NATHD : un modèle différenciant qui continue à faire ses preuves dans le monde des infrastructures numériques
La SPL Nouvelle-Aquitaine Très Haut Débit (NATHD) exploite et commercialise les réseaux de fibre optique construits par ses actionnaires publics sur les zones les plus rurales de Nouvelle-Aquitaine selon un modèle innovant et orienté vers les coûts. Il permettra de finaliser la couverture FTTH à 100 % de l’ensemble du territoire sur lequel elle intervient d’ici fin 2025 dans un contexte de décommissionnement du réseau historique cuivre décidé par Orange. Mathieu Hazouard, président de NATHD, nous en dit plus.
Quel est le positionnement de NATHD ? Quelles sont les particularités de votre modèle dans le paysage des infrastructures numériques ?
Avant le déploiement de la fibre dans le cadre du Plan France Très Haut Débit, nous avions accès au réseau téléphonique cuivre historique, basé sur un principe de péréquation géographique et offrant le même accès, les mêmes conditions et la même technologie à tous via un opérateur unique et public d’infrastructure, France Télécom.
Aujourd’hui, nous avons un marché ouvert à la concurrence avec un certain nombre d’opérateurs privés. Le territoire national s’est ainsi vu divisé en 3 zones : les zones denses et rentables sur lesquelles les opérateurs se sont positionnés en priorité pour investir et prendre des parts de marché ; les zones moins denses et moins rentables mais qui présentaient tout de même un intérêt pour les opérateurs à condition de bénéficier d’un soutien financier public via des subventions ; et des zones peu denses, non-rentables et au titre desquelles les opérateurs avaient indiqué il y a dix ans ne pas vouloir venir du tout.
En région Nouvelle-Aquitaine, qui a une superficie équivalente à celle de l’Autriche, seules les principales agglomérations de chaque département sont considérées comme denses et rentables par les opérateurs. En parallèle, dans le reste des départements les plus denses principalement les Pyrénées-Atlantiques, la Charente-Maritime et la Gironde, des initiatives publiques ont permis à un opérateur privé, soutenu par des financements publics, d’accompagner le déploiement du réseau fibre, son exploitation puis sa commercialisation.
L’ensemble du reste du territoire, des zones essentiellement rurales, n’a pas été adressé, ce qui représentait environ 1,5 million de personnes et près de 750 000 bâtiments et entreprises.
“NATHD est un modèle innovant et inédit de « quasi-régie » orientée vers les coûts, adossé à une démarche d’aménagement du territoire portée par une dynamique de service public visant à garantir l’accès au très haut débit grâce à la fibre à tous les habitants de la Nouvelle-Aquitaine.”
C’est dans ce contexte qu’a vu le jour NATHD il y a bientôt dix ans, l’Opérateur d’Infrastructures mis en place par la Région Nouvelle-Aquitaine et les collectivités de sept départements ruraux néo-aquitains regroupés en syndicats mixte ouverts (« SMO ») incluant la Région, les Départements et les EPCI (ie : la Dordogne, les Landes, le Lot-et-Garonne, la Charente, et « Dorsal » pour la Corrèze, la Creuse et la Haute-Vienne) pour façonner l’aménagement numérique des territoires et permettre ainsi à l’ensemble de ces administrés d’être éligibles à la fibre : sans cet effort 100 % public, ces usagers n’auraient jamais eu le FTTH !
NATHD est un modèle innovant et inédit de « quasi-régie » orientée vers les coûts, adossé à une démarche d’aménagement du territoire portée par une dynamique de service public visant à garantir l’accès au très haut débit grâce à la fibre à tous les habitants de la Nouvelle-Aquitaine.
Avec cette approche, l’objectif a été de pallier de manière concrète le manque d’investissement privé sur ce territoire en mutualisant au maximum les coûts et en amenant une démarche locale de péréquation.
NATHD se positionne ainsi aujourd’hui comme un opérateur d’infrastructures qui commercialise ces réseaux publics de fibre auprès des opérateurs privés et qui génère ainsi un retour sur investissement pour ses actionnaires publics, les syndicats mixtes numériques qui sont en charge de la construction du réseau.
Alors que l’arrêt du réseau historique en cuivre est fixé à 2030, quel est l’état d’avancement au niveau de votre territoire ?
Fin 2019, Orange a décidé de retirer le réseau historique. Alors que le réseau fibre a vocation à se substituer au réseau en cuivre, il n’est, en effet, pas pertinent économiquement de conserver les deux. En tant qu’opérateur d’infrastructures, une fois le réseau historique retiré, nous serons en situation de monopole sur notre territoire avec la seule infrastructure THD fixe accessible. Notre démarche aujourd’hui est d’anticiper et d’accompagner cette bascule du réseau historique à la fibre pour s’assurer que tout le monde sera bien raccordé.
Pour garantir l’accès au réseau à tous sur votre territoire, quels sont vos enjeux ?
Nous avons, d’abord, un enjeu financier qui a évolué au fil du temps et à l’occasion du déploiement du réseau. Tout d’abord, l’exploitation du réseau en zone rurale coûte plus cher qu’en zone urbaine et dense. NATHD a réussi à relever ce défi et à maîtriser ce risque financier dès l’origine grâce au marché public passé avec son prestataire industriel qui prévoit un prix forfaitaire d’exploitation à la prise sur l’ensemble du territoire.
Toutefois, à partir de 2020, nous avons été confrontés à des surcoûts découverts à l’occasion de l’exploitation effective du réseau. En plus des coûts relatifs à l’utilisation des infrastructures existantes d’Orange (poteaux et infrastructures Orange via le contrat « GCBLO »), nous devons assumer des coûts supplémentaires essentiellement pour financer des travaux de génie civil, soit de remise en état d’infrastructures existantes soit pour étendre le réseau et assurer, in fine, un service universel qui a disparu depuis 2020 par manque de transposition en droit français de dispositions européennes. Ainsi, le service universel cuivre permettait le déploiement d’infrastructures vers les immeubles neufs, l’ensemble étant financé par la communauté des opérateurs privés. Ces infrastructures étaient réutilisables pour la fibre. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas et pour financer ces surcoûts, nous avons décidé d’augmenter les prix d’accès à notre réseau pour les opérateurs privés en restant de notre côté orientés vers les coûts.
Fin du service universel, accélération du déploiement de la fibre, hausse des usages numériques… Comment imaginez-vous votre rôle dans cette continuité ?
Comme précédemment mentionné, NATHD et ses actionnaires SMO auront finalisé le déploiement de la fibre sur son territoire à d’ici la fin 2025, ce qui nous permettra d’être au rendez-vous fixé par l’État.
Il restera en revanche à réaliser l’ensemble des raccordements de chaque bâtiment éligible pour permettre une substitution définitive au réseau cuivre voué à disparaître.
Nous avons par ailleurs fait émerger il y a plus de trois ans au niveau national une problématique liée à la dépéréquation des coûts d’exploitation de nos réseaux publics ruraux. En d’autres termes, notre modèle économique est mis à mal par des surcoûts imprévisibles il y a dix ans (disparition du service universel, un marché des raccordements déséquilibré en termes de retour sur investissement au profit des opérateurs privés, de nouveaux besoins de génie civil non financés…).
“NATHD et ses actionnaires SMO auront finalisé le déploiement de la fibre sur son territoire à d’ici la fin 2025, ce qui nous permettra d’être au rendez-vous fixé par l’État.”
Aussi il nous semble important que soient mis et remis en place des outils de péréquation géographique qui existent dans d’autres secteurs d’infrastructures essentielles (ie : électricité, eau). En notre qualité d’opérateur d’infrastructures, nous serions par exemple prêts à assumer le rôle de récipiendaires d’un nouveau service universel fibre financé comme auparavant, par les opérateurs commerciaux. Cette démarche est essentielle également afin de permettre le financement de la résilience des réseaux.
Enfin, en parallèle de l’infrastructure, les usages et les services sont des éléments majeurs de l’aménagement numérique des territoires. Nous avons vocation à accompagner la hausse des usages numériques en mettant à disposition une infrastructure publique ouverte et non discriminatoire. Dans ce cadre, nous accordons une attention particulière à la cybercriminalité ainsi qu’à toute forme de services indispensables aux collectivités en termes de service public.