Mieux courir avec les mathématiques © Juice Dash / Schutterstock.com

Mieux courir avec les mathématiques

Dossier : Jeux olympiques et sportMagazine N°796 Juin 2024
Par Amandine AFTALION

La course à pied se décline en plu­sieurs dis­tances que l’on pour­ra admi­rer lors des Jeux olym­piques de Paris, avec à la clé de pos­sibles nou­veaux records du monde. Et si les stra­té­gies des cham­pions pou­vaient deve­nir acces­sibles à tous les cou­reurs ? Grâce à un modèle qui s’appuie sur le contrôle moteur et moti­va­tion­nel de la force de pro­pul­sion afin d’optimiser la dépense éner­gé­tique, l’effort et le temps final, il est pos­sible de déter­mi­ner com­ment les cou­reurs doivent adap­ter au mieux leur rythme afin de réa­li­ser la meilleure performance.

Le sport, en tant que pra­tique orga­ni­sée fai­sant l’objet de com­pé­ti­tions et béné­fi­ciant d’infrastructures dédiées, a été ame­né chez les Gau­lois par les Romains. Si les Romains étaient sur­tout adeptes des sports de com­bat (com­bats de gla­dia­teurs, courses de chars et com­bats de boxe), ils ont ame­né éga­le­ment des pra­tiques qui rele­vaient de l’athlétisme, la course à pied fai­sant l’objet d’une rela­tive méfiance de la part des Romains, qui y voyaient une acti­vi­té pro­pre­ment hel­lé­nique et moins for­ma­trice et virile que les sports de com­bat. Mais ni les Grecs, ni les Romains ne cher­chaient à mesu­rer la performance ! 

Tout d’abord la réfé­rence de dis­tance n’existait pas : le pied et donc le stade variaient d’un site à l’autre ; il n’y avait pas non plus d’instrument pour mesu­rer les temps et il n’était guère pos­sible d’établir des records. En réa­li­té, cet inté­rêt pour le record n’existait pas pour les Grecs. La seule chose qui était digne d’intérêt, c’était la vic­toire, être le pre­mier. Les Jeux olym­piques étaient des « agônes » et ce terme d’agôn impli­quait l’idée de compétition.

Un changement de perspective

C’est dans l’optique de renouer avec le modèle antique que Pierre de Cou­ber­tin lance en 1896 les Jeux olym­piques dits « modernes », dans les­quels l’athlétisme et la course à pied occupent une place impor­tante. Par ailleurs, une grande par­tie du lexique du sport ren­voie à des termes de l’Antiquité grecque ; et les stades contem­po­rains reprennent l’architecture des amphi­théâtres romains. 

Pour autant c’est à l’émergence d’une nou­velle pra­tique spor­tive que l’on assiste aux XXe et XXIe siècles, por­teuse de valeurs très dif­fé­rentes de celles por­tées par ces acti­vi­tés dans l’Antiquité : l’entraînement spor­tif répon­dait en effet à des fonc­tions mili­taires, édu­ca­tives et sacrées dont il est aujourd’hui lar­ge­ment dépour­vu (à part peut-être à l’École poly­tech­nique) ; et une logique de per­for­mance et de records, absente à l’époque, domine la pra­tique spor­tive ins­ti­tu­tion­na­li­sée. Aujourd’hui, dans les grandes com­pé­ti­tions, le record est une plus-value par rap­port à la seule vic­toire et la science prend natu­rel­le­ment toute sa place pour aider à amé­lio­rer la performance.

L’outil mathématique

Aujourd’hui, grâce au sys­tème Iso­Lynx, à des cap­teurs pla­cés sur les ath­lètes et à une dizaine d’antennes sur le stade, des don­nées de vitesse tous les 100 m/s peuvent être récu­pé­rées en cham­pion­nat. Cela per­met pour la télé­vi­sion d’avoir des infor­ma­tions en temps réel sur le clas­se­ment des cou­reurs, mais aus­si, sans avoir à faire de mesures in vivo sur les ath­lètes, d’avoir accès à toute la phy­sio­lo­gie grâce à un modèle mathé­ma­tique et des simu­la­tions repo­sant sur le contrôle optimal. 

On peut ain­si com­prendre l’influence des para­mètres physio­logiques et men­taux dans la per­for­mance et cela ouvre la com­pré­hen­sion de la manière de mieux s’entraîner. Grâce à la conser­va­tion de l’énergie et à la seconde loi de New­ton, on peut mettre la course en équa­tions (voir enca­dré). Cela prend en compte à la fois l’énergie aéro­bie (ou plus pré­ci­sé­ment la VO2, le débit d’oxygène que l’on trans­forme en éner­gie) et l’énergie anaé­ro­bie (celle qui ne vient pas de l’oxygène mais de la phos­pho­créa­tine et du glucose). 

À cela, il faut ajou­ter le contrôle moteur qui est la capa­ci­té à varier sa force de pro­pul­sion grâce à la com­mande du cer­veau sur les muscles.


Lire aus­si : Sport & tech­no­lo­gie : la révo­lu­tion par l’Intelligence artificielle



Les équations du problème de contrôle optimal

Le modèle met en équa­tions un cer­tain nombre de variables : v(t) la vitesse de l’athlète, f(t) sa force de pro­pul­sion par uni­té de masse, u(t) son contrôle moteur, e(t) son éner­gie anaé­ro­bie. L’énergie de l’athlète est en effet for­mée de deux par­ties : 

  • l’énergie aéro­bie, celle qui uti­lise l’oxygène ; l’oxydation des glu­cides et des graisses pro­duit de l’énergie par la syn­thèse de l’ADP en ATP ; un débit d’oxygène de 1 litre par kilo et par seconde pro­duit 2 870134 = 21,4 joules par kilo et seconde ; la puis­sance aéro­bie est donc reliée au débit d’oxygène dis­po­nible, la VO2, trans­for­mé en éner­gie ; 
  • l’énergie anaé­ro­bie, celle qui ne dépend pas de l’oxygène et qui est appe­lée par­fois défi­cit d’oxygène ; elle existe en fait sous deux formes, selon l’intensité et la durée de l’exercice (phos­pho­créa­tine et glu­cose). 

La puis­sance aéro­bie est notée dans nos équa­tions σ(e) car elle dépend éga­le­ment par un méca­nisme de rétro­ac­tion de l’énergie anaé­ro­bie rési­duelle, et non pas juste du temps ou de la dis­tance par­cou­rue. C’est ce méca­nisme de rétro­ac­tion qui conduit à une bonne ana­lyse des courses. Dans une course de sprint σ(e) est une fonc­tion linéaire décrois­sante de e, et donc une fonc­tion crois­sante du temps (l’énergie anaé­ro­bie décroît avec le temps !). Pour les courses plus longues, la forme de la fonc­tion σ(e) tient compte de la ciné­tique de la VO2 étu­diée par les phy­sio­lo­gistes, ce qui rend la fonc­tion plus compliquée.

« La puissance aérobie dépend également de l’énergie anaérobie résiduelle, et non pas juste du temps ou de la distance parcourue. »

Les équa­tions pro­viennent de : 

la conser­va­tion de l’énergie : la puis­sance déve­lop­pée par la force de pro­pul­sion est égale à la varia­tion d’énergie dis­po­nible, aéro­bie et anaérobie :

la seconde loi de New­ton : l’accélération est égale à la somme des forces mises en jeu, force de pro­pul­sion dimi­nuée des forces de frottement :

dans le modèle le plus simple, le frot­te­ment est linéaire en vitesse avec un coef­fi­cient de frot­te­ment τ, mais aus­si bien une côte et un frot­te­ment lié au vent peuvent être pris en compte dans cette équa­tion ; 

la théo­rie du contrôle moteur limite les varia­tions de la force de pro­pul­sion selon : 

γ et Fmax sont des para­mètres et u(t) le contrôle effec­tué par le cer­veau. 

« Évaluer numériquement tous les paramètres physiques et physiologiques ! »

À par­tir de ces lois, et pour des valeurs des para­mètres don­nées, ces équa­tions per­mettent ensuite de résoudre le pro­blème de contrôle opti­mal en mini­mi­sant, à dis­tance et éner­gie anaé­ro­bie fixées, le temps final et le contrôle moteur, au sens de l’intégrale de u2. La dif­fi­cul­té est évi­dem­ment de savoir quelle valeur don­ner à tous les para­mètres physiologiques.

C’est là où l’optimisation mathé­ma­tique montre toute sa puis­sance : à par­tir de don­nées de course (temps et posi­tion), afin de repro­duire la même courbe de vitesse que les don­nées, le cal­cul per­met d’évaluer numé­ri­que­ment tous les para­mètres phy­siques et phy­sio­lo­giques ! Ce modèle donne alors accès à la courbe de vitesse spé­ci­fique à chaque dis­tance, l’énergie aéro­bie, l’énergie anaé­ro­bie, la force de pro­pul­sion, et per­met de com­prendre com­ment la stra­té­gie opti­male varie avec les para­mètres. Dans le cas d’un virage, le modèle consiste à écrire une équa­tion de contrôle moteur pour éga­le­ment la force addi­tion­née de la force centrifuge

Le modèle est une exten­sion de celui pro­po­sé par Joe Kel­ler, qui consi­dé­rait la VO2 constante et les varia­tions de force libres. Le modèle a ensuite été amé­lio­ré dans une série de papiers.


Un modèle performant

Mais trop de varia­tions d’allure pro­voquent un coût dans l’effort. On a ain­si construit un modèle de coût et béné­fice repo­sant sur à la fois la méca­nique, l’énergétique et le contrôle moteur. Cela per­met, une fois que l’on se fixe une dis­tance à cou­rir, de déter­mi­ner com­ment opti­mi­ser son effort, gérer ses res­sources et les contraintes pour faire le meilleur temps. Cela prend en compte la topo­gra­phie du ter­rain (virages et côtes ou des­centes), l’effet psy­cho­lo­gique à avoir quelqu’un devant et la moti­va­tion. Évi­dem­ment, cela néces­site d’injecter des valeurs à tous les para­mètres phy­sio­lo­giques, en par­ti­cu­lier cer­tains qu’on ne peut mesurer. 

“Ce n’est pas du big data ou des statistiques, mais un modèle déterministe.”

Alors com­ment faire ? La puis­sance du modèle est que, à par­tir de don­nées très pré­cises de vitesse, il iden­ti­fie tous les para­mètres phy­sio­lo­giques et donne accès en par­ti­cu­lier à la courbe de VO2 et d’énergie. Ensuite, on peut évi­dem­ment faire varier ces para­mètres pour étu­dier les stra­té­gies de course. Ce n’est pas du big data ou des sta­tis­tiques, mais un modèle déter­mi­niste. Pour opti­mi­ser son effort, on montre que, du 100 mètres au 400 mètres, on court en accé­lé­rant très fort au départ, puis en décé­lé­rant en fin de course. À par­tir du 800 mètres, la course se fait avec une réac­cé­lé­ra­tion en fin de course et, à par­tir du 1 500 mètres, après une phase d’accélération ini­tiale, il y a une par­tie cen­trale de la course à vitesse presque constante avant le sprint final.

Figure 1 : Temps mesurés tous les 10 m de Usain Bolt, pour son record à Berlin en 2009.
Figure 1 : Temps mesu­rés tous les 10 m de Usain Bolt, pour son record à Ber­lin en 2009.

Le sprint sur courte distance

Dans l’épreuve du 100 mètres, les ath­lètes ne passent pas la ligne d’arrivée en accé­lé­rant, mais plu­tôt en décé­lé­rant ! Ils arrêtent d’accélérer dès 60 ou 70 m, soit envi­ron aux deux tiers de la course. C’est en fait qu’ils ne peuvent pas tenir leur effort maxi­mal pen­dant toute la course, même si c’est l’impression qu’ils donnent. On peut le voir par exemple sur les temps mesu­rés tous les 10 m de Usain Bolt, pour son record à Ber­lin en 2009 (figure 1).

On peut prou­ver grâce à la théo­rie du contrôle opti­mal que la meilleure stra­té­gie est de par­tir à force de pro­pul­sion maxi­male, ce qui déter­mine la vitesse comme une expo­nen­tielle crois­sante en début de course. Mais cette force maxi­male ne peut être main­te­nue sur tout l’exercice à cause du stock limi­té d’énergie anaé­ro­bie. Donc la force dimi­nue, la vitesse aus­si. Par­tir moins fort et accé­lé­rer tout au long de la course serait moins ren­table en ce qui concerne le temps final.

« La meilleure stratégie est de partir à force de propulsion maximale, ce qui détermine la vitesse comme une exponentielle croissante en début de course. »

Cette stra­té­gie de course est la même du 100 mètres au 400 mètres, qui sont des courses où la VO2, le débit d’oxygène, aug­mente sans atteindre de palier. Le 400 mètres est la plus longue course de sprint. Elle se court éga­le­ment en par­tant à fond et en essayant de ralen­tir le moins pos­sible. Le maxi­mum de vitesse est atteint avant les cent pre­miers mètres, donc dans le virage mal­gré la force cen­tri­fuge. Là les cou­reurs sont à plus de 10,5 m/s chez les hommes et 9,5 chez les femmes. Ensuite il s’agit de décé­lé­rer le moins pos­sible : cela pro­vient à la fois d’une VO2 éle­vée et d’une contri­bu­tion anaé­ro­bie éle­vée et du cou­loir. Dans la figure 2 nous avons ana­ly­sé, sur le 400 mètres de Femke Bol aux cham­pion­nats d’Europe de Munich en 2022, com­ment les dif­fé­rents para­mètres jouent sur la courbe de vitesse et la performance.

Figure 2 : rapport paramètres/vitesse pour les 400 mètres de Femke Bol aux championnats d’Europe de Munich en 2022.
Figure 2 : rap­port paramètres/vitesse pour les 400 mètres de Femke Bol aux cham­pion­nats d’Europe de Munich en 2022.

L’endurance en trois phases

« Rien ne sert de cou­rir, il faut par­tir à point » nous dit la fable, et c’est exac­te­ment vrai pour la course d’endurance : si on part trop fort, c’est bien connu, on a du mal à ter­mi­ner et sur­tout à pro­duire l’accélération finale déci­sive ; au contraire, si on part trop len­te­ment, certes on garde des réserves, mais on n’arrive jamais à rat­tra­per le temps per­du. Il est donc très impor­tant de trou­ver la bonne vitesse d’accélération au démar­rage d’une course longue. Une course longue est carac­té­ri­sée par le fait que la VO2, le débit d’oxygène, aug­mente, atteint un palier et dimi­nue. Pour les courses sur piste, c’est le cas à par­tir du 1 500 mètres. Une course longue se court en trois parties.

La phase d’accélération

D’abord une phase d’accélération pour atteindre la vitesse pic, qui est supé­rieure à la vitesse de croi­sière. Cette phase d’accélération se court en anaé­ro­bie et elle a pour rôle de lan­cer le cycle aéro­bie, c’est-à-dire que le débit d’oxygène qui est trans­for­mé en éner­gie augmente.

Pour que cette mise en route du cycle aéro­bie soit rapide, il est impor­tant d’accélérer fort afin d’augmenter plus vite le débit car­diaque. On atteint une vitesse pic qui est supé­rieure à la vitesse de croi­sière. La meilleure stra­té­gie est alors de ralen­tir au moment où le maxi­mum du débit d’oxygène est atteint, pour se pla­cer à la vitesse de croisière.

Une autre stra­té­gie qui consis­te­rait à n’accélérer que jusqu’à la vitesse de croi­sière (peut-être légè­re­ment plus éle­vée alors) condui­rait à un temps final plus impor­tant. De même, une stra­té­gie qui consis­te­rait à accé­lé­rer moins fort au début pour éven­tuel­le­ment avoir une vitesse de croi­sière plus éle­vée condui­rait à un temps final plus important.

La phase intermédiaire

Ensuite on a la phase inter­mé­diaire de course qui repose essen­tiel­le­ment sur l’énergie aéro­bie. Plus la VO2 est grande (débit d’oxygène), plus la vitesse de croi­sière est grande. Cette vitesse n’est pas exac­te­ment constante s’il y a des virages, des côtes. Il peut être utile de varier légè­re­ment sa vitesse autour de cette vitesse de croi­sière moyenne, indé­pen­dam­ment de la stratégie.

La phase de sprint finale

Enfin la phase de sprint finale repose sur l’énergie anaé­ro­bie rési­duelle. Il y a un méca­nisme de rétro­ac­tion dans le corps qui fait que, quand les réserves anaé­ro­bies atteignent un tiers de la valeur de départ, le débit d’oxygène trans­for­mé en éner­gie dimi­nue. C’est alors le moment pour lan­cer le sprint final. Si le cou­reur a trop accé­lé­ré au début, il ne lui reste plus assez de réserves anaé­ro­bies pour le sprint final. Sur les longues dis­tances, on peut ana­ly­ser les effets stra­té­giques qui consistent sou­vent à for­cer les adver­saires à une accé­lé­ra­tion en milieu de course, qui les oblige à tirer sur leurs réserves anaé­ro­bies et péna­lise les ath­lètes les moins résis­tants sur le sprint de fin de course.

Figure 3 : Cinétique de VO2 d’Ingebrigtsen / ses adversaires lors de la finale européenne du 1 500 mètres.
Figure 3 : Ciné­tique de VO2 d’Ingebrigtsen / ses adver­saires lors de la finale euro­péenne du 1 500 mètres.

Le cas Ingebrigtsen

La tac­tique gagnante d’Ingebrigtsen lors de la finale euro­péenne du 1 500 mètres consiste à adop­ter un rythme de croi­sière très rapide à par­tir de 300 m, ce qui est pos­sible parce qu’il est capable de main­te­nir une valeur de VO2 éle­vée jusqu’à la fin de la course et qu’il dis­pose d’une contri­bu­tion anaé­ro­bie impor­tante. Il a une ciné­tique de VO2 plus rapide que ses adver­saires (figure 3), qui ne néces­site pas un départ aus­si rapide, mais il accé­lère ensuite dans les deux der­niers tours.

“L’intérêt du modèle est qu’il permet d’étudier la variation de performance en fonction de chaque paramètre physiologique.”

L’étude montre que ce sont l’amélioration du méta­bo­lisme aéro­bie et la capa­ci­té à tenir sa VO2 qui ont le plus d’effet sur la per­for­mance au 1 500 mètres. L’intérêt du modèle est qu’il per­met d’étudier la varia­tion de per­for­mance en fonc­tion de chaque para­mètre phy­sio­lo­gique, sans avoir recours à des mesures in vivo, impos­sibles sur des courses de championnat.

Les mathématiques permettent de déterminer comment courir dans les couloirs © kovop / Shutterstock.com
© kovop / Shutterstock.com

Et le couloir ?

Mais il faut aus­si com­prendre, pour les courses en cou­loirs, les effets cor­ré­lés de la force cen­tri­fuge (qui devient moins impor­tante au fur et à mesure qu’on s’éloigne vers les cou­loirs exté­rieurs) et de l’attraction psycho­logique géné­rée par un ath­lète devant soi. Dans les cou­loirs exté­rieurs, on court en aveugle, ce qui est péna­li­sant. Il a été en effet mesu­ré qu’un ath­lète fai­sant un tour de stade (400 m) der­rière « un lièvre » peut gagner jusqu’à une seconde par rap­port au fait de cou­rir seul. 

Pour une course de 200 mètres, le départ se fait dans le virage. Il faut prendre en compte dans le modèle une dimi­nu­tion du frot­te­ment effec­tif si l’on a quelqu’un devant soi. On cal­cule que la per­for­mance est la meilleure pour les lignes 4 à 6 où l’effet de la force cen­tri­fuge et l’effet psy­cho­lo­gique se conjuguent. Ensuite les lignes 7 et 3, puis 8 et 2, sont équi­va­lentes mais le cou­loir 1 est for­te­ment péna­li­sé. Cela est fina­le­ment cohé­rent avec le tirage au sort des com­pé­ti­tions, qui consiste à mettre les meilleurs cou­reurs dans les lignes 3 à 6 per­met­tant les meilleures performances. 

Dans les nou­veaux stades, comme à Buda­pest, il y a neuf cou­loirs et les courses en cou­loirs se font dans les lignes 2 à 9, ce qui évite la ligne 1. Une bonne tac­tique : suivre quelqu’un qui a le même rythme que soi, cela per­met d’économiser de l’énergie et donc du temps. Ce n’est pas juste un effet pour se pro­té­ger du vent comme les cyclistes, c’est un effet psy­cho­lo­gique, car on n’a pas à réflé­chir à son rythme et on tient plus long­temps. Encore faut-il que ce soit le bon rythme… 


Aftalion, Amandine. Pourquoi est-on penché dans les virages ? - Le sport expliqué par les sciences en 40 questions. CNRS Éditions 2023.Références :

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