Mathématiques est un classique de la littérature scientifique russe

Mathématiques

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°775 Mai 2022Par :

Alexandrov, Kolmogorov, Lavrentiev

Rédacteur : Gérald Tenenbaum (72)

Il s’agit de la pre­mière tra­duc­tion en fran­çais, par notre cama­rade André Cabannes (72), d’un clas­sique de la lit­té­ra­ture scien­ti­fique russe, publié en 1956 et coécrit par une ving­taine de mathé­ma­ti­ciens de cette école qui a tant appor­té aux mathé­ma­tiques mon­diales. En trois volumes, cet ouvrage se pro­pose de pré­sen­ter les bases d’un cor­pus cou­vrant les connais­sances requises de la fin du secon­daire aux trois années de licence.

Des trois auteurs prin­ci­paux, Kol­mo­go­rov (1903−1987), qui révo­lu­tion­na la théo­rie des pro­ba­bi­li­tés, est sans doute le plus célèbre. Alexan­drov (1912−1999) fut lau­réat du prix Lobat­chevs­ki pour ses tra­vaux sur les sur­faces convexes. Lavren­tiev (1900−1980), théo­ri­cien proche des appli­ca­tions, contri­bua au pre­mier ordi­na­teur soviétique.

« Mathématiques est un classique de la littérature scientifique russe, publié en 1956 et coécrit par une vingtaine de mathématiciens »

Mar­qué par un sou­ci constant de péda­go­gie, l’ouvrage s’appuie sur l’intuition et la pro­gres­si­vi­té et s’écarte des géné­ra­li­sa­tions abs­traites. Un cha­pitre intro­duc­tif, qui n’est pas exempt d’idéologie, pré­sente une vue d’ensemble des mathé­ma­tiques, de leurs méthodes, de leur essence. On trouve ensuite, expo­sées en lien per­ma­nent avec les appli­ca­tions, les bases de l’analyse : fonc­tions, conti­nui­té, déri­va­tion, inté­gra­tion, fonc­tions de plu­sieurs variables, séries. Ce même pre­mier volume expose les fon­de­ments de la géo­mé­trie ana­ly­tique et la théo­rie des équa­tions algé­briques. Le point de vue est his­to­rique et réso­lu­ment pra­tique, très éloi­gné d’une struc­tu­ra­tion bourbachique.

Les tomes II et III, dont il serait trop long de don­ner les tables des matières in exten­so, invitent le lec­teur à décou­vrir, entre autres, les équa­tions dif­fé­ren­tielles, l’analyse com­plexe, les nombres pre­miers (y com­pris les apports de Tche­by­chev et Vino­gra­dov), la théo­rie des pro­ba­bi­li­tés, celle de l’approximation, les fonc­tions de variable réelle, la topo­lo­gie et l’analyse fonctionnelle.

Le moindre des attraits de cet ouvrage n’est pas de mon­trer que le pro­pos mathé­ma­tique, à l’instar de tous les logos, est empreint d’options esthé­tiques, phi­lo­so­phiques et idéo­lo­giques. S’ils n’altèrent pas la rigueur indis­pen­sable à la dis­ci­pline, ces choix modi­fient pro­fon­dé­ment la trans­mis­sion de ce savoir. On com­prend ain­si pour­quoi on peut vala­ble­ment par­ler d’écoles mathé­ma­tiques à tra­vers le monde : cha­cune sépa­ré­ment apporte son éclai­rage, toutes ensemble elles forment notre bien commun.

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