Poyesis développe des produits numériques sur mesure
En 2021, Maxime Pfrimmer (X13) a cofondé Poyesis avec Walid Ghanem (X13), qui accompagne les entreprises dans la création de produits 100 % sur mesure : logiciels, applications web, applications mobiles… Le développement se fait au forfait : ils s’engagent sur un prix fixe en début de projet.
Quelle est l’activité de Poyesis ?
Poyesis est une agence spécialisée dans le développement de produits numériques sur mesure. Concrètement, nous développons par exemple des logiciels (SaaS), des marketplaces, des outils de gestion ou encore des applications mobiles. Autant de produits qui nécessitent une approche très personnalisée du développement et ne peuvent se satisfaire de l’utilisation d’outils de construction self-service (les CMS – content management system, ou système de gestion de contenu – comme WordPress ou Shopify).
Quel est le parcours des fondateurs ?
Nous sommes deux fondateurs, issus de la promo X13, mais aux profils très différents. Walid Ghanem (CTO) et moi (CEO) sommes meilleurs amis depuis le lycée. Après l’X, j’ai opté pour un début de carrière dans le conseil en stratégie, au Boston Consulting Group, où j’ai travaillé pendant cinq ans. De son côté, Walid a poursuivi un cursus technique : recherche en Machine Learning à l’Inria, CTO de start-up, puis Tech Lead dans une agence de développement logiciel. Notre complémentarité est une force. L’expertise technique de Walid est bien sûr indispensable à la réalisation des projets de nos clients, alors que mon expérience en conseil nous permet de performer dans d’autres dimensions : gestion de projet, vente, stratégie de croissance, organisation… Nous nous faisons une confiance (quasi) aveugle dans nos domaines de compétence respectifs.
Comment t’est venue l’idée ?
Depuis notre rencontre en classe de seconde, Walid et moi avons toujours projeté de monter ensemble un projet entrepreneurial. Je n’étais pas particulièrement attiré par le modèle de start-up, qui impose des financements externes et leurs contraintes associées. Nous avons donc réfléchi à un projet autoporteur et le développement numérique sur mesure nous est apparu comme une évidence alors que Walid travaillait précisément dans ce domaine. Enfin, Walid étant franco-libanais, nous avons opté pour le recrutement de développeurs au Liban, où la formation universitaire est excellente, les attaches avec la France fortes et le marché de l’emploi des développeurs moins concurrentiel qu’en France. Quinze ans après nos discussions sur les bancs de Louis-le-Grand, le projet se concrétisait !
Qui sont les concurrents ?
Nos principaux concurrents sont les agences de développement françaises qui disposent de compétences techniques de pointe. À cet égard, les deux plus significatifs sont Galadrim et Theodo, deux entreprises fondées par des X. Avant de créer Poyesis, Walid était donc Tech Lead chez Galadrim, dont je tiens à saluer les fondateurs Jean Ashton (X11) et Arnaud Albalat (X11), qui ont permis à Walid de voler de ses propres ailes.
Quelles ont été les étapes clés depuis la création ?
La première étape a consisté à confirmer une hypothèse : nous pouvons recruter, moyennant une politique de rémunération très attractive, des développeurs de top niveau au Liban. Après de longues séries d’entretiens, nous avons trouvé la perle rare et l’avons convaincue de nous rejoindre – ce qui n’était pas chose aisée à l’époque. En parallèle, nous avons démarché nos premiers clients. Tout a été plus vite que prévu : nous sommes passés en deux ans de 3 à 30 collaborateurs, de 0 à + 50 clients et d’un open space en sous-sol à de beaux bureaux au cœur du quartier tech de Beyrouth. Nous sommes désormais reconnus sur le marché français du développement sur mesure et sommes bien implantés dans l’écosystème tech libanais. Notre priorité est maintenant d’étoffer notre portefeuille de clients grands groupes, qui ont représenté ~ 30 % de notre activité en 2023.
L’univers des agences est un océan rouge, comment y survit-on au quotidien ?
C’est en effet un océan rouge, mais parsemé d’eaux turquoise ! Les sous-domaines les plus concurrentiels sont en effet ceux, connexes, de la communication-marketing numérique (référencement, régie publicitaire) et de la réalisation de sites standards (vitrines et e‑commerce essentiellement). Notre positionnement exclusif dans le développement sur mesure est plus préservé, du fait des compétences de pointe qu’il nécessite de mobiliser. Toutefois, pour suivre la cadence du secteur, la qualité d’exécution doit être irréprochable et le relationnel client doit être cultivé : ce sont nos meilleurs VRP.
Les clients sont-ils à la recherche de compétences pointues ou bien d’une vision plus généraliste ?
Du point de vue « produit », nos clients sont à la recherche d’une compréhension fine du contexte et des enjeux spécifiques à leur projet, afin de définir une feuille de route stratégique et fonctionnelle optimale. Mon expérience en conseil, au cours de laquelle j’ai été confronté à des sujets et des secteurs variés, me permet d’accompagner nos clients sur ces aspects. Au-delà d’être un partenaire technique, nous sommes un sparring partner stratégique pour nos clients : c’est un élément différenciateur de notre agence. Il n’en demeure pas moins que, du point de vue technique, nos clients cherchent les compétences pointues qui assureront un livrable de qualité.
Vous demande-t-on de développer des projets sur mesure autour de l’IA générative et des LLM ?
Absolument : nous avons intégré des modules d’IA (via ChatGPT) dans quatre produits de nos clients au cours des six derniers mois, et même développé un projet reposant intégralement sur l’intelligence conversationnelle. Toutefois, je note que l’engouement s’est un peu dissipé depuis septembre. L’effet « ruée vers l’or » s’amenuise alors que le marché est saturé de produits estampillés « IA », se contentant d’une interface basique faisant appel à ChatGPT, qui ont du mal à trouver leur public. À ce jour, la majorité des cas d’usages pertinents sont disponibles directement sur l’interface de ChatGPT ou de son écosystème, laissant peu de place à des projets IA indépendants et aux ressources limitées.
Y a‑t-il un risque de voir votre métier disparaître justement du fait du développement de ce type de technologie et du remplacement des ingénieurs par des machines ?
Pour utiliser une analogie, je dirais qu’un projet numérique complexe (par exemple un SaaS) ressemble à un chantier immobilier. Les outils d’IA sont remarquables pour produire les briques, peuvent en assembler certaines entre elles, voire construire une section de bâtiment ; en revanche, elles sont incapables de prendre du recul sur le projet dans son ensemble, d’en assurer la cohérence et la vision globale, comme le font le promoteur, le conducteur de travaux ou l’architecte. Et c’est bien là que réside la valeur des ingénieurs informatiques : non pas dans la production de lignes de code, mais dans leur articulation globale selon les besoins exprimés – et implicites – du client.
Nous utilisons donc l’IA à notre avantage, à travers des outils d’assistance au code – le fameux GitHub Copilot, fondé sur le moteur GPT‑4. Ces outils permettent d’améliorer la productivité de nos équipes et de réduire la part fastidieuse du travail de développeur. Cette analyse tiendra d’après moi à moyen terme : dans vingt ans, les cartes seront peut-être rebattues !
À terme, pensez-vous vous orienter vers un rôle d’éditeur ou d’intégrateur ?
C’est en effet l’ambition de la plupart des agences de développement et nous ne faisons pas exception. C’est un équilibre complexe à trouver, car il est difficile de refuser un client en prestation de service, activité génératrice de cash, pour prioriser un projet interne, gourmand en trésorerie. Nous avons toutefois choisi de faire un pas vers l’édition, à travers deux démarches complémentaires. D’une part, nous investissons occasionnellement dans des projets portés par nos clients, en échange d’une prestation de services. D’autre part, nous travaillons depuis plus d’un an sur le développement d’un projet ambitieux dans le domaine du sport – lancement prévu début 2024 !