Carlos GHOSN (74) chez Nissan

Les conditions de réussite de l’alliance Renault-Nissan

Dossier : L'automobileMagazine N°557 Septembre 2000
Par Carlos GHOSN (74)

Renault et Nis­san ont signé une alliance le 27 mars 1999, accord par lequel Renault est deve­nu action­naire de Nis­san à hau­teur de 36,8 %.

Mais à cette période-là, Nis­san, deuxième construc­teur japo­nais, qui a pro­duit en 1999 plus de 2 400 000 véhi­cules, se trou­vait dans une situa­tion finan­cière alar­mante, avec un endet­te­ment net de 2,4 tril­lions de yens (150 mil­liards de FF – au taux actuel du yen). L’en­tre­prise avait enre­gis­tré des résul­tats néga­tifs au cours des huit der­nières années (excep­té en 1996) et voyait ses parts de mar­ché mon­diales décroître de 6,6 % en 1991, à 4,9 % en 1999 (ce qui repré­sente un volume supé­rieur à 600 000 voi­tures, la pro­duc­tion totale de la marque Vol­vo en 1998).

Cette alliance Renault-Nis­san a pu appa­raître, lors de son annonce, comme un pari un peu fou, com­por­tant des risques par­fois qua­li­fiés d’in­sur­mon­tables : dis­tance et choc des cultures, d’une part, situa­tion finan­cière dra­ma­tique de Nis­san d’autre part. Après un peu plus d’une année de tra­vail, il est temps de reve­nir sur ce qui a été accom­pli pour en tirer quelques enseignements.

Trois condi­tions au moins me paraissent essen­tielles : la renais­sance de Nis­san, la stra­té­gie de crois­sance ren­table et cohé­rente de l’en­semble Renault-Nis­san dans une approche équi­li­brée du par­te­na­riat, enfin la coexis­tence de deux iden­ti­tés de marques dis­tinctes et fortes.

Il est indé­niable que la pre­mière condi­tion, à court terme, de réus­site de l’Al­liance est de redres­ser la situa­tion finan­cière et de remettre Nis­san sur le che­min de la crois­sance ren­table. Il faut que Nis­san se rap­proche de la per­for­mance de Renault qui lui-même a encore beau­coup de poten­tiel. Le contrat de base est clair : ce que nous fai­sons chez Nis­san, c’est d’a­bord pour Nis­san et c’est dans l’in­té­rêt de l’al­liance Renault-Nissan.

Autre­ment dit ce qui est bon pour Nis­san est bon pour l’Al­liance. Nous ver­rons, dans un pre­mier temps, com­ment l’é­quipe de Nis­san a com­men­cé à rele­ver ce défi.

Mais cette équipe s’ap­puie en par­tie sur l’ex­pé­rience et les posi­tions actuelles de Renault.

Ce qui nous conduit à la seconde condi­tion inti­me­ment liée à la pre­mière et qui pro­dui­ra ses pleins effets à moyen terme : le déve­lop­pe­ment des syner­gies entre les deux entre­prises, qui per­met de doter l’en­semble Renault-Nis­san d’une stra­té­gie cohé­rente et coor­don­née de crois­sance ren­table mais éga­le­ment de sou­te­nir l’ef­fort de redres­se­ment de Nis­san : parce que les suc­cès de l’Al­liance sont néces­saires à Nis­san autant que le redres­se­ment de Nis­san est indis­pen­sable à l’Alliance.

Le troi­sième élé­ment essen­tiel c’est le res­pect abso­lu et intan­gible des marques de cha­cun, dans le cadre d’une vision glo­bale et par­ta­gée. C’est un des prin­cipes fon­da­teurs de l’al­liance Renault-Nis­san. Il consti­tue le socle d’un par­te­na­riat équilibré.

Transformer une entreprise orientée volume en une entreprise orientée clients – profits : le plan de redressement de Nissan

Com­ment avons-nous mis en œuvre ce plan de crois­sance et de réduc­tion de coûts ?

La pre­mière étape de notre action chez Nis­san a consis­té à éta­blir un diag­nos­tic appro­fon­di, pré­cis et chif­fré, sans com­pro­mis ni com­plai­sance. Pen­dant toute cette période, qui a duré envi­ron trois mois, il s’a­gis­sait de com­prendre de l’in­té­rieur les rai­sons du déclin de Nis­san et de sa perte de com­pé­ti­ti­vi­té – le contexte, la stra­té­gie, les choix et les actions enga­gées, en étant réel­le­ment à l’é­coute des employés et res­pon­sables de Nis­san. Nous avons pros­crit toute atti­tude conqué­rante, arro­gante ou agressive.

Dans le même temps, cette phase d’ob­ser­va­tion et de diag­nos­tic nous a per­mis d’é­tu­dier et de recon­naître les atouts indis­cu­tables de Nis­san, dans des domaines tels que la qua­li­té et la fia­bi­li­té des pro­duits, les com­pé­tences tech­no­lo­giques et indus­trielles mais aus­si la dimen­sion inter­na­tio­nale de cette entre­prise : Nis­san est en effet pré­sent en Asie, en Europe et aux États-Unis, avec à chaque fois des implan­ta­tions indus­trielles et com­mer­ciales signi­fi­ca­tives. Au-delà de ces trois grandes zones stra­té­giques, Nis­san a une pré­sence effec­tive au Mexique et en Amé­rique cen­trale, au Moyen-Orient, en Australie.

Ce diag­nos­tic exi­geant nous l’a­vons conduit en asso­ciant les membres de Nis­san. Nous avons d’ailleurs consta­té, sans que cela consti­tue véri­ta­ble­ment une sur­prise, qu’ils étaient par­fai­te­ment conscients de la dégra­da­tion des résul­tats, qu’ils en avaient bien sou­vent ana­ly­sé les causes et que de sur­croît ils avaient un cer­tain nombre de solu­tions à pro­po­ser pour en sortir.

L’adhé­sion du per­son­nel est une condi­tion de réus­site du plan de renaissance.

Nous avons ensuite construit le plan comme un ensemble de mesures de redres­se­ment et de recon­quête, et l’a­vons annon­cé le 18 octobre 1999 (soit six mois après la signa­ture de l’Al­liance) à la presse et de façon simul­ta­née en interne et à nos par­te­naires exté­rieurs, four­nis­seurs et conces­sion­naires. Un plan de ce type doit être expli­qué et argu­men­té. Il était très impor­tant de par­ta­ger notre diag­nos­tic ain­si que les solu­tions que nous pré­co­ni­sions et avions déci­dé de mettre en œuvre.

Et cet effort de com­mu­ni­ca­tion nous le pour­sui­vons, en infor­mant régu­liè­re­ment nos col­la­bo­ra­teurs et par­te­naires sur les résul­tats et l’a­van­ce­ment du plan. Car plus la situa­tion de l’en­tre­prise est déli­cate, plus la com­mu­ni­ca­tion doit être pré­cise, simple et claire. Elle doit être com­prise depuis l’ou­vrier jus­qu’à l’a­na­lyste finan­cier. Elle doit ren­for­cer la moti­va­tion de cha­cun et la confiance dans les actions entreprises.

Briè­ve­ment, ce plan peut se résu­mer à trois enga­ge­ments majeurs : le retour à la pro­fi­ta­bi­li­té en mars 2001, une hausse à un mini­mum de 4,5 % de la marge opé­ra­tion­nelle et une dette réduite de moi­tié (6,3 mil­liards de dol­lars) d’i­ci mars 2003. Le pre­mier de ces enga­ge­ments est en passe d’être atteint. Fin mars 2001, à l’is­sue de la pre­mière année fis­cale pleine, Nis­san devrait connaître son pre­mier exer­cice béné­fi­ciaire depuis quatre ans.

Le res­pect de ces enga­ge­ments passe par un plan de réduc­tion des coûts impor­tant, une réal­lo­ca­tion de res­sources au pro­fit de la crois­sance, un plan de déve­lop­pe­ment pro­duits ambi­tieux et une remise à plat de l’or­ga­ni­sa­tion mon­diale et du mana­ge­ment de l’entreprise.

Nous avons éla­bo­ré ce plan dans un temps très court, puis l’a­vons mis en route sans attendre, à la fois parce que la situa­tion ne pou­vait plus durer et parce qu’il fal­lait réin­suf­fler le sens de l’ur­gence à Nissan.

Aujourd’hui, où en sommes-nous de ce plan de redressement parfois qualifié de » mission impossible » ?

Glo­ba­le­ment le Nis­san Revi­val Plan se déroule selon nos pré­vi­sions, avec quelques dif­fé­rences sui­vant les secteurs.

Le reen­gi­nee­ring de la fonc­tion achats et la mise en œuvre d’une pro­cé­dure de sélec­tion des four­nis­seurs basée sur des cri­tères de per­for­mance donnent des résul­tats très encou­ra­geants, et même meilleurs que pré­vus. Nous serons en ligne avec notre objec­tif de réduc­tion des coûts de 8 %, puisque 80 % de nos four­nis­seurs se sont enga­gés dans ce sens, et nous sommes confiants sur l’ob­jec­tif de 20 % à la fin de l’exer­cice fis­cal 2002.

La par­tie indus­trielle du plan, qui vise à concen­trer et réduire les capa­ci­tés de pro­duc­tion, est enga­gée. Toutes les opé­ra­tions préa­lables aux fer­me­tures d’u­sines sont dans les temps. Nous avons dépla­cé cet été les lignes de pro­duc­tion de la March et de la Sky­line. 80 % du per­son­nel de l’u­sine de Muraya­ma, l’u­sine la plus impor­tante que nous allons fer­mer en mars 2001, sont prêts pour un transfert.

Mais trop sou­vent les com­men­ta­teurs retiennent le volet » réduc­tion des coûts » du plan de renais­sance. Or on ne relance pas une entre­prise en dif­fi­cul­té en » atta­quant » uni­que­ment ce ver­sant-là de la montagne.

Nous sommes en train de remettre en place les fon­de­ments mêmes d’un déve­lop­pe­ment durable et pro­fi­table de Nissan.

Notre diag­nos­tic a fait appa­raître que, pour assu­rer son déve­lop­pe­ment, Nis­san avait besoin de nou­veaux pro­duits, d’une orien­ta­tion client plus affir­mée, d’un ren­for­ce­ment de la marque, d’un par­te­na­riat plus exi­geant avec le réseau de dis­tri­bu­tion et d’un mar­ke­ting inno­vant et plus démar­qué de la concurrence.

Une réflexion appro­fon­die pour doter la marque Nis­san d’une nou­velle iden­ti­té a été enga­gée ain­si qu’un plan pro­duit très ambi­tieux : 22 nou­veaux pro­duits seront lan­cés dans les trois ans à venir et les années sui­vantes nous pro­po­se­rons une moyenne de 7 nou­veaux pro­duits par an. Ils seront le reflet de la nou­velle iden­ti­té de la marque. Ce plan pro­duit est sou­te­nu par des inves­tis­se­ments consé­quents. Ils repré­sen­te­ront 60 % du total de nos inves­tis­se­ments pour l’an­née fis­cale 2000. C’est bien d’un recen­trage de nos res­sources vers ce qui est pour un construc­teur auto­mo­bile le core busi­ness : un plan pro­duit solide en phase avec les attentes de nos clients ou des ten­dances perçues.

Enfin signa­lons les évo­lu­tions dans l’or­ga­ni­sa­tion et le mana­ge­ment : début avril nous avons retou­ché l’or­ga­ni­sa­tion du groupe, pour le rendre plus réac­tif, plus trans­ver­sal et plus glo­bal. Nous avons aus­si intro­duit dans la ges­tion du per­son­nel et dans le mana­ge­ment des prin­cipes nou­veaux. Ils remettent par­fois en cause des tra­di­tions, mais ils sont néan­moins bien accep­tés par des acteurs qui, pour la plu­part, avaient soif de performance.

En octobre 2000, nous aurons les résul­tats du pre­mier semestre de l’an­née » 1 » du » Nis­san Revi­val Plan « . Nous aurons ensuite une visi­bi­li­té beau­coup plus claire en mai 2001, quand nous aurons pas­sé le cap de la pre­mière année de ce plan.

La presse ne s’y est pas trom­pée, qui voit dans les pre­miers indices du redres­se­ment de Nis­san je cite [un signe que] » l’al­liance […] pré­sen­tée ini­tia­le­ment comme un pari extrê­me­ment dif­fi­cile est bien enga­gée « 1.

Pas­sons main­te­nant à la seconde condi­tion de réus­site de l’al­liance Renault-Nissan.

Un partenariat équilibré à la recherche des synergies

Les groupes de tra­vail conjoints, mis en place dans tous les métiers, dans le cadre de l’Al­liance, ont deux objec­tifs prin­ci­paux : iden­ti­fier toutes les oppor­tu­ni­tés de crois­sance com­mune et repé­rer les oppor­tu­ni­tés de gains par la mise en com­mun des com­pé­tences et savoir-faire, des acquis ou des posi­tions res­pec­tives de chaque par­te­naire. Les sommes ain­si déga­gées étant mises au ser­vice de la crois­sance future.

C’est dans l’é­qui­libre entre deux par­te­naires forts qu’il y aura une véri­table alliance effi­cace avec d’im­por­tantes synergies.

Concrè­te­ment plu­sieurs chan­tiers sont enga­gés : une plate-forme2 com­mune équi­pe­ra les rem­pla­çantes des Micra, March, Cube de Nis­san et Clio et Twin­go de Renault soit plus de 1,2 mil­lion de véhi­cules ; un plan de plate-forme doit nous conduire à un total de 10 plates-formes com­munes en 2010 ; un plan d’or­ganes méca­niques com­mun ; un plan d’a­chat com­mun pour béné­fi­cier au maxi­mum des effets d’é­chelle très impor­tants dans l’in­dus­trie auto­mo­bile. Dans le domaine de la dis­tri­bu­tion, nous met­tons en com­mun nos savoir-faire et nos implan­ta­tions res­pec­tives, afin de réa­li­ser des éco­no­mies sur tout ce qui n’est pas visible pour les clients – ce que nous appe­lons les back-office – en sui­vant le prin­cipe de base : le mieux implan­té sou­tient le déve­lop­pe­ment du partenaire.

C’est le cas en Europe où Nis­san s’ap­puie très lar­ge­ment sur le réseau dense de Renault, pour atteindre à moyen terme une part de mar­ché cumu­lée de 17 %. Dans d’autres pays comme le Mexique, c’est Nis­san qui faci­lite le retour de Renault sur ce mar­ché et qui assu­re­ra même la pro­duc­tion de véhi­cules Renault dans son usine de Cuer­na­va­ca, dès le début de 2001.

Au pas­sage, ces pro­duc­tions addi­tion­nelles per­mettent à Nis­san d’op­ti­mi­ser l’u­ti­li­sa­tion de ces capa­ci­tés de pro­duc­tion, dans ce pays. Une illus­tra­tion très concrète de » ce qui est béné­fique à l’Al­liance est béné­fique à Nis­san, et bien sûr béné­fique à Renault « .

Dans le même temps cha­cun pour­suit une stra­té­gie de crois­sance ren­table, avec des pro­duits, des gammes et des iden­ti­tés de marque distinctes.

Apprentissages réciproques et ouverture d’esprit au service de la croissance

Nous avons iden­ti­fié des domaines de com­pé­tences et de savoir-faire où des dif­fé­rences existent entre Nis­san et Renault. Au sein de groupes de tra­vail conjoints, nous met­tons sys­té­ma­ti­que­ment en œuvre les échanges pour favo­ri­ser au maxi­mum les appren­tis­sages de » best prac­tices » et éla­bo­rer, chaque fois que c’est néces­saire, des réfé­rences com­munes. C’est un pro­ces­sus conti­nu, qui vise à créer ensemble de la valeur pour les deux entreprises.

C’est le cas, par exemple, dans le domaine de la qualité.

La qua­li­té et la fia­bi­li­té des pro­duits Nis­san sont répu­tées mon­dia­le­ment et contri­buent à l’i­den­ti­té de la marque. Notre qua­li­té est faite de rigueur et de méthode. Elle ne s’im­pro­vise pas. Les stan­dards de qua­li­té Nis­san inté­ressent Renault qui peut com­prendre de l’in­té­rieur com­ment, chez Nis­san, nous réa­li­sons la qua­li­té. Sur cette base nous sommes en train d’é­la­bo­rer des stan­dards com­muns, car si nous vou­lons déve­lop­per des plates-formes com­munes, si nous devons uti­li­ser des usines com­munes, nous ne pou­vons pas avoir deux ins­tru­ments dis­tincts pour mesu­rer la qua­li­té de nos pro­duits. Nous avions déci­dé dès l’o­ri­gine de l’Al­liance qu’en aucun cas la qua­li­té ne devait être un fac­teur dif­fé­ren­ciant entre Renault et Nissan.

Sur le plan indus­triel, Nis­san a des usines très per­for­mantes, dont la pro­duc­ti­vi­té est recon­nue pour être par­mi les plus éle­vées au monde.

Dans l’é­tude com­pa­ra­tive menée par l’EIU3, l’u­sine de Sun­der­land, dans le nord de l’An­gle­terre, appa­raît comme la plus pro­duc­tive en Europe depuis trois ans. De son côté, l’u­sine de Smyr­na, dans le Ten­nes­see, s’est éga­le­ment pla­cée en pre­mière posi­tion aux États-Unis, en 1999, d’a­près une étude du Har­bour report4.

Eh bien, nous inci­tons au maxi­mum d’un côté les ingé­nieurs de Renault à visi­ter et étu­dier en pro­fon­deur cette usine, de l’autre les ingé­nieurs de Nis­san à être ouverts à l’é­change, à expli­quer leurs méthodes afin que cha­cun des par­te­naires puisse pro­fi­ter de cette avance que nous avons sur nos concurrents.

De son côté Nis­san a des choses à apprendre de Renault en matière de mana­ge­ment de la réduc­tion des coûts ou de poli­tique d’a­chat – ce qui a été utile dans l’é­la­bo­ra­tion du Plan de renais­sance de Nis­san – mais aus­si en matière de desi­gn, d’in­no­va­tion et de créativité.

Depuis trop long­temps Nis­san com­mer­cia­lise des voi­tures d’in­gé­nieurs, des voi­tures fiables et tech­no­lo­gi­que­ment très avan­cées mais sans âme par­ti­cu­lière et au desi­gn trop clas­sique. Pre­nez la Sky­line GTR, le bijou de la gamme. Cette voi­ture est un tigre aux allures de cha­ton. Sa tech­no­lo­gie et ses per­for­mances remar­quables sont han­di­ca­pées par un desi­gn déca­lé par rap­port à ses qua­li­tés rou­tières. Renault, recon­nu pour son desi­gn auda­cieux, peut sou­te­nir Nis­san dans son sou­ci de mieux col­ler aux exi­gences de ses clients dans ce domaine.

Nous avons ins­tau­ré un comi­té com­mun de Desi­gn (« Joint Desi­gn Poli­cy Group ») asso­ciant les 2 patrons du Desi­gn de Renault et de Nis­san. Ce comi­té a pour voca­tion de faci­li­ter l’é­change d’in­for­ma­tion sur les pra­tiques et pro­jets res­pec­tifs, d’in­ten­si­fier l’ou­ver­ture au par­te­naire – au tra­vers par exemple d’é­changes de desi­gners – ou de mettre à niveau les équi­pe­ments et outils pour les rendre com­mu­ni­cants. Tout cela au ser­vice de gammes dis­tinctes mais cohé­rentes, du point de vue de leur iden­ti­té et de leur design.

À titre d’exemple, grâce à Renault, Nis­san, qui par le pas­sé s’a­dres­sait à des pres­ta­taires pour conce­voir ses concept-cars, va main­te­nant déve­lop­per une véri­table poli­tique de concept-cars conçus en interne, et uti­li­sés autant pour mon­trer aux clients les ten­dances du desi­gn Nis­san que pour impré­gner les desi­gners mai­son d’une nou­velle culture de la marque.

Ces échanges appro­fon­dis et régu­liers, menés en toute loyau­té dans le res­pect de l’his­toire de cha­cun, sont la base du tra­vail mené en com­mun. La trans­pa­rence dans les échanges ain­si que la sin­cé­ri­té et la fia­bi­li­té des infor­ma­tions mises en com­mun sont encou­ra­gées à tous les niveaux.

Des marques fortes et distinctes au service de l’Alliance

Pour faire de Renault-Nis­san un ensemble plus riche que la seule addi­tion de nos chiffres d’af­faires, nous avons ima­gi­né un concept ori­gi­nal, celui d’al­liance bina­tio­nale. Des dif­fé­rences mani­festes entre ces deux entre­prises, sou­vent poin­tées comme un fac­teur de risques, nous fai­sons une oppor­tu­ni­té pour l’en­semble : un ensemble où la double natio­na­li­té et la double culture sont consi­dé­rées comme des fac­teurs com­plé­men­taires et enri­chis­sants, plu­tôt que péna­li­sants ; un ensemble où chaque marque reste indé­pen­dante pour évi­ter can­ni­ba­li­sa­tion ou redon­dance entre les modèles. La sépa­ra­tion des marques est garan­tie par l’i­den­ti­té tech­nique et cultu­relle forte de cha­cune des entreprises.

Un véhi­cule Nis­san est et res­te­ra un véhi­cule dont les fon­da­men­taux sont conçus au Japon par des Japo­nais. Il est et res­te­ra radi­ca­le­ment dif­fé­rent d’un véhi­cule Renault à l’i­den­ti­té fran­çaise recon­nue par tous.

D’autres exemples dans l’in­dus­trie auto­mo­bile montrent que la dis­tinc­tion des marques au sein d’un groupe mul­ti­marque n’est pas tou­jours facile ; cha­cun recon­naît pour­tant que c’est un fac­teur de suc­cès incon­tes­table : main­te­nir des iden­ti­tés sépa­rées, c’est s’as­su­rer que les clients de cha­cune des marques y trouvent ce qu’ils attendent de spécifique.

C’est pour­quoi nous appli­quons ce prin­cipe à tous les niveaux : en amont dans les phases de desi­gn et d’in­gé­nie­rie aus­si bien qu’en aval dans la distribution.

Le » Joint Desi­gn Poli­cy Group « , cité plus haut, en est une illus­tra­tion. Il s’as­sure du sub­til équi­libre entre des véhi­cules aux » looks » bien dis­tincts, entre chaque marque, autant que de la cohé­rence des marques entre elles.

Dans l’in­gé­nie­rie, il s’a­git de réus­sir la mise en com­mun de fonc­tions pour obte­nir les effets d’é­chelle, propres à réduire nos coûts et nos délais glo­baux de concep­tion, tout en conti­nuant à conce­voir sépa­ré­ment les fonc­tions dif­fé­ren­ciantes d’un véhi­cule (éclai­rage, sièges) ou à pro­cé­der aux mises au point spé­ci­fiques qui ren­dront un véhi­cule iden­ti­fiable à sa marque (tenue de route, freinage).

Dans un esprit iden­tique les pro­jets dits de cross-bad­ging, qui consistent à uti­li­ser dans une gamme un des pro­duits du par­te­naire, plu­tôt que d’en déve­lop­per un soi-même, font l’ob­jet d’a­na­lyses très poin­tues pour mesu­rer l’ef­fet de ces pro­duits » emprun­tés » au par­te­naire sur la clien­tèle et sa per­cep­tion de la marque. Et chaque fois qu’un risque de confu­sion des marques appa­raî­tra nous serons extrê­me­ment vigi­lants. Dans les faits, ces pro­jets de cross-bad­ging res­te­ront limités.

Enfin, en aval le res­pect des deux marques passe par le main­tien de réseaux de dis­tri­bu­tion distincts.

On ne ver­ra pas de Nis­san dans un show-room Renault, et inver­se­ment. Il est essen­tiel pour un construc­teur auto­mo­bile de main­te­nir la rela­tion directe avec ses clients, au tra­vers de son réseau.

Même si nous met­tons en com­mun des moyens, des sup­ports ou des acti­vi­tés de back-office, tels que nos sys­tèmes infor­ma­tiques ou notre logis­tique, parce qu’il y a des éco­no­mies consi­dé­rables à faire à ce niveau, nous main­tien­drons une stricte sépa­ra­tion de nos points de ventes.

Les véhi­cules, leur desi­gn, leur qua­li­té, leur niveau d’é­qui­pe­ment, mais aus­si les ser­vices asso­ciés, de garan­tie, de finan­ce­ment ou d’as­su­rance ou encore le ser­vice après-vente sont carac­té­ris­tiques de la marque. De même la rela­tion au conces­sion­naire, celui de son quar­tier, importe au client.

Une approche com­mune à long terme, la crois­sance ren­table construite sur la confiance – et notam­ment celle qui existe au niveau des diri­geants -, dou­blée d’une indé­pen­dance des marques et d’une véri­table auto­no­mie de déci­sion, voi­là ce qui fait aujourd’­hui l’o­ri­gi­na­li­té de l’al­liance Renault-Nis­san et qui nous rend confiants quant à son avenir.

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1. Auto­mo­tive News, juillet 2000.
2. Un ensemble de pièces et fonc­tions assem­blées, consti­tuant le sou­bas­se­ment et la base rou­lante d’un véhicule.
3. The Eco­no­mist Intel­li­gent Unit, Centre d’é­tude anglais indé­pen­dant qui depuis cin­quante ans pro­duit des études com­pa­ra­tives notam­ment sur l’in­dus­trie auto­mo­bile, membre de » The Eco­no­mist Group « .
4. Har­bour report : Centre d’é­tude de même nature, qui conduit des études com­pa­ra­tives aux États-Unis.

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