Perdre pour grandir : les pertes, un chemin de connaissance et de croissance
Il est un élément commun à chacune de nos existences : les multiples pertes que nous expérimentons. Déstabilisantes, dérangeantes et pénibles, les pertes sont pourtant occasion de connaissance de soi et de croissance lorsqu’on décide de les traverser en prenant le temps d’en respecter les étapes. Un accompagnement peut être utile, car il faut à la fois lâcher prise et se faire confiance. Avec au bout du chemin une paix intérieure et davantage d’humanité peut-être. Et pourquoi pas s’offrir un détachement volontaire ?
« Connais-toi toi-même ! » enseignait Socrate.
Même si Kundera expliquait dans L’Art du roman que l’on peut se confronter à des situations imaginaires, gardons à l’esprit que notre connaissance de nous-même se construit d’abord à la faveur des expériences que nous vivons. Nos réactions face à des situations nouvelles ne sont qu’en partie prévisibles, et ce sont elles qui nous enseignent, soit dans l’instant, soit plus tard dans une relecture.
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Comment traverser la perte ?
Bien loin de la promesse du transhumanisme, chacun subit dans son existence de multiples pertes, ne serait-ce que celles liées à l’âge, de l’enfance à la vieillesse, celles liées aux soucis de santé, aux relations affectives déçues, aux croyances. Dans le domaine professionnel également, il est fréquent d’avoir un échec dans son ambition, d’être barré par une personne, de subir une pression incessante. Ces pertes vont déranger l’ordre établi de notre existence en nous retirant ce qui semblait nous appartenir.
Phénomène normal de guérison, traverser des pertes peut être mieux compris et accompagné en se référant à la « vallée du deuil ». Pour des experts comme le psychologue canadien Jean Monbourquette, « on a pleinement vécu son deuil lorsque, en entendant quelqu’un relater un souvenir de la personne aimée – de la situation perdue –, on se réjouit de l’avoir connue, fréquentée et aimée ».
Cette traversée demande volonté et courage, et se vit à travers une succession d’étapes, ou plutôt de points de repère. Cela mobilise notre psychologie et notre Soi (terme de C. G. Jung pour désigner l’âme), et cela prend du temps.
Quatre étapes sont particulièrement marquantes dans ce processus.
Expression des émotions
Au contraire des conseils de l’entourage qui proposerait volontiers de passer à autre chose, tourner la page et ne pas se complaire dans le négatif, il est important de raconter à quelqu’un de confiance les circonstances vécues. Se replonger dans l’annonce de la nouvelle, afin d’identifier les émotions ressenties et parfois mélangées : colère, tristesse, peur de l’abandon, culpabilité souvent, avec parfois des sentiments d’impuissance et d’angoisse, mais aussi de soulagement.
C’est l’occasion de répondre aux deux questions clés : « Qu’as-tu perdu ? » et « Qu’est-ce que cela représentait pour toi ? » Derrière un job était-ce une position, un avantage, une réussite, une promesse ? Il m’est arrivé de passer une séance complète de coaching avec ces deux seules questions, pour que finalement la vraie perte se révèle… et apporte un profond soulagement.
Un entretien AX Carrières, un coaching ?
L’un des bénéfices des entretiens proposés gratuitement par AX Carrières (en un clic sur le site de l’AX), c’est de porter un regard extérieur sur une situation professionnelle, qu’elle soit critique ou simple, et proposer des orientations. De manière plus approfondie, dans un coaching, un coach vous aidera à définir un objectif vis-à-vis d’une situation que vous voudriez traverser au mieux et, au fil d’une dizaine de séances, vous amènera à mobiliser vos propres ressources pour l’atteindre.
Accomplir les tâches matérielles
Notre psychologie a besoin que l’on close le chapitre de la perte. Fermer et archiver les dossiers, achever les dialogues, garder un objet symbolique mais se débarrasser des choses anciennes. Le passage à l’action fait aussi entrer dans une dynamique nouvelle et donne un signal clair que c’est bien fini, à condition d’avoir pris le temps d’écouter les émotions.
Chercher le sens
Affirmer qu’il y a un sens dans la perte peut être révoltant. C’est d’abord un non-sens, une diminution. Cependant, la perte ouvre des chemins nouveaux, crée des possibilités dont nous n’aurions pas eu idée, infléchit notre histoire.
Ainsi, on ne peut pas construire sa vie professionnelle sans renoncer à son statut d’étudiant.
Mais le sens est aussi la signification que cette perte prend pour nous, que l’on peut approcher par des questions comme :
- « Qu’as-tu appris sur toi-même et en quoi es-tu devenu plus humain ? »
- « Quelles nouvelles forces et ressources as-tu découvertes en toi ? »
- « Comment vas-tu réorienter ta vie ? »
Accueillir l’héritage
L’un des apports originaux de Monbourquette est cette notion d’héritage : ce que l’on a aimé correspond à une « projection » d’éléments inconscients de notre psychisme, qualités, talents, idéaux sur une personne ou un objet. Plutôt que compenser en recherchant immédiatement un autre « support de projection » (un autre associé, une autre start-up, un autre poste de DG), il s’agit de se réapproprier ces éléments : « Telle qualité que j’avais prêtée, je la reprends pour moi. »
Par exemple, si j’ai admiré la clairvoyance d’un chef qui m’aidait à dénouer des situations complexes, je vais me réapproprier ma propre clairvoyance.
Se connaître soi-même constitue un itinéraire de vie, qui comprend une bonne part de lâcher-prise. C’est en agissant et en nous voyant agir dans les événements de la vie que nous nous découvrons davantage, de manière non prévisible. Un travail de relecture et d’accompagnement se révèle particulièrement utile, car il n’est pas possible de faire abstraction de ses filtres lorsque nous nous examinons.
La traversée des inévitables pertes en fait partie, pour peu que nous nous y engagions avec confiance. Au bout de la route, nous en ressortons grandis et plus humains : peut-être une certaine toute-puissance se sera-t-elle fissurée, serons-nous devenus plus compatissants et aurons-nous appris à accueillir en nous des qualités nouvelles : des soft skills ?
Les détachements volontaires
Il ne faudrait pas croire que seules les épreuves peuvent conduire à une bonne connaissance de soi.
Lorsque nous sommes confortablement installés dans une situation, en sécurité, c’est l’occasion de nous mettre à l’écoute de nos motions intérieures, de nos envies profondes. Où devons-nous bouger ?
Un exercice intéressant consiste à faire un « détachement volontaire ». N’y a‑t-il pas dans nos vies des choses qui nous lient, objets (livres, bureau), activités (inutiles, non satisfaisantes), attitudes (peur de manquer, routines, postures), et même des qualités reconnues par l’ego (paraître), dont nous gagnerions à nous détacher parce que cela serait pour un plus grand bien ? C’est indiqué lorsque nous considérons ces choses comme des extensions de nous-même ou comme nous appartenant, ou encore lorsqu’elles sont idéalisées…
Faisons la liste et choisissons-en une, puis entrons en dialogue avec elle :
- « Qu’est-ce que tu représentes pour moi aujourd’hui ? Hier ? »
- « Quels liens gardes-tu avec moi et que m’arriverait-il si je me détachais de toi ? »
- « Est-ce que j’éprouve des résistances à l’idée de me détacher de toi et de quelle manière les prendre en compte ? »
- « Comment conserver ce que tu m’as appris ? »
- « Quelle est la motivation profonde qui me permet de me détacher de toi ? »
Le détachement, manifesté par un acte concret (donner, faire un symbole et le détruire avec respect, etc.), permettra souvent une véritable libération intérieure.
Source : Stratégies pour développer l’estime de soi et l’estime du Soi, de Jean Monbourquette et Isabelle d’Aspremont