Ludwig von Mises
Certains pensent que la pensée économique et sociale de l’École autrichienne, dont les deux représentants les plus célèbres sont Friedrich Hayek et Ludwig von Mises, reste d’une très grande actualité et a été malheureusement enfouie sous le déferlement de la synthèse néoclassique de l’après-guerre. Elle mériterait donc d’être republiée, afin que chacun puisse se faire sa propre opinion, à l’heure où le discours économique, même contesté, est roi. Si les textes de Hayek sont relativement disponibles, l’oeuvre majeure de ce courant est pour Gérard Dréan (54) L’Action humaine de Mises, une somme de plus de 900 pages publiée en anglais en 1949, et traduite en français par Raoul Audoin en 1985 (actuellement épuisée). Un ouvrage, donc, qui risque d’en rebuter plus d’un.
Gérard Dréan, fin connaisseur de la pensée de Mises, et désirant faire partager son intérêt pour elle, aurait pu adopter la voie relativement facile du court traité contemporain sur le gros traité historique. Il a choisi une voie bien plus risquée : sélectionner et ordonner des fragments cohérents du texte de Mises, avec le minimum de commentaires, en supprimant les parties qui relevaient du débat politique de l’époque et qui, bien qu’instructives, présentent moins d’intérêt aujourd’hui.
C’est un exercice très difficile et j’avoue avoir ouvert le livre avec appréhension. Mais je suis sorti très satisfait de sa lecture : l’essentiel des thèses de Mises y est exposé clairement, le livre est un abrégé convaincant de sa pensée, on peut en effet se faire une opinion de son actualité. Personnellement, j’ai mieux perçu les racines philosophiques du libéralisme, apprécié la vision dynamique de l’économie qui est privilégiée, et j’ai pu aussi mieux comprendre mes réticences, dont le noyau est le refus (fondé pour eux en théorie) de toute mathématisation de la pensée économique. Bref un pari remarquablement réussi et un petit livre indispensable à qui veut réfléchir sur l’économie de notre temps.