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
La demande énergétique va peser de plus en plus lourd sur les ressources en eau, et les pays émergents pourraient bientôt être confrontés à un double stress, hydrique et énergétique. Le changement climatique va aggraver ce défi, par une plus grande variabilité de la disponibilité de la ressource en eau et l’intensification des phénomènes météorologiques tels que les inondations graves et les sécheresses longues.
Éviter des scénarios catastrophe
Le rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau, publié à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau (22 mars de chaque année), pointe « le manque de coopération et de planification entre les deux secteurs » et appelle à « une meilleure gestion afin d’éviter des pénuries à venir d’eau et d’électricité ».
L’interdépendance entre la gestion des ressources en eau et en énergie appelle de la part de tous les acteurs une coopération beaucoup plus étroite, car il est clair qu’il n’y aura de développement durable tant qu’il n’y aura pas de meilleur accès à l’eau et à l’énergie pour tous.
Dessaler l’eau de mer
LE DESSALEMENT EN MÉDITERRANÉE
Dans le bassin méditerranéen, la capacité installée sera multipliée par cinq ou six d’ici à 2030.
La production artificielle d’eau douce par dessalement d’eau de mer ou d’eau saumâtre souterraine a débuté principalement dans des situations d’isolement insulaire (Malte, Baléares, Chypre), littorales (Libye) et désertiques (Algérie). Ces productions industrielles d’eau ont progressé régulièrement en volume et en performance, l’abaissement significatif des coûts rendant le dessalement de plus en plus compétitif.
Deux technologies sont essentiellement mises en œuvre : la distillation et l’osmose inverse (aujourd’hui 70 % des installations), qui ont fait des progrès considérables.
Compte tenu de l’épuisement relatif des ressources traditionnelles, il est nécessaire que les politiques publiques de gestion de l’eau intègrent d’une part un volet de gestion de la demande et d’autre part un volet de développement de nouvelles ressources alternatives non conventionnelles comme la réutilisation des eaux usées et le dessalement.
Le dessalement des eaux de mer ou des eaux saumâtres constitue une des réponses possibles pour s’adapter à la pénurie croissante des ressources en eau.
Face aux pénuries d’eau, ce dessalement est en très forte croissance. Le taux de croissance du secteur a été de 10 % au cours de la dernière décennie. Les volumes d’eau dessalée avoisinent aujourd’hui les 70 millions de mètres cubes chaque jour, produits grâce à 17 000 usines de dessalement dans 120 pays.
Le dessalement requiert de grandes quantités d’énergie, sous forme de chaleur ou d’électricité, coûteuses dans la durée et sources d’émissions de gaz à effet de serre. Mais est-ce une solution de facilité à court terme, coûteuse en énergie, ou une solution durable respectueuse de l’environnement ? Un dessalement par énergies renouvelables est étudié.
Civaux.
Réfrigérants bas avec ventilateurs à Chinon.
Transférer l’eau
L’eau douce est disponible de façon très inégale dans le monde, en géographie comme en calendrier. Dans les régions arides ou semi-arides, le changement climatique annoncé devrait se traduire par davantage d’événements climatiques extrêmes, des crues plus fortes et des périodes de sécheresse plus dures.
“ Des oppositions aux grands projets jugés dispendieux ”
En parallèle, la population mondiale augmente, en urbanisation croissante de plus dans les bandes littorales en bord de mer, zones où les ressources en eau sont limitées et où les nappes aquifères surexploitées voient leur niveau s’abaisser et deviennent de plus en plus saumâtres.
Cette eau douce, dont les villes assoiffées ont de plus en plus besoin, peut être obtenue par transfert à grande distance. Le transfert d’eau est pratiqué depuis l’Antiquité. Il suffit de se rappeler les aqueducs romains, le pont du Gard, les nombreux canaux.
Mais il est coûteux en investissements lourds, en énergie de pompage, et se heurte de plus en plus à des oppositions fortes environnementales et politiques : en Espagne pour le transfert d’eau de l’Èbre, en Libye pour la « Grande Rivière artificielle » (Great man made river).
Il y a un sentiment de dépossession, voire de spoliation, des habitants locaux si on leur prend « leur eau » pour la transporter au profit d’une autre région, et ces grands projets sont jugés dispendieux voire « pharaoniques ».
Transferts d’eau interbassins en grandes quantités et sur longues distances par tuyau flexible sous-marin |
Pourquoi produire de l’eau douce nouvelle quand il suffit de « transporter » l’eau disponible à l’embouchure des fleuves vers les régions côtières en manque ? Pour nourrir les prochains 3 milliards d’habitants supplémentaires de notre planète, pourquoi détruire les forêts tropicales quand il est possible de « transformer les déserts en vergers » ?Les « rivières sous-marines » constituent une solution particulièrement écologique et économique pour résoudre les problèmes d’eau et d’alimentation dans le monde. Les « autoroutes de l’eau » fournissent de l’eau pour favoriser le développement économique et social. |
LE PROJET VIA MARINALe projet Via Marina est un système performant et économique de transfert d’eau grâce à des tuyaux flexibles pouvant mesurer jusqu’à quatre mètres de diamètre, posés au fond de l’océan. L’eau, prélevée à l’embouchure de fleuves ou issue des eaux usées traitées, peut être transportée sur des centaines de kilomètres. Au niveau des estuaires juste avant de se mélanger à l’eau de mer, l’eau douce sera perdue de toute façon, et cela ne lèse personne (acceptabilité politique).La pose de conduites sous-marines assez profondes, sur le plateau continental, est peu gênante en matière d’environnement et ne sera même pas visible en fonctionnement. Ce concept Via Marina est très favorable du point de vue de l’environnement et des émissions de carbone et de gaz à effet de serre (peu d’énergie consommée). Un projet est en cours d’étude au Chili. |