L’opérateur historique et la concurrence.
Qualifié tour à tour d’exploitant public, d’opérateur public, d’opérateur historique ou d’opérateur monopolistique, la place de France Télécom demeure unique : nouvel entrant à l’étranger comme ses concurrents le sont en France, mais surtout ancien monopole dans son pays d’origine, cette jeune société issue de l’administration des P et T a dû mener simultanément la guerre sur plusieurs fronts.
D’abord pour profiter de l’expansion du marché des télécommunications en France et à l’étranger ; ensuite et surtout pour protéger de l’appétit de ses compétiteurs nationaux sa rente de situation conséquence du monopole, qui devait à la fois assurer le financement de ses conquêtes et aussi conforter le porte-monnaie de ses actionnaires.
En effet, la loi de 1996 mettait en place une série d’obligations et de contraintes pouvant représenter un danger avec lequel elle a petit à petit appris à vivre.
Dans le jeu de la concurrence dans les télécommunications France Télécom tient le rôle de « l’opérateur historique » – tout au moins en France, car dans les autres pays d’Europe ou d’ailleurs ses filiales se comportent bien sûr comme des « nouveaux entrants ». C’est un grand rôle. Mais ce n’est pas le beau rôle. En tout cas, c’est un rôle bien difficile, qui nécessite beaucoup d’exercices, de répétitions et d’efforts. Et c’est un rôle ingrat, car malgré tout le talent que l’on peut y mettre, les partenaires (les concurrents) et les critiques (les autorités en charge de la régulation ou de la concurrence) se déclarent rarement satisfaits de la performance.
Heureusement, les spectateurs (les clients), eux, semblent apprécier, puisqu’ils restent majoritairement fidèles à ce « bon vieil opérateur historique », tout en se réjouissant tout de même qu’il ne soit plus seul en scène.
Historique
France Télécom, issue de la Direction générale des télécommunications, administration centrale relevant du ministère des PTT, a été pendant longtemps – un siècle – en situation de monopole, sauf sur certaines de ses activités comme la vente des terminaux ou des centraux d’entreprises. Sa mise en concurrence totale s’est effectuée en deux étapes.
- Les lois de 1990 ont doté France Télécom d’un statut d’établissement autonome de droit public chargé de missions de service public. Elles ont aussi défini strictement le champ respectif des activités restant en monopole, comme la téléphonie vocale, des activités en concurrence soumises à autorisation et des activités totalement libres.
- Les lois de 1996, conformément aux décisions prises au niveau communautaire, ont abrogé tout monopole en matière de télécommunications à partir du 1er janvier 1998. Mais cela seul n’aurait pas suffi. Pour permettre à de nouveaux acteurs d’intervenir sur ce marché jusque-là dominé par un opérateur dont les performances, et cela ne facilitait pas les choses, étaient largement reconnues et appréciées des clients, il a fallu instaurer toute une réglementation spécifique, extrêmement complexe, fortement asymétrique, imposant à l’opérateur historique des contraintes particulières.
Une instance administrative d’un type nouveau, l’Autorité de régulation des télécommunications (ART), était mise en place pour veiller, aux côtés du ministre chargé des télécommunications, au respect et au bon fonctionnement de cette réglementation sectorielle. Dans le même temps, ces lois ont donné à France Télécom le statut de société anonyme à capital détenu majoritairement par l’État.
Et le résultat est spectaculaire.
Les objectifs poursuivis en 1996 ont été parfaitement atteints. Il faut se rappeler – mais que tout cela paraît lointain, aujourd’hui ! – les nombreux débats de l’époque : que d’interrogations, de scepticisme, voire d’oppositions à propos de l’ouverture de la téléphonie à la concurrence, ou encore de la possibilité de transformer l’administration des télécommunications en une véritable entreprise !
En quelques années, les nouveaux opérateurs se sont multipliés, jusqu’à dépasser largement la centaine. Après l’inévitable phase de consolidation, ils sont maintenant plusieurs dizaines et ont pris des parts de marché tout à fait significatives, ainsi dans la téléphonie mobile où ils dépassent au total les 50 %.
Quant à France Télécom, l’actualité des derniers mois s’est malheureusement chargée de démontrer à ceux qui pouvaient encore en douter qu’elle avait à présent tous les attributs d’une » vraie entreprise « , c’est-à-dire en particulier qu’elle n’est plus immortelle…
Le cadre juridique mis en place en 1996 a donc bien joué son rôle qui consistait à assurer le passage d’une situation de monopole à un régime concurrentiel, en évitant que l’opérateur historique ne tente d’abuser de sa position dominante pour empêcher le développement d’opérateurs concurrents et en évitant que les consommateurs les moins favorisés, géographiquement ou économiquement, fassent les frais de la fin du monopole public. C’est cette dernière préoccupation qui a conduit à la notion de » service universel « .
L’asymétrie
Le cadre juridique a bien joué son rôle. Le régulateur aussi. Mais pourquoi ne pas le dire : France Télécom aussi a bien joué son rôle. Un rôle ô combien subtil et paradoxal !
Car, d’un côté, du fait de son passé d’administration, de la propriété majoritairement publique de son capital et des missions de service public qu’on lui a confiées, la société continue à attendre plus ou moins confusément de l’entreprise nationale qu’elle propose tous ses services un peu comme avant, lorsqu’elle était encore » le service public » national et en monopole. On attend d’elle notamment qu’elle ait un rôle éminent en matière d’aménagement du territoire : il paraît encore évident à tous que ses prestations doivent être disponibles sur l’ensemble du territoire, et, plus encore, que les prix qu’elle pratique soient partout identiques, alors même que ses coûts de revient varient fortement en fonction de la densité de population.
En même temps, on lui demande de jouer pleinement le jeu de la concurrence et même de se plier de bon gré, de façon à faire de la place à ses concurrents, à une réglementation asymétrique qui est à son détriment. Or ses concurrents, eux aussi, ont des coûts bien plus faibles dans les zones les plus denses ; mais eux, ils n’offrent leurs services que dans ces seules zones, à des prix, du coup, structurellement plus compétitifs que ceux, soumis à péréquation, de l’opérateur historique.
Il a fallu apprendre. En particulier l’auteur de l’article, qui ferraille chez l’opérateur historique sur le front réglementaire, a beaucoup appris.
Que la régulation ex ante (c’est-à-dire l’imposition d’obligations à remplir a priori, comme la fourniture de services à ses concurrents), qui était présentée comme une étape transitoire vers le régime normal du droit de la concurrence, bien loin de s’alléger au fur et à mesure du développement de la compétition, ne fait que se complexifier, se ramifier, se raffiner…, se renforcer pour tout dire, puisque chaque nouvelle règle du jeu nécessite inéluctablement d’être complétée par un nouvel ensemble de règles qui sont seules à même de garantir le bon fonctionnement de la première règle…
Que le respect d’obligations ex ante, imposées par le régulateur, ne met pas à l’abri de poursuites au titre du droit de la concurrence ex post, et que si ce dernier prohibe l’abus de position dominante, et non la position dominante en elle-même, l’opérateur historique » jouit » en la matière d’une présomption générale d’abus…
Que les hausses de tarifs sont mal venues de qui a la charge du service universel et doit à ce titre fournir un service de qualité à un prix abordable à l’ensemble des citoyens. Que, d’un autre côté, les baisses de tarifs sont inopportunes si, moyennant certaines hypothèses qui ne pourront jamais être vérifiées puisque l’expérience réelle en sera empêchée, elles risquent de provoquer ce que l’on appelle un « effet de ciseaux », c’est-à-dire de concurrencer un tant soit peu vigoureusement les offres des autres opérateurs, les » nouveaux entrants « …
Que les segments élémentaires d’activité étant très nombreux dans le secteur des télécommunications, et puisqu’il faut laisser une place à tout opérateur qui déclare vouloir concurrencer l’opérateur historique sur tel ou tel de ces segments particuliers, le métier d’un opérateur global comme France Télécom se retrouve de fait découpé en un grand nombre d’activités, régulées de manière séparée, avec pour seul dénominateur commun la quasi-interdiction faite à l’opérateur global de faire bénéficier le client final des synergies qu’il est seul susceptible de dégager, que ce soit en termes de structures d’offres (couplages) ou plus encore de prix…
Que la complexité croissante de la régulation, associée à celle de la technologie qui caractérise le secteur, conduit à la paralysie des marketeurs et à la prise de pouvoir par une nouvelle race d’experts : les « technico-réglementeurs », qui disposent d’une sorte de droit de veto dans l’entreprise (« ça ne passera pas » !) et sont les seuls à même de lire, comprendre et traduire des décisions du régulateur dont certaines font plus de 60 pages…
Que pour lever les ultimes réticences des nouveaux entrants à se lancer dans une activité qui suppose que l’on prenne le risque d’investir, l’opérateur historique peut être conduit à offrir à ses concurrents l’usage, pour un tarif symbolique, quasi gratuit, de la principale de ses ressources, la paire de cuivre du réseau local…
Que lorsqu’il existe un fichier de 33 millions de clients qui sont facturés très régulièrement pour l’abonnement téléphonique, il serait dommage pour les opérateurs concurrents de ne pas en profiter pour ajouter à la facture de l’opérateur historique leurs propres prestations, sans que leur nom apparaisse, et en bénéficiant d’une garantie de paiement, même en cas de contentieux avec les clients finals…
Que lorsqu’on est nouvel entrant et que l’on supporte des coûts de structure réduits, sans commune mesure avec ceux d’un opérateur installé, qui dispose entre autres d’un centre de recherches reconnu mondialement, une manière de faire du chiffre d’affaires consiste à obtenir que l’opérateur historique soit contraint de vous vendre en gros un de ses services, y compris un des services développés dans son centre de recherches, à un tarif suffisamment bas pour pouvoir le revendre au client final moins cher que lui, tout en dégageant une marge…
Que la concurrence ne peut avoir pour seul effet que le départ de clients – jusqu’alors mal informés, forcément – de l’opérateur historique vers un de ses concurrents, et que si l’inverse devait advenir, ce serait évidemment le signe, au mieux d’un défaut de concurrence, et plus probablement d’une concurrence déloyale de la part de l’opérateur historique…
Des règles pas toujours évidentes
On a beaucoup appris, à France Télécom. Et on en a tiré quelques enseignements.
Tout d’abord, que la concurrence n’est pas chose naturelle dans le secteur des télécommunications, activité de réseaux par essence. La concurrence doit être » forcée » : il lui faut, pour exister, une réglementation spécifique, fortement asymétrique, et un régulateur vigilant et interventionniste. N’étant guère » naturelles « , les règles de la concurrence sectorielle ne vont pas toujours de soi, et il est inévitable que l’on se trompe parfois. Le régulateur peut se tromper, ou tout du moins tâtonner quelque peu avant de trouver le mécanisme qui va conduire à l’équilibre qu’il recherche.
Et l’opérateur historique peut se tromper, lui aussi. Au quotidien, tout d’abord.
Il faut que chaque marketeur ait le réflexe et la discipline d’examiner si telle innovation, qui répond aux attentes des clients, et doit permettre à France Télécom, et parfois même au-delà à tout le secteur, de se développer et de progresser, ne risque pas d’être considérée comme anticoncurrentielle à un titre ou à un autre. Malgré des débats internes nombreux, la » vérité » est loin d’apparaître évidente en ces matières. Des choix sont faits, qui parfois se révèlent erronés.
Il faut que chaque vendeur, à qui il est demandé d’atteindre des objectifs commerciaux ambitieux tout en continuant à honorer la mission de service public qui est confiée à France Télécom et qu’attend au demeurant la grande majorité de ses clients, soit attentif à respecter scrupuleusement, non pas les règles – il y en a peu -, mais bien plutôt les attitudes prescrites par le droit de la concurrence. Il peut arriver qu’un huissier mandaté par un concurrent constate ici ou là une petite entorse.
Mais l’opérateur historique peut se tromper également sur le plan stratégique.
A‑t-il intérêt à faire porter tel service ou telle offre par sa filiale de téléphonie mobile, ou par sa filiale Internet, ou encore par la maison mère (en charge de la téléphonie fixe) ? Au-delà de ces questions classiques, un opérateur historique doit en plus prendre en considération la dimension réglementaire et concurrentielle car ses implications peuvent être très différentes. Quelle place doit-il occuper sur le marché intermédiaire, c’est-à-dire le marché des offres de gros qui permettent à ses concurrents de lui prendre des parts de marché sur le marché de détail ? Ces questions sont extrêmement complexes et le fait que la mécanique concurrentielle n’obéit pas, ici, à des lois naturelles, ne fait que leur adjoindre une inconnue majeure.
La « bonne » et la « mauvaise » concurrence
De l’expérience de ces cinq années de concurrence complète, on a également tiré l’enseignement que la « bonne » concurrence, c’est-à-dire la concurrence qui bénéficie durablement aux clients finals, est celle qui s’installe entre des opérateurs « du métier ». Et ce métier consiste fondamentalement à offrir au client « l’accès » au monde des communications électroniques.
C’est l’accès qui est primordial ici, le reste – les communications – en découle.
Un opérateur qui fournit l’accès a un comportement sain : il cherche à développer l’usage que peut faire son client de son accès au monde des communications électroniques en promouvant tous les services, car tous les services lui rapportent, directement ou indirectement (ainsi le mécanisme des terminaisons d’appel qui intéresse l’opérateur au trafic arrivée). Ce modèle conduit à une concurrence entre des opérateurs qui, tout en cherchant chacun à augmenter ses propres parts de marché, ont tous intérêt à faire croître le même marché, à l’instar des constructeurs automobiles qui œuvrent tous à la croissance du marché automobile dans son ensemble : c’est le cas, pour les télécommunications, des mobiles.
Par contre une concurrence qui consiste à ouvrir, plus ou moins artificiellement, des espaces entre différents segments du réseau ou des services pour permettre à une myriade de fournisseurs de services de prospérer sur chacune des sous-activités élémentaires, emporte tous ses acteurs dans une spirale de destruction de la valeur, dont l’opérateur historique est la première victime, tout en étant contraint d’en être également un acteur. Un tel modèle peut sembler profitable à court terme aux clients finals : il se traduit en effet par une guerre des prix dont ils sont les bénéficiaires. Mais force est de constater qu’il tue à moyen terme toute innovation – en dehors des seules innovations « marketing » – et décourage l’investissement.
Cette question du modèle de concurrence peut être illustrée par le cas du haut débit. La technologie dite « ADSL » (Asymmetric Digital Subscriber Line) permet de transmettre sur la paire de cuivre utilisée pour le téléphone des informations numériques à haut débit (typiquement 512 kbits/seconde). Elle suppose la mise en place d’équipements spécifiques (les « DSLAM » : Digital Subscriber Line Access Multiplexer) dans les répartiteurs où se concentrent les lignes d’abonnés. Le trafic haut débit est ensuite véhiculé à travers un réseau numérique jusqu’aux plates-formes des fournisseurs de services correspondants.
Aujourd’hui, cette technologie est utilisée pour offrir au client final un accès haut débit à l’Internet. Pour permettre la concurrence sur ce service d’accès haut débit à Internet, France Télécom a été contrainte d’élaborer de multiples offres de gros : la paire de cuivre nue (ce que l’on appelle le dégroupage total) ; les fréquences hautes de la paire de cuivre (ce que l’on appelle le dégroupage partiel) ; la ligne d’abonné équipée de sa carte DSLAM ; la ligne d’abonné équipée de sa carte DSLAM et le transport des données correspondantes sur le réseau numérique. Les fournisseurs d’accès à Internet (les FAI) et les opérateurs font leur marché dans cet éventail d’offres unique en Europe. Le régulateur veille, pour sa part, à ce que tout acteur se positionnant sur tel segment puisse concurrencer France Télécom sur le marché des offres qui se situent immédiatement en aval. La complexité des équations – ou plutôt des inéquations – à vérifier est telle à présent qu’il faut compter de six à neuf mois si l’on veut en changer quelques paramètres.
Et on n’a encore rien vu. Car l’audiovisuel ne fait qu’arriver sur le haut débit. Les premières expériences de vidéo sur ligne téléphonique démarrent. De nouveaux acteurs vont apparaître : les fournisseurs de contenus audiovisuels et les bouquets de chaînes. Leurs services cohabiteront avec ceux des fournisseurs d’accès à Internet, sur la même paire de cuivre et à travers le même équipement DSLAM.
Comment le modèle actuel pourra-t-il faire fonctionner tout cela ? Comment répartir le coût de la ligne et du réseau entre l’Internet et la vidéo ? et qui va décider de cette répartition ? le régulateur ? À qui « appartiendra » le client final : au fournisseur d’accès à Internet ? au bouquet de chaînes ? à l’opérateur de télécommunications ?
Peut-être faudra-t-il aller vers un modèle dans lequel le client n’aura qu’un fournisseur d’accès haut débit, qui lui offrira la possibilité de consommer ensuite, en s’adressant à différents prestataires, de l’Internet ou de la vidéo. C’est ce fournisseur d’un accès global haut débit qui définira sa propre politique de répartition des coûts de l’accès entre l’Internet et la vidéo. Et la concurrence jouera, d’un côté entre opérateurs d’accès (l’opérateur historique et les « dégroupeurs »), et d’un autre côté entre fournisseurs de services (Internet et vidéo).
Une nouvelle loi
L’expérience de la concurrence dans le secteur des télécommunications acquise depuis plus de cinq ans va pouvoir être mise prochainement à profit. En effet, pour la troisième fois en quatorze ans, le Parlement va être sollicité pour redéfinir le cadre législatif régissant les télécommunications, conformément aux décisions prises au niveau communautaire : de nouvelles directives européennes qui définissent un nouveau cadre réglementaire doivent être transposées dans la loi nationale cette année.
Quel est l’objectif fondamental que le législateur doit avoir à l’esprit en rédigeant ce nouveau corpus réglementaire ?
La loi de 1996 avait aboli tout monopole dans le secteur des télécommunications. Il n’y a donc pas de nouvelle étape à franchir dans l’abolition de quelconques » droits exclusifs « , sans parler de » monopoles « .
La loi de 1996 avait été conçue, il faut le rappeler, pour permettre le passage du monopole à la concurrence. Ce passage ayant été réussi, elle doit maintenant faire place à une législation assurant en régime permanent le fonctionnement harmonieux d’un secteur pleinement ouvert, secteur qui garde cependant un certain nombre de spécificités justifiant une réglementation sectorielle appropriée. Il sera toujours nécessaire d’assurer l’interconnexion et l’interfonctionnement des réseaux, de rendre accessibles à tous certains services jugés essentiels, d’optimiser la gestion de certaines ressources rares, de prévenir certains risques de comportements anticoncurrentiels, etc.
Et puis, l’environnement a changé. Profondément. La bulle financière de l’Internet et des télécommunications s’est formée… et a éclaté. Le secteur est encore sous le choc. L’enjeu de la nouvelle loi est de créer les conditions de la convalescence puis du retour à la pleine santé pour tous les acteurs, y compris celui qui joue le rôle d’opérateur historique, dont on a découvert que la capacité à absorber tous les à‑coups d’une part, et de servir de réserves de ressources pour ses concurrents d’autre part, n’était pas sans limites.
La loi de 1996 avait pour finalité la » libéralisation » des télécommunications, c’est-à-dire l’ouverture à la concurrence. Il fallait empêcher l’ancien monopole de s’opposer à l’arrivée des nouveaux entrants.
La loi de 2003 doit avoir pour finalité de » libérer » toutes les forces du marché, notamment d’innovation.
Le premier acteur de ce marché, France Télécom, doit à présent recouvrer sa liberté de mouvement pour jouer son rôle de locomotive au bénéfice de la croissance de tout le secteur.
La régulation doit bien entendu veiller à ne pas laisser se reconstituer des monopoles ; mais, à cette condition près, elle doit avoir pour préoccupation principale de laisser agir le marché.
Le risque majeur est de caresser la chimère que toutes les questions peuvent ou doivent être résolues par la régulation : c’est alors à une économie administrée et non à un marché dynamique que l’on aboutirait. Ce n’est pas ce dont le secteur des télécommunications a besoin.