Roxel

L’innovation, moteur du développement du marché de la défense

Dossier : Vie des EntreprisesMagazine N°737 Septembre 2018
Par Jacques DESCLAUX

Rappelez-nous le positionnement de Roxel dans le secteur de la défense.

Roxel est un groupe fran­co-bri­tan­nique, le lea­der euro­péen de la pro­pul­sion tac­tique et le troi­sième acteur mon­dial. Roxel est une filiale de MBDA et de Safran qui conçoit, déve­loppe, indus­tria­lise et com­mer­cia­lise des moteurs solides pour les sys­tèmes d’armes tac­tiques, les mis­siles de croi­sière et d’autres appli­ca­tions, comme les cibles aériennes, par exemple. Notre coeur de métier tourne notam­ment autour de la concep­tion de moteur anaé­ro­bie, qui a la capa­ci­té de fonc­tion­ner sans uti­li­ser d’air. Le moteur emporte ses propres com­bus­tible et car­bu­rant, que nous appe­lons dans notre jar­gon le pro­per­gol solide. Notre acti­vi­té est essen­tiel­le­ment orien­tée vers le mar­ché de la défense. Notre prin­ci­pal client est le mis­si­lier MBDA pour ces quatre mar­chés domes­tiques : la France, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Allemagne. Nous expor­tons aus­si en propre notam­ment vers les anciens pays de l’Est, le Moyen-Orient et l’Asie du Sud-Est. Roxel regroupe 650 col­la­bo­ra­teurs et réa­lise un chiffre d’affaires annuel de 120 mil­lions d’euros, qui tend rapi­de­ment vers 150 millions. 


Corps d’allumeur en fabri­ca­tion additive

Sur le marché de la défense, quelles sont vos ambitions ?

Nous fai­sons face à une forte concur­rence des pays déve­lop­pés et en voie de déve­lop­pe­ment. Pour conser­ver notre avan­tage com­pé­ti­tif et avoir un levier de dif­fé­ren­cia­tion, nous misons sur l’innovation. Notre ambi­tion est de pou­voir pro­po­ser de nou­veaux pro­duits tou­jours plus per­for­mants, mais aus­si plus éco­no­miques. Chez Roxel, l’innovation est double. Elle est dans notre ADN et est issue de la recherche finan­cée dans le cadre de la défense. Par exemple, nous réflé­chis­sons aux nou­veaux pro­per­gols en tra­vaillant notam­ment pour leurs élé­ments sur l’utilisation des molé­cules nitrées, qui sont plus éner­gé­tiques, mais aus­si beau­coup plus instables. Elle est aus­si ins­pi­rée des tech­no­lo­gies et des pro­cé­dés uti­li­sés dans l’ensemble des indus­tries, comme la fabri­ca­tion addi­tive, un pro­cé­dé qui cor­res­pond bien à la taille de nos pièces et de leur com­plexi­té. Notre métier est à la confluence entre la chi­mie et la méca­nique. Nous avons besoin d’excellents chi­mistes pour éla­bo­rer les for­mu­la­tions de nos pro­per­gols et de très bons méca­ni­ciens pour réa­li­ser les cal­culs et le dimen­sion­ne­ment pour les insé­rer dans nos moteurs afin de faire en sorte qu’ils génèrent de la pro­pul­sion. Cela néces­site aus­si une large palette de com­pé­tences afin de rendre nos moteurs plus com­pacts pour gagner en per­for­mance, et plus aisés à fabri­quer pour être plus com­pé­ti­tifs. Dans cette optique, nous déve­lop­pons des tech­no­lo­gies de rup­ture comme le malaxage par réso­nance acous­tique, un pro­cé­dé emprun­té à l’industrie phar­ma­ceu­tique, qui rem­pla­ce­ra à terme le malaxage méca­nique clas­sique et per­met­tra ain­si de réduire consi­dé­ra­ble­ment les cycles de fabri­ca­tion en pas­sant d’un mois à quelques heures. 

Qu’en est-il des principales tendances qui caractérisent le marché de la défense actuellement ?

Après des dizaines d’années de décrois­sance, les bud­gets de défense repartent à la hausse aus­si bien en Europe que dans le reste du monde notam­ment en réponse à la mul­ti­pli­ca­tion des ten­sions. De plus en plus de pays en voie de déve­lop­pe­ment veulent ache­ter du maté­riel et bâtir une indus­trie de la défense. Pour cela, ils sont deman­deurs de trans­ferts de tech­no­lo­gies et nous sol­li­citent très régu­liè­re­ment sur ce volet. Dans ce cadre, l’innovation est cen­trale, elle nous per­met de gar­der une lon­gueur d’avance, alors que ces trans­ferts ne concernent bien évi­dem­ment pas les tech­no­lo­gies récentes ou en cours de déve­lop­pe­ment. La concur­rence est d’abord euro­péenne avec la Tur­quie par exemple, amé­ri­caine et vient aus­si des pays d’Asie et de l’Amérique du Sud. Elle est notam­ment éco­no­mique, car ces pays béné­fi­cient d’une main d’oeuvre à moindre coût. Il est donc essen­tiel de conti­nuer à pro­gres­ser et inno­ver pour réduire nos coûts de pro­duc­tion, mais aus­si pour gagner des nou­velles parts de mar­ché ou nouer des par­te­na­riats stra­té­giques, alors que Roxel est plus que jamais un acteur incon­tour­nable et recon­nu dans le domaine. 

Roxel
Cloi­son de sépa­ra­tion par fusion laser (SLM)

Sur un plan plus humain, attirer et fidéliser les talents est un véritable enjeu pour les industriels de tous bords. Quel est votre positionnement à ce niveau ?

Sur les deux der­nières années, Roxel a recru­té 25 % de nou­veaux col­la­bo­ra­teurs pour rem­pla­cer des départs natu­rels et assu­rer les res­sources néces­saires pour tenir une crois­sance pré­vue fixée à 30 %. Pour atti­rer et fidé­li­ser les talents, notre meilleur argu­ment reste le déve­lop­pe­ment conti­nu de notre entre­prise en misant sur l’innovation et des inves­tis­se­ments mas­sifs. Dans cette optique, nous sommes en train de réno­ver et d’adapter notre outil indus­triel, soit l’ensemble de nos éta­blis­se­ments (3 usines en France et 1 au Royaume-Uni). Nous réno­vons et moder­ni­sons nos ins­tal­la­tions pour des usines au mini­mum 3.0. Nous implé­men­tons des logi­ciels de MES (Manu­fac­tu­ring Exe­cu­tion Sys­tem) avec dif­fé­rents outils pour rele­ver les para­mètres de tous nos pro­cé­dés. C’est un aspect fon­da­men­tal, car nous sommes sur des pro­duits que nous ne pou­vons pas tes­ter alors que nous devons garan­tir à nos clients leur confor­mi­té. Avec ces sys­tèmes modernes de rele­vé de para­mètres de pro­cé­dés, nous pou­vons garan­tir la confor­mi­té et ain­si évi­ter des tests inutiles. Cela passe aus­si par la robo­ti­sa­tion et l’adaptation de la taille de notre outil indus­triel pour gagner un maxi­mum de com­pé­ti­ti­vi­té. En paral­lèle, nous res­tons vigi­lants sur la mon­tée en com­pé­tence et la poly­va­lence de nos col­la­bo­ra­teurs. En effet, dans une ETI comme Roxel, il n’y a pas d’hyperspécialisation comme cela pour­rait être le cas dans des groupes plus grands. 

Vos enjeux ? Vos perspectives ?

Conti­nuer à évo­luer vers l’usine du futur, c’est une démarche iné­luc­table à laquelle nous ne pou­vons pas échap­per. En paral­lèle, nous res­tons foca­li­sés sur la sécu­ri­té, un enjeu fort pour une socié­té qui tra­vaille sur des sys­tèmes pyro­tech­niques. Pour évi­ter les acci­dents, la rigueur et le res­pect des pro­cé­dures sont indis­pen­sables. Enfin, parce que nos sys­tèmes res­tent assez com­plexes, nous devons faire appel à de nom­breux métiers et tech­no­lo­gies. Nous sommes donc ouverts aux col­la­bo­ra­tions avec des labo­ra­toires exté­rieurs pour per­mettre notam­ment à nos experts de déve­lop­per leurs com­pé­tences par le contact avec des scien­ti­fiques de haut niveau.

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