LES CROIX DE CHEMIN ET DE VILLAGE DU CANTON DE BLIGNY-SUR-OUCHE
Jean Salat est un membre actif du Centre beaunois d’études historiques (CBEH). C’est dans ce cadre qu’il vient de publier cet ouvrage qui lui a valu le prix Lucien Perriaux décerné chaque année à des travaux de recherche historique dans le pays beaunois.
Sur le territoire d’un canton bourguignon couvrant près de 23000 hectares, au nord-ouest de Beaune, l’auteur a d’abord repéré sur les documents et les cartes disponibles les croix de plein air érigées dans les villages, le long des chemins ou à leurs carrefours.
Puis, pendant deux ans et demi, il a fouillé les archives départementales et diocésaines et visité les 23 communes de ce canton, recherchant sur le terrain les croix héritées du passé. La plus ancienne remonterait à l’année 1536, la plus récente à la fin du siècle dernier. L’auteur en a répertorié 140, soit plus de cinq pour cent habitants. Chacune fait l’objet d’une fiche détaillée qui la décrit minutieusement, illustrée par une ou plusieurs photographies prises par l’auteur.
Dans la synthèse qui précède ce catalogue, Jean Salat nous apporte des précisions intéressantes. Certes, ces croix témoignent d’une piété populaire, d’ailleurs variable au cours des temps. Plus des deux tiers des croix qui portent des dates remontent au XIXe siècle. Après la loi de séparation de l’Église et de l’État, il est devenu impossible d’élever une croix, symbole religieux, dans un lieu public. Mais, nous apprenons qu’à côté de leur sens spirituel leurs fonctions pouvaient être multiples. L’auteur distingue ainsi les croix qui balisent des chemins, celles qui, aux carrefours, orientent les voyageurs, celles qui marquent des limites : limites entre deux communes, entre deux territoires de justice… Certaines de ces croix indiquent les sources, c’està- dire la vie, ou coiffent les sommets à partir desquels le panorama invite à la pause, à la méditation. D’autres rappellent aux vivants le souvenir d’événements individuels (les morts) ou collectifs (les missions paroissiales).
Lors de ses relevés, l’auteur a été frappé par l’attachement des populations à ces symboles dont la proximité quotidienne n’avait pas émoussé la présence qu’elle soit commémorative ou tutélaire.
Ainsi la lecture de cet ouvrage fait-elle revivre, au sein de ce terroir bourguignon qu’une autoroute traverse sans s’y arrêter, non seulement d’antiques croyances mais aussi des noms et des images gravés, toujours visibles sur les pierres. Ce sont là quelques-unes de nos racines. Parmi d’autres, elles soutiennent notre culture.