Open savoir-faire, une innovation radicale inspirée de l’open source
REPÈRES
« Un savoir-faire se définit comme un ensemble d’informations pratiques non brevetées, résultantes de l’expérience et testées qui est :
– secret, c’est-à-dire qu’il n’est pas généralement connu ou facilement accessible ;
– substantiel, c’est-à-dire important et utile pour la production des résultats ;
REPÈRES
« Un savoir-faire se définit comme un ensemble d’informations pratiques non brevetées, résultantes de l’expérience et testées qui est :
– secret, c’est-à-dire qu’il n’est pas généralement connu ou facilement accessible ;
– substantiel, c’est-à-dire important et utile pour la production des résultats ;
– identifié, c’est-à-dire décrit d’une façon suffisamment complète pour permettre de vérifier qu’il remplit les conditions de secret et de substantialité. » (Cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de prestations intellectuelles, 2009.)
Le savoir-faire d’une entreprise est source d’avantages compétitifs durables. Objet de convoitise de la part de la concurrence, le savoir-faire est protégé par le secret, une qualité qui lui est consubstantielle. Pour une entreprise manufacturant des produits, on imagine aisément que l’on puisse mener une politique de non-divulgation de savoir-faire. L’achat d’un produit manufacturé n’emporte généralement pas l’accès à la conception ou au procédé de fabrication, et l’entreprise peut tenir contractuellement ses salariés au secret des affaires et à un devoir de réserve pendant et après leur collaboration.
Le savoir-faire en services professionnels
En revanche, on voit plus difficilement quels dispositifs de protection mettre en place lors de la fourniture de services professionnels tels que le conseil en gestion des affaires ou l’ingénierie de systèmes d’information.
Les entreprises de services doivent imaginer des politiques alternatives
Tout d’abord, le client bénéficiaire d’un service peut directement observer le savoir-faire mis en œuvre lors des prestations. Puis il peut même participer à cette mise en œuvre lors de pilotage conjoint et des phases de conception.
Ensuite, il impose souvent des clauses de transfert de savoir-faire. Enfin, quand bien même les deux parties en conviendraient-elles, il est problématique de réserver l’accès au savoir-faire aux seuls collaborateurs habilités du client alors que des fournisseurs tiers concurrents du détenteur du savoir-faire sont concomitamment employés.
Ainsi, une entreprise innovante de service est condamnée, à terme, à perdre cet avantage compétitif par l’effet même de son succès. Encore récemment, ce terme était de plusieurs années. Avec les réseaux sociaux numériques, il se réduit à quelques clics de souris.
Face à ce défi inédit, les entreprises de services professionnels porteuses de savoir-faire doivent imaginer des politiques alternatives.
Troc entre savoir-faire et réputation
Premier exemple, élémentaire, celui d’un expert divulguant son savoir-faire dans un ouvrage. Outre une communication de savoir-faire, cet ouvrage en propose des représentations stylisées originales et dès lors porteuses de droits d’auteur. Leur utilisation impliquant la citation de l’auteur et de la source, l’expert offre ainsi un troc entre savoir-faire et réputation. En cas d’emprunt notable à des fins commerciales, une compensation financière est possible.
« Référentiels SI » sous copyright
Protection juridique
Un open savoir-faire est un savoir-faire divulgué. Sa formulation, nouvelle et stylisée, est une création originale et dès lors porteuse de droits d’auteur. Nous exposons ici « HORIT ». Cette création, qui avance une figure de l’immatériel à cinq composantes, est protégée par le droit d’auteur.
Second exemple, complexe, celui des « référentiels SI », ouvrages en gestion informatique publiés sous copyright. Présentés souvent comme des « meilleures pratiques » par leurs promoteurs, ce sont des produits immatériels. On peut faire remonter leur essor au début des années 2000. À l’époque, une poignée d’entreprises internationales domine de leur savoir-faire le marché des prestations informatiques.
Opérant globalement, ces entreprises aux marques prestigieuses mettent en œuvre des méthodes qu’elles ont éprouvées sur le marché nord-américain et qu’elles protègent jalousement par le secret des affaires et le copyright. Pour leurs concurrents locaux n’ayant ni la surface financière ni le temps d’investir dans le développement et la promotion d’un savoirfaire compétitif, il s’agit de trouver une riposte. Or, outre-Manche, il existe une offre de savoirfaire informatique. Pilotée par l’Office Government of Commerce (OGC), celle-ci confère un avantage compétitif certain à ses souscripteurs. Le savoir-faire en question est celui de la Central Computer and Telecommunications Agency (CCTA). La CCTA a consigné ses pratiques en gestion de systèmes d’information dans des ouvrages, et les prestataires informatiques anglais les utilisent comme un guide qualité pour répondre à des consultations. Comme ces ouvrages sont rassemblés sous une marque, leurs souscripteurs en tirent un signe distinctif de reconnaissance ; et ces derniers ont commencé à s’organiser en ligue internationale. Pour des prestataires informatiques débutants, c’est une opportunité stratégique. Mais, pour l’OGC, c’est une opération de valorisation de savoir-faire par la collecte de royalties de copyright.
Les stratégies open savoir-faire
Une expérience peut être partagée librement et licitement
Pour éclairer les alternatives stratégiques au savoir-faire, nous avançons une matrice à deux dimensions : la première, désignée par share, adresse l’exposition de l’expression du savoir-faire ; la seconde, désignée par protect, adresse la concession des droits afférents à l’expression du savoir-faire. Pour chaque dimension, nous posons deux directions : pour la dimension share, cela sera non divulgué-publié ; pour la dimension protect, cela sera copyright-open.
Ainsi configurées, ces dimensions sont croisées, faisant apparaître en damier quatre stratégies de savoir-faire : le « secret d’entreprise », qui est un savoir-faire exclusif parfois objet de titres de propriété industrielle, le « pragmatisme stylisé », ouvrages publiés sous copyright par des professionnels expérimentés aux talents d’écrivain et de graphiste, les « ligues de pratique », associations développant sous des processus analogues à ceux du logiciel des pratiques professionnelles sous copyright et signées par des marques, et les « communautés de pratique », dont l’expérience est partagée librement et licitement via les réseaux sociaux numériques professionnels publics et des régimes de droits d’auteur permissifs tels que les licences Creative Commons ou les licences Libres Savoirs ParisTech.
Maintenu enfermé dans l’entreprise, le savoir-faire est sous-tendu par une stratégie d’exclusion. Cette stratégie est celle des éditeurs de logiciels propriétaires qui bloquent l’accès aux sources et à leur savoir-faire. Inspiré par l’open source, on peut opter pour une stratégie d’ouverture que nous avons désignée par open savoir-faire. Cette stratégie permet de bénéficier du retour d’expérience et des enrichissements apportés par des partenaires ou des concurrents.
3 Commentaires
Ajouter un commentaire
Application de l’Open savoir-faire : l’expert anywhere anytime
Une application de ce modèle : un nouveau modèle de consulting, l’expert anywhere anytime.
Sur Le Cercle Les Echos : « Consulting via internet, l’expert anywhere anytime » par Tru Dô-Khac
Les trois modèles du consulting analysés avec HORIT
Un exemple d’application de HORIT pour analyser les trois modèles de consulting : le Consultant personne physique, le Consultant personne morale, le Consultant personne « numérique ».
Les actifs immatériels du Consultant personne physique sont de type humain et relationnel et ceux du Consultant personne morale sont en outre de type organisationnel.
Pour le Consultant personne « numérique », les actifs immatériels sont de type technologique et intellectuel.
cf Les trois modèles du consulting : personne physique, personne morale, personne « numérique » par Tru Dô-Khac sur Le Cercle Les Echos
Quatre modèles d’affaires Open Savoir Faire
Si l’on définit l’Open Savoir-Faire comme la divulgation du savoir-faire sous une forme originale porteuse de droit d’auteur, l’Open Savoir-Faire ouvre, pour sa source, la voie à des opportunités remarquables de co-mpétition.
Lorsqu’un concurrent reproduit ou représente l’Open Savoir-Faire (dans le respect du Code de la propriété intellectuelle et sous une concurrence loyale), il fait la promotion de la source en la citant. Pour une exploitation qui va au delà de ce qui est permis pas le Code de la propriété intellectuelle (exceptions aux droits d’auteur, L122‑5), il sera avisé de le faire sous licence d’autant plus que l’on revendiquera une politique d’entreprise socialement responsable et que l’on porte une marque forte.
Mais on peut aller plus loin. On peut engager la source pour un soutien en « back-office ». Et pour une opportunité précise, on peut même inviter la source à réaliser une offre conjointe (soutien « front office »).