L’entre-soi des élites
Maurice Bernard, qui a été directeur des études à l’École, et a publié il y a quelques années un ouvrage en trois volumes sur les élites françaises, nous offre aujourd’hui un pamphlet de 118 pages sur le sujet. Le titre L’entre-soi des élites et le sous-titre Une oligarchie suicidaire sont sans équivoque, le style brillant et la critique de la France actuelle acerbe et pertinente.
Après une entrée en fanfare sur le choix des mots (l’élite, les élites, le héros, l’anti-héros, le pseudo-héros), l’auteur dénonce les annonces politiques inconsidérées, les décisions mal préparées, puis souligne les dangers de l’entre-soi des élites qui contribue à des formes de corruption.
Il développe ensuite l’exemple des résultats médiocres de l’Éducation nationale et termine en évoquant les dangers qui nous attendent dans un monde où les médias à travers leurs mots et leurs images nous déconnectent du réel.
J’ai retrouvé dans ce petit livre la trace des regrets et des colères que suscite pour ma génération l’observation de la France d’aujourd’hui, mais je me suis demandé si le phénomène de l’entre-soi des élites ne relevait pas d’une évolution plus ample : la sclérose de la société française sous l’influence de groupes organisés tenus en main par des « professionnels permanents » attachant plus d’importance à leur conservation qu’à l’intérêt de la collectivité et même à celui de leurs membres.
Les étrangers qui connaissent bien la France font la distinction entre la vitalité de la base et la lourdeur des strates superposées qui verrouillent notre société et parfois même la ridiculisent.