POWER 8 : Appliquer les meilleures pratiques
L’objectif de Power 8 est de construire et de mettre en œuvre un programme de réduction des coûts et d’amélioration de la performance opérationnelle, revoyant les structures de coût, afin d’améliorer l’EBIT, la trésorerie et la compétitivité d’Airbus en réduisant les délais de développement, tout en continuant à garantir et à améliorer la satisfaction du client.
REPÈRES
Fin 2006, malgré d’excellentes performances de ventes et de livraisons, Airbus se trouve dans une situation financière délicate.
Après la crise liée aux retards de l’A380, l’entreprise affronte des besoins de trésorerie et des marges en régression, en même temps que des besoins importants en investissements liés aux programmes présents et futurs dont notamment l’A350 XWB.
De plus, la faiblesse du dollar américain ainsi que la pression concurrentielle représentent une menace pour la situation financière de l’entreprise. Power 8 est alors décidé dans un contexte de crise et de réorganisations majeures.
Un programme en treize module
Le programme a été structuré en treize modules, fondés en partie sur les meilleures pratiques du supply chain management, pour répondre aux besoins stratégiques d’Airbus :
- harmoniser les processus et les règles d’investissements
- garantir que les besoins clients sont toujours traités en priorité
- développer plus vite par une réduction du temps de cycle de développement
- harmoniser les règles et les processus de gestion immobilière
- en matière d’ICT (information, communication et technologie), intégrer la gestion de l’information à la stratégie de l’entreprise
- intégrer la production et l’engineering, et déployer tous les principes du juste-à-temps (lean JIT) sur l’ensemble des sites
- maximiser la trésorerie en réduisant le besoin de capital et en augmentant le contrôle de la trésorerie dans toutes les opérations
- revoir l’empreinte industrielle par un centrage sur les activités « cœur de métier », un déploiement des stratégies de make or buy et une extension de la base fournisseur au-delà de l’Europe occidentale
- supprimer 10 000 sureffectifs
- réduire les coûts d’achat sur les pièces d’avion
- réduire les coûts sur les achats généraux
- optimiser les FAL (final assembly lines) en simplifiant les processus d’assemblage final et réduisant les cycles
- créer une fonction « supply chain et logistique » intégrée au sein d’Airbus.
Des fournisseurs partenaires
En matière d’achats, nos objectifs allaient bien au-delà des gains financiers. Il s’agissait de travailler de manière plus constructive avec nos fournisseurs ainsi qu’avec les parties prenantes impliquées dans chaque étape des décisions d’achat ou des contrats.
“ Garantir et améliorer la satisfaction du client ”
Depuis 2007, Airbus a revu son rôle dans la chaîne de valeur comme celui d’un architecte ou d’un intégrateur. Dans le cadre de Power 8 et des nouvelles politiques de l’A350, le portefeuille des fournisseurs de composants aéronautiques a été progressivement restructuré, transférant des ensembles plus importants avec des responsabilités étendues vers les fournisseurs.
Depuis les aérostructures jusqu’aux systèmes, le département des achats a guidé les fournisseurs pour optimiser le design et leur chaîne de valeur, notamment en gérant la sous-traitance dans les pays à bas coût.
Supply chain et logistique
UN PROJET PARTAGÉ
Les équipes achat d’Airbus ont travaillé main dans la main avec l’ingénierie et les opérations, et cela sur deux axes : la consolidation du volume de fournisseurs et le changement organisationnel qui nous a conduits à créer des équipes intégrées transnationales dans tous les domaines d’achat.
La création d’une fonction supply chain and logistics (SCL) intégrée a été décidée dans le cadre de Power 8. La SCL a permis d’améliorer le niveau de service aux clients internes – sites et lignes d’assemblage – tout en apportant des gains opérationnels. La fonction SCL pèse environ 300 millions d’euros, y compris les effectifs directs.
Les dépenses externes sont principalement du transport et des dépenses logistiques. Ces fonctions sont maintenant organisées autour de six hubs en Europe.
Le besoin de standardisation de l’organisation et des modes de fonctionnement a conduit à créer une fonction SCL en charge de la standardisation au sein d’Airbus :
- à définir une politique de make or buy et réviser la base fournisseur pour les transports et la logistique,
- à réduire le nombre d’entrepôts et utiliser une solution standard de gestion des flux pour la mise en place d’un système de suivi global,
- à réduire enfin de 40 % la couverture des stocks et créer des règles de dimensionnement des stocks.
Une nouvelle organisation et de nouvelles pratiques
Aujourd’hui le réseau SCL (supply chain et logistique) est totalement opérationnel. Géré par un comité ad hoc, il s’appuie sur des pilotes SCL dans tous les centres d’excellence, avec des rôles et responsabilités parfaitement définis. Un processus de gestion de la demande et de la planification regroupant tous les responsables demande et opérations a été mis en place.
LA LOGISTIQUE AVANT POWER 8
Plus de quinze opérateurs et cent transporteurs étaient en relation directe avec Airbus. De plus, le transport était de fait sous le contrôle des fournisseurs. L’absence de politiques de make or buy clairement établies et la disparité des pratiques rendaient difficile le contrôle des dépenses et des opérations.
La logistique physique et les moyens n’étaient pas cohérents au sein d’Airbus. On dénombrait pas moins de soixante entrepôts et de nombreux magasins supplémentaires répartis dans tous les sites. L’approvisionnement et la distribution n’étaient pas optimisés. Il manquait des standards en gestion des stocks, les processus de prévision ou de planning, sous-optimisés, conduisaient à des excès de stocks.
Enfin, la fonction SCL n’était pas assez impliquée dans la gestion des changements, ce qui conduisait à un niveau élevé d’obsolescence.
Un responsable Europe pour la logistique et un responsable Europe pour les transports ont été désignés. Les transports au sein d’Airbus sont contrôlés et optimisés. Les règles applicables aux décisions make or buy et aux conditions de ventes internationales (incoterms) ont été définies.
En ce qui concerne la logistique physique, six hubs ont été développés, permettant la création d’un réseau physique optimisé au sein d’Airbus.
“ La couverture des stocks a pu être réduite de 40 % ”
Des standards d’emballage et de conditionnement ont été définis. Les logiques de distribution sont organisées autour d’une approche « lean-flux tiré ». Des méthodes rationalisées sont désormais utilisées (Kanban, kitting, etc.). Cela a conduit à un ensemble de règles d’or applicables aux nouveaux programmes, dont l’A350.
En matière de stocks, dès la fin de 2010, la couverture a pu être réduite de 40 %, avec un alignement des politiques de stocks accompagné de la mise en place d’un module de formation. Des processus optimisés de gestion de la demande et de la planification sont utilisés et des stocks de consignation fournisseur sont en place.
Une réussite au delà des attentes
Des ressources logistiques optimisées
(ici, un entrepôt logistique d’Airbus).
Après quatre ans de travaux considérables, les équipes supply chain et logistique de toute l’Europe ont réussi leurs missions au-delà des attentes. Nous avons maintenant des pratiques et des processus harmonisés et nous avons développé nos standards à travers tous les sites et les FAL d’Europe.
De plus, nous avons optimisé l’usage de ressources logistiques, particulièrement en ce qui concerne les entrepôts, et les partenariats avec nos prestataires logistiques. Nous avons réussi cette transformation sans rupture des opérations, voire en améliorant nos taux de service.
Power 8 a transformé le business model d’Airbus et développé un réseau global de partenaires. Bien que la finance soit à l’origine de Power 8, c’est un programme qui a impliqué toutes les fonctions de l’entreprise et a généré des résultats significatifs.
Nouveau paradigme
L’approche Power 8 n’a pas été un simple changement d’organisation, mais un changement total de paradigme. En faisant passer le pilotage des flux en priorité, elle a permis de structurer et de simplifier le pilotage de l’entreprise, donné de la visibilité à l’ensemble des acteurs, et permis de construire avec l’ensemble des acteurs (fournisseurs, sous-traitants, prestataires, etc.) un réseau à forte valeur ajoutée.
Cette opération a été tirée par une vision simple, « appliquer à Airbus les meilleures pratiques de supply chain, sur l’ensemble des acteurs ». Agir en architecte d’un réseau et non seulement en intégrateur.
“ Agir en architecte d’un réseau et non seulement en intégrateur ”
La mise en œuvre a été effectuée tambour battant, comme le recommandent toutes les meilleures pratiques du domaine. Et cela a permis de garantir la montée en volume des gammes suivantes A350 XWB, A330 et A320. À cette échelle, dans le secteur de l’aéronautique et compte tenu du contexte franco-allemand et de la taille de l’entreprise, c’est une première mondiale inégalée, et dont les analystes ont souligné la performance.