Les aides à la conduite, facteur de sécurité
REPÈRES
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Un véhicule actuel contient autant d’électronique qu’un Airbus d’il y a dix ou vingt ans, et la part de l’électronique dans le prix de revient d’un véhicule a été augmentée de 50 % en dix ans, passant de 22 % en 2000 à 35 % en 2010. Aujourd’hui, plus d’un tiers du prix de revient d’un véhicule vient des seules fonctionnalités électroniques embarquées. Si on considère le cas particulier des véhicules haut de gamme des constructeurs spécialistes allemands, les diverses options technologiques d’aide à la conduite (donc hors équipements de confort et de style) proposées peuvent faire grimper la facture de 15% sur un véhicule dont le prix de base tutoie déjà les cent mille euros.
Reportez-vous vingt-cinq ans en arrière. Vous avez pris soin d’étudier votre itinéraire sur votre carte. Vous avez prévu de voyager de nuit pour éviter la forte chaleur de la journée. Vous vérifiez que tous les occupants ont bien attaché leur ceinture. Vous sortez de votre place de parking en faisant attention à votre carrosserie. Vous surveillez les limitations de vitesse et n’oubliez pas de passer en feux de croisement quand vous croisez un autre véhicule, vous réglez sans cesse vos essuie-glaces, démarrez en côte, etc., jusqu’à la fin du parcours et le repos bien mérité.
L’automobile a connu la même évolution que l’informatique, à l’aspect extérieur près
Vingt-cinq ans plus tard, que reste-t-il de ces tourments ? La climatisation est agréable. Vous enclenchez la fonction de parking automatique et regardez votre volant tourner tout seul pendant que vous agissez sur les pédales. Le système de navigation vous amène à destination. Vous enclenchez le régulateur de vitesse. L’avertisseur de franchissement de ligne vous maintient dans le droit chemin. Les phares passent d’eux-mêmes dans la position appropriée pour éviter d’éblouir. S’il pleut l’essuyage automatique gère la vitesse des essuie-glaces. En arrivant vous vous demandez si vous avez vraiment servi à quelque chose.
Une évolution exponentielle
1) Vitesse du véhicule réglée à 70.
2) Le radar constate que le véhicule précédent roule moins vite, il réduit la vitesse pour garder une distance de sécurité. 3) Le régulateur s’ajuste sur la vitesse du véhicule qui précède. |
En vingt-cinq ans la technologie a permis de réaliser des progrès considérables dans l’automobile. Si on compare avec l’informatique, il y a vingt-cinq ans sortait le premier IBM PC, à comparer avec les solutions informatiques existant aujourd’hui. L’automobile a connu la même révolution, la seule différence se situant dans une évolution moindre de l’aspect extérieur (après tout une voiture c’est toujours un habitacle dans une caisse posée sur quatre roues, le tout avec un moteur).
De façon usuelle, la plupart des innovations, qu’il s’agisse d’aides à la conduite ou d’autres équipements, apparaissent sur des véhicules haut de gamme du fait du coût de la technologie à son lancement. Puis, du fait de l’effet volume, ces innovations s’étendent à des véhicules de gamme inférieure jusqu’à, pour certaines, se généraliser, éventuellement sous contrainte réglementaire ou sous la pression des organismes de consumérisme (type Euro NCAP).
Si on prend comme référence le cas du système de contrôle de trajectoire ESP, il équipe aujourd’hui plus de 60% des véhicules vendus en Europe et le coût de l’option est d’environ 300 à 600 euros suivant les constructeurs. À partir de fin 2014, tous les véhicules vendus en Europe devront réglementairement être équipés de l’ESP.
Le GPS et ses applications
Le GPS s’est intégré et démocratisé
Le GPS (Global Positioning System) est un système opérationnel depuis le milieu des années 1990 permettant un positionnement du récepteur avec une précision d’une quinzaine de mètres. Ce système utilise pour fonctionner un réseau de satellites lancés par l’armée des États-Unis.
Introduit dans l’univers automobile, sa première application est de fournir une fonction de navigation et guidage à l’utilisateur. C’est au travers de cette application que le système s’est démocratisé, en particulier par le biais des systèmes nomades (type » Tom Tom ») qui ont permis une baisse sensible du prix d’achat des systèmes intégrés proposés par les constructeurs d’automobiles. Ainsi trouve-t-on aujourd’hui des GPS intégrés vendus en option entre 400 et 800 euros, là où leurs prédécesseurs, bien que dotés de fonctionnalités identiques, étaient vendus entre 2 000 et 3 000 euros il y a cinq à dix ans.
Ultérieurement la fonction de guidage simple s’est enrichie de fonctionnalités de type « info-trafic » permettant la prise en compte des embouteillages dans le calcul de l’itinéraire optimal. Le déploiement de cette fonctionnalité n’est pas généralisé et dépend des zones géographiques, le Japon se situant par exemple à la pointe dans ce domaine (une nécessité compte tenu de la densité de population des mégalopoles japonaises).
Les applications du GPS peuvent être multiples, puisque de très nombreuses fonctions d’un véhicule peuvent avantageusement être améliorées si on connaît la position de celui-ci sur une carte.
Topographie et limitations
Outre la fonction de guidage aujourd’hui bien connue du grand public le positionnement GPS du véhicule peut également permettre d’optimiser le fonctionnement d’autres systèmes du véhicule. Il est par exemple possible (ce dispositif est proposé aujourd’hui sur certains véhicules haut de gamme) d’adapter les lois de passage d’une boîte de vitesses automatisée en tenant compte de la topographie de la route empruntée (relief, approche d’un virage, etc.). Inutile, par exemple, de passer le rapport supérieur à l’approche d’un virage susceptible de nécessiter un ralentissement du véhicule.
Une autre application possible est, pour les véhicules équipés d’un éclairage directionnel (des phares dont l’orientation du faisceau peut varier en s’écartant de l’axe véhicule pour éclairer la route à l’intérieur d’un virage), de dévier préventivement le faisceau lumineux avant même que le conducteur ne tourne le volant. Citons enfin la possibilité de connaître les limitations de vitesse en vigueur pour ajuster la consigne d’un régulateur ou limiteur de vitesse.
La régulation de vitesse
Le premier système de régulation de vitesse est apparu en 1958 aux États-Unis. Il était basé sur un système contrôlant mécaniquement la position de l’accélérateur. Ultérieurement est apparu le régulateur de vitesse électronique, utilisant le logiciel de contrôle moteur pour gérer l’alimentation en air du moteur afin de maintenir la vitesse de consigne. Autrefois réservé aux véhicules haut de gamme, ce système s’est démocratisé et est aujourd’hui disponible en série ou en option sur la quasi-totalité des véhicules vendus en Europe.
Les systèmes de sécurité active
L’ABS est aujourd’hui obligatoire en Europe
De nombreux systèmes ont pour rôle d’améliorer la sécurité active du véhicule, c’est-à-dire qu’ils interviennent en vue d’éviter un accident. Parmi ceux-ci on peut notamment citer l’antiblocage des roues (ABS). Visant à éviter le blocage des roues lors d’une phase de freinage, l’ABS permet par conséquent de maintenir le pouvoir directionnel du véhicule pour réaliser une manœuvre d’évitement, par exemple.
Marque déposée par l’équipementier allemand Bosch en 1978, lors du lancement du système, il a été commercialisé tout d’abord sur des véhicules haut de gamme allemands, afin de descendre progressivement en gamme. Il est aujourd’hui et depuis 2004 obligatoire pour tous les véhicules commercialisés en Europe.
L’alerte de changement de file
Autre système de sécurité active en fort développement aujourd’hui, l’alerte de changement de file a pour vocation d’alerter le conducteur en cas de changement de file non signalé par la mise en action du clignotant, afin de prévenir les cas de somnolence. Lors du franchissement d’une ligne en l’absence de clignotant des vibrations sont émises dans le siège ou le volant du côté où se trouve la ligne franchie inopinément. Il est possible d’y associer une alerte sonore. En cas d’absence de correction il est même possible d’appliquer un couple dans le volant à l’aide de la direction assistée pour remettre le véhicule dans sa file.
Des coûts encore élevés
La voiture sous pilotage automatique n’est plus une utopie
Ce panorama non exhaustif nous donne un aperçu des progrès réalisés depuis quelques années dans le domaine des aides à la conduite, domaine qui a connu une évolution exponentielle grâce au développement et à la miniaturisation de nombreux équipements électriques et électroniques.
Du fait des coûts, aussi bien en termes de développement qu’en termes de prix de revient, la majorité des systèmes apparaît en tant qu’option sur des véhicules haut de gamme, la descente en gamme étant fonction de l’engouement des acheteurs, des possibilités d’optimisation économique du dispositif et parfois de la pression des autorités de régulation.
C’est pour cette raison que l’application de l’ensemble des systèmes n’est pas mondiale, les clients de certaines zones géographiques recherchant avant tout des véhicules économiques à l’achat.
Cependant les attentes de consommateurs allant croissant, il est permis de penser que ce mouvement va perdurer et que la voiture sous pilotage automatique n’est plus une utopie…
Fiabilité et responsabilisation du conducteur
Les principaux freins à cette tendance de fond sont essentiellement liés à trois éléments : la nécessaire fiabilité de ces systèmes ; la (dé)responsabilisation du conducteur ; le coût.
En effet de nombreux acteurs, et pas uniquement du monde de l’automobile, sont capables techniquement parlant de réaliser des prototypes d’une voiture sans conducteur. En revanche par définition le secteur des aides à la conduite touche à la sûreté de fonctionnement du véhicule.
En cas de défaillance d’un système d’aide à la conduite, dans le pire des cas le « conducteur » (si on peut le définir ainsi étant donné qu’il n’a plus d’action à faire) peut voir sa vie mise en danger, avec un impact désastreux pour le constructeur, en termes d’image certes, mais également au niveau pénal.
Le pied sous le siège
L’exemple du régulateur de vitesse est tout à fait flagrant : une fois ce régulateur enclenché, des études ont montré que le pied droit du conducteur était généralement mis sous le siège au bout de cinq à dix minutes. En cas de besoin de freinage d’urgence le temps de réaction est ainsi allongé (multiplié par trois), avec en outre un risque que le conducteur se trompe de pédale.
Dix millions de véhicules rappelés
Une belle démonstration
Pour le clin d’œil on peut évoquer la communication faite par Volvo lors du lancement de son dernier modèle sur un système de freinage automatique du véhicule en cas de détection d’un obstacle en ville. Lors de la démonstration devant les journalistes, le véhicule de test est allé s’encastrer sous le camion utilisé pour matérialiser l’obstacle, spectacle immortalisé par une vidéo qui a fait le buzz sur Internet.
Deux exemples sont particulièrement parlants à cet égard : les problèmes de Toyota aux États-Unis, à cause desquels une campagne de rappel d’une ampleur historique (près de dix millions de véhicules) a été organisée par le constructeur, ce qui ne l’empêche pas d’être passible d’une amende record en dépit des excuses du président devant la commission d’enquête du Congrès ; les problèmes de régulateur de vitesse ayant affecté les véhicules Renault, dont la conclusion juridique n’a pas, dans ce cas, accablé le constructeur.
La difficulté réside donc aujourd’hui dans la capacité à développer des systèmes d’aide à la conduite fiables pour une production de masse.
Deuxième difficulté, intimement liée à ce qu’on vient d’évoquer, la responsabilisation du conducteur. Comment faire comprendre au conducteur qu’un système d’aide à la conduite, qui par définition doit lui permettre d’avoir une conduite la plus automatisée possible, ne doit pas se substituer à lui-même et annihiler sa faculté de réaction ?
Ainsi la voiture sous pilotage automatique, bien que séduisante et techniquement réalisable, pose-t-elle des problèmes qui vont bien au-delà d’une simple faisabilité technique sur un cas isolé.