Mieux tirer parti de l’énergie solaire
La Terre reçoit du Soleil une énergie huit mille fois supérieure à la demande mondiale. L’utilisation de cette énergie, qui peut être convertie en chaleur, en électricité ou en biomasse, représente un enjeu technologique et économique majeur.
Panneaux photovoltaïques
Les cellules photovoltaïques montrent des baisses de rendements significatives dans le bleu (400−500 nm). Ces photons génèrent relativement peu d’électrons et provoquent l’échauffement du système par thermalisation. L’utilisation de matériaux photoluminescents permet donc d’augmenter le nombre de photons dans les longueurs d’ondes optimales et également de limiter l’effet de thermalisation.
Elle constitue aussi un levier de croissance extraordinaire qui dynamise aujourd’hui des marchés en pleine expansion tels que ceux du photovoltaïque et de la biomasse. Le photovoltaïque, par exemple, connaît des taux de croissance de l’ordre de 40% annuels depuis plus de dix ans, tandis que le marché de la culture de microalgues à but agroalimentaire ou énergétique implique des acteurs aussi divers qu’Exxon, Chevron, Google, Virgin, Bouygues ou Lafarge. L’agriculture sous serre représente, quant à elle, un marché d’environ un million d’hectares de films agricoles dans le monde (donnée BASF), renouvelés tous les deux ou trois ans.
Décaler les longueurs d’ondes
La Terre reçoit du Soleil une énergie huit mille fois supérieure à la demande mondiale
Les phénomènes de décalage de longueurs d’ondes – stokes shift – par photoluminescence offrent la possibilité de moduler le spectre solaire afin d’améliorer l’efficacité des procédés de conversion énergétiques par les cellules photovoltaïques, les microalgues ou les végétaux terrestres.
Le principe consiste à décaler certaines longueurs d’ondes (ou couleurs, pour le visible) vers d’autres longueurs d’ondes plus utiles. Par exemple, les UV, généralement inutiles ou dommageables, sont transformés en bleu, le bleu peut être transformé en vert, le vert en rouge, puis en infrarouge. Ce phénomène est obtenu grâce à l’utilisation de substances optiquement actives particulières permettant d’absorber puis de réémettre les photons dans les gammes de longueurs d’ondes de plus grande sensibilité d’une cellule solaire ou chlorophyllienne.
Matériaux photoniques
Il est ainsi possible de développer, à partir de ces substances particulières, des matériaux, dits » photoniques « , aux propriétés originales et fonctionnant non pas comme de simples filtres mais comme de véritables concentrateurs spectraux.
En combinant l’effet de plusieurs de ces substances bien choisies au sein de nouveaux matériaux, il est possible de recréer, à partir de la lumière naturelle, une nouvelle lumière, conçue sur mesure pour les besoins de l’utilisation finale. Par exemple, la plupart des plantes possédant de la chlorophylle utilisent de manière préférentielle l’énergie solaire correspondant aux couleurs bleues et rouges, et réfléchissent le vert et le jaune dont elles ne se servent pas ou peu, d’où leur couleur verte.
Capacités multiples
En plus de cette photoluminescence, les matériaux ainsi conçus peuvent offrir des propriétés de concentration lumineuse par effet de guide d’onde à deux dimensions ainsi que la possibilité de capter ou réémettre la lumière de manière diffuse. Ces propriétés peuvent se révéler déterminantes pour bon nombre d’applications comme dans les domaines du film agricole ou du solaire urbain intégré au bâtiment par exemple.
Rendements accrus
Les modules solaires utilisant des matériaux photoluminescents atteignent des performances supérieures
Les études quantitatives préalables menées sur l’utilisation de la photoluminescence dans les domaines du photovoltaïque, des algues et de l’agriculture témoignent d’augmentations de rendements significatives, comprises entre 5% et plus de 50% selon les applications.
En effet, sous forme d” encapsulants photovoltaïques, les matériaux photoluminescents permettent, grâce à leurs multiples propriétés, de générer une puissance donnée sur une surface donnée en utilisant un foisonnement de cellules potentiellement inférieur à celui des modules actuels. Il en résulte une utilisation de silicium réduite et donc des coûts réduits. Les modules solaires ainsi fabriqués montrent d’autre part des performances supérieures en incidence non directe. Pour les plantes ou les algues, l’éclairement solaire peut être adapté aux divers spectres d’action photosynthétique des espèces cultivées. Sous forme de films ou plaques plastiques, ces matériaux permettent d’améliorer de manière simple et peu coûteuse la photosynthèse et le rendement des cultures sous serre (un million d’hectares dans le monde).
Créée à Paris en 2009, PhotoFuel développe et commercialise des technologies et matériaux photoniques pour les marchés du photovoltaïque, de l’agriculture sous serre et de la culture de microalgues . Elle vise en priorité des solutions directement intégrables aux procédés et dispositifs existants. La société vient d’entrer en phase préindustrielle, avec la production de plusieurs tonnes de polymères dopés. Elle a noué des relations avec des partenaires industriels et académiques de référence en France comme à l’étranger (Europe, Asie).
Dans le domaine à fort potentiel des microalgues , l’éclairement solaire peut être adapté aux divers spectres d’action photosynthétique des nombreuses espèces cultivées. De plus, les propriétés de guide d’onde de ces matériaux permettent de répondre à l’une des problématiques majeures du développement et de l’élaboration des enceintes de culture en favorisant la répartition de la lumière autour des systèmes. Ces technologies permettent donc d’augmenter la productivité surfacique en biomasse et donc le principal facteur de rentabilité économique des futures bioraffineries .
Le regain d’intérêt pour l’exploitation de l’énergie solaire justifie donc, de nos jours, la considération sérieuse de ces matériaux photoluminescents . Ils constituent une nouvelle plateforme technologique permettant d’améliorer de manière significative le rendement de nombreux systèmes aux potentiels économiques grandissants.
Histoire
L’utilisation de la photoluminescence pour le décalage de longueurs d’ondes a suscité l’intérêt de la communauté scientifique depuis le milieu des années 1970. Philippe Gravisse, physicien et inventeur français indépendant, est un pionnier du domaine et le premier à avoir breveté et identifié le potentiel de technologies de ce type pour de multiples applications. Le professeur Adolf Goetzberger , lauréat du prix de l’Inventeur européen de l’année 2009 de l’Office des brevets européens (OEB) et fondateur de l’Institut Fraunhofer des systèmes énergétiques solaires (ISE), a lui aussi beaucoup travaillé sur les technologies de photoluminescence appliquées au photovoltaïque, d’un point de vue fondamental.
Plus récemment, le professeur Marc Baldo , au MIT, vient de fonder un nouveau centre de recherche qui a reçu la visite du président Barack Obama, et qui étudie ces technologies pour des applications photovoltaïques principalement. Ces activités académiques restent relativement éloignées du milieu industriel et visent des objectifs à long terme, comme l’obtention de concentrateurs solaires par luminescence (LSC).