La start-up qui révolutionne la médecine personnalisée dans le domaine de l’oncologie
Grâce à une plateforme d’immunothérapie combinatoire personnalisée, Odimma Therapeutics a pour ambition de développer et démocratiser les traitements sur-mesure pour traiter de manière spécifique les patients atteints de cancer. Pascale Balducchi, CEO de cette start-up innovante spécialisée dans la médecine personnalisée.
Présentez-nous Odimma Therapeutics.
Odimma Therapeutics est née d’un brevet déposé par le docteur Jean-Marc Limacher, oncologue chef du service d’oncologie de l’Hôpital Louis Pasteur de Colmar au sein duquel il a développé son activité de génétique oncologique visant à soigner les individus et les familles ayant une prédisposition héréditaire au cancer. Dans ce cadre, il a travaillé sur une approche innovante visant à prendre en compte la génétique du cancer pour développer une thérapie nouvelle.
Dans cette continuité, la start-up Odimma Therapeutics a vu le jour en 2017. Aujourd’hui, Odimma Therapeutics emploie 8 personnes et a levé, à date, près de 5 millions d’euros principalement auprès de fonds publics et de capitaux privés. Nous avons ainsi essentiellement été soutenus par des Business Angels (tels que Angels Santé et Alsace Business Angels, mais aussi des membres des communautés Sportive, Santé et Industrielle) et des institutionnels, comme le fonds Cap Innov’Est et BPIfrance.
Actuellement, nous sommes en pleine recherche de financements pour commencer un premier essai clinique chez l’Homme, de phase I.
Dans le domaine de la lutte contre le cancer, à quelle problématique vous intéressez-vous et pourquoi ?
Une des difficultés majeures de la lutte contre le cancer est liée au fait que chaque patient atteint présente une tumeur qui est génétiquement unique, c’est-à-dire que cette tumeur possède des marqueurs tumoraux qui lui sont propres. Ces marqueurs, appelés des néo-antigènes, peuvent également servir de cible au système immunitaire. Si le système immunitaire est stimulé efficacement pour reconnaître et détruire les cellules qui portent ces néo-antigènes, il pourra être en mesure de détruire spécifiquement la tumeur.
À partir de ces constats, Odimma Therapeutics développe une plateforme personnalisée qui va cibler ces néo-antigènes présents dans la tumeur du patient pour induire et amplifier une réponse immunitaire efficace contre la tumeur. C’est un changement significatif dans la manière d’appréhender le cancer, car il ne s’agit plus de considérer s’il s’agit d’une tumeur du sein ou du poumon, par exemple, mais de considérer la tumeur d’un patient X ou Y, quel que soit l’organe solide porteur de cette tumeur.
Concrètement, que proposez-vous ?
Grâce à l’intelligence artificielle et aux algorithmes, nous recherchons et sélectionnons les marqueurs pertinents de la tumeur pour les regrouper sous forme d’une portion d’ADN synthétique. Nous y ajoutons deux adjuvants, qui sont des potentialisateurs forts de la réponse immunitaire. L’ensemble des 3 éléments (le vaccin) est ensuite injecté au patient pour stimuler son système immunitaire à se diriger contre ces néo-antigènes.
Les récents progrès en cancérologie ont notamment été rendus possibles par l’apparition d’une classe de médicaments, les inhibiteurs de point de contrôle. Dans l’organisme, ces points de contrôle sont des molécules qui empêchent le système immunitaire de s’emballer à chaque événement qui se produit. Nous ajoutons ainsi à l’ADN synthétique deux adjuvants : un virus inactivé pour stimuler le système immunitaire et un inhibiteur de point de contrôle á faible dose pour amplifier la réponse immune obtenue. L’idée est de donner un signal d’alerte à l’organisme pour déclencher puis permettre la réponse immunitaire ciblée.
Odimma Therapeutics a réussi à développer une plateforme technologique dotée d’une double caractéristique : la puissance et la personnalisation.
Quels sont les défis que pose la médecine personnalisée ?
L’immunothérapie développée au cours des dernières années a permis des avancées majeures dans la lutte contre le cancer. Néanmoins, on estime que seulement 20 % des patients en moyenne peuvent réagir aux immunothérapies classiques. L’ambition d’Odimma Therapeutics est de permettre à beaucoup plus de patients de bénéficier de ces nouvelles classes thérapeutiques, mais aussi de créer de nouveaux répondeurs notamment pour les patients qui présentent une résistance à l’immunothérapie, afin de les rendre sensibles. Nous sommes persuadés que la médecine personnalisée est un des principaux vecteurs des progrès et des avancées de demain.
Dans ce cadre, nous apportons une véritable innovation avec notre plateforme qui permet de proposer un vaccin thérapeutique spécifique à chaque patient.
Au-delà, les défis de la médecine personnalisée tournent aussi autour du coût et de la durée nécessaire á la fabrication du traitement. Chez Odimma Therapeutics, nous contribuons à lever ces freins. En effet, le recours à l’ADN synthétique permet d’aller plus vite que l’ARN et que les technologies actuellement utilisées. Nous espérons pouvoir proposer dans un délai de 7 semaines le médicament sur-mesure au patient. En parallèle, nous souhaitons aussi que ce traitement soit accessible et abordable au bénéfice de tous les patients et compatible avec les contraintes des systèmes de santé ; l’ADN synthétique permet, par ailleurs, une meilleure maîtrise des coûts.
Dans cette démarche, à quelles problématiques êtes-vous confrontés ?
L’enjeu est d’articuler une chaîne de production ou supply chain efficace et performante capable de gérer l’ensemble de ces paramètres et composantes. Dès le départ, nous avons travaillé sur la sécurisation de chacune des étapes.
Concrètement, en amont de la chaîne, le patient subit un prélèvement afin de réaliser le séquençage de l’ADN qui est pris en charge par notre partenaire. Ce séquençage est ensuite analysé grâce à l’intelligence artificielle et à l’aide d’algorithmes afin d’identifier les éléments nécessaires à la fabrication de l’ADN synthétique. Ces éléments sont transmis aux acteurs en charge de préparer l’ADN synthétique. En parallèle, les deux autres composants, le virus et l’inhibiteur de point de contrôle sont préparés à l’avance et prêts à être utilisés.
Les maillons de la chaîne de valeur qui couvrent la personnalisation du produit ne représentent, in fine, que 30 % du processus global. Le modèle est « scalable » et a la capacité à servir un nombre croissant de patients.
Aujourd’hui, comment vous projetez-vous sur le marché ? Quelles sont les prochaines étapes ?
Nous finalisons une dernière étude réglementaire afin de déposer notre demande d’essai clinique pour pouvoir commencer la phase I à partir de l’été 2024 dans l’indication du cancer colorectal dans un premier temps. Cet essai sera réalisé avec le centre régional de lutte contre le cancer Georges-François Leclerc, basé à Dijon, et qui est un centre de référence en immunothérapie et en cancérologie digestive. Nous sommes également en cours de discussion pour mettre en place des collaborations dans les domaines du cancer du sein et du mélanome.
Vous préparez également une levée de fonds…
Les essais cliniques nécessitent des fonds significatifs. Dans le contexte actuel, les marchés du capital risque et des levées de fonds pour les biotechs sont très difficiles d’accès et très resserrés depuis près de deux ans. Nous sommes actuellement en phase active de recherche de financements et d’investisseurs pour poursuivre nos développements et avancer vers notre premier essai clinique que nous souhaitons lancer d’ici l’été 2024.