Les nouvelles technologies de l’information et de la communication au Maroc
Introduction
L’avènement des NTIC (Nouvelles technologies de l’information et de la communication) a été perçu au Maroc depuis très tôt comme une vague à prendre.
Une vague de croissance qu’un pays en voie de développement espère saisir pour faire face à ses contraintes et mieux répondre aux exigences de développement économique et social tout en aspirant en tant que nation à pouvoir changer d’orbite de classification.
Mais, comme nous l’avait enseigné notre professeur Brézin dans son cours de physique quantique, pour pouvoir changer d’orbite il faut une excitation suffisante.
Cette prise de conscience, assez tôt et à différents niveaux de responsabilité, de l’opportunité que représentent les NTIC, a permis au pays de ne pas rater la vague voire de très bien se positionner au niveau régional et à un assez bon niveau à l’échelle mondiale.
Néanmoins le profit que pouvait en tirer le pays est loin d’être optimisé, comme cela a été le cas pour d’autres pays tel que l’Inde par exemple, alors que le Maroc pouvait présenter à l’origine des avantages comparatifs non négligeables.
Cela serait-il dû à un manque de dynamisme ou de réactivité ? Ou au fait que les pays anglo-saxons en ont mieux profité que les pays francophones ? Ou à un manque de confiance dans le phénomène, et donc une prise de risque limitée ?
Une chose est sûre c’est que le Maroc n’a pas connu pleinement la bulle de la nouvelle économie dans ses aspects virtuels ou réels, ni dans ses aspects positifs tel le ré-engineering des structures, ni dans ses aspects négatifs tels que ceux qui avaient suivi l’éclatement de la bulle, ou au moins l’a-t-il connue sur un rayon très limité.
Le Maroc aurait choisi, pas nécessairement d’une manière consciente ou volontaire, un scénario tendanciel. Cette logique du « doucement mais sûrement » nous a menés vers le Maroc actuel des NTIC : pas de décalage par rapport à l’essentiel, un Maroc « up to date » dans le secteur.
Mais un Maroc qui ne se distingue pas jusqu’à présent au niveau mondial dans aucun des compartiments du secteur, sauf peut-être dans des occasions assez rares.
Télécommunications
Durant les quatre dernières années le gouvernement marocain donnait l’impression de traîner les pieds et de trébucher quand il s’agissait du calendrier de libéralisation du secteur des télécoms. Avec les nombreux reports et ajournements, le secteur semblait opérer en pilotage sans visibilité « To see or not to see ! ».
Avec l’avènement de l’introduction en Bourse du principal opérateur Maroc Telecom, une « success story », dont le processus de privatisation avait commencé bien avant avec la cession en deux temps de 51 % à Vivendi Universal, la clarification de l’horizon est devenue une obligation. C’est ainsi que l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) a rendu publique une note d’orientations générales sur le sujet qui s’étend de 2005 à 2008. Ce nouveau calendrier a été adopté après le feu vert donné par le Premier Ministre marocain, M. Driss Jettou, lors du Conseil d’administration de l’Agence tenu le 8 novembre 2004 et réaffirmé lors du dernier conseil tenu le 25 janvier 2005.
Dans le document de base, quatre axes stratégiques resurgissent. Il s’agit de la refonte de la loi 24–96 qui réglemente le secteur, l’adoption d’un calendrier de mise en place d’actions spécifiques de régulation, la publication du plan national des fréquences et enfin, l’adoption d’un calendrier réaliste de la libéralisation du secteur.
Concernant ce dernier point, le Maroc a toujours été un leader régional de la libéralisation du secteur des télécoms. Nous pouvons citer dans ce cadre les différentes licences octroyées pour la fourniture de services satellitaires tels que les VSAT, les GMPCS, et les réseaux radio à ressources partagées « 3RP », sans oublier la deuxième licence GSM.
Le phénomène du mobile
L’introduction de la concurrence sur ce marché a créé une nouvelle dynamique, avec des cycles de baisse des tarifs fréquents, une multiplicité d’offres et des programmes de fidélisation. Cela a permis au marché du mobile de connaître un développement assez singulier sur les cinq dernières années. Le nombre d’abonnés du mobile doublait presque en moyenne chaque année, permettant ainsi au Maroc de se positionner en tant que leader régional.
Calendrier de libéralisation
Les vertus de la libéralisation du mobile ont rendu le processus irréversible. La prochaine priorité de la libéralisation du fixe stimulera plusieurs projets à forte valeur ajoutée tels que les Centres d’appels, BPO (Business Process offshoring), e‑commerce, e‑gov, e‑education, etc.
Pour cela l’approche de libéralisation adoptée par l’autorité de régulation intègre la double convergence (fixe/mobile et voix/données) tout en consacrant la neutralité technologique. Elle vise pour cela la mise en place d’une compétition entre trois opérateurs, y compris les opérateurs en place, sur tous les segments des marchés fixe et mobile. Ainsi, l’ANRT prévoit le lancement début 2005 de deux nouvelles licences par segment (local, interurbain, international).
Dans le mobile, le programme de libéralisation prévoit de lancer éventuellement des licences 3G en 2005 après la fin d’une étude préliminaire. De même, une troisième licence du mobile est programmée dès 2007.
En conclusion, le calendrier télécoms au Maroc est bien chargé sur les trois prochaines années. Du respect de ce calendrier dépendra la viabilité de la stratégie future du secteur, et les bases structurantes de son développement futur.
Internet au Maroc
Bien que les utilisateurs d’Internet au Maroc pourraient dépasser le million de personnes, le nombre d’abonnés qui est de 93 000 reste très loin du potentiel de développement du marché estimé à 500 000 abonnés. C’est ce qui ressort de la première étude menée par l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (www.ANRT.net.ma). Néanmoins une ferme volonté existe, aussi bien du côté du gouvernement que de celui de l’ANRT, pour relever ce défi. En effet, après la publication des chiffres très décevants en décembre 2003, une réaction rapide portant principalement sur la baisse des tarifs Internet, surtout ceux de l’ADSL, avait permis, relativement, de redresser la barre. De même, le nouveau texte complétant et modifiant la loi relative à la Poste et aux Télécommunications qui vient d’être promulguée a trait à l’élargissement de la définition de la notion du « Service universel » (SU) pour y inclure la fourniture des services à valeur ajoutée dont Internet.
Cependant, bien que les tarifs restent encore chers comparativement à d’autres pays, et qu’ils nécessitent un nouveau cycle de baisse, le futur plan d’action requiert une démarche multidimensionnelle pour répondre aux différentes contraintes, et pouvoir mettre en place un modèle économique viable pour tous les acteurs du marché.
En effet, déjà en ce qui concerne le coût d’accès, aussi bien le prix d’acquisition du PC, que celui de la connexion Internet, restent encore très élevés comparés au revenu moyen par habitant, qui représente à lui seul une contrainte macroéconomique non négligeable. S’ajoute à cela une autre contrainte structurelle, qui est la faiblesse du taux d’alphabétisation de la population.
Les autres contraintes non structurelles, bien que préoccupantes, peuvent être levées assez rapidement. Des actions dans ce sens sont d’ailleurs déjà programmées comme celles touchant aux aspects de la concurrence et à la libéralisation des télécoms (boucle locale, backbone (réseau dorsal), IP internationale).
Un autre constat préoccupant : le contenu local disponible est pauvre que ce soit celui destiné aux citoyens ou aux entreprises. Par conséquent, sur ce volet, plusieurs actions programmées ont tardé à émerger dont par exemple la e‑administration, le commerce électronique et la généralisation des NTIC dans le secteur de l’éducation nationale.
Le Maroc représente aujourd’hui un chantier ouvert pour l’Internet recelant un potentiel important de développement et des opportunités assez sérieuses.
Avec toutes ces contraintes levées et les opportunités saisies, le Maroc pourra prétendre confortablement et durablement à une seconde place africaine dans le domaine de l’Internet, et se hisser ainsi à un classement respectable au niveau international.