Nous étions seuls. Une histoire diplomatique de la France. 1919–1939
Alors que le personnel diplomatique est généralement inconnu du grand public, Gérard Araud a réussi le tour de force d’obtenir une réelle notoriété au-delà du cercle des initiés. Depuis son départ en retraite du corps diplomatique, il met à profit son expérience professionnelle et cette notoriété pour satisfaire un goût de la plume qui était déjà manifeste à l’École. Et tant mieux pour nous, puisqu’il nous livre à présent une excellente synthèse historique de la diplomatie française entre les deux guerres : 330 pages point trop grandes.
L’auteur souligne que cet ouvrage est en quelque sorte un produit dérivé de ses Histoires diplomatiques parues l’an dernier, dont nous avons rendu compte dans notre récent numéro 785. Comme l’auteur le dit pour lui dans son premier chapitre, comme moi-même qui aussi ai servi mon pays avec fierté, nous sommes nombreux à être restés traumatisés par la défaite de 1940, par histoire familiale interposée, et à nous demander comment on en était arrivé là, ce que nous aurions fait alors… Je crois pouvoir dire que ce livre répond bien à la première question et il m’a apporté des lumières inédites, tout en mettant de l’ordre dans un ensemble de connaissances un peu disparates. Il se lit avec facilité et plaisir. Son seul défaut est de nous laisser parfois sur notre faim, car c’est une synthèse et il ne pouvait entrer dans tous les détails ; mais n’est-ce pas une qualité que de donner envie d’approfondir ? La succession des événements est agrémentée par des réflexions que je crois pertinentes (le dernier chapitre, qui envisage la période non plus chronologiquement mais par aire géographique, est particulièrement fort) et surtout par des portraits à charge et à décharge qui avec gourmandise sont bien brossés ; ces portraits nous renvoient au rôle des personnalités dans l’évolution des événements, par-delà le déterminisme des faits ; ils nous renvoient à la seconde question : qu’aurions-nous fait ? qu’avons-nous fait ? que faisons-nous de la part de responsabilités que la Nation nous a confiées ?