Philippe Adam (85)

Philippe Adam (85), le pilote de chasse

Dossier : AtypiXMagazine N°Philippe Adam (85), le pilote de chasse

Philippe Adam, X 85, est à l’âge où l’on est ten­té de nouer ensemble le fil de son pas­sé et celui de l’avenir pour en faire le fil conduc­teur de sa vie. Et en toute sim­pli­ci­té, il se sent en paix avec ces deux âges qui convergent vers lui aujourd’hui.

Il vou­lait être pilote de chasse. En sor­tant de l’X, en un temps où les jeunes X bou­daient encore la car­rière mili­taire, il entre dans l’armée de l’air. Deux ans plus tard, en 1990, il est bre­ve­té pilote de chasse. Il est affec­té en pre­mier poste sur la base de Cam­brai. « Il m’a fal­lu faire preuve d’humilité et de téna­ci­té, face à des offi­ciers for­més à Salon qui me sus­pec­taient de vou­loir prendre leur place. Après 4 à 5 ans, ils m’avaient adopté. »

C’est alors que son pedi­gree tech­nique le rat­trape. Il est affec­té au Centre d’essais en vol, à Istres, comme pilote d’essai. En 2000, il suit la sco­la­ri­té de l’École de guerre. Il part en 2003 pour les Émi­rats Arabes Unis, pour y assu­rer l’interface entre les indus­triels fran­çais de l’armement et les auto­ri­tés émiraties.

En 2006, retour à Paris. Il est affec­té à l’état-major de l’armée de l’air, au bureau des pro­grammes, en charge de l’aviation de com­bat. Il y coor­donne les pro­grammes Rafale, Scalp, Mica, et ASMPA (Air-Sol Moyenne Por­tée Amé­lio­ré, élé­ment de la dis­sua­sion nucléaire). En 2008, il atteint le som­met de la car­rière à laquelle tout jeune offi­cier aspire et dont tout vieil offi­cier parle avec res­pect et nos­tal­gie : il devient « père du régiment ».

La base qui lui est confiée, Istres, qu’il connaît bien, compte 5 000 agents, dont 2 500 sous ses ordres. L’équipe de direc­tion est par­fai­te­ment à sa main. Le voi­la à la tête d’une grosse entre­prise, très opé­ra­tion­nelle, avec héli­co­ptères, nucléaire, logis­tique, et une dimen­sion rela­tions exté­rieures non négligeable.

Mais ces rêves-là sont de courte durée. En 2010, il est affec­té à Washing­ton pour y suivre les cours du Natio­nal War Col­lege, qui est l’équivalent amé­ri­cain du Centre des Hautes Etudes Mili­taires. L’année sui­vante, il retrouve sa petite famille à Bruxelles, où il intègre les équipes de l’OTAN. En 2013, il revient à Paris, à la Délé­ga­tion aux affaires stratégiques.

Son envi­ron­ne­ment de tra­vail actuel le laisse à vrai dire sur sa faim : des chefs, for­més dans d’autres moules, qui croient sou­vent tout savoir et n’écoutent guère. Rien à voir avec l’éthique mili­taire. « Le com­man­de­ment puise ses res­sources dans les huma­ni­tés, car on tra­vaille avec le ‘maté­riau’ humain, ou les ‘res­sources’ humaines.

A vrai dire, le mot ‘res­sources’ est adap­té au cas d’espèce car il s’agit d’aller pui­ser en cha­cun de ses col­la­bo­ra­teurs ce qu’il a de meilleur et de le mettre en valeur. Dans l’armée, la confiance est une ver­tu car­di­nale : quand on va au com­bat ensemble, il est impen­sable qu’on n’ait pas une confiance abso­lue en celui qui nous accom­pagne. Au fond, contrai­re­ment à l’idée reçue qui vou­drait que les mili­taires exé­cutent sans état d’âme et sans réflé­chir, ‘com­man­de­ment’ et ‘mana­ge­ment’ sont un seul et même mot. »

Quand il com­man­dait la base d’Istres, Phi­lippe res­sen­tait avec émo­tion l’attente de ses équipes qui, avant toute déci­sion impor­tante, vou­laient connaître sa posi­tion à lui. Il a par­ta­gé cette res­pon­sa­bi­li­té avec elles, sans se déro­ber devant la res­pon­sa­bi­li­té émi­nente qui était la sienne.

Il garde éga­le­ment un grand sou­ve­nir de ses inter­lo­cu­teurs émi­ra­tis. For­més aux meilleures uni­ver­si­tés anglo-saxonnes, ceux-ci étaient, selon leur fond arabe, de fins négo­cia­teurs. Il s’est très vite aper­çu qu’ils le mani­pu­laient volon­tiers. Il a dû se tenir sur ses gardes, sans jamais mani­fes­ter de défiance envers eux. Leurs dis­cus­sions ont été pro­fondes. Ain­si, au moment des émeutes des ban­lieues fran­çaises en 2005, ils lui deman­daient, incré­dules, pour­quoi, si ces émeu­tiers n’étaient pas Fran­çais, la France ne les ren­voyait tout bon­ne­ment pas chez eux. Ils eurent entre eux des dis­cus­sions très riches sur les « reli­gions du Livre ».

Phi­lippe a noté l’avantage des négo­cia­teurs arabes qui fixent d’emblée un prix pla­fond, puis exigent le maxi­mum dans le cadre de l’enveloppe, quand l’administration fran­çaise souffre d’une atti­tude par­fois ambi­guë envers les indus­triels et de sa propre transparence.

Phi­lippe garde un grand sou­ve­nir de la for­ma­tion tech­nique, humaine et mili­taire reçue à l’X. Il s’agace des remises en cause inces­santes de ce modèle dont il s’estime le dis­ciple, et qui l’a por­té dans sa car­rière. Il s’étonne qu’on mette en ques­tion l’équité de son recrutement.

S’il avait des conseils à don­ner aux plus jeunes, ce serait ceux-ci : ne pas cher­cher de passe-droit, mais se valo­ri­ser par la qua­li­té de ses résul­tats ; être effi­cace, non auto­ri­taire ; être atten­tif aux hommes, à l’image de l’actuel chef d’état-major de l’Armée de l’Air, le géné­ral Mercier.

A la ren­trée, Phi­lippe pren­dra son nou­veau poste, au PC des opé­ra­tions aériennes du Mont Ver­dun, près de Lyon. Retour à l’opérationnel, dont il sait gré à son employeur, qui a su répondre à ses aspirations.

Commentaire

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ACMErépondre
18 juillet 2017 à 19 h 43 min

Bon­jour
Content de te revoir sur Inter­net. N’ou­blie pas les anciens. Ami­ca­le­ment. Serge

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