Les atouts de la formation d’ingénieur pluridisciplinaire
L’industrie pharmaceutique investit souvent en R&D externe, c’est à dire en rachetant une start-up qui a développé un médicament. Le développement de telles start-up est une activité aux spécificités fortes. Il faut partir sur des bases de données solides dans un secteur réglementé avec un financement par levée de fonds. Les cycles sont longs et le risque d’échec important.
Depuis plusieurs années, l’industrie pharmaceutique investit une part croissante de ses efforts R & D en « R & D externe », ce qui se traduit par le rachat de sociétés de biotechnologie qui ont développé un médicament (plus rarement plusieurs) jusqu’à des phases aval de développement clinique.
Cette évolution importante marque un changement de fond dans cette industrie, avec notamment presque 50 % des investissements R & D de GSK (l’un des leaders mondiaux de la pharmacie) alloués à des partenariats externes.
REPÈRES
L’indice Euronext Next Biotech compte plus d’une trentaine de sociétés cotées à Paris pour une capitalisation boursière totale supérieure à 6,5 Mds€
UNE ACTIVITÉ AUX SPÉCIFICITÉS FORTES
Avant de considérer le secteur des start-up en biotech comme le nouvel eldorado pour scientifiques avides d’aventures entrepreneuriales, il convient de comprendre les spécificités qui rendent ce secteur difficile d’accès.
Tout d’abord, les entreprises de biotech sont en général lancées sur la base de brevets déjà existants, ou bien de données assez solides.
“ La biotech est un secteur très réglementé ”
Ces données ou ces brevets sont souvent générés au sein de laboratoires publics. Le lien avec la recherche académique est donc fondamental dans la recherche de pépites en devenir.
En deuxième lieu, la biotech est un domaine très réglementé puisqu’il s’agit de développer des médicaments. Il faut bien connaître le domaine et avoir beaucoup grenouillé avec les acteurs institutionnels avant d’être vraiment crédible.
D’autre part, on y génère très rarement du chiffre d’affaires et on finance donc une entreprise par des levées de fonds successives, en atteignant entre-temps des jalons qui permettent à la société et à ses actions de gagner en valeur. Il faut donc bien comprendre le monde du financement en fonds propres ou en subventions.
Enfin, les cycles de développement sont très longs. On ne retrouve donc pas autant de serial entrepreneurs (entrepreneur en série) que dans d’autres domaines. En effet, il faut souvent cinq à sept ans avant de savoir qu’on s’est « planté » et dix ans avant de « réussir » en cédant l’entreprise à un grand groupe.
Donc on ne monte pas son entreprise sur une idée. La qualité des dirigeants se démontre sur le long terme : les serial entrepreneurs sont rares car ils n’ont quasiment jamais le loisir d’avoir créé plus de 2 ou 3 sociétés sur trente ans !
LES ATOUTS INDÉNIABLES DE L’ÉCOSYSTÈME FRANÇAIS
Comme le prouve le nombre important de jeunes pousses qui réussissent à se financer sur le marché de la Bourse parisienne, la France ne manque pas d’atouts dans l’entreprenariat en biotech : elle possède une recherche académique de tout premier plan ; le coût de la R & D y est assez compétitif grâce à au CIR ; et elle est souvent considérée comme le paradis du financement non-dilutif grâce aux nombreux outils incitatifs développés et centralisés par BPI France.
“ Il n’y a pas de modèle pour un entrepreneur ! ”
Enfin, nous souffrons moins que d’autres secteurs de la lourdeur du droit du travail. En effet, la biotech se développe et se projette sur de longs cycles, ce qui permet d’anticiper les évolutions d’organisation.
De plus, elle fait appel à des compétences très pointues qui sont généralement proposées par des consultants qui ne sont donc pas des employés (on parle souvent de virtual biotech pour les premières années de vie d’une biotech).
SAVOIR GÉRER LE RISQUE D’ÉCHEC
Puisque des projets peuvent être abandonnés au bout de très nombreuses années de recherche pour des raisons techniques difficiles à anticiper, il peut être risqué de sauter le pas et de lier sa carrière à un brevet ou à une molécule qu’on ne peut contrôler totalement. Alors comment gérer le risque d’échec en biotech ?
TECHS VS BIOTECHS : DES LOGIQUES DIFFÉRENTES
Dans la « tech », une des qualités indispensables va être l’agilité avec laquelle une entreprise s’adapte à son environnement et fait évoluer rapidement son produit.
Dans la biotech, ces qualités ne vont répondre que partiellement à la problématique de la gestion du risque : en effet, on ne peut que très difficilement changer une molécule ou un brevet lorsqu’on a déjà fait plusieurs années de R & D dessus.
Une des approches est de créer de l’optionalité en développant une plateforme technologique à partir de laquelle on va développer deux ou trois projets en pensant qu’un ou deux vont capoter.
Une autre approche est celle utilisée par les fonds (et donc pas par l’entrepreneur) qui investissent dans une dizaine de projets en misant tout sur l’apparition d’un seul « cheval ». Dans la réalité, on voit souvent une entreprise qui se finance en développant rapidement et efficacement un premier produit, et qui utilise l’assise financière ainsi générée pour élargir sa base en acquérant ou développant de nouveaux projets très en amont.
À ce stade, on parle de pipeline et c’est souvent une condition sine qua non pour se financer sur les marchés boursiers.
DES PROFILS TRÈS DIVERS
Il n’y a pas de modèle pour un entrepreneur ! Il y en a autant que d’individualités.
- On retrouve des pragmatiques passionnés qui ont une profonde expérience du terrain dans le domaine médical ou scientifique et qui n’ont pas peur de remonter leurs manches ;
- des profils qui sont capables de « vendre » un projet aux financeurs, soit parce qu’ils ont une crédibilité scientifique ou médicale très forte, soit parce qu’ils ont une fibre « marketing-vente » issue du domaine de la santé ;
- des professionnels aguerris qui ont longtemps roulé leur bosse dans le domaine avant de se lancer.
Les entreprises de biotech sont en général lancées sur la base de brevets déjà existants, ou bien de données assez solides.
On voit par exemple beaucoup de projets se lancer avec un ou deux chercheurs qui continuent leurs travaux académiques et un manager aguerri qui va devenir DG.
Enfin, on retrouve parfois des professionnels qui sont placés par des fonds. Ils ne sont pas toujours fondateurs, mais ils apportent énormément à l’entreprise à un moment clé de sa croissance.
En résumé, la création ou la gestion d’une entreprise intervient logiquement plus tard en biotech que dans la « tech » et les profils de dirigeants ne se résument pas à une formation X (ou Y…).
Ce sont plutôt des soft skills comme l’envie, l’esprit de synthèse, la capacité de travail ou le bon sens scientifique qui vont être importants dans ce genre de positions… qu’il faudra valider par une grande expérience dans le domaine de la santé avant de faire le pas de la création ou de la reprise d’une société de biotech.