Logistique et livraison, clés du e‑commerce
REPÈRES
REPÈRES
Plus de 30 millions de Français ont réalisé un achat sur Internet en 2011. Le commerce en ligne est devenu en dix ans un mode de consommation courant. Mais, pour les biens physiques, un achat en ligne n’est réussi que lorsque le consommateur peut prendre possession de son acquisition rapidement et sans mauvaise surprise. La logistique et la livraison constituent ainsi des conditions clefs du développement du commerce sur Internet. Et les opérateurs postaux se sont ainsi trouvés au début des années 2000 sur le chemin critique du développement de ce nouveau mode de commercialisation.
La révolution de la vente à distance
L’arrivée d’Internet a pris tous les acteurs au dépourvu
Après la Seconde Guerre mondiale, la vente par correspondance (VPC) s’est développée, essentiellement à partir de l’industrie textile du nord de la France, et La Poste a proposé des services de livraison de colis à domicile. Le modèle économique reposait sur la constitution de deux collections par an, sur la diffusion en grand nombre d’un catalogue illustré, sur des remises accordées en fonction du niveau de vente de chaque article, sur des prises de commande d’abord par courrier puis par téléphone, sur des soldes pour liquider les invendus et sur une livraison en 5 à 10 jours.
Au Bonheur des dames
La vente à distance est une pratique qui était autrefois fondée sur la diffusion de catalogues et la communication par courrier. Émile Zola décrit comment les premiers grands magasins parisiens recevaient et honoraient les commandes de leurs clientes de province. À l’époque, les colis étaient transportés par les compagnies de chemins de fer jusqu’à la gare la plus proche de l’adresse du destinataire, où des petits transporteurs, les « messagers », prenaient le relais, en facturant souvent cette prestation « des derniers kilomètres » au destinataire.
De grandes enseignes comme La Redoute, Les 3 Suisses ou la CAMIF ont fait la renommée de ce mode de commercialisation. L’arrivée d’Internet a pris tous ces acteurs au dépourvu. Les nouveaux arrivants qui n’utilisaient que le canal de l’Internet (les pure players) ont proposé plus de choix, des stocks en temps réel permettant de ne pas décevoir les acheteurs par des délais de réassort, et ils ont réduit leurs charges en s’affranchissant du coûteux catalogue ou en n’acceptant que les commandes payées en ligne par carte bancaire. Ils se sont également efforcés de préparer rapidement les commandes et ont tous opté pour une livraison rapide.
Des spécialistes aux généralistes
Certains de ces nouveaux vendeurs à distance ont commencé par un positionnement de spécialistes (Amazon sur les livres, Pixmania sur les appareils photo numériques, CDiscount sur les DVD) avant de devenir généralistes en faisant bénéficier d’autres petits vendeurs de l’audience de leurs sites à travers des « galeries marchandes », comme les hypermarchés ont en leur temps attiré d’autres commerces.
Un client qui attend son colis ou ne le reçoit pas risque de ne pas refaire d’achat en ligne
D’autres ont découvert comment Internet pouvait étendre au monde entier leur zone de chalandise, et qu’ils pouvaient ainsi devenir des spécialistes mondiaux du matériel de pêche, de broderie ou des équipements de moto. Pour certains articles, Internet a permis de compenser la faible efficacité de la distribution traditionnelle : le succès de la vente de chaussures en ligne s’explique ainsi en grande partie par le fait qu’un client qui entre dans un magasin de chaussures a une chance sur deux de ne pas trouver chaussure à son pied. De même, pour l’électroménager, vendre en ligne permet d’économiser des surfaces d’exposition coûteuses et bien peu utilisées. En quelques années, même chez des enseignes historiques de la vente à distance, la commande en ligne est devenue majoritaire et les principes du e‑commerce se sont imposés.
Une livraison en toute confiance
Les e‑commerçants ont redécouvert les impératifs de la préparation de commande depuis longtemps maîtrisés par leurs prédécesseurs de la VPC : optimisation du stockage et du parcours de constitution du colis (picking), sécurisation des entrepôts et du processus de transport, problématique des retours et de leur gestion, coût des emballages de transport, nécessité de disposer d’un bon service client, etc.
Ventes événementielles
Grâce à Internet, le métier traditionnel de la braderie, filière historique d’écoulements des invendus, a même donné naissance au secteur florissant des « ventes événementielles » avec le français Vente-Privée.com comme leader mondial.
En effet, un client qui attend son colis ou, pire, qui ne le reçoit pas, risque évidemment de ne pas refaire d’achat en ligne. Les e‑commerçants ont également découvert la variabilité du rythme des commandes (saisonnalité, effet des campagnes de promotion, charge du lundi suite aux commandes du week-end, etc.) et la difficulté à répondre toujours rapidement aux commandes enregistrées.
Et ils ont bien sûr immédiatement réalisé que leur activité dépendait intégralement de la livraison et donc du prestataire capable de l’assurer.
Les points relais, une solution
Boîtes normalisées
L’e‑commerce français bénéficie de l’initiative prise par l’administration postale à la fin des années 1970 : la boîte aux lettres normalisée (NF D 27404 ou 405), obligatoire pour toute construction autorisée depuis le 12 juillet 1979, a un format qui permet la livraison de colis de 260 x 260 x 340 mm même en l’absence du destinataire. Grâce à ces boîtes aux lettres qui équipent 70% des adresses françaises, La Poste arrive à livrer directement plus de 70% des colis qui lui sont confiés. Cette méthode de distribution est évidemment particulièrement adaptée aux petits objets de faible valeur.
Parallèlement, les spécialistes historiques de la vente à distance ont développé en France la livraison en « points relais », c’est-à-dire dans des commerces de proximité. Cette solution a d’abord été développée pour s’affranchir des risques liés aux grèves des services publics, alors que le conflit de 1995 avait été dévastateur pour la vente à distance. Mais ce mode de livraison a très vite répondu aux attentes de certains consommateurs rarement présents chez eux lorsque les livreurs peuvent s’y présenter. Par ailleurs, la livraison en un même point de plusieurs colis et le dédommagement fort modeste versé au commerçant en ont fait un mode de livraison low-cost.
Livrer à domicile, un travail de spécialiste
Internet a créé de nouvelles opportunités commerciales
La livraison aux particuliers à leur domicile se révèle en effet beaucoup plus compliquée que celle des entreprises. Localiser un logement précis dans un ensemble peut prendre du temps et le destinataire d’un envoi n’est pas toujours chez lui. Les spécialistes de la livraison des entreprises ont donc souvent évité de prendre des flux à destination des particuliers et La Poste a longtemps conforté sa position de spécialiste de livraison des particuliers à domicile. Ses facteurs disposent en effet d’une connaissance intime de leurs circuits de livraison, au point de s’adapter parfois aux habitudes des habitants et de pouvoir identifier un voisin de confiance pour lui demander de prendre en charge un envoi.
Cinq modes de livraison
Réseau de proximité
La Poste bénéficie, avec son réseau de plus de 17000 points de contact, d’une solution de grande proximité pour mettre à disposition les colis qu’elle n’a pas été en mesure de livrer à domicile, faute de présence du destinataire. En 2011, plus de 88 % des envois ont été effectivement livrés à l’adresse de destination, et plus de 80% des destinataires ayant retiré un envoi dans un bureau de poste se sont déclarés satisfaits ou très satisfaits de cette solution.
La Poste peut maintenant offrir le choix entre cinq modes de livraison : la livraison à domicile ou au bureau, la livraison le soir sur rendez- vous à Paris, la livraison dans une consigne automatique accessible 24 heures sur 24, la livraison dans l’un des 10 000 bureaux de poste proposés ou dans plus de 3 500 commerces de proximité. Des transporteurs spécialisés effectuent par ailleurs sur toute la France les livraisons sur rendez-vous des objets lourds et encombrants, le cas échéant avec des prestations annexes d’installation.
Il n’est donc pas étonnant que plus de 97% des acheteurs en ligne se soient déclarés satisfaits de leur achat en 2011.
Moins de CO2
Moins de déplacements
La Poste mutualise fortement les livraisons de colis et de courrier : lorsqu’une camionnette jaune livre 100 colis, ce sont peut-être 100 particuliers qui n’ont pas eu à se déplacer. L’e‑commerce contribue ainsi à limiter la congestion urbaine.
La vente à distance est fondamentalement favorable à la préservation de notre environnement. Une étude réalisée par la Fédération des entreprises de vente à distance (FEVAD) auprès de plus de 6 000 acheteurs à distance a démontré que ce mode de consommation permettait d’éviter des déplacements et pouvait conduire à quatre fois moins d’émissions de CO2 que l’achat en magasin.
Aujourd’hui, tout le monde ou presque achète en ligne et, avec Internet, chacun peut vendre de partout et vers le monde entier, à peu près n’importe quoi.
Chaque consommateur peut devenir e‑commerçant
Internet a non seulement permis à de nouveaux acteurs pure players de développer leur activité, mais concourt aujourd’hui au développement d’un commerce « multicanal ». On peut choisir son produit en ligne et l’acheter en magasin, ou repérer un modèle en magasin sans trouver la bonne taille et finalement la recevoir en 48 heures à domicile. Si Internet a facilité la désintermédiation et ouvert la voie à un contact direct entre consommateur et producteur ou distributeur, sans passer par des commerces locaux, il a surtout créé de nouvelles opportunités commerciales.
Tout un chacun peut ainsi proposer sur la Toile ses créations ou ses objets inutilisés. Ce commerce entre particuliers se développe et remplace les brocantes d’autrefois tout en favorisant le recyclage ou l’usage multiple de certains objets, comme les livres, par exemple. Il peut même constituer une solution pour monétiser ses possessions dans un moment difficile, remplaçant ainsi le prêt sur gage de « Ma Tante ».