Pour une croissance accélérée des PMI à l’international

Dossier : Le tissu des PME françaisesMagazine N°522 Février 1997Par : Pierre VACHER (46)

La place domi­nante des PME dans l’é­co­no­mie fran­çaise (près de 60 % de la popu­la­tion active) est-elle com­pa­tible avec l’é­vo­lu­tion de l’é­co­no­mie mondiale ?
Les PME – et plus par­ti­cu­liè­re­ment les PMI – sont-elles bien équi­pées pour affron­ter la concur­rence internationale ?
Devront-elles se pla­cer dans le sillage des grandes entre­prises dotées d’un vaste réseau de suc­cur­sales et de comp­toirs, et ne vendre qu’à tra­vers ces réseaux ?
Ou, au contraire, devraient-elles s’af­fran­chir de la tutelle des grands groupes et s’or­ga­ni­ser, éven­tuel­le­ment en coopé­ra­tion, pour aller à l’international ?
Nous allons voir que les deux voies ne sont pas exclu­sives l’une de l’autre, qu’elles sont déjà pra­ti­quées avec un cer­tain suc­cès, mais qu’elles peuvent don­ner lieu à d’im­por­tants progrès.

1 – La place des PME dans le commerce extérieur – le rôle particulier des PME du secteur industriel (PMI)

Les PME agissent à l’international sur­tout par leurs expor­ta­tions ; leurs inves­tis­se­ments et implan­ta­tions à l’étranger sont encore peu déve­lop­pés. Nous par­le­rons donc sur­tout d’exportation.

1.1 – Les chiffres globaux de l’exportation

Les chiffres glo­baux de 1994 que nous pou­vons rete­nir sont les sui­vants en mil­liards de francs1 (tableau 1).

Notre réflexion se porte par­ti­cu­liè­re­ment sur le sec­teur des indus­tries manu­fac­tu­rières pour lequel nos expor­ta­tions glo­bales ne repré­sentent que 16 % du PIB contre 24 % en Alle­magne et qui pos­sède la marge de crois­sance la plus impor­tante pour les pays les plus avan­cés dans le monde.

Tableau 1​
Total dont PME
Expor­ta­tion de biens :
• entre­prises des indus­tries manufacturières
• autres​(agro-ali­men­taire…)
Expor­ta­tion de ser­vices :
935
377
372
277
225
TOTAL 1 684 502

1.2 – La place des PMI dans le commerce extérieur des biens manufacturés

Les chiffres détaillés pour 1994 qui se trouvent dans le tableau en annexe peuvent se résu­mer comme indi­qué dans le tableau 2.

Ces chiffres font appa­raître que la place des PMI dans l’exportation est impor­tante mais infé­rieure à leur place dans le chiffre d’affaires inté­rieur, et a for­tio­ri dans l’emploi.

Il est vrai qu’il fau­drait ajou­ter aux expor­ta­tions directes celles qui se font à tra­vers des entre­prises ensem­bliers, géné­ra­le­ment de grande dimen­sion. Ces expor­ta­tions indi­rectes sont géné­ra­le­ment éva­luées à 25–30 % du chiffre d’affaires à l’exportation des grandes entre­prises, ce qui fait remon­ter sen­si­ble­ment la part des PMI dans l’exportation.

Mais on observe par ailleurs que la moi­tié des PMI ne font aucune expor­ta­tion directe, se conten­tant du débou­ché de la clien­tèle locale ou natio­nale et de la fidé­li­té de leurs don­neurs d’ordre français.

En outre il ne semble pas que le poids des PME dans la popu­la­tion des entre­prises manu­fac­tu­rières soit un obs­tacle aux bonnes per­for­mances sur le com­merce inter­na­tio­nal. Les cal­culs de cor­ré­la­tion et l’exemple de cer­tains pays comme l’Italie le montrent.

Tableau 2​
Total PMI PMI/Total
• Effec­tifs (en mil­lions de personnes)
• Chiffre d’affaires (mil­liards de francs)
• Expor­ta­tions (mil­liards de francs)
• Taux d’exportation :
– toutes entreprises
– hors entre­prises <20 pers.
3,5
3,3
0,935

28,5 %
31,8 %

2,2
1,55
0,277

18 %
21,7 %

62 %
47 %
30 %

1.3 – Les facteurs influant sur les performances à l’exportation

Deux indi­ca­teurs per­mettent d’apprécier les per­for­mances à l’exportation et, dans une cer­taine mesure, la com­pé­ti­ti­vi­té des branches concer­nées : le taux d’exportation (exportation/chiffre d’affaires) et le taux de cou­ver­ture (exportation/importation), le pre­mier per­met­tant de mesu­rer la capa­ci­té de péné­tra­tion sur les mar­chés exté­rieurs et le deuxième le degré de par­ti­ci­pa­tion à l’équilibre de la balance des échanges.

Ces per­for­mances sont très inégales selon la taille des PMI, la nature de leurs acti­vi­tés et le type d’actionnariat.

  • Le taux d’exportation aug­mente avec la taille de l’entreprise :
    – 5 % (esti­ma­tion) pour les moins de 20 salariés,
    – 12 % pour la tranche 20–50 salariés,
    – 28 % pour la tranche 200–500 salariés,
    – 39 % pour les grandes entreprises.
  • Ce taux varie éga­le­ment selon les sec­teurs d’activités :
    – 16 % pour les biens de consommation,
    – 19 % pour des biens intermédiaires,
    – 24 % pour les biens d’équipement en géné­ral (mais beau­coup plus pour les biens d’équipement de production).
  • Le taux de cou­ver­ture des impor­ta­tions par les expor­ta­tions varie éga­le­ment selon les sec­teurs d’activité mais dans l’ensemble il est supé­rieur à 1 (moyenne 1,4), y com­pris dans les domaines for­te­ment tou­chés par la concur­rence exté­rieure tel celui du tex­ti­le­ha­bille­ment dont le taux moyen est de 1,3. Il est sen­si­ble­ment le même pour les PMI que pour les grandes entre­prises sauf pour les biens inter­mé­diaires où il est plus faible.
  • Les dif­fé­rences obser­vées selon le type d’actionnariat sont illus­trées par le tableau 3 :
    – les socié­tés indé­pen­dantes ont un taux d’exportation deux fois plus faible que les filiales des groupes étran­gers, mais elles rap­portent des excé­dents alors que les autres n’en rap­portent pas, car ces der­nières jouent, en plus de leurs acti­vi­tés indus­trielles, un rôle d’importateur de maté­riels pour leur groupe ;
    – les filiales des groupes fran­çais ont un taux d’exportations directes faible par rap­port à leurs mai­sons mères (20 % contre 30 %) mais un bon taux de cou­ver­ture de leurs impor­ta­tions. En valeur abso­lue le volume de leurs excé­dents est sen­si­ble­ment égal à celui des PMI indépendantes.
Tableau 3 (chiffres de 1992)
Socié­tés
indépendantes
Filiales​de groupes
fran­çais étran­ger
Nombre de PMI de plus de 20 personnes
Part de chaque caté­go­rie de PMI
dans les expor­ta­tions françaises
Taux d’exportation de chaqu​e catégorie
Taux de cou­ver­ture des importations
Solde com­mer­cial (en mil­liards de francs)
18 900
42 %14,5 %
1,30
21
2 000
23 %

20 %
1,75
21,5

2 000
35 %

30 %
1,0 (env.)
1,5

Quant à l’évolution des taux d’exportation depuis 1980, elle est net­te­ment posi­tive ; le taux moyen est pas­sé, pour les PMI de plus de 20 per­sonnes, de 16,4 à 21,7 (en 1994), pen­dant que les grandes entre­prises pas­saient de 31,3 à 39,3 ; les deux per­for­mances sont simi­laires mais les PMI ont accru leur part dans la pro­duc­tion fran­çaise, et les deux pro­gres­sions se cumulent.

Cette pro­gres­sion des PMI ne mini­mise en rien, bien enten­du, le rôle moteur des grandes entre­prises dans l’industrie et les échanges extérieurs.

1.4 – Les investissements des PMI à l’étranger

Les PMI ont sui­vi, mais dans une faible pro­por­tion et avec quelques années de déca­lage, l’essor des inves­tis­se­ments fran­çais à l’étranger, essor déclen­ché par un cer­tain nombre de grandes entre­prises fran­çaises de l’industrie et des services.

On comp­tait en 19932 1 400 entre­prises moyennes ou petites (moins de 1 mil­liard de francs de chiffre d’affaires), indus­trielles pour la plu­part, ayant implan­té une filiale à l’étranger soit par créa­tion, soit par prise de contrôle. Ces filiales repré­sen­taient 14 % des éta­blis­se­ments fran­çais à l’étranger et 5 % des effec­tifs (110 000 emplois) ; elles se situaient pour la plu­part en Europe et dans une moindre mesure en Afrique.

2 – Comment les PMI réalisent-elles leurs exportations ?

Il importe de dis­tin­guer entre les expor­ta­tions directes et les expor­ta­tions indi­rectes qui relèvent de démarches tota­le­ment dif­fé­rentes, même s’il y a par­fois inter­fé­rence entre elles.

2.1 – Les expor­ta­tions directes concernent les pro­duits finis, com­po­sants, matières… – quel­que­fois des sous-trai­tances – que les PMI vendent à des clients étran­gers, soit par leurs propres moyens, soit avec l’aide d’intermédiaires : agents, socié­tés de com­merce, grou­pe­ments d’exportateurs, etc.

Un poste de douane tranquilleÀ cet égard, les PMI sont sou­vent confron­tées à des pro­blèmes de coût (com­mis­sions rela­ti­ve­ment éle­vées pour des volumes d’affaires modestes, tâches de pros­pec­tion oné­reuses…) ou de com­pé­tence, l’exportation de pro­duits indus­triels exi­geant en géné­ral des connais­sances très diverses, sur la tech­nique, la concur­rence, les mon­tages finan­ciers, etc.

Dans l’ensemble, il appa­raît que les moyens dont dis­posent les PMI pour leurs expor­ta­tions sont insuf­fi­sants. Les résul­tats d’une étude menée à l’appui d’un rap­port d’Olivier Das­sault de 1994 illus­trent cette appréciation :
– sur l’ensemble des 140 000 entre­prises fran­çaises expor­ta­trices de toutes tailles, il y en a 126 000 qui exportent peu ou prou, dont 3 000 seule­ment dis­posent d’une fonc­tion expor­ta­tion ; sur les autres entre­prises qui exportent plus de 5 mil­lions de francs, la moi­tié seule­ment ont un spé­cia­liste de l’exportation ;
– un son­dage effec­tué auprès des entre­prises expor­ta­trices per­met d’estimer que la créa­tion ou le ren­for­ce­ment de leur fonc­tion com­mer­ciale pour­rait géné­rer un volume de ventes sup­plé­men­taires à l’étranger de l’ordre de 200 mil­liards de francs, ceci concer­nant, pour l’essentiel, des PME ; un chiffre qui paraît énorme, mais qui se recoupe avec les per­for­mances des PME alle­mandes, les­quelles exportent, toutes pro­por­tions gar­dées, 145 mil­liards de francs de plus que les françaises.

Les ini­tia­tives de la DRIRE, des DRCE, des Chambres de com­merce et des grou­pe­ments pro­fes­sion­nels pour déve­lop­per le conseil et l’assistance aux PMI en matière d’exportation vont donc tout à fait dans le bon sens.

Il fau­drait en mesu­rer plus rigou­reu­se­ment l’efficacité sur le ter­rain et sélec­tion­ner les orga­nismes les plus aptes à accro­cher l’intérêt des chefs d’entreprise.

2.2 – Les expor­ta­tions indi­rectes, c’est-à-dire via les entre­prises qui incor­porent les demi-pro­duits four­nis par les PME dans leurs propres expor­ta­tions n’ont pas été éva­luées avec pré­ci­sion, mais elles sont esti­mées à envi­ron 60 % des expor­ta­tions directes des PME (chiffres du CODEIEM)3. Ceci se recoupe avec le fait que la part des achats de com­po­sants dans le chiffre d’affaire des grandes entre­prises expor­ta­trices est consi­dé­rable (40 à 60 %) et la majo­ri­té de ces achats est d’origine française.

Ce type d’exportation est sou­vent l’occasion pour les PMI four­nis­seurs de s’initier à l’international, dans le sillage de leurs clients, et de déve­lop­per ensuite leurs expor­ta­tions directes, voire leur implan­ta­tion pro­gres­sive à l’étranger.

De façon géné­rale, il serait utile que les grandes entre­prises expor­ta­trices puissent plus sou­vent faire pro­fi­ter ceux de leurs four­nis­seurs qui le sou­haitent de leurs actions à l’étranger :
– non seule­ment en contri­buant aux ventes des élé­ments incor­po­rés dans leurs propres expor­ta­tions et en assu­rant par là même la noto­rié­té de leurs fournisseurs,
– mais éga­le­ment en emme­nant avec elles cer­tains d’entre eux et en les asso­ciant aux opé­ra­tions annexes éven­tuelles : après-vente, expor­ta­tion d’équipements de pro­duc­tion, assis­tance pour la pro­duc­tion locale…
– ou, enfin, en met­tant à leur dis­po­si­tion leurs réseaux de rela­tions avec le contexte local pour les conseiller ou les sou­te­nir dans leurs projets.

Il peut en résul­ter une sorte d’accompagnement des PMI par des entre­prises clientes, comme cela se pra­tique déjà dans cer­tains sec­teurs tels que l’automobile, les télé­com­mu­ni­ca­tions ou cer­tains équi­pe­ments élec­triques (exemple : Citroën et EDF en Chine). Ce mode d’entraide inter­en­tre­prises peut se retrou­ver dans les rela­tions fabri­cants-dis­tri­bu­teurs, par exten­sion au mar­ché inter­na­tio­nal de rela­tions nouées sur le mar­ché intérieur.

2.3 – Les moyens dont disposent les PMI pour se développer à l’international pourraient être renforcés

Les PMI uti­lisent dif­fé­rents moyens pour l’exportation que nous pré­sen­tons dans le tableau 4, où le nombre de croix indique le degré d’adaptation à chaque classe d’activités.

Tableau 4​
Biens de
consommation

(pro­duits finis)
Biens
d’équipement

(pro­duits finis,
composants)
Biens
intermédiaires

(semi-pro­duits,
composants
Moyens en propre, groupe​ments d’exportateurs x x x x x
Sou­tien d’industriel client x x x x
Sou­tien de socié­té de distribution x x x x
Socié­té de com­merce international x x x
Por­tage par groupe indus­triel ou commercial x x

Ce tableau appelle quelques appréciations :
– les ser­vices com­mer­ciaux d’entreprise sont sou­vent trop légers ou inexis­tants, sauf dans quelques PMI, même par­mi les plus petites, for­te­ment expor­ta­trices, qui dis­posent d’un per­son­nel spécialisé ;
– la mise en pool de l’exportation dans des grou­pe­ments d’entreprises est longue à orga­ni­ser ; l’utilisation de cadres à temps par­ta­gé pro­gresse plus rapidement ;
– le sou­tien des groupes indus­triels et du com­merce de dis­tri­bu­tion se relie aux efforts de déve­lop­pe­ment du par­te­na­riat (qui est encore trop sou­vent plus ver­bal que réel) ;
– les socié­tés de com­merce inter­na­tio­nal (SCI) qui sont en France spé­cia­li­sées, pour la plu­part, dans le négoce de matières ou de pro­duits agri­coles, sont peu adap­tées à la com­mer­cia­li­sa­tion de pro­duits tech­niques com­plexes, diver­si­fiés, et peu répé­ti­tifs. Mais l’exemple de grands pays expor­ta­teurs tels que l’Allemagne et le Japon montre qu’il est pos­sible d’étendre l’action des SCI dans le com­merce exté­rieur au delà des branches traditionnelles ;
– la for­mule du por­tage pro­pre­ment dit est pro­po­sée par quelques grandes entre­prises dont cer­taines depuis long­temps (Pechi­ney, Rhône-Pou­lenc, Total, Elf, EDF…), à des entre­prises de plus petite taille, avec les­quelles elles n’ont pas de rela­tions d’affaires cou­rantes et dans des métiers sou­vent dif­fé­rents des leurs.

Cette for­mule a pris un cer­tain essor au cours des années récentes : elle inté­resse déjà, de façon plus ou moins sui­vie, plu­sieurs cen­taines de PMI. Selon le rap­port d’Olivier Das­sault cité plus haut, elle pour­rait être uti­li­sée assez rapi­de­ment par plus d’un mil­lier d’entreprises. Encore faut-il trou­ver un moyen de moti­ver dura­ble­ment, par un pro­fit propre, l’entreprise “ por­teuse ” non seule­ment au niveau des états majors mais à celui des opé­ra­tion­nels sur le ter­rain qui vivent sous la pres­sion de leurs objec­tifs de vente.

C’est dans cet esprit que le minis­tère du Com­merce exté­rieur a mis en place, cou­rant 1996, un dis­po­si­tif (la cel­lule “ Par­te­na­riat- France ”) des­ti­né à faci­li­ter les rap­pro­che­ments entre PMI et grandes entre­prises volon­taires pour le por­tage, dis­po­si­tif agis­sant en liai­son avec les struc­tures régio­nales du Com­merce extérieur.

2.4 – Le cas des filiales de groupes

Notre réflexion ci-des­sus, concerne prin­ci­pa­le­ment les PMI indé­pen­dantes. Les filiales de groupes fran­çais ou étran­gers peuvent en effet uti­li­ser le réseau com­mer­cial de leurs socié­tés mères, dans la mesure où leurs acti­vi­tés res­pec­tives sont de nature assez voi­sines et où la poli­tique de leur groupe intègre la fonc­tion com­mer­ciale extérieure.

On peut se deman­der, à cet égard, si cer­tains groupes fran­çais n’auraient pas inté­rêt – compte tenu de la mon­dia­li­sa­tion des mar­chés et sans nuire à l’autonomie de res­pon­sa­bi­li­té de leurs filiales –, à mieux faire jouer la syner­gie com­mer­ciale entre leurs dif­fé­rentes uni­tés à l’international.

3 – Quelques performances à l’exportation

Compte tenu de ce qu’environ la moi­tié des PMI n’exportent pas (pour dif­fé­rentes rai­sons : besoin non res­sen­ti, acti­vi­té de sous-trai­tance de proxi­mi­té…), il appa­raît que les PMI expor­ta­trices font, en moyenne, 40 % de leur chiffre d’affaires à l’international, dont 20 % à 35 % pour les plus petites de la tranche 20100 (voir tableau annexe).

Dans le sec­teur de la méca­nique, par exemple, sur un chiffre d’affaires de 320 mil­liards de francs en 1995, pour l’ensemble des entre­prises de plus de 20 sala­riés, près de 50 % ont été réa­li­sés à l’exportation, dont les deux tiers par les PMI.

Dans les sec­teurs for­te­ment concur­ren­cés par les pays à bas salaires comme celui du textile/ habille­ment, on trouve éga­le­ment des taux d’exportation remar­quables, par exemple : 25 % en moyenne dans l’habillement4, 58% chez Deveaux avec 320 sala­riés, 30 % chez Bel Maille avec 110 sala­riés, ces résul­tats étant le fruit d’efforts sou­te­nus d’organisation et de modernisation.

L’analyse de la cin­quan­taine d’entreprises indus­trielles situées en queue de la liste des 1 000 pre­mières entre­prises fran­çaises5 (qui appar­tiennent à la caté­go­rie des PMI ou qui en fai­saient encore par­tie il y cinq ou dix ans) fait appa­raître deux élé­ments significatifs :

1 – toutes ces entre­prises sont expor­ta­trices, dont la moi­tié avec des taux com­pris entre 25 et 90%,

2 – celles d’entre elles qui ont dépas­sé la barre des PMI (+ de 500 sala­riés) au cours de la période écou­lée et occupent aujourd’hui entre 500 et 1 500 emplois, voire plus dans deux ou trois cas, y sont par­ve­nues par l’effet d’une poli­tique de crois­sance externe, appuyée sur l’exportation (cas de Sidel ou de Deveaux), ou de regrou­pe­ment avec d’autres PMI sou­vent expor­ta­trices éga­le­ment (exemples : Zan­nier, GFI Indus­tries, APE, Meunier/mécanique, SPPI, Dynac­tion…)6.

On remar­que­ra que les pro­duits expor­tés sont loin de se limi­ter au seul sec­teur des tech­niques dites nou­velles et touchent toutes sortes de domaines, depuis le spa­tial jusqu’aux acti­vi­tés les plus tra­di­tion­nelles. À condi­tion que soient maî­tri­sés les prin­ci­paux atouts de la com­pé­ti­ti­vi­té : d’une part, bonne per­cep­tion du client et réac­ti­vi­té à sa demande, d’autre part, capa­ci­té d’innovation, pro­duc­ti­vi­té et fia­bi­li­té des engagements.

4 – Les nouvelles données du contexte commercial issues de la mondialisation

Les pro­fondes trans­for­ma­tions éco­no­miques sur­ve­nues dans le monde au cours des der­nières années ont eu deux sortes d’impacts sur les PMI :

un accrois­se­ment bru­tal de la concur­rence qui a fra­gi­li­sé ou fait dis­pa­raître beau­coup de ces entre­prises7 ou, au contraire, conduit cer­taines d’entre elles à se mobi­li­ser pour répondre aux nou­veaux besoins, notam­ment dans le domaine des biens d’équipement des­ti­nés aux pays émergents,
un chan­ge­ment pro­fond dans les rela­tions entre don­neurs d’ordre, qui sont géné­ra­le­ment des grandes entre­prises, et leurs four­nis­seurs, PMI pour la plu­part. Les don­neurs d’ordre ont exter­na­li­sé de nom­breuses acti­vi­tés non cen­trales, donc accru l’ampleur de leurs achats. Cela les amène à diver­si­fier leurs sources d’approvisionnement, sou­vent au-delà de leurs fron­tières natio­nales, à sélec­tion­ner leurs four­nis­seurs en fonc­tion de cri­tères sévères et à nouer des rela­tions de par­te­na­riat dans la durée avec ceux qui sont retenus.

Ces nou­velles don­nées du contexte com­mer­cial obligent les PMI à s’adapter pour être capables de s’insérer dans les réseaux de coopé­ra­tion don­neurs d’ordre/ fournisseurs.

Au total, les entre­prises seront d’autant mieux à même de pro­fi­ter des oppor­tu­ni­tés de la mon­dia­li­sa­tion qu’elles par­vien­dront à ren­for­cer leur coopération :

– d’une part entre PMI et grandes entre­prises fran­çaises ou étran­gères, afin d’accéder à des par­te­na­riats durables et de béné­fi­cier de la poli­tique d’externalisation de ces entreprises,

– d’autre part entre PMI elles-mêmes afin d’atteindre une taille suf­fi­sante pour enri­chir leurs offres sur les mar­chés exté­rieurs et pour faire face, par une coopé­ra­tion orga­ni­sée, à la demande des don­neurs d’ordres.

De telles habi­tudes de coopé­ra­tion existent déjà, avec plus ou moins de suc­cès, dans cer­tains sec­teurs (auto­mo­bile, télé­com­mu­ni­ca­tions, indus­tries de défense…) ; des ini­tia­tives nou­velles, sou­vent à l’échelon local, se déve­loppent dans d’autres sec­teurs ; il importe de les mul­ti­plier et de les encou­ra­ger, afin d’aider les PMI dont la sur­vie est en cause à s’insérer dans ce mou­ve­ment irré­ver­sible d’alliances multilatérales.

TABLEAU ANNEXE​
STATISTIQUES PAR TAILLE D’ENTREPRISES
Nombre​
d’entreprises
Effectifs​
(mil­liers
Chiffre d’affaires
(mdf)​
EXPORTATIONS​
Taux d’exportation* %​ Valeur (mdf)​
019
20/49​
5099
100199
200499
173 000
13 170
4 076
2 413
1 548
660
422
288
336
471
350
277
206
268
448
5
12
17,7
24,7
27,7
17
33,3
36,4
66,3
124
Total PMI (20÷499) 21 207 1 517 1 190 21,7 260,0
Total PMI (0÷499) 194 207 2 177 1 549 17,9 277
>500  850 1 323 1 611 39,3 633
Total toutes entreprises
(y. c. divers)
195 057 3 500 3 270
(110)
28,6 935
(25)
Ratio PMI / Total 99,5 % 62 % 47 % 30 %
Source : INSEE – Exploi­ta­tion TEF 1996–1997. Tranche 019 : chiffre d’affaires et taux : estimations.
* Taux d’exportation = exportation/chiffre d’affaires – chiffres de 1994.

Conclusion : l’effort accompli par les PME et pour les PME pour développer leurs exportations doit être poursuivi énergiquement

Les PME sont appe­lées à jouer un rôle de plus en plus large dans l’économie du fait notam­ment de la poli­tique d’externalisation des grandes entre­prises et de la diver­si­fi­ca­tion de la demande dans tous les types de pays. Leur place à l’exportation devrait donc conti­nuer à se déve­lop­per d’autant plus que la France a un cer­tain retard à rattraper.

Nous devons nous féli­ci­ter des nom­breuses marques d’attention dont les PME font l’objet, et tout par­ti­cu­liè­re­ment des aides appor­tées au déve­lop­pe­ment de leurs expor­ta­tions : dans les domaines des garan­ties, de la pros­pec­tion, du conseil en com­merce exté­rieur, de la dif­fu­sion des langues étran­gères, notam­ment. Ces efforts devront être pour­sui­vis pen­dant long­temps, car l’apprentissage est très progressif.

Les deux lignes direc­trices qui sont issues de notre réflexion et qui sont du res­sort des orga­nismes publics, para­pu­blics, pro­fes­sion­nels, et des entre­prises elles-mêmes, peuvent se résu­mer ainsi :

a) pour les PMI ven­dant direc­te­ment à l’exportation, il s’agit, d’une part de les aider ou conseiller dans la mise en place de ser­vices com­mer­ciaux appro­priés et, d’autre part, d’intéresser les firmes spé­cia­li­sées dans le com­merce exté­rieur : socié­tés de com­merce inter­na­tio­nal et socié­tés inter­ve­nant dans le por­tage, à se ren­for­cer dans l’exportation de pro­duits industriels,

b) pour les PMI ven­dant leurs pro­duits par l’intermédiaire de groupes indus­triels ou de dis­tri­bu­tion, il s’agit de les aider à éle­ver leurs per­for­mances au niveau des exi­gences de leurs clients et s’il y a lieu, de les accom­pa­gner dans leurs recherches de coopé­ra­tion avec d’autres PMI, en vue d’élargir leurs offres com­mer­ciales, et avec les grandes entre­prises clientes en vue de nouer des rela­tions de par­te­na­riat durables.

___________________________________________
1. Voir tableau en annexe et Enquête sur les PME fran­çaises – Édit. Maxi­ma, 1995.
2. Don­nées citées par F. HATEM, L’investissement inter­na­tio­nal, (1995).
3. Consor­tium pour le déve­lop­pe­ment des entre­prises indé­pen­dantes en éco­no­mie de marché.
4. Ce taux d’exportation rela­ti­ve­ment impor­tant tend à aug­men­ter et concerne aus­si bien les PMI que les entre­prises plus grandes. Certes, les expor­ta­tions des firmes indus­trielles ne com­pensent pas les impor­ta­tions pra­ti­quées par les firmes com­mer­ciales (en 1995 : chiffre d’affaires de la pro­fes­sion : 69 mil­liards de francs ; expor­ta­tion 17,5 mil­liards de francs ; impor­ta­tion 26,4 mil­liards de francs) mais contri­buent for­te­ment à limi­ter les défi­cits de la balance com­mer­ciale et à main­te­nir un grand nombre d’emplois.
5. L’Expansion, novembre 1996.
6. Il serait ins­truc­tif, selon une démarche inverse appli­quée à un échan­tillon de PMI des années 1985–1990, d’examiner com­ment l’exportation a pu être, au cours des années pas­sées, un fac­teur de crois­sance ou au contraire d’affaiblissement pour cer­taines entreprises.
7. En dépit de cer­taines ana­lyses éco­no­miques ras­su­rantes, les baisses de prix occa­sion­nées par la nou­velle com­pé­ti­tion mon­diale ont conduit les don­neurs d’ordres à deman­der à leurs four­nis­seurs des efforts com­pa­rables, voire plus impor­tants, sous peine d’acheter à la concur­rence ; nombre de PMI qui n’ont pas eu le temps ni les moyens finan­ciers de s’adapter en ont été for­te­ment déstabilisées

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