OVRSEA Une alternative numérique pour le transport international
Antoine Sauvage (2012) est cofondateur et directeur technique d’Ovrsea, un commissionnaire de transport qui propose une alternative numérique pour le transport international. Ovrsea apporte simplicité, fiabilité et transparence dans la gestion des transports maritimes grâce à la technologie.
Quelle est l’activité d’Ovrsea ?
Nous organisons le transport de marchandises de nos clients qui sont des entreprises exportatrices ou importatrices. Cela s’apparente à une agence de voyages pour marchandises : camion au départ, passage des douanes, réservation du bateau ou de l’avion, douanes à l’arrivée, assurances, postacheminement, c’est une prestation tout en un pour les clients. Notre spécificité est de proposer en plus un service numérique qui donne de la visibilité, simplifie les process et fait gagner énormément de temps à nos clients. Suivi, reporting, interactivité…, nous avons fait rentrer la technologie dans un secteur vieux comme le commerce.
Comment t’est venue l’idée ?
C’est celle de trois des fondateurs issus d’HEC qui ont analysé le marché et maturé l’idée pendant leur dernière année de master. Nous nous sommes rencontrés alors que je cherchais un projet pendant ma quatrième année. Ils avaient déjà modifié leur projet une première fois, leur vision était déjà très claire à ce moment-là.
Quel est le parcours des fondateurs ?
3 HEC, un Supélec, un X, tous fraîchement sortis d’école. Des stages assez variés : banque, conseil, audit, industrie, start-up…, pas vraiment de profil type qui se dégage, à part l’envie de fuir les grosses structures, la volonté d’innover sur un marché majeur et une grande complémentarité. Notre spécificité, c’est peut-être que nous sommes jeunes et nous sommes cinq. On ne le regrette pas une minute, vu l’ambition du projet !
Qui sont les concurrents ?
En France, ce seraient les opérateurs traditionnels (Bolloré, Geodis…). Mais notre service est tellement différencié que nous ne sommes pas vraiment en concurrence. Étant seuls à proposer ce que nous faisons, nous nous battons contre les habitudes. À l’international, le marché est tellement gigantesque que l’on ne s’est encore jamais retrouvé face à des concurrents comme Flexport – qui vient de lever 1 milliard de dollars.
Quelles ont été les étapes clés depuis la création ?
Le projet a débuté à plein temps pour les cinq fondateurs en juin 2017 et trois mois plus tard, nous avons obtenu les premières autorisations, réalisé un premier microtour de financement en BSA AIR (bon de souscription d’actions avec accord d’investissement rapide). En octobre 2017, nous avons rejoint l’incubateur HEC à Station F et recruté un premier stagiaire.
En janvier 2018, la première expédition (shipment), suivie du premier CDI en mai 2018. Un premier tour de financement en mode seed, à hauteur d’1,9 million d’euros. Aujourd’hui, nous sommes 15 et prévoyons de doubler la taille de l’équipe d’ici fin 2019.
Peux-tu nous raconter l’histoire du Cabinet start-up à l’X ?
Jacques Biot arrivait, il n’y avait alors aucune culture start-up chez les élèves, mais on en sentait les prémices. Le but était d’avoir un pendant start-up aux autres binets « pro » : X‑forum et Duo Conseil par exemple. Et nous voulions créer un accélérateur.
Nous avons commencé par un start-up weekend, un énorme projet à notre échelle. 150 participants, un week-end complet, à partir d’une feuille blanche, à Palaiseau…, une aventure entrepreneuriale en soi. Ça a permis de réellement lancer le CSU (Cabinet start-up), et nous en sommes assez fiers. Depuis, de nombreux membres du binet et participants à ce premier week-end baignent dans le milieu des start-up.
Par la suite, l’administration a décidé de créer elle-même un incubateur. Le CSU a de son côté monté un salon, en plus des start-up weekends. Entre-temps, comme tous les binets, nous avons passé la main.
La culture start-up est-elle en train de se diffuser dans les grandes écoles ?
Oui, massivement et l’ampleur du mouvement est incroyable. Associations, masters, stages, la frontière entre les start-up et les écoles n’existe plus. Et c’est normal, les start-up sont les seules entreprises à pouvoir accueillir des étudiants dans leurs rangs avant même la fin de leurs études, à leur faire confiance et à profiter vraiment de leur dynamisme. Il n’y a que dans une start-up qu’un stage peut avoir un réel impact.
Le transport international était-il jusque-là le parent pauvre du numérique ?
Le seul parent pauvre, peut-être pas, mais avec vingt ans de retard, oui ! Que de temps perdu en coups de téléphone, e‑mails, fax, en recopie permanente d’informations d’un formulaire à l’autre, d’un e‑mail à un formulaire, etc. Notre technologie nous permet donc de nous concentrer sur ce qui fait la valeur du commissionnaire : conseiller, gérer les problèmes et négocier au nom de nos clients, plutôt que de se perdre dans des tâches administratives sans fin.
Verra-t-on l’avènement du transport maritime autonome ?
Il faut demander à nos collègues de chez Shone ! Comme dans la plupart des secteurs, on peut penser que ce sera progressif : les tâches à faible valeur ajoutée les premières, etc. Mais personne à bord, pas pour tout de suite !
En revanche, dans les ports, c’est une autre histoire : le port de Shanghai est quasi tout automatique par exemple. C’est une excellente nouvelle pour la qualité des données et la visibilité qui en découle.
Quels conseils donnerais-tu aux X qui voudraient lancer une start-up ?
Même dans l’entrepreneuriat, le diplôme de l’X a une valeur. L’exemple de Mark Zuckerberg, qui a abandonné ses études, n’est pas bon : mieux vaut un très beau parcours académique et des bonnes expériences quand on lève des fonds.
Il faut s’efforcer de distinguer l’entêtement de la vision : quand on lance une start-up, la plupart des retours sont mitigés, beaucoup insistent sur le risque, ce qui ne fonctionnera pas, etc. Il faut en tenir compte et garder le cap en même temps. En tant qu’X, lorsque c’est possible, il faut essayer d’arbitrer grâce à nos capacités analytiques.
Et enfin, faire preuve d’humilité : il y a plein de qualités que nous n’avons pas en tant qu’X. S’associer c’est faire (vraiment) confiance aux autres : penser sincèrement qu’ils feront mieux et prendront de meilleures décisions dans leurs domaines de compétence. Je ne compte plus le nombre de (très) mauvaises décisions que j’aurais prises si je n’avais pas fait confiance à mes cofondateurs.