Les créations d’entreprises
La création d’entreprises
Les entreprises qui se créent sont, en général, de petites structures : près des trois quarts d’entre elles n’ont pas de salarié. Ce sont majoritairement des personnes physiques (près de 55 %) et si elles sont créées sous forme sociétale, ce sont, pour leur grande majorité, des SARL.
La création est, en général, classée en trois catégories : la création pure qui correspond à la création de nouveaux moyens de production, la création par reprise lorsque la nouvelle entreprise reprend tout ou partie des activités et moyens de production d’une autre entreprise (à l’exclusion des rachats de parts sociales) et la création par réactivation qui correspond à la reprise d’activité d’un entrepreneur individuel après une mise en sommeil temporaire (que la reprise d’activité corresponde à l’ancienne activité ou à une nouvelle). En 1998, sur les 266 000 créations enregistrées dans le champ ICS1 de Sirene (voir ci-après), 62 % étaient des créations pures, 17 % des reprises et 21 % des réactivations.
Le répertoire interadministratif des entreprises, Sirene, enregistre de façon très exacte les créations d’unités légales, très peu de temps après leur création à partir des déclarations faites auprès des Centres de formalités des entreprises (CFE).
En effet, l’obligation de déclaration est respectée par les entrepreneurs, l’inscription à Sirene permettant d’obtenir le numéro d’identification dit SIREN, exigé pour de nombreuses opérations (ouvrir ou débloquer un compte bancaire, obtenir une adresse Internet » .fr « …).
Le tableau ci-dessous donne, à partir de Sirene, les nombres de créations d’entreprises du champ ICS de 1993 à 2000 selon différentes modalités.
Comme on pouvait le penser, la grande majorité des créations se fait dans les secteurs du commerce des services et de la construction, là où l’entrée est plus facile et nécessite, en général, des mises de fonds relativement faibles (on le verra plus loin).
Les créations d’entreprises du champ ICS de Sirene | ||||||||
1993 | 1994 | 1995 | 1996 | 1997 | 1998 | 1999 | 2000 | |
Pures Reprises Réactivations |
170 904 48 138 54 405 |
183 748 49 673 60 693 |
178 913 46 545 59 384 |
171 613 46 043 57 602 |
166 836 46 385 57 853 |
166 174 44 480 55 775 |
169 600 43 159 56 069 |
176 754 41 652 53 666 |
Industrie agricole et alimentaire (IAA) Industrie (hors IAA) Construction Commerce Transports Immobilier Services aux entreprises Services aux particuliers Éducation – Santé – Action sociale |
6 573 18 601 33 557 87 805 10 022 7 142 41 328 49 884 18 535 |
7 359 19 691 37 745 93 979 10 656 7 914 44 340 53 073 19 357 |
7 190 18 662 36 823 88 338 10 509 7 472 44 630 52 205 19 013 |
7 277 17 283 35 106 83 831 9 651 7 009 43 867 51 827 19 407 |
6 885 16 283 34 168 81 460 10 075 7 408 43 872 51 548 19 376 |
6 800 15 540 33 269 78 090 9 650 7 889 44 184 51 309 19 698 |
6 638 14 939 34 934 76 778 8 889 8 868 45 391 52 543 19 848 |
6 233 14 422 39 993 72 494 7 073 9 183 50 920 51 577 20 177 |
Personnes physiques Personnes morales SARL |
173 710 99 737 82 329 |
190 695 103 419 86 773 |
187 604 97 238 82 554 |
177 017 98 241 84 378 |
171 522 99 553 86 497 |
166 596 99 833 87 233 |
166 884 101 944 88 690 |
163 901 108 171 92 025 |
0 salarié 1 à 9 salariés 10 salariés et plus |
200 269 68 413 4 765 |
218 925 70 820 4 369 |
215 427 65 554 3 861 |
207 225 64 528 3 505 |
208 681 59 149 3 245 |
203 910 59 152 3 367 |
207 156 58 281 3 391 |
210 478 57 889 3 705 |
TOTAL | 273 447 | 294 114 | 284 842 | 275 258 | 271 075 | 266 429 | 268 828 | 272 072 |
De Sirene au Système d’information sur les nouvelles entreprises (SINE)
Du fait du rôle important des créations ou, plutôt, du renouvellement du parc d’entreprises et de la création d’entreprises dans des secteurs nouveaux, il a paru nécessaire d’aller au-delà de la seule connaissance des chiffres de la création. Il fallait mieux connaître le profil des entreprises nouvelles et de leurs créateurs, examiner dans quelles conditions les projets ont pu être réalisés et voir comment les choses ont pu évoluer dans le temps. L’objet était, entre autres, de déterminer, si possible, les facteurs de succès ou d’échec.
Ces besoins ont été en partie satisfaits par l’enquête dite SINE (Système d’information sur les nouvelles entreprises), lancée fin 1994 sur les créations du 1er semestre de l’année. L’INSEE a assuré le développement, la réalisation et les premières exploitations, mais il n’était pas seul (et il n’est toujours pas seul) à suivre le travail. Ainsi participent activement à la définition de l’enquête, aux thèmes à traiter et à la détermination des exploitations prioritaires certaines grandes administrations, des organismes de financement (Banque de France, BDPME, Caisse des Dépôts…), les réseaux consulaires, les réseaux d’aide à la création, etc.
Le créateur et la création en 1998, selon SINE2
En 1998, sept créateurs d’entreprises sur dix sont des hommes mais on note une augmentation de la part des femmes au-delà de 40–45 ans, c’est-à-dire lorsqu’elles ont moins à s’occuper de leurs enfants ; un peu moins d’un créateur sur deux est titulaire d’un diplôme correspondant au baccalauréat ou plus (47 %) ; 12 % n’ont pas de diplôme du tout. De plus, si diplôme il y a, celui-ci est plutôt technique (CAP, BEP, BTS…).
Le créateur possède, dans deux cas sur trois, un chef d’entreprise dans son entourage familial. Avant la création, la moitié des créateurs avaient une activité, le tiers était chômeur ; le reste, les sans activité, correspond principalement aux étudiants et aux femmes au foyer. Enfin, on note que, souvent, le créateur s’oriente vers un projet correspondant à l’activité qu’il avait précédemment (avant la création ou avant la période de chômage).
En ce qui concerne l’entreprise créée, les données de SINE confirment celles de Sirene. On ne reviendra donc pas sur elles. Par contre, on s’attachera à examiner les conditions financières de la création et on tentera de faire une estimation des sommes nécessaires à la création.
Les aspects financiers de la création dans SINE
Le capital social des entreprises créées en 1998
Capital social moyen des SARL créées en 1998 d’après l’enquête SINE 1998 |
Une première question d’ordre financier dans SINE demande le capital social des entreprises créées sous forme de société. Il est en moyenne de l’ordre de 253 000 F (38 500 €) (130 000 F (19 800 €) pour les SARL)3. Malheureusement, pour les SARL, il n’est pas sûr que le déclarant, surtout le petit entrepreneur créant sa SARL unipersonnelle, s’en soit tenu, dans sa réponse, au capital social ; au vu des données collectées, il semble que certains s’en sont tenus à la part du capital utilisée au cours de l’année 1998 tandis que d’autres ont chiffré le total des immobilisations de leur entreprise.
Le capital social déclaré varie très sensiblement selon le secteur où s’est fait l’investissement et selon que la création est pure ou par reprise. On le voit sur le graphique concernant le capital moyen des SARL.
Les reprises de SARL étant peu nombreuses, les fortes valeurs constatées pour l’industrie (hors IAA), les services aux entreprises et l’Éducation-Santé-Action sociales peuvent s’expliquer par la reprise exceptionnelle d’unités importantes.
Une question complémentaire sur la propriété des entreprises créées permet de déterminer la part des filiales, créations d’entreprises par d’autres entreprises. Elle est de 7,1 % en 1998, ces unités étant généralement plus importantes que la moyenne en termes de capitaux investis, d’emploi et de chiffre d’affaires.
Les sources de financement des entreprises créées en 1998
Part (%) des entreprises créées en 1998 ayant déclaré avoir eu recours à la source de financement citée (Source : SINE 1998) | |
Ressources personnelles | 61,2 |
Emprunts bancaires | 28,5 |
Autres emprunts | 9,6 |
Apport en capital d’autres sociétés | 8,0 |
Subvention | 2,2 |
Le tableau ci-dessous donne la synthèse des réponses.
On notera ainsi la fréquence, somme toute relativement faible, des recours au système bancaire, mais, il faut le rappeler, on raisonne ici en nombre d’entreprises et non en montants empruntés.
Les moyens nécessaires au démarrage
Une dernière question d’ordre financier permet de se rendre compte du » poids » financier des créations. Il est demandé au créateur d’évaluer le montant des moyens qui ont été nécessaires pour démarrer et l’on cite des exemples : achat de machines, frais d’équipement, apports en nature, constitution des stocks, fonds de roulement…
Médiane des moyens au démarrage (créations pures) (Source SINE 1998) |
Médiane de moyens au démarrage (reprises) (Source SINE 1998) |
Malheureusement, dans le type d’enquêtes multithèmes dans lequel l’enquête SINE peut être classée, enquêtes plutôt qualitatives que quantitatives, il n’est pas possible de demander au répondant une réponse chiffrée exacte, mais plutôt de se classer dans des catégories prédéfinies et, généralement, larges. Ainsi ici, sept possibilités de réponses sont données, avec des tranches larges, ce qui ne permet pas les évaluations globales, sinon que sous forme d’ordre de grandeur.
Le tableau des moyens nécessaires pour démarrer confirme à nouveau la part des petits projets, 36 % des entreprises signalent des moyens inférieurs à 50 000 F (7 600 €). Le seuil de 50 000 F (capital minimum de SARL) est lui aussi bien marqué.
Mais la dispersion des montants nécessaires pour démarrer est très grande, même à l’intérieur d’un sous-ensemble croisant l’activité économique et le type de création (pure ou reprise). L’étude des moyennes des sommes nécessaires au démarrage n’est guère significative. Il est préférable de s’intéresser à l’étude des médianes, c’est-à-dire des valeurs pour lesquelles la moitié des créations a nécessité des sommes inférieures (et donc l’autre moitié, des sommes supérieures). Les graphiques permettent de se rendre compte de l’influence des deux facteurs, activité (surtout en ce qui concerne les reprises d’entreprises de transports et de services aux entreprises) et le type de création (la création par reprise requiert plus de moyens que la création pure).
Données pour une évaluation du » poids » financier des créations de 1998
Les moyennes que l’on peut calculer par » case » croisant la forme juridique (personne physique ou personne morale) et le type de création (création pure ou réactivation), appliquées aux effectifs du champ SINE conduisent aux évaluations données ci-dessous.
Le nombre total de créations du champ de SINE est de l’ordre de 160 000 se répartissant entre 85 500 personnes physiques et 75 500 personnes morales. Les créations, dans le champ ICS de Sirene, se répartissent entre 166 500 personnes physiques et 100 000 personnes morales.
MOYENS NÉCESSAIRES POUR DÉMARRER Part (%) des entreprises dont les moyens se trouvent dans la tranche indiquée (Source : SINE 1998) |
|
Moins de 10 000 F | 15,8 |
10 000 à moins de 25 000 F | 11,0 |
25 000 à moins de 50 000 F | 9,3 |
50 000 à moins de 100 000 F | 32,9 |
100 000 à moins de 250 000 F | 14,9 |
250 000 à moins de 500 000 F | 8,0 |
500 000 F et plus | 8,1 |
Pour les créations de personnes physiques, outre les 44 500 réactivations, l’écart entre les champs de SINE et de Sirene couvre principalement des créations éphémères (entreprises ayant vécu moins d’un mois) et des entreprises saisonnières. L’infrastructure existant déjà, la somme moyenne nécessaire au démarrage d’une réactivation est vraisemblablement plus limitée que pour les créations pures ou les reprises. Par contre, a priori, pour les entreprises saisonnières, il n’y a pas de raison que la somme moyenne soit différente.
Enfin, les créations éphémères de personnes physiques n’ont vraisemblablement guère exigé de moyens. Le passage du champ de SINE au champ ICS de Sirene pour les personnes physiques conduit à une valeur supérieure pour les moyens nécessaires au démarrage, mais l’augmentation n’est, à coup sûr, pas proportionnelle à l’augmentation du nombre d’entreprises. En » coupant la poire en deux » (moitié du passage de 85 000 entreprises à 166 500 entreprises), on arrive à une estimation de 11 200 millions (1 700 millions d’euros).
En dehors du champ ICS de Sirene les créations de personnes physiques se font principalement dans le secteur de l’agriculture, mais l’on ne dispose d’aucune information précise au sujet de ces entreprises. En fin de compte, on retiendra le chiffre de 11,5 milliards de francs (1,750 milliard d’euros) comme minorant des moyens engagés par les personnes physiques créatrices d’entreprises en 1998.
Sommes nécessaires au démarrage (entreprises du champ de SINE 1998) |
||
Millions de francs |
Millions d’euros |
|
Personnes physiques | 7 600 | 1 160 |
Personnes morales | 13 000 | 1 980 |
Total des créations du champ de SINE |
20 600 | 3 140 |
Le » déficit » de personnes morales du champ de SINE par rapport au champ ICS est moins fort (75 500 entreprises créées dans SINE contre 100 000 dans Sirene). Mais aussi bien pour extrapoler les sommes engagées pour la création que le capital social, les exclusions du champ ICS de Sirene pour passer à SINE ont leur importance :
- les » activations économiques » peuvent être importantes pour ce qui est des sommes nécessaires au démarrage, le capital social ayant déjà été, au moins partiellement, engagé ;
- les holdings sont importants pour ce qui concerne le capital ;
- les GIE sont importants pour les besoins au démarrage.
On ne dispose pas de données permettant une extrapolation correcte (notamment sur le capital des holdings).
Pour ce qui est des sommes nécessaires au démarrage des sociétés en 1998, pour passer du champ de SINE au champ ICS de Sirene, on pratiquera une extrapolation comparable à celle utilisée pour les personnes physiques (moitié de l’écart en pourcentage du nombre d’entreprises créées). Ceci conduit à une estimation plancher de 15 milliards de francs (2,3 milliards d’euros).
Et par souci de prudence, on en restera au montant du total du capital social déclaré dans l’enquête SINE, sachant que c’est un minorant du capital social des entreprises du champ ICS : ce montant est de l’ordre de 16 milliards de francs (2,4 milliards d’euros).
Ceci étant, les deux évaluations minimales relatives aux sommes nécessaires au démarrage et au capital social total devraient certainement être fortement augmentées du fait de la non- prise en compte, dans le champ ICS, des créations d’entreprises dans les secteurs financiers et d’assurances.
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1. Champ ICS ou Industrie-Commerce-Services. Au début des années 1990, lorsque furent commencés les travaux de démographie d’entreprises, certains secteurs marchands ont été éliminés soit faute d’information suffisamment exhaustive, soit parce que l’information était trop lente à parvenir. De plus, les travaux ne concernaient que les entreprises actives du secteur marchand. D’où la création du » champ ICS » couvrant l’ensemble des activités marchandes de l’industrie, de la construction, du commerce et des services hors services financiers et d’assurances. Des travaux actuellement en cours permettront de prendre bientôt en compte le secteur de l’agriculture et des services financiers.
2. Les résultats des trois enquêtes sur la cohorte de 1994 et de l’enquête initiale de 1998, ainsi que des données de cadrage à partir de Sirene sont disponibles sur Cédérom dans » Créations et créateurs d’entreprises » (Insee Résultats – Système productif n° 205, décembre 2001).
3. Les créations de SA sont très rares. Les données sur le capital social sont extrêmement dispersées : fournir une donnée moyenne n’a donc guère de sens.