L’Exception : Quand la mode devient digitale
En janvier 2011 Régis Pennel (99) a lancé L’Exception, qui est devenu en quelques années le leader commercial français de la mode créative et luxe pour femme et homme, avec plus de 500 marques. Il se présente comme le meilleur service client de France, primé chaque année par Avis Vérifiés.
Que permet L’Exception ?
L’Exception est un concept store, une boutique omnicanale de prêt-à-porter, qui permet de s’habiller de la tête aux pieds pour les femmes et les hommes. Nous proposons des produits de marque, sélectionnés avec soin, ainsi que de nombreuses exclusivités. Nous travaillons également sur de nombreuses catégories complémentaires comme les idées cadeaux, la cosmétique, etc.
Comment t’est venue l’idée ?
J’ai créé la société en 2011 alors que je travaillais chez LVMH. À cette époque, j’ai pu voir la création de nombreuses petites marques sur le segment contemporain. Il y avait aussi le début d’une prise de conscience de l’importance du « fabriqué en France ». J’ai voulu créer le premier e‑shop dédié aux marques françaises, puis en 2016 nous avons ouvert notre boutique dans le premier arrondissement à Paris.
Quel est le parcours des fondateurs ?
Je suis X99 et je suis sorti dans le corps des Télécom. J’ai commencé ma carrière au ministère des Finances où je m’occupais des contrats d’exportation pour la direction du Budget. Après deux ans, je me suis rendu compte que je voulais changer complètement de métier et je suis parti chez LVMH. J’ai alors démissionné du corps des Télécom pour démarrer ma carrière dans le privé. J’ai passé cinq ans chez LVMH d’abord au retail (les magasins), puis au marketing produit où je m’occupais de lignes de maroquinerie. Je voyageais pas mal en France, puis en Italie pour voir l’atelier ou à Londres pour voir le bureau de style. J’ai appris chez LVMH la base du métier du luxe. À la suite de cette expérience, j’ai eu envie de lancer mon entreprise en créant L’Exception. C’est là que mon cursus informatique X‑Télécom m’a bien aidé.
Qui sont les concurrents ?
En France, nos concurrents principaux vont être Place des Tendances, Printemps.com, Galeries Lafayette. À l’international, on va plutôt être confronté à des sites comme Zalando ou Mr Porter.
Quelles ont été les étapes clés depuis la création ?
Après le démarrage du site en 2011, la première étape a été l’ouverture de notre boutique en 2016, ce qui nous a permis de mettre en place une réelle expérience omnicanale. Nous avions été assez précurseurs à l’époque, avec une unification complète des stocks et de nombreux services ajoutés, comme l’e‑réservation, etc. La deuxième étape importante a été en 2017 quand nous avons « pivoté » pour ne plus vendre que des marques françaises, mais ajouter dans notre assortiment une sélection des meilleures marques internationales. Cela nous a permis de libérer la croissance.
Qu’est-ce qui a changé dans l’univers du luxe et de la création ces vingt dernières années ?
Cet univers a énormément gagné en pression. Quand je suis entré chez Celine au sein du groupe LVMH, c’était comme une maison familiale, très indépendante. Depuis lors, la société a énormément grossi et est devenue plus rigide, avec une hiérarchie de plus en plus lourde. Les salariés du luxe y ont perdu en liberté et en capacité d’innovation. Il y a aussi le fait que, depuis quelques années, le luxe travaille principalement pour une clientèle chinoise, ce qui impacte à la fois le processus de création et le processus de production.
Rares sont les ingénieurs qui parviennent à y trouver leur place. Quelle est la recette ?
Ce n’est effectivement pas facile pour un ingénieur de s’intégrer dans l’univers du luxe. Pour y parvenir, il est important de vraiment s’intéresser à ce milieu. Il ne faut pas y aller pour le luxe et les paillettes, mais parce qu’on est réellement passionné par cet univers. Il faut aussi ne pas avoir peur de démarrer à la base, car c’est un métier où l’on apprend d’abord sur le terrain, donc en boutique ou dans les ateliers.
Le digital laisse-t-il encore la possibilité d’émerger au niveau national ?
Oui, clairement : quand nous avons démarré en 2011, nous n’étions personne, et maintenant nous faisons partie du top 100 des sites e‑commerce français et du classement du Financial Times des 1 000 entreprises de croissance européennes. Le digital ouvre énormément de perspectives de croissance car, contrairement au physique, il n’y a pas de limite à la croissance. On peut au démarrage très facilement doubler ses ventes d’année en année, ensuite c’est plus compliqué et le taux de croissance baisse, mais il reste de toute façon très supérieur à ce qu’on pourrait obtenir dans le cadre d’un magasin physique. L’avantage est également de pouvoir non seulement toucher la France entière à partir d’un site internet, mais aussi le monde entier.
Verra-t-on un jour apparaître un Netflix de la mode ?
C’est une question un peu avant-gardiste… Si on parle d’un nouveau business où l’on pourrait consommer la mode en location et ne plus l’acheter, il y a clairement des exemples de succès comme Rent the Runway. Mais en France les habitudes de consommation n’y sont pas encore. On est très loin de voir le business de la location décoller dans la mode. Il y a eu trois ou quatre start-up qui se sont lancées sur ce créneau en France, et la plupart ont fait faillite. C’est un métier de pressing, donc un métier très manuel et la main‑d’œuvre en France coûte cher. Aux États-Unis, ce type de business modèle peut fonctionner plus facilement, car la main‑d’œuvre peu qualifiée est bien meilleur marché.
Quels conseils donnerais-tu aux X qui veulent rejoindre l’univers de la mode ?
C’est un métier où les X ne sont pas attendus, donc il faut être passionné et rejoindre ce secteur avec beaucoup d’humilité. Les jeunes qui souhaiteraient découvrir ce domaine ou s’y lancer peuvent me contacter.