Les conséquences pour la marine de la réforme de la DCN
Plus de six mois après le changement de statut de la Direction des constructions navales (DCN) intervenu le 1er juin 2003, quelles sont les conséquences visibles pour la marine ? De façon un peu paradoxale, l’on peut dire que la première conséquence, immédiate et d’ailleurs anticipée, de la réforme a été l’aggravation de la situation financière déjà tendue de la marine. Pour autant, personne ne remet en cause la pertinence du changement de statut, les marins moins que d’autres, confrontés qu’ils étaient aux insuffisances de l’ancien service à compétence nationale.
Personne n’a soutenu que la transformation de la DCN en société ne serait pas coûteuse puisqu’à vrai dire elle marquait la fin des arsenaux de l’époque de Colbert. Aujourd’hui, la question n’est plus là. Il s’agit de savoir si les charges supplémentaires que supporte la marine par rapport à ce qui avait été convenu dans la loi de programmation militaire seront couvertes et si, plus généralement, l’État en aura pour son argent. Il n’est pas inutile toutefois de commencer par un petit rappel historique.
La réforme de la DCN est un processus qui s’est déroulé sur une dizaine d’années. La théorie nous enseigne que le cadre juridique d’une administration n’est pas optimal pour gérer une activité industrielle. L’expérience de la DCN constitue à cet égard un cas d’école. De fait, lorsqu’on a voulu doter ce service d’une personnalité morale en l’érigeant en société anonyme, il a fallu reconstituer une comptabilité, établir un bilan d’ouverture et définir des plans de mise à niveau dans les domaines du contrôle de gestion et de l’informatique. Cet effort n’est pas terminé. Au fond et avec du recul, l’idée de départ de 1992, la séparation du pôle étatique du pôle industriel, était la bonne.
Mais cette distinction n’a pas été au départ assez radicale puisqu’il a fallu dix ans pour la mener à bien. Les dates qui jalonnent cette évolution sont connues : 1997, création du service des programmes navals à côté d’une DCN dépendant toujours de la DGA ; 2000, transformation de la DCN en service à compétence nationale relevant directement du ministre de la Défense (donc sorti du champ de la DGA), 1er juin 2003 obtention de la personnalité juridique et de l’autonomie financière à la faveur du changement de statut. Sans doute était-il nécessaire de procéder par étapes et de ménager les personnels.
À l’usage néanmoins, il apparaît que la poursuite de relations fortement consanguines n’a pas favorisé la rigueur de gestion, le suivi des contrats (quand ils existaient c’est-à-dire depuis 1998, sous une forme d’ailleurs dégradée car l’État ne peut pas contracter avec lui-même), la connaissance des prix de revient et leur contrôle ainsi que le souci de mettre le client au centre de l’organisation, pratiques de règle dans les sociétés privées.
Il y a au demeurant deux façons d’appréhender ces évolutions qui ne sont pas terminées puisqu’une consolidation interviendra tôt ou tard dans le domaine de la construction navale militaire européenne. La première consiste à adopter le prisme de l’industriel ; la seconde fait du changement de statut de la DCN un élément de la réforme de la DGA qui se poursuit.
Pour autant, et du point de vue qui nous occupe, il est bon de souligner que l’effort de mise à plat qui a été mené à bien était nécessaire. L’exercice de réconciliation comptable était obligatoire puisque le choix a été fait de changer le statut de la DCN et non pas de créer une nouvelle société ab initio (ce qui aurait été très difficile puisque cette société aurait eu vocation à récupérer les contrats en cours d’exécution et le personnel en poste).
Il a permis de créer une situation de départ très favorable. En cas de doutes, et ils ont été assez nombreux, la pratique a en effet consisté à déprécier ou à provisionner massivement les postes concernés. Les amortissements pratiqués ont été massifs ; pour les immobilisations corporelles par exemple, c’est-à-dire les terrains, bâtiments et outillages apportés en propre à la nouvelle société, le taux d’amortissement a été de 84 %, diminuant d’un coup la valeur de la DCN de près de 1,3 milliard d’euros. Les provisions et les amortissements ont été complétés par des garanties délivrées par l’État couvrant à la fois les contrats export et les contrats nationaux, garanties ayant pour objet de protéger la future entreprise de toutes les conséquences financières négatives liées à son activité en tant que service de l’État. Les contrats ayant été transférés » en l’état « , ils n’ont pas donné lieu à renégociation sur le prix et le client n’en a tiré aucun bénéfice. Enfin la DCN a été dotée d’un capital initial qui s’élève à 563 M&euro ; et couronne l’édifice.
Bref, rien que du très solide : un capital correct, un actionnaire étatique, des comptes passés à la paille de fer, un plan de charge conséquent. Et le client dans tout cela ? À la vérité, il a été confronté à un double défi : la réforme l’a conduit à réfléchir aux fonctions régaliennes qu’il devait exercer, notamment dans le domaine du nucléaire où l’État conservera sa responsabilité d’exploitant, mais elle a été suivie aussi de ce que l’on pourrait appeler des dégâts financiers collatéraux.
Les charges supplémentaires sont parfaitement identifiées. Elles tiennent en premier lieu à l’assujettissement de la nouvelle entreprise à la TVA dans les conditions de droit commun qui se traduit par une augmentation mécanique de ses prix. Lorsque la DCN fonctionnait comme un service de l’État, elle n’était pas en effet assujettie à cette taxe. Heureusement, et au moins sur la durée de la loi de programmation militaire, le principe d’une compensation budgétaire a été retenu et mis en œuvre à la suite de décisions des plus hautes autorités de l’État. Il n’en reste pas moins que cette compensation sera soumise à renégociation chaque année compte tenu du principe de l’annualité budgétaire. Et que sur le long terme la situation française est insatisfaisante.
Il faut savoir en effet que la plupart des pays de l’Union européenne pratiquent le taux 0 ou l’exonération en matière de construction navale militaire à l’exception de la France et de l’Allemagne. Cette distorsion de concurrence fiscale pénalise la marine française qui, à budget égal, verra ses programmes amputés d’environ 20 % de contenu physique dès lors qu’elle s’adresse à la DCN par rapport, par exemple, à la marine britannique. Cette inégalité de traitement est dommageable également au développement de la coopération industrielle entre pays de l’Union. Non seulement les marins devront tenter de converger sur l’expression des besoins opérationnels, qui commanderont eux-mêmes les caractéristiques des équipements, mais ils devront ensuite gérer une différence sensible de pouvoir d’achat qui nuira à la définition d’un produit commun. La solution serait bien entendu une remise à plat du régime applicable à la construction navale militaire au niveau européen, en intégrant les nouveaux États membres. Mais elle prendra du temps compte tenu de l’exigence d’unanimité qui prévaut en la matière… Les discussions sur la TVA dans le domaine de la restauration sont là pour nous le rappeler.
Les conséquences industrielles et sociales de la réforme sont une deuxième source de dépenses. Le volet industriel » marine » a été estimé à 353 M€ base 2003 sur la période 2003–2008 ; il permettra de couvrir la réhabilitation des infrastructures techniques mises à disposition de la DCN dans les ports militaires de Brest et de Toulon, les charges liées à la reprise de la fonction » rechanges « , la mise à niveau de la documentation technique des bâtiments et le coût des déménagements induits par la mise en œuvre du schéma directeur de la nouvelle société. Ces dépenses sont incompressibles.
Navire en entretien programmé. MARINE NATIONALE
Il faut savoir que l’État, propriétaire des installations, ne peut les mettre à disposition de la DCN que si elles sont conformes à la réglementation et aux normes. À défaut, sa responsabilité pourrait être engagée. Ceci concerne en particulier les réseaux électriques, les capacités sous pression et les engins de levage. La marine s’est trouvée en effet dans cette situation paradoxale d’hériter d’installations portuaires vétustes, sous-entretenues pendant des décennies, et de devoir les remettre sans délai à la disposition de la DCN en état de marche.
Ces 353 M€ sont la contrepartie d’un effort d’investissement analogue de la DCN au titre, notamment, des installations dont la propriété lui a été transférée. Dans son plan à moyen terme 2003–2008, la DCN a en effet prévu 366 M€ base 2003 d’investissements liés à sa restructuration. Ces dépenses pèsent sur les résultats prévisionnels sur la période et expliquent que le redressement financier ne soit réellement tangible qu’en 2006, sauf bonne surprise. Certaines auraient probablement dû être engagées même en l’absence du changement de statut pour améliorer le fonctionnement de l’outil industriel.
Mais le débat n’est pas là. Dans la mesure où elles ont été acceptées, elles consacrent l’effort important consenti pour améliorer la compétitivité de l’entreprise. La marine a simplement souhaité qu’un effort de même nature soit engagé au titre des fonctions et des installations qu’elle conservait ou reprenait. À défaut auraient coexisté au sein d’un même port des installations rénovées, celles de la nouvelle DCN, et des équipements dignes de l’époque de Colbert ou de Zola, héritage d’une gestion étatique indigente. Cette coexistence aurait posé problème et n’aurait pas été comprise.
Pour être complet, il faudrait aussi intégrer la charge nouvelle des assurances de la DCN (auparavant, l’État était son propre assureur) et le financement par le ministère de la Défense du fonds d’adaptation industrielle et des indemnités de départ volontaire qui seront proposées à certains personnels pour ajuster la masse salariale au plan de charge prévisible.
Troisième source de dépenses, la nécessité de couvrir ce que l’on a appelé des encours non contractualisés (340 M€ en base 2003 pour l’ensemble du ministère de la Défense), en fait des prestations de la DCN, souvent réalisées dans des établissements portuaires, qui avaient échappé à la diligence des gestionnaires chargés de les régulariser a posteriori lorsque la contractualisation des relations entre la DGA et la DCN avait été décidée en 1997, principe rappelé par la Charte de gestion en 1999. Ces dépenses étaient restées non facturées dans la mesure où les contrats nécessaires n’avaient pas été établis. Elles avaient néanmoins été financées en trésorerie par des avances globales, récupérées depuis. Lors du changement de statut, elles sont apparues en pleine lumière et ont aggravé le passif à combler. Ce fut une bien mauvaise nouvelle que personne n’avait envisagée.
On pourra toujours discuter sur leur étendue et leur pertinence ; en fait, après une analyse de la DGA et une enquête de l’IGF et du CGA, leur réalité ne fait plus de doute. Elles ont essentiellement concerné des études, des travaux d’entretien, des munitions et des rechanges.
Une recherche en paternité de cette situation serait stérile. La cause profonde réside dans le mécanisme du compte de commerce qui fonctionnait comme un compte de caisse et comme un parking budgétaire, bien commode pour échapper aux rigueurs de la régulation, et n’autorisait pas les contrôles dont sont coutumiers les gestionnaires d’entreprise habitués à la comptabilité en partie double. Ceux-ci savent que recette n’est pas synonyme de créance et que la notion de dette est plus large que celle de dépense. Ce compte a servi de banquier à la DCN, mais il s’agissait d’un banquier particulièrement négligent. Les dépenses étaient toujours couvertes en gestion et le compte soldé à l’équilibre en fin d’année. L’impression était trompeuse. En l’absence de contrats (au moins jusqu’en 1998), puisque tout se passait au sein de l’État, la clôture des opérations industrielles n’intervenait qu’avec retard. Le gestionnaire naviguait donc à l’aveugle… et les pertes étaient masquées.
Le client marine souhaiterait aujourd’hui qu’on lui prodigue la même sollicitude qu’à la DCN car il supportera la plus grande part des charges supplémentaires rappelées ci-dessus. Elles sont estimées à plus d’un milliard d’euros pour le ministère de la Défense entre 2004 et 2008, hors impact de la TVA (encours non contractualisés, volets industriel et social de la réforme, assurances, impact des redevances payées par la DCN pour les zones mises à sa disposition).
Bien entendu, cette somme considérable peut se justifier. Si les investissements interviennent comme prévu, la DCN disposera dès 2005 d’un outil industriel entièrement remis à neuf ce dont on ne peut que se féliciter. Les risques sont couverts, le capital en voie de libération, la société a été créée sur des bases saines… Son plan de charge n’est pas susceptible de connaître un effondrement comparable à celui de GIAT Industries en 1991 avec le nombre de programmes nationaux envisagés (frégates multi-missions, sous-marins nucléaires d’attaque Barracuda, deuxième porte-avions) et des perspectives prometteuses à l’exportation.
Dès lors la question qui se pose est celle du retour sur investissement ; elle conduit à une redéfinition des relations entre la DCN et la marine.
Sous-marin nucléaire au bassin, en entretien programmé. MARINE NATIONALE
Cette question de la rentabilité de l’opération est celle de l’État actionnaire qui profitera évidemment du redressement financier de l’entreprise. Début 2004, le cheminement vers une situation bénéficiaire semble plus rapide que celui esquissé lors des simulations réalisées au moment de la création de la société, tout en restant tributaire du respect des dates des programmes. Cette valeur apparaîtra au grand jour dès qu’une opération interviendra sur le capital. Elle devrait permettre d’apprécier positivement les efforts consentis au titre du comblement du passif et de la capitalisation.
Mais cette interrogation est aussi celle de l’État client, en l’occurrence la marine. Il faut, en vertu d’une juste répartition de la valeur créée, que celle-ci soit répartie entre le client, l’actionnaire, l’entreprise et ses salariés. La possibilité de rationaliser les achats en s’affranchissant des procédures du code des marchés publics, très contraignantes et à vrai dire peu adaptées à une activité industrielle, va jouer un grand rôle dans le redressement (en 2003, la DCN prévoyait 7 % d’économies sur le volume total des achats sur une période de six ans). Les achats de la DCN et de la DCNI représentent environ un milliard d’euros par an et, à l’image d’autres industries lourdes, près des deux tiers du chiffre d’affaires. C’est donc un poste très important.
Il convient que le client puisse bénéficier de ces gains sous forme d’amélioration de la qualité du service et de baisse des prix sur les nouveaux contrats. Des procédures de concertation ont été mises en place aux niveaux central et local. Elles doivent encore faire leur preuve. Le contrat d’entreprise, signé entre l’État et la DCN, organise, pour sa part, les relations dans la durée et prévoit de mesurer les progrès réalisés par la tenue d’un certain nombre d’indicateurs. Il constituera un instrument précieux et a d’ores et déjà permis de mener une réflexion commune sur le devenir de la société et ses métiers stratégiques, prolongeant le plan Azur d’avril 2001 demeuré à usage interne.
Le débat sur le » juste retour » ne sera pas évité et il sera public. La loi du 28 décembre 2001 qui a autorisé le changement de statut prévoit en effet que chaque année jusqu’en 2008 le Parlement sera destinataire d’un rapport sur les perspectives d’activité et les fonds propres de la nouvelle entreprise. Le premier rapport a été déposé en avril 2003 ; il n’a pas suscité d’observations particulières. Les suivants pourront sans doute être le prétexte à des discussions nourries. Tant que l’entreprise sera dans le rouge, toute revendication serait mal venue car l’intérêt commun exige que la réforme soit un succès. Mais dès qu’elle dégagera des bénéfices, il n’en sera plus de même surtout si elle met en œuvre une politique de rente dans certains domaines techniques.
Les évolutions toucheront également la marine dans ses relations avec la DCN. Les contrats deviendront la loi des parties et les juristes seront beaucoup plus sollicités. Il faudra s’y adapter. Le travail de fond sur l’expression de besoin devra être développé ; le contrôle de gestion interne devra être généralisé ; la vérification du contenu physique des prestations achetées, lacunaire sous l’empire du compte de commerce et du travail en régie, devra être systématisée, au besoin en s’aidant de catalogues. Ces tâches nouvelles appellent de nouvelles compétences qu’il faudra aller chercher à l’extérieur et convenablement positionner dans la hiérarchie. Cet état-major en est persuadé.
La réforme de la DCN a été en effet l’occasion d’une redéfinition des rôles et d’un transfert de certaines fonctions. Dans le domaine du nucléaire, la marine devra ainsi organiser sa montée en puissance pour pouvoir contrôler l’entreprise devenue simple opérateur industriel. La reprise de la gestion des rechanges, qui bénéficie désormais de moyens de stockage modernes et automatisés, ainsi que celle des pyrotechnies (via le service de soutien de la Flotte) l’ont conduite à accueillir le personnel ex-DCN concerné par ces activités. Le service des travaux maritimes a vu la superficie des emprises dont il est affectataire augmenter dans une proportion de 25 % puisque les terrains et les bâtiments (ainsi que les réseaux de fluides) dans les ports militaires, propriétés de l’État gérées autrefois sous la responsabilité de DCN/service à compétence nationale, lui ont été confiés. Une partie de ces emprises a d’ailleurs été mise à disposition de DCN/société anonyme par l’intermédiaire de titres d’occupation du domaine public militaire. Dans le domaine des munitions le service des travaux maritimes a récupéré des tâches supplémentaires liées à la poursuite des mises à hauteur de sécurité des pyrotechnies de Brest et de Toulon.
Il serait faux de croire, toutefois, que le changement de statut réalisé, les principes posés, les moyens accordés, tous les risques sont écartés. Comme l’ont souligné certains spécialistes, la DCN est une entreprise en situation de retournement qui doit prendre conscience de son nouvel environnement. Ainsi, si le plan de charge n’est pas respecté, ce n’est plus l’État, via le compte de commerce, qui sera chargé de faire les fins de mois mais la société avec bien entendu des conséquences sur son résultat. La liberté accrue de l’entreprise sera la contrepartie d’une plus grande exposition à la vie des affaires et aux nécessités de la concurrence. En un sens, le changement de statut de la DCN a éliminé une source de déficit à la charge du budget de la Défense, du moins tant que l’entreprise restera en pertes.
Cela dit, il faut raison garder. Pendant de très longues années, les sorts de la marine et de la DCN seront liés. Il ne peut en être autrement si l’on songe que l’entreprise réalisera 70 % de son chiffre d’affaires avec l’État sur la durée du contrat d’entreprise dans sa version prudente dite de dimensionnement. Dans de nombreux domaines la mise en concurrence ne sera qu’une vue de l’esprit.
Dans celui de l’entretien par exemple, et compte tenu du tissu industriel local, il faudra au préalable que le Service de soutien de la Flotte (SSF) se constitue une doctrine et une expérience avec des moyens renforcés sans courir le risque de devenir une DCN bis. Dans les zones déléguées à la DCN, on ne voit pas qui pourrait lui succéder, si tant est que l’on en ait le désir, à l’expiration des titres domaniaux.
Raison de plus pour que l’entreprise se préoccupe des ressources de son client principal. C’est la raison essentielle qui milite pour le financement du contrat des frégates multimissions en financement innovant, mode de financement reposant sur l’utilisation de techniques de marché et non plus sur de simples crédits budgétaires. Les ressources ainsi dégagées permettraient de couvrir les charges supplémentaires rappelées au début de cet article et de lisser le coût des programmes sur la durée d’utilisation des matériels. S’il n’en était pas ainsi, tous les partenaires y perdraient : la marine qui ne pourrait pas respecter les termes de la loi de programmation militaire et serait confrontée à des ruptures capacitaires, la DCN qui verrait son plan de charge affecté et son redressement compromis, l’État enfin qui n’aurait pas investi à bon escient. Lors de sa visite dans la marine nationale à Brest le 17 février 2004, le président de la République a d’ailleurs incité les acteurs à faire preuve d’imagination pour le financement des FREMM.
Les responsables actuels sont conscients des enjeux. Il reste à espérer que les fruits tiennent la promesse des fleurs. À cet égard, les deux années qui viennent seront critiques au même titre que les conditions de la consolidation industrielle qui reste à venir. Défi industriel majeur, la réforme de la DCN est un élément de la réforme de l’État. Nous avons tout à gagner de sa réussite et tout à perdre de son échec. Comme tout investissement, elle est coûteuse à court terme, mais elle dégagera progressivement des résultats positifs puisque l’industriel sera non seulement attentif à sa technique mais aussi à l’optimisation de ses coûts de réalisation.