Pour une gestion individualisée de l’épargne et des investissements
Éric Mookherjee (X78), fondateur de PrimeRadiant, nous en dit plus sur le positionnement de sa Fintech de technologie inédite qui permet d’avoir une approche sur-mesure et industrialisée de la gestion privée. Explications.
Dans l’univers des FinTechs, quel est le positionnement de PrimeRadiant ?
PrimeRadiant est une FinTech, orientée vers les autres FinTechs de gestion privée et les directions techniques et marketing des grandes institutions financières offrant le service de gestion d’épargne et de patrimoine (banques, assureurs-vie, sociétés de gestion privée, conseillers en gestion de patrimoine).
Dans le cadre de leur digitalisation, ces prestataires ont schématiquement deux composantes intimement liées. La première consiste à concevoir une offre et la seconde une application web ou téléphone pour accompagner l’offre avec des fonctionnalités complètes et une expérience utilisateur aussi simple et intuitive que possible et qui s’insère facilement dans leur logistique existante.
Cela nécessite la création d’outils reposant sur des algorithmes mathématiques complexes qui ont mis des années à développer. En termes imagés, nous avons fabriqué un moteur de création d’offres de gestion d’épargne pour les prestataires financiers.
En quoi est-ce complexe ?
Il y a trois de difficultés de natures très différentes. La plus connue des financiers, mais largement ignorée du public, est que la mesure des risques sur les marchés financiers n’est pas modélisable simplement et directement injectable dans des formules mathématiques. Il s’agit, par exemple, mais pas uniquement, du fait que les probabilités de crises graves sont plus élevées que ce que suggèrent les régimes ‘’normaux’’ des marchés financiers.
La seconde est que la variété des clients est littéralement infinie. C’est aussi pour cela que l’offre est restée très rustique en dehors du segment des grandes fortunes (« Ultra High Net Worth »). D’ailleurs, cette dernière repose essentiellement sur les conseillers financiers, qui ne disposent pas d’outils comme nous en avons créés. De ce fait, l’offre est généralement peu adaptée à leurs besoins spécifiques individuels : dans l’immense majorité des cas, les conseillers classent les clients dans un « profil de risque » de type « Prudent », « Equilibré »…, et tous les clients du même type ont le même portefeuille, qui ne change, d’ailleurs, pratiquement jamais dans le temps.
La troisième est que la diversité du type de comptes, de leur fiscalité, de leurs règles de fonctionnement, des véhicules d’investissement qui y sont accessibles, créent aussi un combinatoire immense avec des contraintes qui se chevauchent, et rendent la création de milliers de portefeuilles non-standardisés comparable à un casse-tête Rubik’s Cube. Et ce d’autant que pour une certaine catégorie de clients, il y a souvent plusieurs types de comptes simultanément (PEA, assurance-vie, PER…).
Est-on dans une configuration où l’intelligence artificielle est en train de rattraper l’humain ?
Non, pas du tout, et elle ne le fera jamais ! Elle occupera des terrains que l’humain n’a jamais occupé, ce qui lui sera très utile, mais elle restera exclue de certains domaines.
Pour des raisons structurelles, qui existeront encore quand les ordinateurs quantiques et autres progrès anticipés auront été réalisés, l’intelligence artificielle n’aura toujours qu’une valeur ajoutée marginale et instable dans l’investissement sur les marchés financiers. Au mieux, elle améliore les mesures de risque, mais ceci est essentiellement dû à des progrès dans l’approche théorique.
Pour l’illustrer, citons simplement les investissements colossaux et croissants que les plus gros ‘’hedge funds’’ ont fait pour des résultats qui ont des durées de vie limitées. Les marchés financiers sont selon l’expression consacrée un jeu à somme nulle, avec pour conséquence que quand les machines luttent contre d’autres machines, elles s’annihilent rapidement. L’apparence de science et de technique qu’est l’IA est parfois un outil essentiellement marketing pour les profanes !
“Nous avons fabriqué un moteur de création d’offres de gestion d’épargne pour les prestataires financiers.”
Par ailleurs, sur des sujets aussi sensibles que son épargne, toutes les expériences ont démontré la nécessité pour une personne d’avoir un interlocuteur humain dans certaines circonstances, même si l’IA peut traiter beaucoup de questions courantes. Le domaine de PrimeRadiant n’est pas dans les deux activités précitées, mais celui d’individualiser pour chaque client la gestion de son épargne, à partir de ce que les spécialistes financiers et les conseillers clientèle du prestaire indiquent d’un côté pour les marchés, et de l’autre pour leurs clients.
Pour résumer, il y a deux parties nobles dans la gestion d’épargne privée : l’analyse des marchés financiers, et la relation clientèle, pour laquelle les hommes ne seront jamais remplacés. En revanche, pour toute la partie pesante, règlementée, contrainte, calculatoire qui se trouve entre les deux, un robot allège immensément la tâche. C’est un outil comme n’importe quel autre entre les mains d’humains, dont le travail acquiert avec lui plus de valeur ajoutée et plus d’intérêt. L’intelligence artificielle en fait partie, rien de plus.
Pouvez-vous expliciter l’apport dans la pratique ?
Le champ d’intervention est bien spécifique : il n’est pas de suggérer une orientation sur les marchés financiers du fait de la conjoncture, qui est le domaine des spécialistes de marché du prestataire, ou de concevoir l’offre de services qui est la responsabilité de l’équipe Produits, sous le contrôle d’autres éventuellement (Conformité, Risques…), ou encore de remplacer les conseillers clientèle. Il s’agit d’individualisation de la gestion de l’épargne après ces étapes.
Parmi les fonctionnalités importantes qui individualisent la gestion de l’épargne d’une personne physique, on peut noter :
- La prise en compte des besoins personnels que cette épargne doit couvrir, et qui sont généralement multiples (retraite, études des enfants, investissement immobilier…), et des flux de revenus prévisibles de la personne ;
- La prise en compte des enveloppes fiscales (les comptes) où se trouve cette épargne, et qui peuvent être multiples (contrat d’assurance-vie, Plan d’épargne en actions, PER…) ;
- Les sensibilités particulières d’une personne pour des raisons personnelles ou éthiques qu’elle souhaite retrouver dans ses investissements (attention à la protection de l’environnement, sujets sociaux, protection renforcée contre l’inflation, famille à l’étranger…) ;
- Les contraintes (souvent discontinues) dues à la règlementation ou au fonctionnement du compte…
Ces aspects, simples à décrire et naturels chez toute personne, créent la multiplicité quasi-infinie de combinaisons évoquée alors que la plupart de ces critères ont des sous-critères. Mais toutes ces petites modifications se traitent très efficacement avec des mathématiques, de l’expérience en finance théorique et appliquée, l’intelligence artificielle et la puissance du pool de techniques accessibles.
Quels sont vos principaux vecteurs de différenciation ?
Il y en a deux. D’abord, la limitation au champ de recherche où les outils mathématiques/numériques ont de la valeur ajoutée plutôt que la quête d’une martingale mathématico-financière secrète et géniale. Le deuxième est que nos concepteurs sont des ingénieurs ou des scientifiques de haut niveau qui ont tous une longue expérience pratique dans la gestion de capitaux, et l’utilisation de modèles et de théories financières dans ce domaine. Ce mix est crucial, tant l’application de théories financières est dans la pratique délicate.
Comment vous projetez-vous ?
Nous avons de grands clients français et européens, et une avance technologique forte dans notre domaine. Je pense notamment que nous sommes les seuls à pouvoir traiter réellement l’avènement de l’Investissement Socialement Responsable dans la règlementation MIFID qui régit ce service financier aux particuliers.
Nous espérons que nos développements vont intéresser d’autres grands acteurs institutionnels et fintechs européens et au-delà, et projetons pour cela une levée de fonds.