Michel Brisac (47), un grand théoricien de l’expertise
Il y a quelques mois à peine, Michel Brisac faisait le déplacement de Paris à Bordeaux pour se rendre au Congrès national du Conseil national des compagnies d’experts de justice.
Il participait aux travaux, prenant à son habitude la parole, apportant son point de vue – un point de vue qui pesait toujours – et cette fois, ceux qui l’ont entendu s’en souviennent, sur la conciliation.
Cette image est celle de l’homme que nous aimions : un homme mentalement debout, à la pensée riche, animée par un raisonnement puissant et soutenue par une très vaste culture.
C’était le Michel Brisac au faîte de sa maturité, inchangé au fil des décennies, en une sorte de permanence d’être, avec sa pipe et son sourire ironique, affectueux.
Ingénieur-conseil en béton armé et en structure métallique, il a été inscrit sur la liste de la cour d’appel de Paris en 1975 puis sur la liste nationale en 1981.
Résistant à seize ans puis engagé dans la première armée française, Michel Brisac était titulaire de la Croix de guerre et chevalier de la Légion d’honneur.
Un analyste rigoureux
Michel fut d’abord un très grand travailleur. Ses avis, notamment sur la procédure, trouvaient leurs fondements dans une analyse rigoureuse des textes, autant que dans une connaissance étendue du droit et de la jurisprudence. Il ne manquait pas une réunion d’importance, l’esprit toujours en éveil.
Il travaillait spontanément et généreusement pour l’intérêt général, et c’est ainsi qu’il a été un théoricien reconnu de l’expertise. Nous lui devons en particulier ce concept de » la technique expertale alliée à la technique technicienne « .
Il fut aussi un des grands animateurs et des plus puissants inspirateurs des organisations ou institutions du corps expertal : la Compagnie des ingénieurs experts de Paris, l’UCECAP (Union des compagnies d’experts près la cour d’appel de Paris) dont il a été le président de 1986 à 1989, la CNIDECA (Compagnie nationale des ingénieurs diplômés experts près les cours d’appel et les juridictions administratives) qu’il a créée en 1991 et qui est membre du Conseil national des ingénieurs et scientifiques de France.
La Fédération, avant qu’elle ne devienne le Conseil national, a voté en 2003 à l’unanimité, qu’il en devienne président d’honneur.
Rarement nous avons rencontré quelqu’un ayant une telle autorité, sans compromis par rapport à la compétence et l’indépendance d’esprit. C’est sans doute pourquoi les expertises les plus difficiles lui étaient confiées par les juridictions.
Un prix » Michel Brisac »
Mais Michel était aussi bienveillant, généreux dans ses conseils à ses confrères plus jeunes, et humain dans l’expertise, ayant conscience des conséquences de ses avis, en particulier à l’égard des entreprises dont il connaissait les difficultés de réalisation des chantiers.
Michel Brisac aura sans doute trouvé dans l’expertise judiciaire le cadre où exercer ses qualités intellectuelles et humaines. L’expertise et les experts étaient sa vie.
Car il s’immergeait, dès qu’il le pouvait, dans le corps expertal, spécialement quand ce corps rencontrait des difficultés, tant pour confronter son point de vue avec d’autres, que pour rechercher l’intérêt général. Michel était, à bien des égards, non seulement un grand théoricien de l’expertise, mais l’âme de nos institutions. Il masquait avec pudeur une disponibilité rare à rendre service, sans économiser sa personne et son temps, efficace et discret.
La mémoire de Michel Brisac, son exemple, la référence à ce que, dans des circonstances futures, il aurait dit ou pensé resteront présents, et plus encore vivants, dans nos institutions.
C’est pourquoi le Conseil national, association désormais reconnue d’utilité publique, a décidé d’instituer en sa mémoire un prix Michel Brisac.