Louis-Bernard GUYTON de MORVEAU (1737−1816)
Le 60e bulletin de la SABIX, paru en janvier dernier, fait revivre un personnage hors du commun : à la fois enseignant et chercheur, industriel et consultant d’entreprise, et administrateur public, Louis-Bernard Guyton de Morveau s’est illustré dans la plupart des domaines de prédilection des polytechniciens.
Sans avoir eu de carrière militaire stricto sensu, il a exercé les fonctions d’un ingénieur de l’armement avant l’heure en créant puis développant l’aérostation militaire, et en organisant la production d’armement.
En outre, il a mené une activité politique brève mais intense. Élu en 1791 à l’Assemblée législative puis en 1792 à la Convention nationale, Guyton entre en 1793 au Comité de salut public, mais n’est pas élu aux élections législatives de 1798. Son vote pour la mort du roi lui sera vivement reproché sous la Restauration, ce qui explique peut-être que son nom soit quelque peu tombé dans l’oubli aujourd’hui malgré la grande renommée dont il a joui de son vivant.
Les activités de recherche et d’enseignement de Guyton de Morveau se sont déroulées sur une longue période allant du règne de Louis XV à la Restauration. Après avoir fait construire un laboratoire à l’Académie de Dijon, il convainc les États de Bourgogne de financer des cours de chimie publics et gratuits.
Ceux-ci, qu’il assure lui-même de 1776 à 1789, rencontrent un succès considérable. En 1795, il entre à l’École polytechnique comme « instituteur de chimie », fonction qu’il exercera jusqu’en 1811. Tout en cherchant à faire progresser la science, Guyton n’oublie jamais les applications au profit des entreprises et de la société.
Il devient lui-même entrepreneur quand un secteur nouveau lui paraît mériter d’être développé. Ainsi, beaucoup voient en lui l’inventeur des liants hydrauliques artificiels. Son exemple mérite d’être médité à une époque où certains pensent que la coopération entre laboratoires et entreprises est une idée récente…
Enfin, Guyton est directeur de l’École polytechnique pendant une période clé allant de 1798 à 1804, où il utilise sa réputation et son entregent pour défendre l’établissement et ses élèves vis-à-vis de l’ extérieur.
Ses fonctions prennent fin avec la militarisation décidée par Napoléon en 1804, qui conduit au remplacement d’un directeur choisi parmi les membres du Conseil des « instituteurs » par un responsable nommé directement par le gouvernement.
Ce passionnant bulletin, coordonné par Patrice Bret, se termine par une présentation des archives qui lui ont servi de base, ainsi que par de courtes biographies de polytechniciens de la famille de Louis- Bernard Guyton de Morveau.