« Prédire les risques pour anticiper au mieux »
Stéphane Ragusa (89), PDG de Predilife, nous raconte la genèse de son entreprise dont la vocation est de prédire le risque de cancer. Il nous explique notamment sa démarche, le positionnement de cette entreprise française et ses ambitions.
Pourquoi avez-vous créé Predilife ?
J’ai créé cette société, car je ne voulais pas avoir de cancer plus tard ! Enseignant les mathématiques appliquées à la médecine et travaillant dans le centre anti-cancéreux Gustave Roussy à Villejuif, je voyais des malades dans le hall de l’hôpital. Je me demandais alors comment leur état avait pu autant se dégrader et s’il n’aurait pas été possible de réagir plus tôt. C’est à partir de là qu’est née l’idée de Predilife : prédire les risques pour anticiper au mieux.
Concrètement, nous proposons des bilans prédictifs qui, à partir de quelques questions, des analyses biologiques et un test génétique salivaire, permettent de prédire les risques avec un protocole de prévention proposé par un médecin en visioconférence.
Comment arrive-t-on à prédire ce futur ?
Nous comparons un individu à ses voisins comportementaux grâce à l’accès à des bases de données ayant suivi des milliers de personnes sur de nombreuses années.
À partir de ces bases d’expériences, que l’on appelle des « cohortes prospectives » enregistrant le mode de vie, les médicaments pris et collectant plus tard les pathologies déclarées, nous arrivons à prédire le devenir d’un nouvel individu de manière fiable avec des méthodes d’intelligence artificielle.
Est-ce que la prédiction est juste ?
La prédiction de l’infarctus est bien connue. Aujourd’hui, chacun comprend qu’avec le cholestérol, la tension artérielle, l’âge et le tabac, nous sommes face à des paramètres qui permettent de prédire le risque de cette maladie. En matière de cancers, les facteurs de risque sont différents. Mais dès lors que l’on intègre la génétique, le niveau de prédiction est le même.
La part entre l’inné – la génétique – et l’acquis est variable selon les cancers. Par exemple, pour le cancer du poumon, le tabac compte beaucoup alors que la génétique peu. Pour le cancer de la prostate, c’est l’inverse avec la génétique qui compte beaucoup. Toutefois, nous arrivons à bien à prédire les risques pour ces deux pathologies.
Quelles sont la valeur ajoutée et la pertinence de votre démarche ?
L’enjeu est de :
- anticiper ou diminuer le risque comme on le pratique avec les traitements du cholestérol ;
- diagnostiquer plus tôt la maladie, c’est-à-dire tous les cancers.
Nous avons commencé avec le cancer du sein, où une évaluation de risque permet aux femmes identifiées à risque de commencer les mammographies à 40 ans au lieu de 50 ans, par exemple.
Détecter un cancer au stade local permet de l’enlever au plus vite, alors qu’une fois que les métastases sont là, la survie est en danger. Identifier plus tôt les cancers est possible pour tous les organes (poumon, colon, pancréas…), encore faut-il savoir si on est à risque et réaliser ensuite l’examen de radiologie approprié : mammographie, échographie, IRM.
Ne craignez-vous pas la concurrence de Google ?
Pas encore ! Nous avons eu accès à des bases de données académiques, en France, en Europe et aux États-Unis qui sont très protégées. J’ai pu avoir accès à ces bases lorsque j’étais maître de conférences à l’université et cet accès a été maintenu après la création de l’entreprise avec toutes les autorisations nécessaires, et bien évidemment les garanties d’anonymat. Nous avons plusieurs années d’avance sur Google et sommes les seuls à proposer ce service au plan mondial.
Nous nous sommes introduits à la bourse de Paris pour financer notre développement. Je suis convaincu que nous pouvons construire un acteur français d’envergue mondiale de la médecine prédictive !