Ming Yang, enfant de la planète
Déjà après le bac, le gaokao, obtenu en 2002, l’enfant de la « petite » ville de Shijiazhuang, au sud de Pékin, se découvre un peu étranger à l’université de Tongji qu’il intègre alors. « 80 % de la promo étaient des Shanghaïens, ils parlaient shanghaïen, mangeaient différemment de nous… ».
A Tongji, université fondée par des Allemands en 1907 et très liée à l’industrie mécanique et notamment à Volkswagen, il se passionne pour l’ingénierie mécanique automobile.
En deuxième année, il trouve une échappatoire à l’ambiance étouffante du dortoir : des cours de français à l’Université des langues étrangères de Shanghai. Tous les samedis, il avale 8 heures de français.
L’année suivante, il entend parler de l’X et découvre qu’il peut y candidater ; ce qu’il fait. Il y est pris. « Je connaissais la France par les livres et les photos, et par tous les forums qui fleurissent sur le web, j’étais prêt à y aller. Mais j’ai été surpris et touché de voir que des professeurs venaient de France pour nous interroger, et qu’ils nous jugeaient au tableau, et pas seulement sur des épreuves écrites. »
En février 2006, Ming arrive en France. Mise à niveau intensive en langue, mais aussi en maths et en physique, car, venant de l’ingénierie, il avait de sérieuses lacunes par rapport à ses futurs camarades.
Et puis c’est le plongeon dans le grand bain : la convergence de la promo sur la Plâtal pour le tronc commun, en avril. Ming se sent débordé. Il n’arrive pas à suivre le rythme des cours. Il songe à rentrer en Chine. Depuis la France, il questionne ses parents.
Il prend également conseil auprès de ses compatriotes de la promo 2004, qui l’encouragent à serrer les dents pour passer ce mauvais cap. Finalement, il reste. Arrivé en deuxième année, il se sent comme Magellan au débouché dans l’Océan « pacifique » : finies les maths pures qui le dépassaient, bienvenue à la méca, à l’informatique, à l’économie. Tout va mieux.
A l’heure du choix de la 4e année, Ming n’est toujours pas vraiment fixé. Il en sait au demeurant gré à l’X, qui lui a laissé toutes les portes ouvertes. Il songe à mettre en application son goût pour la géologie et le terrain dans une filière génie civil. Son parrain par la grâce de l’AX, Vincent Cousin, consultant indépendant, lui est très proche.
C’est alors qu’il découvre que Schlumberger recrute beaucoup en Chine pour des expatriations sur des plateformes pétrolières aux quatre coins du monde. Il choisit donc le pétrole. Il part pour l’Imperial College de Londres dans un master d’ingénierie pétrolière.
Nouveau bain culturel : si les étudiants sont bien encadrés et stimulés au niveau undergraduate, ensuite on ne s’occupe plus d’eux, alors que les étrangers forment 70 % des promotions. Ming peut laisser aller sa nostalgie des nombreux binets qui faisaient la vie de promo à l’X.
Un X qui apparaît comme une heureuse parenthèse entre l’université chinoise, où l’on ne dispense que quelques cours de sport, et Londres, avec son ambiance studieuse mais peu fraternelle.
Ming est parti à Londres avec une bourse Total. C’est donc naturellement qu’à son retour, il intègre cette société. Il commence alors son compagnonnage à travers le monde, avec un passage au siège à la Défense et un séjour bienvenu au pays, à Xi’an.
Aujourd’hui, il vient de rejoindre la France et Pau, en provenance du Congo. Il y a passé ses journées à terre, au bureau, à exploiter les données fournies par les plateformes. Il s’y rendait de temps en temps, toujours avec joie, pour superviser les opérations. Il garde une pointe de nostalgie de n’avoir pas vraiment connu la vie sur plateforme, une vie au milieu de gens venus de partout, au contact des réalités. Si c’était à refaire, il commencerait par là.
En Afrique, Ming voit des compatriotes. Sans doute du fait du handicap de la langue, ceux-ci vivent reclus dans leurs cités, très peu en contact avec les populations.
Lui, Ming, a déjà suffisamment bourlingué pour se sentir à l’aise partout.