L’industrie de la connaissance, rouage clé de l’industrie 4.0

L’industrie de la connaissance, rouage clé de l’industrie 4.0

Dossier : L'Industrie de la connaissanceMagazine N°775 Mai 2022
Par Florence LUSTMAN (X80)

L’industrie de la connais­sance contri­bue à la mise en œuvre d’un déve­lop­pe­ment res­pon­sable, sorte de troi­sième voie fon­dée sur un recours rai­son­né à la science et à la tech­no­lo­gie, qui s’inscrit dans la refonte d’un pro­jet col­lec­tif por­teur de sens et qui conjugue la puis­sance d’action et la volon­té des pou­voirs publics avec le dyna­misme des entre­prises privées.
Il est utile, en conclu­sion du pré­sent dos­sier, de reve­nir aux fon­da­men­taux de la Know­ledge Indus­try née dans les années 1990, pour syn­thé­ti­ser et remettre en pers­pec­tive ses fai­blesses, mais aus­si et sur­tout ses atouts.

L’industrie de la connais­sance est consti­tuée de grands groupes, d’ETI, de PME et de TPE qui exercent leurs acti­vi­tés dans dif­fé­rents domaines : tra­di­tion­nel­le­ment le numé­rique, l’ingénierie, le conseil, l’événementiel, la for­ma­tion, mais aus­si la banque et l’assurance que j’ai l’honneur de repré­sen­ter, ou encore d’autres branches telles que la publi­ci­té ou les opé­ra­teurs télé­coms. Tous font par­tie des métiers dits de l’intelligence pro­duc­tive. C’est un rouage clé de l’industrie 4.0, le fer de lance de l’économie imma­té­rielle des acti­vi­tés de ser­vices à forte valeur ajou­tée, autre­ment appe­lée l’économie des savoirs.

Conseiller, inventer, créer, bâtir, rénover

L’industrie de la connais­sance met ses ser­vices à dis­po­si­tion des autres acteurs de l’économie, qu’ils soient publics ou pri­vés. Elle regroupe en son sein des popu­la­tions for­te­ment diplô­mées aux com­pé­tences poin­tues, qui sont implan­tées prin­ci­pa­le­ment dans les grands centres de déci­sion métro­po­li­tains et qui font l’objet d’une com­pé­ti­tion mondiale.

Cet état des lieux énon­cé, force est de consta­ter que nous nous trou­vons à un moment char­nière : d’ici à 2025, l’humain pour­rait être rem­pla­cé par la machine dans 85 mil­lions d’emplois, tan­dis que pour­raient émer­ger 97 mil­lions de nou­velles com­pé­tences plus adap­tées à la nou­velle divi­sion du tra­vail entre l’homme, la machine et les algo­rithmes, selon le forum éco­no­mique mondial.

La Dares et France Stra­té­gie s’attendent, quant à elles, à quelque 90 000 créa­tions nettes d’emplois chaque année, qui se concen­tre­ront essen­tiel­le­ment autour des actifs qua­li­fiés et diplô­més du supé­rieur. Cette évo­lu­tion place l’industrie de la connais­sance et ses res­sources face à de nom­breux défis édu­ca­tifs, sociaux et sociétaux.


Les chiffres clés du secteur Syntec (numérique, ingénierie, conseil, événementiel, hors formation professionnelle) 

  • + 21 % de créa­tions d’emplois par an en moyenne, soit plus de 60 000 emplois nets
  • 80 000 entre­prises
  • 1 mil­lion de sala­riés, dont plus de 70 % de bac + 5
  • Un chiffre d’affaires annuel de plus de 110 Md€ soit 8 % du PIB national.

(Source : Fédé­ra­tion Syntec)


Former, évoluer, déconcentrer

Pour y répondre, plu­sieurs freins sont à des­ser­rer, à com­men­cer par le désa­jus­te­ment quan­ti­ta­tif et qua­li­ta­tif entre les pro­fils frais émou­lus du sys­tème de for­ma­tion et les besoins des entre­prises. Le volume de diplô­més adap­tés à l’économie est notoi­re­ment insuf­fi­sant (45 % des jeunes Alle­mands suivent des for­ma­tions scien­ti­fiques, pour seule­ment 20 % en France) et dénote l’absence d’une véri­table stra­té­gie édu­ca­tive sus­cep­tible de répondre aux requêtes de l’industrie de la connais­sance. Nos sec­teurs, par la nature de leurs acti­vi­tés et les remon­tées du ter­rain, sont pour­tant par­ti­cu­liè­re­ment bien pla­cés pour éva­luer les besoins et contri­buer ain­si aux pro­grammes édu­ca­tifs et à la défi­ni­tion des for­ma­tions ini­tiales et continues.

Si l’on consi­dère qu’un actif chan­ge­ra en moyenne 13 à 15 fois de tra­vail au cours de sa car­rière, il est clair que la mobi­li­té des talents est un atout dont il faut se sai­sir. Être éli­gible à des for­ma­tions com­plé­men­taires tout au long de sa vie sup­pose cepen­dant que votre bagage ini­tial inclue des com­pé­tences de type scien­ti­fique. C’est la condi­tion sine qua non pour s’adapter au monde de demain ; mais aus­si un réel pro­blème en France, au vu du pour­cen­tage de jeunes filles qui délaissent de plus en plus ces études. Même si par exemple le sec­teur de l’assurance ne fait pas direc­te­ment par­tie de l’ingénierie, il est domi­né par des métiers de chiffres et de don­nées, métiers spé­cia­li­sés où les femmes sont trop peu représentées.


Trois propositions pour attirer les femmes vers les filières technologiques :

  • Orga­ni­ser des états géné­raux « femmes et sciences ».
  • Fixer un objec­tif de mixi­té au lycée.
  • Déve­lop­per les réseaux et les sys­tèmes de mentorat.

Paral­lè­le­ment, de nom­breuses trappes à mobi­li­tés sociales et géo­gra­phiques s’accumulent, géné­rant des inéga­li­tés, qui à leur tour entraînent des gâchis de talents et une perte en capi­tal humain. Pour autant, plus de 50 000 sala­riés accèdent chaque année à un sta­tut de cadre par pro­mo­tion interne dans nos sec­teurs (qua­li­fi­ca­tion propre ou for­ma­tion per­ma­nente). La réa­li­té de l’ascenseur social fonc­tionne et est tan­gible. Nous avons conscience qu’il faut la déve­lop­per davan­tage, encore faut-il, je le répète, dis­po­ser d’un socle mini­mal de connais­sances scien­ti­fiques, la for­ma­tion per­ma­nente ne pou­vant pas com­pen­ser les trous béants de la for­ma­tion initiale…

C’est là qu’intervient le rôle majeur de l’apprentissage, dont la réforme lan­cée par la loi Ave­nir de sep­tembre 2018 est indé­nia­ble­ment un suc­cès. Il faut capi­ta­li­ser sur cette réus­site de la for­ma­tion com­plé­men­taire sur le ter­rain, y com­pris dans les études supé­rieures, et péren­ni­ser les inci­ta­tions fis­cales dont elle béné­fi­cie. C’est aus­si un moyen d’encourager et de faci­li­ter les études puis l’emploi d’étudiants moins dotés finan­ciè­re­ment, grâce à la contri­bu­tion des entre­prises, et ain­si aug­men­ter la mobi­li­té sociale.

Enfin, la revi­ta­li­sa­tion et la recon­quête des ter­ri­toires sont indis­pen­sables pour com­pen­ser la sur­re­pré­sen­ta­tion des cadres dans les grandes agglo­mé­ra­tions, par­ti­cu­liè­re­ment en Île-de-France. Si la pré­sence dans les ter­ri­toires est plus homo­gène dans la banque et l’assurance que dans d’autres sec­teurs – les agences de proxi­mi­té des assu­reurs et les répa­ra­teurs asso­ciés gèrent 36 000 sinistres par jour sur l’ensemble du ter­ri­toire – il n’en reste pas moins que les cadres dans les centres de déci­sion res­tent (trop) concen­trés et loca­li­sés dans les métropoles.

Enrichir, valoriser, dynamiser

La part de l’immatériel, du tra­vail intel­lec­tuel et de la recherche et du déve­lop­pe­ment dans les pro­ces­sus de créa­tion des richesses et dans les richesses elles-mêmes ne cesse de croître. Comme l’a très jus­te­ment sou­li­gné Serge Sou­do­pla­toff (73) : « Quand on par­tage un bien maté­riel on le divise, quand on par­tage un bien imma­té­riel on le mul­ti­plie. » Les flux de l’économie de la connais­sance et des ser­vices en par­ti­cu­lier ont enre­gis­tré en 2021 un excé­dent record de 36,2 mil­liards d’euros.

L’intelligence pro­duc­tive est aus­si un état d’esprit, par l’impact de ses res­sources trans­ver­sales. En maniant l’information, les connais­sances et les data, elle crée de la valeur ajou­tée tant maté­rielle qu’immatérielle au ser­vice de la per­for­mance et donc in fine de la pro­duc­ti­vi­té. Ce thème, cher à Viviane Chaine-Ribei­ro – ancienne pré­si­dente de la Fédé­ra­tion Syn­tec et figure emblé­ma­tique de l’entrepreneuriat et du numé­rique –, valo­rise les com­pé­tences intel­lec­tuelles qui sont en effet cru­ciales dans nos métiers, que ce soit en termes de modé­li­sa­tion et cota­tion des risques ou de pré­ven­tion (catas­trophes natu­relles, réchauf­fe­ment climatique…).

“Quand on partage un bien matériel on le divise, quand on partage un bien immatériel on le multiplie”

Par son dyna­misme, son poids et son fonc­tion­ne­ment, l’industrie de la connais­sance est un sec­teur éco­no­mique stra­té­gique, qui des­sine les contours des tran­si­tions éco­no­miques, éco­lo­giques et sociales. Elle sous-tend et sou­tient nos défis col­lec­tifs, mon­diaux, euro­péens, natio­naux. C’est un fac­teur clé pour peser dans la com­pé­ti­tion inter­na­tio­nale, notam­ment à tra­vers la R & D.

L’assurance inves­tit à ce titre depuis des décen­nies dans la pré­ven­tion à 360° (col­lec­ti­vi­tés, entre­prises, par­ti­cu­liers) pour pro­mou­voir des com­por­te­ments plus res­pon­sables et limi­ter ain­si les consé­quences des catas­trophes natu­relles, inno­ver en san­té ou lut­ter contre les cybe­rat­taques. Avec un objec­tif prin­ceps, mieux gérer la mon­tée iné­luc­table des risques en col­la­bo­ra­tion avec les pou­voirs publics.

Au vu de l’ensemble de ces élé­ments et dans un contexte natio­nal et inter­na­tio­nal en constante muta­tion, l’emploi qua­li­fié est un actif stra­té­gique à la fois moteur et pilier de notre appa­reil pro­duc­tif. Une saine exploi­ta­tion des poten­tia­li­tés des métiers de l’intelligence pro­duc­tive fera de l’industrie de la connais­sance une res­source tou­jours plus pré­cieuse de déve­lop­pe­ment au ser­vice de l’intérêt général.


Le secteur de l’assurance

La fédé­ra­tion France assu­reurs a été créée en juillet 2016 de la réunion de la Fédé­ra­tion fran­çaise des socié­tés d’assurances (FFSA) et du Grou­pe­ment des entre­prises mutuelles d’assurance (GEMA). Elle ras­semble ain­si l’ensemble des entre­prises d’assurance et de réas­su­rance opé­rant en France, soit 247 socié­tés repré­sen­tant plus de 99 % du mar­ché glo­bal de l’assurance.

Ses prin­ci­pales mis­sions sont de pré­ser­ver l’ensemble du champ éco­no­mique et social en rela­tion avec les acti­vi­tés assu­ran­tielles ; repré­sen­ter l’assurance auprès des pou­voirs publics natio­naux et inter­na­tio­naux, des ins­ti­tu­tions et des auto­ri­tés admi­nis­tra­tives ou de place ; offrir un lieu de concer­ta­tion et d’analyse des ques­tions finan­cières, tech­niques ou juri­diques ; four­nir les don­nées sta­tis­tiques essen­tielles de la pro­fes­sion ; infor­mer le public et les médias ; pro­mou­voir les actions de pré­ven­tion ; pro­mou­voir la place de l’assurance dans le monde aca­dé­mique et la formation. 

Le sec­teur de l’Assurance emploie 149 100 tra­vailleurs, 255 000 en comp­tant les inter­mé­diaires, et compte 52 300 éta­blis­se­ments à tra­vers la France. L’assurance est le pre­mier finan­ceur de l’économie du pays grâce à l’argent confié par les épargnants.


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