Lefty

Ne pas laisser n’importe qui Influencer !

Dossier : TrajectoiresMagazine N°755 Mai 2020
Par Hervé KABLA (X84)
Par Thomas REPELSKI (2002)

En 2015 Tho­mas Repels­ki, Chris­tian Rivas­seau et Roman Beren­stein, tous trois de la pro­mo­tion 2002, ont créé Lef­ty pour per­mettre aux marques de gérer leurs rela­tions avec les influen­ceurs, sur un mar­ché encore nais­sant, en forte crois­sance et sans réel leader.

Quelle est l’activité de Lefty ? 

Lef­ty est un logi­ciel basé dans le cloud, qui per­met aux marques de gérer l’ensemble de leurs rela­tions avec leurs influen­ceurs. Nous tra­vaillons avec des marques telles que Louis Vuit­ton, Cha­nel, Guer­lain, Lacoste ou Swatch. Grâce à Lef­ty, nos clients peuvent iden­ti­fier les influen­ceurs per­ti­nents, les acti­ver dans des cam­pagnes, mesu­rer leur impact et com­prendre leur posi­tion­ne­ment sur le mar­ché de l’influence par rap­port à leurs concurrents.

Quel est le parcours des fondateurs ? 

Nous sommes trois fon­da­teurs poly­tech­ni­ciens avec des par­cours inter­na­tio­naux. Après un mas­ter à Stan­ford, j’ai débu­té comme char­gé d’affaires à New York. Puis j’ai rejoint l’industrie phar­ma­ceu­tique, d’abord à Phi­la­del­phie à ana­ly­ser des oppor­tu­ni­tés de rachat de socié­tés bio­tech­no­lo­giques, puis à Londres, Sin­ga­pour et Paris dans des rôles com­mer­ciaux. Chris­tian Rivas­seau, notre CTO, a un par­cours de déve­lop­peur assez clas­sique. Il a débu­té chez Cap­ge­mi­ni, où il a par­ti­ci­pé au pro­jet d’automatisation de la ligne 1 du métro, puis a rejoint Google Search à New York. Roman Beren­stein, qui dirige le pro­duit, est pas­sé par plu­sieurs hedge funds à Londres puis Paris, où il a déve­lop­pé des machines de tra­ding algorithmiques.

Comment vous est venue l’idée ?

Lef­ty est née de plu­sieurs pivots. Nous vou­lions à l’origine trans­for­mer Ins­ta­gram en banque d’images. Au début de Lef­ty, nous avons conçu un moteur de recherche indexant vingt mil­lions d’images par jour afin de per­mettre aux marques d’identifier du conte­nu d’utilisateur com­mer­cia­le­ment exploi­table. Quelques mois après le lan­ce­ment, nous avons obser­vé que la plu­part de nos uti­li­sa­teurs étaient plus inté­res­sés par les auteurs des conte­nus que par les conte­nus eux-mêmes. Nous avons alors trans­for­mé Lef­ty en moteur de recherche d’influenceurs et avons ajou­té des briques à notre offre, jusqu’à deve­nir aujourd’hui une solu­tion qui couvre l’ensemble de la chaîne de valeur de la rela­tion marque-influenceur.

Qui sont les concurrents ? 

Nous avons une petite dizaine de concur­rents dans le monde, dont Traa­ckr, Tribe Dyna­mics ou Launch­me­trics. C’est un mar­ché encore nais­sant, en forte crois­sance et sans réel lea­der. Les places sont à prendre main­te­nant, c’est donc un moment exci­tant pour nous !

Quelles ont été les étapes clefs depuis la création ? 

Nous avons levé des fonds quand nous nous sommes consti­tués en avril 2015, puis en mai 2017 quand nous avons pivo­té. Nous avons eu une crois­sance orga­nique depuis lors, jusqu’à deve­nir pro­fi­table récem­ment. Nos clients sont prin­ci­pa­le­ment en France aujourd’hui (60 % de notre base clients) et la pro­chaine étape est l’inter­nationalisation.

Qu’est-ce que le marketing d’influence ?

C’est une chaîne de com­mu­ni­ca­tion uti­li­sée par les marques qui éta­blissent des par­te­na­riats avec des influen­ceurs afin de pro­mou­voir leurs pro­duits. Un influen­ceur est un compte social qui a plu­sieurs mil­liers, voire plu­sieurs mil­lions d’abonnés. Il s’agit sou­vent d’une per­sonne phy­sique, alliant une pas­sion (pho­to­gra­phie, mode, maquillage, vie de famille, tech­no­lo­gie, etc.) qu’il aime par­ta­ger sur les réseaux sociaux. Une com­mu­nau­té d’abonnés l’a élu pour la qua­li­té de son contenu. 

Comment mesure-t-on la qualité d’un influenceur ? 

Elle est mesu­rée avec les mesures de suc­cès clas­siques des chaînes de com­mu­ni­ca­tion digi­tale, au tra­vers d’indicateurs allant de la mesure de la visi­bi­li­té (impres­sions ou por­tée) à la mesure de la conver­sion (CTR ou Click Through Rate, ventes géné­rées, etc.).

Les marques ne risquent-elles pas de perdre le contact véritable avec leurs consommateurs ? 

Au contraire ! Les marques peuvent, de nos jours, se rap­pro­cher de leurs consom­ma­teurs en créant des com­mu­nau­tés fortes, autour d’influenceurs qui leur servent de relais. à tra­vers les influen­ceurs, le mes­sage de marque se trans­forme en s’humanisant. Il passe de l’ère où la marque inter­rom­pait les conver­sa­tions en fai­sant la pro­mo­tion par des mes­sages directs (l’ère de la publi­ci­té) à une ère où la marque fait par­tie inté­grante des conver­sa­tions sur les réseaux sociaux.

Les faux influenceurs existent-ils et comment les traite-t-on ? 

Les comptes robots sont en plein essor du fait de la crois­sance de l’influence : il faut bien com­prendre qu’il s’agit d’un mar­ché qui est pas­sé de 500 mil­lions de dol­lars en 2015 à 10 mil­liards aujourd’hui ! Les influen­ceurs achètent de faux abon­nés et de faux likes afin de gon­fler leurs sta­tis­tiques et d’attirer les marques, qui s’appuient sur ces sta­tis­tiques pour juger de la por­tée qu’un influen­ceur peut leur offrir. Grâce à notre logi­ciel, nos clients peuvent connaître la pro­por­tion réelle de robots qui suivent un influen­ceur et débus­quer les fraudeurs.

Assistons-nous à l’émergence d’une société fondée sur la vanité ? 

Les influen­ceurs sont vus comme des modèles par les jeunes géné­ra­tions. Mais ils n’ont fait que rem­pla­cer les idoles du ciné­ma, du sport ou de la télé­vi­sion (qui sont d’ailleurs deve­nus des influen­ceurs et dont le quo­ti­dien peut désor­mais être sui­vi sur les réseaux sociaux). Ces modèles sont plus acces­sibles que jamais : ils res­semblent à leur audience, qui les a élus et qui les observe en per­ma­nence. Leur habi­tude de publier régu­liè­re­ment du conte­nu sur les réseaux sociaux est sans doute copiée par leur audi­toire, aus­si bien par mimé­tisme que par vani­té. Les jeunes géné­ra­tions rêvent de deve­nir influen­ceurs, mais ils rêvaient d’être des stars il n’y a pas si long­temps ! La vani­té reste la même, elle a sim­ple­ment évo­lué vers un genre nou­veau, que les géné­ra­tions plus anciennes ont un peu plus de mal à appréhender.


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